DETECTION ET CARACTERISATION DES THROMBI DU VG PAR IRM O.FAVELLE (1), P.OMOUMI(1), O GENEE(2), M.COUCHOT(1), D.ALISON(1). (1) Pôle Imagerie (2) Pôle Thorax Vasculaire Hémostase CHU de Tours Université François Rabelais de Tours PLAN 1. GENERALITES a) Introduction b) Etiologies c) Incidence d) Enjeux diagnostiques 2. INTERET DE L’IRM DANS LA DETECTION ET CARACTERISATION DU THROMBUS a) Intérêt de l’IRM par rapport à l’échographie b) Protocole IRM et intérêt respectif des différentes séquences IRM c) caractéristiques sémiologiques du thrombus 3. INTERET DE L’IRM DANS LE DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE DU THROMBUS 4. DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS 5. CONCLUSION GENERALITES Introduction Le THROMBUS du ventricule gauche est une complication fréquente des infarctus du myocarde et des myocardiopathies dilatées grevant le pronostic de ces deux affections par un risque d’embolie systémique. Son dépistage est réalisé en première intention par l’échographie transthoracique, cependant cette technique présente deux inconvénients, une trop faible sensibilité et spécificité (en raison de problèmes inhérents à la technique échographique…), générant de nombreux faux négatifs et faux positifs, et d’autre part elle ne permet le plus souvent qu’un diagnostic étiologique limité de cette thrombose. Actuellement l’IRM cardiaque s’impose en seconde intention lorsque les performances diagnostiques de l’échocardiographie transthoracique sont prises en défaut. Etiologies Les thrombi du ventricule gauche se forment la plupart du temps en regard d’un myocarde akinétique ou dyskinétique. Les deux principales étiologies par ordre de fréquence sont : -l’INFARCTUS DU MYOCARDE : surtout en cas d’infarctus antérieur et d’ anévrisme de la paroi ventriculaire. -les CARDIOMYOPATHIES DILATEES. -les autre étiologies sont beaucoup plus rares et concernent des pathologies entrainant des troubles de la cinétique segmentaire du VG ou des lésions de l’endocarde (non compaction partielle du VG, fibrose endomyocardique…..) Incidence L’incidence de la thrombose intraventriculaire gauche varie selon les séries : -de 5% à 25% après infarctus du myocarde (1-5). -de 11% à 36% en cas de myocardiopathie dilatée (6). Enjeux diagnostiques Le Thrombus du ventricule gauche est un facteur de mauvais pronostic en post-infarctus surtout lorsqu’il survient dans les premières 48 heures (7). Le risque d’embolie artérielle systémique en postinfarctus est située entre 2 et 23 %, selon les études (8). La détection du thrombus et la mise en place d’un traitement anticoagulant diminue significativement le risque d’embolie systémique (9). INTERET DE L’IRM DANS LA DETECTION ET CARACTERISATION DU THROMBUS DU VG CONTEXTE (1) Plusieurs études récentes montrent que l’IRM avec injection de gadolinium présente une meilleure sensibilité et spécificité que l’échographie transthoracique (ETT) et transsoesophagienne (ETO). La plus récente est l’étude prospective incluant 361 patients en post infarctus de SRICHAI et al (10), comparant les trois techniques montre de manière significative une meilleure sensibilité et spécificité de l’IRM comparativement aux deux autres techniques. SENSIBILITE SPECIFICITE IRM gadolinium 88% (79%-97%) 99% (97%-100%) ETT 23% (11%-36%) 96% (92%-99,6%) ETO 40% (26%-54%) 96% (92%-99,6%) CONTEXTE(2) Cette étude confirme le résultat de deux précédentes études Mollet et al (11) et Barkhausen J et al (12) démontrant la supériorité de L’IRM face à l’ETT. Ces 3 études démontrent que les séquences les plus sensibles pour détecter les thrombi du VG sont les séquences de rehaussement tardif. CONTEXTE(3) Ces différences de sensibilité et de spécificité en faveur de l’IRM s’expliquent par : -une meilleure visualisation de l’apex cardiaque. -un meilleur contraste entre le sang circulant, le thrombus et le myocarde obtenu par l’injection de gadolinium. Protocole d’exploration IRM Le protocole d’IRM doit répondre à quatre objectifs: -Détecter et confirmer la présence d’un thrombus. -Poser un diagnostic étiologique. -Eliminer un éventuel diagnostic différentiel. -Avoir une durée acceptable pour le patient. Protocole d’exploration IRM 1. Séquence de repérage en temps réel. 2. Etude DYNAMIQUE (sans injection). • séquence SSFP 2D de ciné IRM petit axe. 3. Etude de la perfusion myocardique. • Séquence d’écho de gradient rapide. Au premier passage d’un bolus de 0,05 mmol/kg de Gadolinium (diethylene triamine pentaacetic acid) à un débit de 5mL/secondes. 