Le Courrier des addictions (13) – n ° 1 – Janvier-février-mars 2011
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Consommation modérée,
maîtrisée ou contrôlée :
la place de l’éducation thérapeutique…
Didier Touzeau*
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siècle, nous assistons à l’émergence d’un nouveau paradigme dans la prise en
charge des patients présentant des conduites addictives : l’acceptation de la non-abs-
tinence. La consommation est acceptée ou tolérée, moyennant des limites définies
par la personne elle-même. Une telle approche permet d’aborder la problématique addictive
en introduisant une alternative à l’abstinence. La consommation se poursuit, mais de manière
contrôlée. Le fait de proposer des choix aux usagers accroît leur motivation au changement.
Mais que le choix aille dans le sens du contrôle ou de l’abstinence, il suppose tout d’abord que
l’usager dispose d’une appréhension des risques plus réaliste.
Élaborer une classication rationnelle des dangers des substances fondée
sur des données scientiques devient urgent
Les systèmes de contrôle réglementaires des drogues reposent sur une approche des risques
des substances qui n’est ni transparente ni objective. Ils devraient prendre en considération les
dommages causés à l’individu, leur potentiel d’induire une pharmacodépendance et les effets
sur l’environnement familial ou sociétal. Les critères ne sont pas consensuels. Ils diffèrent d’un
pays à l’autre, dans un même pays entre les différents intervenants (police, justice et soins).
Certaines substances émergentes sont exclues, d’autres sont diabolisées, limitant ainsi la portée
des messages de prévention.
Les objectifs du traitement ne reposent plus sur l’abstinence
mais sur la maîtrise de la consommation et la prévention des rechutes
Rappelons que la définition de l’addiction inclut une perte de contrôle de la consommation. Or,
le traitement vise précisément à aider les patients à contrôler leur consommation. La réduction
des risques
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, qui admet que l’abstinence est un objectif idéal et privilégie des solutions alterna-
tives pour diminuer les dommages consécutifs à l’usage de drogues, est un pilier de cette orien-
tation. Elle propose, en effet, comme alternative aux soins traditionnels complet à haut seuil, un
accès aux soins de première ligne, avec un bas niveau d’exigence. Les salles de consommations
à moindre risque en sont une première étape pour les consommateurs d’opiacés ou de cocaïne.
On pourrait proposer à ceux qui les défendent et souhaitent les expérimenter d’intégrer dans
les règles de fonctionnement de leur projet le principe des règles négociées de consommation
telles que quantité, qualité, espacement des jours, pas de consommation lors de situations émo-
tionnelles négatives…
Les résultats sont au rendez-vous : environ 670 000 Européens suivent un traitement de subs-
titution (soit, environ la moitié des usagers problématiques d’opiacés d’Europe). Les dernières
données issues des systèmes de suivi des traitements sont encourageantes et montrent une
tendance stable, voire une baisse de la consommation de drogues par voie intraveineuse (rap-
port OEDT 2010). Une diminution de la proportion des consommateurs par voie intraveineuse
d’héroïne entamant un traitement pour une consommation primaire d’opiacés en Europe a
été signalée dans 13 pays entre 2002 et 2007, alors que moins de la moitié d’entre eux (42 %)
déclaraient "habituellement s’injecter" la drogue. Pour ceux qui entament un traitement pour la
première fois, la proportion est inférieure (38 %).
En matière de tabac, l’abstinence, encore prônée par les professionnels, même si un consensus
existe dans un premier temps pour soutenir une baisse de la consommation, pourrait s’ac-
compagner d’une diminution des dommages (sans cependant les annuler). Elle est encouragée
par les limitations de consommation dans les lieux publics. Le "tabagisme contrôlé" tendrait à
associer substitution nicotinique et recours au snuss (tabac chiqué avec ses propres risques).
Mais, là encore, le risque zéro n’existe pas, ce qui illustre la difficulté à formuler des conseils de
modération lorsque le bénéfice obtenu n’est pas évident.
Et l’alcool ? Les problèmes d’alcool sont souvent considérés comme secondaires par rapport à
d’autres troubles psychiatriques, comme la dépression ou le stress, et ne seraient donc pas amé-
liorés en cas de modération de la consommation. Les proches et l’employeur des patients ayant
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1. Harm reduction. Pragmatic strategies for managing high-risk behaviors. G. Alan Marlatt editor.
Huile sur toile, Anne de Colbert Christophorov.
Le Courrier des addictions
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