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terme. La prévalence de l’atteinte
cognitive est passée, en 10 ans, de 26 à
56 %. La sévérité du déclin cognitif
était associée au degré d’atteinte phy-
sique, à une augmentation de l’âge et à
une évolution progressive. Dans l’étude
rapportée par Pelosi et al., comparant
les performances cognitives de
24 patients ayant présenté un épisode
de myélite aiguë isolée et suspects
de SEP à 24 témoins sains appariés, il
est mis en évidence une atteinte débu-
tante de la mémoire de travail, impli-
quant probablement à la fois les méca-
nismes d’encodage et de récupération,
à ce stade très précoce d’une affection
démyélinisante (7).
D’autres études ont étudié les troubles
cognitifs en phase précoce, sans com-
parer la population de malades à un
groupe contrôle. Zivadinov et al. ont
étudié les performances cognitives de
53 patients de forme RR, avec une
durée de maladie comprise entre 1 et
5 ans et un score EDSS inférieur à 5,
couplée à leur étude IRM. À l’inclu-
sion, 26,4 % d’entre eux étaient consi-
dérés comme atteints cognitivement ;
ils étaient 52,8 % après 2 ans d’évolu-
tion (8). Dans l’étude récente d’Achiron
et Barak (2003), une population de
67 patients ayant présenté un événe-
ment démyélinisant unique a été sou-
mise à une batterie de tests neuropsy-
chologiques. Après comparaison aux
normes disponibles dans la littérature,
53,7 % des patients étaient définis
comme cognitivement atteints, les
déficits prédominant sur la mémoire et
sur l’attention (9).
Étude AQUISEP
Dans une étude longitudinale contrô-
lée, l’équipe du Pr Brochet a comparé
les performances cognitives de 69 pa-
tients présentant une SEP nouvelle-
ment diagnostiquée (moins de 6 mois)
et recrutés consécutivement par le
réseau AQUISEP, dont 84 % de
patients de forme RR, 10 % de forme
TP et 6 % de forme PP, à celles de
69 sujets sains (10). Cinquante-cinq
de ces derniers étaient individuelle-
ment appariés, selon l’âge, le sexe et le
niveau d’éducation, à 44 patients de
forme RR et à 11 de forme TP ou PP.
Les patients et les témoins étaient sou-
mis à une large batterie de tests neuro-
psychologiques dont certains sont fré-
quemment utilisés dans la SEP : la
brief repeatable battery de Rao, asso-
ciant le symbol digit modalities test
(SDMT), le selective reminding test
(SRT), le 10/36 spatial recall test
(10/36 SRT), le paced auditory addi-
tion task (PASAT) et le world list
generation task (WLG). Ils étaient
également soumis à une batterie infor-
matisée explorant les domaines atten-
tionnels et les processus d’inhibition
(11), incluant un test de Stroop, un test
de Go-No go et d’autres tests : le sous-
test des similitudes de la Welscher
adult intelligence scale revised
(WAIS-R), le Boston naming test
(BNT) et le Ruff figural fluency test
(Ruff). Cette batterie explore la
mémoire verbale et spatiale immédiate
et au rappel différé (SRT et 10/36
SRT), l’attention complexe et soutenue
(PASAT 2s et 3s, SDMT), l’inhibition
(Stroop, Go-No go), la fluence verbale
sémantique (WLG), la dénomination
(BNT), la conceptualisation (simili-
tudes) et la fluence non verbale (Ruff).
Un examen neurologique standardisé
avec la cotation de l’EDSS et du score
composite (MFSC), une échelle éva-
luant la dépression, la MADRS, une
échelle de qualité de vie, la SEP59,
ainsi qu’une étude IRM étaient réali-
sés chez tous les patients. Les patients
de forme RR et les patients de forme
progressive, regroupant les formes TP
et PP, ont été analysés séparément. Les
patients étaient définis comme cogni-
tivement atteints par l’obtention de
scores inférieurs de -2 DS à ceux des
témoins à au moins deux tests neuro-
psychologiques non redondants. Les
patients de forme RR présentaient des
performances significativement infé-
rieures à celles des témoins, principa-
lement pour les tâches de mémoire
verbale (immédiate et différée) et spa-
tiale (différée), d’inhibition (Stroop),
de conceptualisation, et pour tous les
tests attentionnels. Quarante-trois
pour cent d’entre eux présentaient une
atteinte cognitive globale, 54 % un
déficit attentionnel et 30 % un déficit
mnésique. Des différences significa-
tives entre les performances des sujets
de forme progressive et les témoins
appariés n’ont été notées qu’au SDMT
(attention) et au test des similitudes
(conceptualisation), probablement en
raison du faible échantillon (n = 11).
Pour les patients de forme RR, comme
pour ceux de forme progressive, il n’a
pas été noté de corrélation significa-
tive entre les performances aux tests
cognitifs et les symptômes dépressifs
ou le score de fatigue. Le score à
l’EDSS n’était pas corrélé aux résul-
tats des tests cognitifs, excepté au
SDMT pour les patients de forme RR,
traduisant la limite de cette échelle
dans l’évaluation du handicap lié à
l’atteinte cognitive. Seul le nine hole
peg test, l’une des deux composantes
motrices du score composite, était cor-
rélé significativement aux scores des
tests étudiant l’attention (PASAT2s et
3s, SDMT). Aucune corrélation n’a
été mise en évidence entre le domaine
“bien-être général” de la SEP59 et
les scores cognitifs, excepté pour le
SDMT. Cela suggère que de mauvaises
performances à ces tests neuropsycho-
logiques très sensibles pourraient ne
pas affecter de façon significative la
vie quotidienne. Les résultats à venir
de l’étude longitudinale de cette
cohorte permettront de mieux cerner
l’histoire naturelle des troubles cogni-
tifs dans la SEP.
Physiopathologie des
troubles cognitifs
Les fonctions cognitives telles que
l’attention, la mémoire et le langage
sont assurées par des réseaux inter-
neuronaux qui effectuent la transmis-
sion des informations. Les caractéris-
tiques pathologiques de la SEP
peuvent contribuer à l’interruption de
En partenariat avec le laboratoire Schering