4. Etude DYNAMIQUE (après une dose totale de 0,2 mmol/kg). • séquence SSFP 2D de ciné IRM. • petit axe, horizontal et vertical grand axe. 5. Etude de la VIABILITE myocardique. • Séquence d’écho de gradient T1 dans les 3 plans 15 minutes après l’injection de gadolinium. Intérêt des séquences dynamiques Ce sont des séquences d’écho de gradient rapide (sang blanc), pondérées en T1 et sensibles à l’injection de produit de contraste. Elles permettent : -une étude fonctionnelle (cinétique segmentaire, fraction d’éjection, volumes ventriculaires) et morphologique (anatomie myocardique et évaluation des complications mécaniques (anévrisme)). -après injection, une amélioration du contraste entre le thrombus (qui reste en hyposignal) et son environnement (rehaussement du myocarde et du sang). Intérêt des séquences dynamiques À gauche sur les séquences sans injection on visualise mal le thrombus, qui a un signal identique au myocarde, en revanche à droite après injection de gadolinium le thrombus apparait en hyposignal par rapport au myocarde qui est rehaussé par le produit de contraste. Intérêt des différentes séquences de rehaussement tardif (1) Ce sont des séquences pondérées en écho de gradient T1. Elles sont couplées à une technique d’inversion récupération qui annule le signal du myocarde sain (myocarde en hyposignal) afin d’optimiser la détection des zones rehaussées par le gadolinium correspondant au myocarde pathologique (ex : zone de fibrose post infarctus). Sur ces séquences le thrombus apparait en hyposignal identique à celui du myocarde sain. En cas de rehaussement pathologique du myocarde elles permettent de manière très sensible de détecter les thrombi, notamment les formes tapissantes qui restent en hyposignal par rapport au myocarde pathologique fortement rehaussé . Intérêt des différentes séquences de rehaussement tardif (2) Rehaussement tardif transmural de l’apex traduisant une nécrose ischémique venant silhouetter un thrombus tapissant de l’apex qui reste hyposignal. CARACTERISTIQUES SEMIOLOGIQUES DU THROMBUS L’IRM doit préciser : -La forme du thrombus. .tapissant .nodulaire -Sa topographie -Sa taille. -Son raccordement à la paroi. -Son caractère unique ou multiple. INTERET DE L’IRM DANS LE DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE DES THROMBI DU VG Cas Cas 11 Thrombus nodulaire apical du VG sur infarctus Thrombus nodulaire du VG Topographie: apicale Taille : 3cm Etude DYNAMIQUE : .aspect dyskinétique de l’apex (anévrisme) .volumes ventriculaires normaux .FEVG=40% Anévrisme de l’apex Cas Cas 11 Thrombus nodulaire apical du VG sur infarctus Etude de la VIABILITE Rehaussement cardiaque transmural antéro septo apical. Traduisant une séquelle d’infarctus. AU TOTAL: Trombus nodulaire apical sur séquelle d’infarctus antéro septo apical. Cas Cas 22 Thrombus apical du VG sur infarctus antéro septo apical Thrombus tapissant du VG sur ectasie antéroapicale. Topographie: Antéro-septo-apicale. Taille : 4cm X 1,5cm. Etude DYNAMIQUE : .Dilatation de la cavite ventriculaire gauche. .Akinésie des territoires inférieur, septal et antérieur dans leurs portions moyennes et antérieures. .Hypokinésie du territoire latérale. .Altération sévère de le FEVG=15%. Ectasie antéro apicale Thrombus Cas Cas 22 Thrombus apical du VG sur infarctus antéro septo apical Ectasie antéro apicale Thrombus antéro septo apical Etude de la VIABILITE Séquelles d’infarctus transmural (rétention de gadolinium) : .apical. .de la paroi inférieure. .de l’ensemble du septum dans sa partie apicale et moyenne. Persistance d’une viabilité au niveau de la paroi latérale. AU TOTAL: Aspect de cardiomyopathie dilatée hypokinétique d’origine ischémique. Thrombus tapissant la zone de nécrose antéro septo Cas Cas 33 Thrombus du VG sur cardiomyopathie dilatée et fibrose endomyocardique (1) Thrombus tapissant du VG Topographie: apicale remontant jusqu’en médio ventriculaire. Taille : 4cm X 1,9 cm. Etude DYNAMIQUE : .dilatation ventriculaire gauche. .altération de la FEVG=40%. .insuffisance mitrale. .notez que le thrombus « accompagne » la contraction de la paroi ventriculaire. Noter la prise de contraste entre le thrombus et le myocarde traduisant la fibrose ENDOMYOCARDIQUE THROMBUS tapissant en net hyposignal par rapport au muscle cardiaque rehaussé Cas Cas 33 Thrombus du VG sur cardiomyopathie dilatée et fibrose endomyocardique (2) prise de contraste entre le thrombus et le myocarde traduisant la fibrose ENDOMYOCARDIQUE Etude de la VIABILITE Absence d’anomalie de rehaussement du myocarde. Aspect de rehaussement tardif entre le thrombus intraventriculaire et le myocarde de la couronne apicale correspondant à la zone de FIBROSE ENDOMYOCARDIQUE. AU