Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIV - n° 4 - avril 2010
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Régulations phéromonales des conduites
socio-sexuelles humaines : mythes, réalités, potentialités
intervient dans les régulations physiologiques comme
la modulation du développement pubertaire ou du
cycle œstral chez la souris. Toutefois, le système olfactif
principal, habituellement décrit comme un analyseur
généraliste, intervient également dans le traitement
d’odeurs sociales comme celles émises par le mâle
et qui stimulent la réponse d’immobilisation chez la
truie (gure 1), la réactivation de l’axe gonadotrope
en saison de repos sexuel chez la brebis (“eet mâle”)
ou l’attraction pour un partenaire sexuel chez la souris
(3). Par ailleurs, ces deux systèmes olfactifs jouent un
rôle complémentaire dans la détection des composés
phéromonaux, puisqu’ils sont capables de détecter une
gamme de signaux chimiosensoriels communs (6) ou
de supporter chacun l’expression de certains compor-
tements, par exemple le comportement sexuel chez
le hamster mâle. Cette complémentarité s’opère dans
des régions cérébrales de convergence, notamment au
niveau de l’amygdale ou de l’hypothalamus (5).
La communication phéromonale humaine :
régulations comportementales
et physiologiques
Dans nos sociétés, la perception des odeurs a long-
temps été minimisée et une représentation d’une
fonction olfactive inopérante s’est construite chez les
scientiques. L’espèce humaine a été classée parmi les
microsmates au prétexte d’une réduction morpho-
logique des structures olfactives primaires et d’une
dominance visuelle et auditive. L’intérêt scientique
pour la production et la perception des odeurs, en par-
ticulier sociales, chez l’homme est relativement récent
et plusieurs arguments expérimentaux invalident la
vision selon laquelle les odeurs humaines auraient peu
d’implications fonctionnelles dans le comportement
social. Toutefois, il est souvent prématuré de classer
ces odeurs sous le terme de “phéromones” étant donné
que les diérents critères de dénition (mise en jeu
de composés simples, réponse spécique de l’espèce,
réponse fonctionnelle ne nécessitant pas d’appren-
tissage préalable…) n’ont pas été validés sur le plan
expérimental.
Le corps humain émet divers composés odorants prove-
nant de diérentes glandes exocrines. La région axillaire
est considérée comme l’une des sources principales
de production. En effet, les sécrétions de la région
axillaire, à la suite de l’action microbienne, produisent
un mélange complexe d’odeurs dont la combinaison
produit l’odeur corporelle. Certains de ces composés
sont à présent identiés et comprennent principale-
ment des dérivés du métabolisme des androgènes ainsi
que des acides volatiles, tels que l’acide (E)-3-methyl-2-
hexanoique. Par ailleurs, l’androsténone, qui a une action
phéromonale chez la truie, et l’androstadienone sont
présents dans les sécrétions axillaires humaines comme
de manière plus générale dans la sueur (7, 8). D’autres
régions ont également été caractérisées : l’odeur de
l’haleine permet la reconnaissance du sexe de l’individu ;
de même, l’odeur des sécrétions de la paume de la main
d’un homme est discriminable de celle d’une femme.
Les sécrétions cutanées des glandes de Montgomery,
localisées au niveau de l’aréole du sein maternel, et
le lait régulent le comportement néonatal ainsi que
la mise en place des interactions entre la mère et son
enfant (9, 2).
Les voies olfactives primaires impliquées dans la détec-
tion et le traitement des signaux phéromonaux com-
mencent à être caractérisées. La question de l’existence
des phéromones a souvent été, à tort, associée à l’exis-
tence du VNO. Cependant, le VNO est probablement
un organe vestigial chez l’homme (10, 11) et, jusqu’à
présent, il n’a jamais été possible d’identier une struc-
ture correspondant au nerf voméronasal ou au bulbe
olfactif accessoire chez l’adulte (12). Enn, l’analyse du
génome humain a révélé que la plupart des gènes du
VNO sont des pseudogènes (13). Ainsi, en l’état actuel
des connaissances, il semble que toute communication
phéromonale humaine passe par le système olfactif
principal. Cette conclusion est d’ailleurs confirmée
par des données récentes d’imagerie fonctionnelle
qui montrent que les activations hypothalamiques
observées à la suite d’une stimulation avec un com-
posé phéromonal comme l’œstra-1,3,5(10),16-tetraen-
3-ol, n’ont pas lieu chez des patients anosmiques, à
cause d’une obstruction de la cavité nasale et donc
du système olfactif principal (14). Lorsqu’on compare
ces activations en fonction du sexe, on remarque de
manière intéressante que celles-ci sont diérenciées,
ce qui suggère un eet des composés phéromonaux
sur le comportement sexuel et/ou sur la fonction de
reproduction. De plus, un réseau de régions corticales
traitant les odeurs corporelles a été caractérisé, qui
dière de celui impliqué dans le traitement des odeurs
non humaines (15).
Enn, un bon nombre d’exemples récents montre que
la perception des odeurs sociales induit des chan-
gements physiologiques et/ou comportementaux
chez l’adulte, mais également chez le nouveau-né.
Sans prétendre être exhaustifs, diérents exemples
relativement convaincants en faveur de l’existence
de tels eets sont connus dans la régulation de la
fonction de reproduction. Il a été montré que des