Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 2 - juillet-août-septembre 2010
61
Éditorial
C
ancer du rein, carcinome rénal, kidney
cancer, renal cell carcinoma… Il y a encore
quelques années, lorsque je recherchais
une bibliographie avec ces mots-clés, je retrouvais
dans la littérature urologique essentiellement des
études sur la chirurgie invasive : néphrectomie
élargie par incision sous-costale, curages, risques
hémorragiques, prouesses techniques ou thrombus
cave. La lecture des articles d’oncologie médicale
ne suscitait, quant à elle, guère l’enthousiasme. Au
stade où les oncologues voyaient le patient, le cancer
métastatique était plutôt synonyme de combat perdu,
avec très peu d’espoir de retarder la diusion et le
décès. Il n’y avait alors comme seules armes théra-
peutiques que l’interleukine et l’interféron. Pour
le radiologue, la description des masses manquait
souvent de précision et le diagnostic de malignité
se faisait plus sur la fréquence de la maladie que sur
l’étude pragmatique des images. Pour le patholo-
giste enn, le diagnostic n’était eectif que sur la
pièce de néphrectomie… avec parfois des exérèses
de tumeurs bénignes.
En 10ans, nous avons vécu d’extraordinaires change-
ments dans tous ces domaines. L’exérèse partielle
et les voies d’abord minimalistes ont remplacé la
grande chirurgie délabrante qui ne respectait que
peu la fonction rénale. Les thérapies focales s’installent
progressivement dans l’arsenal thérapeutique. Les
thérapies ciblées donnent de nouvelles armes pour
mieux combattre la diusion métastatique. La radio-
logie s’est enrichie de nouvelles technologies et nos
collègues radiologues repoussent de jour en jour les
limites de l’interprétation en particulier sur les petites
masses. Celles-ci étant de plus en plus découvertes
fortuitement, il est maintenant demandé aux patho-
logistes d’affiner le diagnostic sur des fragments
biopsiques souvent millimétriques. Que de progrès !
Il ne serait rien sans l’extraordinaire collaboration qui
s’est établie au l du temps entre ces diérents acteurs
de soin. Que de synergie entre ces spécialités ! Il n’y a
plus d’opposition entre médecin et chirurgien, entre
imageur et thérapeute, entre chercheur et patho-
logiste. Ensemble la communauté médicale s’organise
pour améliorer de jour en jour la prise en charge de
ces patients.
Nous pourrions presque croire que la victoire contre
le “RCC” est proche. Les progrès sont certains ;
cependant, face à notre enthousiasme, la réalité
quotidienne nous rappelle que le cancer du rein
est loin d’être vaincu. Le décès de Bernard Giraudeau,
parrain d’ARTUR (Association pour la recherche sur
les tumeurs du rein) a frappé l’opinion publique et
nous conduit à l’humilité. Loin de nous l’idée de
baisser les bras, son combat médiatisé doit être
pour nous un encouragement à nous mobiliser
encore plus. La recherche doit être notre crédo, et
nous devons ensemble continuer à nous battre pour
affiner le diagnostic précoce, pour retirer le minimum
de tissu sans prendre de risque carcinologique et
tenter de trouver des combinaisons synergiques des
différentes thérapies ciblées. Avec les chercheurs
ouvrant d’autres voies, il n’y a pas que Mesdames
mTor ou ITK et Monsieur monoclonal. Nombreux
seront les chemins thérapeutiques à tester.
Le cancer du rein :
plus petit mais pas sans risque !
Kidney cancer: smaller but not without risk!
T. Lebret*
* Chirurgie urologique,
hôpital Foch, Suresnes.
>>>