La Lettre du Cardiologue • n° 466-467 - juin-septembre 2013 | 23
L’objectif de la resynchronisation intraventriculaire
serait donc de faire se contracter des segments
myocardiques au bon moment, en systole (correc-
tion de l’asynchronisme temporel) et, si possible, en
même temps (correction de l’asynchronisme spatial)
[figure 2]. Une fois l’appareil implanté, les différents
points de stimulation appliqués doivent permettre
de raccourcir au minimum le temps d’activation
global du ventricule gauche.
Avant l’implantation : sélection
des patients candidats
à la resynchronisation
La première étape pour espérer obtenir une réponse
positive à la resynchronisation est donc de sélec-
tionner un patient :
➤
qui présente un certain degré de désynchroni-
sation ;
➤
dont la désynchronisation puisse bien être
corrigée par l’implantation de l’appareil.
Actuellement, le seul critère de désynchronisa-
tion retenu par les recommandations des sociétés
savantes est celui de la largeur des QRS (≥ 120 ms).
Cette approche simpliste est forcément imparfaite.
On peut en effet remarquer que, parmi l’ensemble
des patients avec un QRS ≥ 120 ms, la réponse la
plus nette est observée chez ceux qui ont des QRS
de plus de 150 ms. Mais tous les patients avec un
QRS > 150 ms ne sont pas des répondeurs et, à
l’inverse, tous les patients avec un QRS compris
entre 120 et 150 ms ne sont pas non plus implantés
pour rien. Dans l’étude DESIRE (3), 70 % des patients
avec un QRS relativement fin, compris entre 120 et
150 ms, et un critère d’asynchronisme mécanique
démontré par l’échographie étaient cliniquement
répondeurs à la resynchronisation. Enfin, tous les
QRS larges ne sont pas identiques : les patients ayant
un aspect de bloc de branche droit ou un trouble
indéterminé de la conduction intraventriculaire sont
moins souvent répondeurs que les patients avec un
bloc de branche gauche classique. Leur désynchro-
nisation est différente et n’est pas facile à corriger
avec nos moyens actuels. Les recommandations
européennes de 2012 sur l’insuffisance cardiaque (4)
ont intégré cette notion et exigent dorénavant que
les patients avec un bloc de branche droit ou un
trouble indéterminé de la conduction intraventri-
culaire aient un QRS ≥ 150 ms pour se voir proposer
une resynchronisation (contre toujours 120 ms pour
les patients avec bloc de branche gauche).
L’échographie cardiaque peut (doit ?) certaine-
ment jouer un rôle important dans la sélection
des patients, en sus de la largeur des QRS et de
leur morphologie. L’étude PROSPECT (Providing
Regional Observation to Study Prediction of Events in
the Coronary Trec) [5] avait déçu les espoirs placés
dans l’échographie, mais ses limites méthodolo-
giques (notamment la reproductibilité de la mesure
de certains paramètres) ont été très commentées
depuis. Pourtant, tout le monde a oublié que, dans
PROSPECT, certains paramètres simples, comme
le délai pré-éjectionnel gauche, le délai interven-
triculaire et la durée du remplissage diastolique,
étaient parfaitement reproductibles et prédisaient
significativement la réponse clinique et échogra-
phique.
En complément de cette première étape de screen ing
par l’ECG et l’échographie, il faudra considérer
certains éléments cliniques dans la décision d’im-
plantation d’une resynchronisation. Trois situations
en particulier inciteront à ne pas la proposer : la
dysfonction ventriculaire droite significative, l’exis-
tence d’une valvulopathie organique nécessitant une
correction chirurgicale et l’insuffisance cardiaque
terminale. L’évolution naturelle de ces patients est
de toute façon péjorative à court ou à moyen terme
et n’est pas modifiée par la resynchronisation dite
“de sauvetage”, qui est actuellement quasiment
abandonnée.
L’implantation d’un système
de resynchronisation classique :
comment l’optimiser ?
La mise en place d’une sonde atriale et d’une sonde
ventriculaire droite (de stimulation ou de défibril-
lation) ne pose en règle générale aucun problème.
La sonde ventriculaire gauche peut être plus déli-
cate à implanter dans une veine coronaire : il faut
qu’elle ait une position stable dans la veine, avec de
bons paramètres de fonctionnement (notamment
un seuil de stimulation acceptable), sans induire de
stimulation phrénique. Si cette approche purement
anatomique est maintenant couronnée de succès
dans 90 à 95 % des cas, elle ne garantit pas que la
stimulation biventriculaire ainsi délivrée permettra
de corriger la désynchronisation que présente le
malade.
On dispose de plusieurs “astuces” pour améliorer
le taux de réponse obtenu avec cette implantation
“classique”.