TOTAL: Aspect de cardiomyopathie dilatée. THROMBUS tapissant FIBROSE ENDOMYOCARDIQUE. En net hyposignal par rapport au Thrombus tapissant apical. muscle cardiaque rehaussé Cas Cas 44 Thrombi sur non compaction partielle du VG Noter la meilleure visualisation des thrombi sur les séquences dynamiques injectées ( à droite) Thrombi (2) nodulaires polylobés mobiles du VG. Topographie: inféro apicale et antéro apicale. Taille : 3,5cm X 2 cm. Etude DYNAMIQUE : Hypokinésie globale du VG. Dilatation globale du VG. Altération sévère de la FEVG=18%. Petite fuite mitrale. Aspect de NON COMPACTION PARTIELLE du VG. NB : THROMBUS du VD associé. Aspect de non compaction partielle du VG apicale et latérale: aspect en « éponge » du myocarde Cas Cas 44 Thrombi sur non compaction partielle du VG Etude de la VIABILITE Absence d’anomalie de rehaussement du myocarde normal. Le thrombus en hyposignal apparaît à distance de la paroi myocardique (en hyposignal) dont il est séparé par la zone de non compaction (en hypersignal cavitaire). AU TOTAL: Aspect de cardiomyopathie dilatée hypokinétique. Thrombi du VG et du VD sur non compaction partielle. DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS Diagnostics différentiels 1. Tumeurs ventriculaires malignes et bénignes 2. Images pièges -Faux tendon. -Volume partiel sur les muscles papillaires. -Image de flux. Cas Cas 55 Diagnostic différentiel : exemple : faux tendon Etude DYNAMIQUE : Cardiomyopathie dilatée hypokinétique. NON COMPACTION PARTIELLE Associée à FAUX TENDON. faux tendon CONCLUSION L’IRM est une technique plus sensible et plus spécifique que l’échocardiographie dans la détection et la caractérisation des thrombi du VG. Les séquences de rehaussement tardif sont les plus sensibles pour détecter le thrombus du VG. Elles peuvent être utilement complétées par des séquences dynamiques réalisées après injection de gadolinium qui n’allongent pas la durée de l’examen et qui sont dans notre expérience également très sensibles pour détecter cette pathologie, ce qui a été peu décrit dans la littérature. Bibliographie (1) 1. Asinger RW, Mikell FL, Elsperger J, Hodges M. Incidence of left ventricular thrombosis after acute transmural myocardial infarction. Serial evaluation by twodimensional echocardiography. NEng J Med 1981;305:297-302. 2. Greaves SC, Zhi G, Lee RT, et al. Incidence and natural history of left ventricular thrombus following anterior wall acute myocardial infarction. Am J Cardiol 1997;80 : 442-448. 3. AJR Teaching File: Left Ventricular Mass in a Patient with Ischemic Heart DiseaseAm. J. Roentgenol., Jun 2007; 188: S31 - S34. 4. Chiarella F, Santoro E, Domenicucci S, Maggioni A, Vecchio C. Predischarge twodimensional echocardiographic evaluation of left ventricular thrombosis after acute myocardial infarction in the GISSI-3 study. Am J Cardiol 1998;81 : 822-827. 5. Porter A, Kandalker H, Iakobishvili Z, et al. Left ventricular mural thrombus after anterior ST-segment-elevation acute myocardial infarction in the era of aggressive reperfusion therapy: still a frequent complication. Coron Artery Dis 2005;16 : 275-279. 6. Gottdiener JS, Gay JA, Vanvoorhees L, DiBianco R, Fletcher R. Frequency and embolic potential of left ventricular thrombus in dilated cardiomyopathy: assessment by two-dimensional echocardiography. Am J Cardiol 1983;52: 1281-5. 7. 7. J.M.van Dantzig, B.J.Delemarre, H.Bot, and C.A. Visser Left ventricular thrombus in acute myocardial infarction Eur. Heart J., November 1996; 17: 1640 - 1645. 8. Diagnostic échocardiographique des thrombi intraventriculaires gauches : apport des sondes de hautes fréquences F Philippe, G Drobinski, E Florens, R Isnard, D Thomas Journal de Radiologie Mai 2000. Bibliographie (2) 9. Vaitkus PT, Barnathan ES. Embolic potential, prevention and management of mural thrombus complicating anterior myocardial infarction: a meta-analysis. J Am Coll Cardiol 1993;22 : 1004-1009. 10. Srichai MB, Junor C, Rodriguez LL, et al. Clinical, imaging, and pathological characteristics of left ventricular thrombus: a comparison of contrast-enhanced magnetic resonance imaging, transthoracic echocardiography, and transesophageal echocardiography with surgical or pathological validation. Am Heart J 2006;152 : 7584. 11. Mollet NR, Dymarkowski S, Volders W, et al. Visualization of ventricular thrombi with contrast-enhanced magnetic resonance imaging in patients with ischemic heart disease. Circulation2002; 106:2873 -2876. 12. Barkhausen J, Hunold P, Eggebrecht H, et al. Detection and characterization of intracardiac thrombi on MR imaging. AJR 2002; 179:1539.