A C T U A L I T É Nouveautés dans la prise en charge de la pathologie de la thyroïde Update in thyroid pathology management ● J.F. Papon* Le Dr Ferrari a présenté les recommandations de l’Agence nationale pour le développement de l’évaluation médicale (ANDEM) concernant le bilan biologique à réaliser devant un nodule thyroïdien (figures 1 et 2). ● Le Dr Marcy a insisté sur la valeur diagnostique d’un bilan échographique de qualité (avec compte-rendu et schémas descriptifs) devant une pathologie nodulaire de la thyroïde, tout en rappelant les caractères échographiques d’un nodule faisant suspecter un cancer (microcalcifications, contours irréguliers, hypoéchogénicité marquée et adénopathies cervicales). Un nodule dont le diamètre antéro-postérieur est supérieur au diamètre transversal semblerait également, au vu de la littérature, être un nouveau critère échographique en faveur de la malignité. Par ailleurs, il a été rappelé que la présence de macrocalcifications au sein d’un nodule thyroïdien n’éliminait pas le cancer. ● Mots-clés : Échographie - Cytoponction - Monitorage récurrentiel - Hypoparathyroïdie - TSH recombinante. Keywords: Ultrasonography - Fine needle aspiration Recurrent nerve monitoring - Hypoparathyroidism Recombinant TSH. a journée consacrée aux “Nouveautés dans la prise en charge de la pathologie de la thyroïde”, présidée par le Pr Michel Zanaret (Marseille, hôpital de la Timone), a été organisée par le Pr José Santini (Nice, hôpital Pasteur) le vendredi 3 juin 2005 à la Faculté de médecine de Nice, sous l’égide de l’Association française des chirurgiens de la face et du cou. Cette journée, riche en enseignements, a permis d’actualiser les connaissances scientifiques sur le diagnostic, les traitements et le suivi des pathologies nodulaires de la thyroïde, et de présenter les avancées et les projets de la recherche fondamentale dans ce domaine. Les exposés didactiques ont été complétés par des cas cliniques pratiques interactifs et des démonstrations opératoires réalisées par un chirurgien senior (le Pr Santini) en direct du bloc opératoire. L Nodule thyroïdien > 1 cm Bilan préopératoire Le Pr Castillo a rappelé que le diagnostic d’un nodule thyroïdien repose sur l’examen clinique, en insistant devant tout nodule sur les signes pouvant faire suspecter un cancer (antécédents familiaux de cancer thyroïdien, antécédents personnels d’irradiation, sexe masculin, âge supérieur à 60 ans ou inférieur à 20 ans, rapidité d’évolution, nodule de plus de 35 mm et/ou fixé, dur ou sensible à la palpation, adénopathie cervicale, paralysie récurrentielle). Une fois découverts, les nodules thyroïdiens doivent faire l’objet d’un bilan biologique et échographique systématique. * Service ORL, hôpital Henri-Mondor, CHU de Créteil. Antécédents NON OUI Nodule chirurgical NON Signes d'accompagnement OUI ÉTAPES DIAGNOSTIQUES ● OUI Calcitonine Douleurs cervicales ± fièvre Poursuite de la démarche diagnostique Signes Apparition ou ➚ brutale du nodule d'hypothyroïdie Thyroïdite subaiguë ? Kyste hématique ? VS NON Ponction ± échographie TSH + T4I AC antithyroïdiens si hypothyroïdie Signes d'hyperthyroïdie TSH + T4I Scintigraphie si hyperthyroïdie Prise en charge spécifique et poursuite de la démarche diagnostique si nécessaire Figure 1. Aspects cliniques des nodules thyroïdiens déterminant des attitudes différentes chez l’adulte d’après les recommandations de l’Agence nationale pour le développement de l’évaluation médicale (ANDEM 1997) (T4l = T4 libre ; VS = vitesse de sédimentation ; AC = anticorps ; TSH = thyroid stimulating hormone). La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no 301 - novembre-décembre 2005 5 A C T U A L Nodule thyroïdien > 1 cm Sans antécédent, sans contexte clinique et sans signe évocateur Dosage TSH Diminuée Normale Hypothyroïdie Hyperthyroïdie T4I Scintigraphie Prise en charge spécifique de l'hyperthyroïdie Augmentée T4l AC antithyroïdiens Poursuite de la démarche diagnostique Prise en charge spécifique de l'hypothyroïdie Figure 2. Démarche initiale devant un patient porteur d’un nodule thyroïdien d’après les recommandations de l’ANDEM 1997 (T4l = T4 libre ; AC = anticorps). La place de la cytoponction semblerait être prépondérante dans la décision thérapeutique. Le Dr Hammou a rappelé qu’une cytoponction avec une analyse cytologique de qualité permet une sélection des patients “chirurgicaux” et “à surveiller”. Malgré les progrès réalisés dans le prélèvement et l’analyse, la cytoponction ne remplace pas, à l’heure actuelle, l’outil diagnostique principal qu’est l’analyse histologique. En outre, la cytoponction reste limitée en cas de mauvaise qualité du prélèvement et/ou dans certains cas où l’analyse microscopique pose des problèmes (distinction entre adénome et carcinome folliculaires, analyse des goitres et nodules hypercellulaires). ● Les Drs Darcourt et Pourcher ont présenté une synthèse de la littérature sur la place de l’imagerie par résonance magnétique (IRM) et de la tomographie par émission de positons au 18F-fluorodéoxyglucose (TEP FDG) dans le bilan des cancers thyroïdiens. Il n’existe pas, à l’heure actuelle, de stratégie fondée sur des preuves permettant de proposer une IRM dans le bilan d’un cancer thyroïdien, car cet examen n’améliore pas les informations morphologiques. En ce qui concerne la TEP FDG, le niveau de preuve est faible, mais une indication semble exister pour rechercher une maladie résiduelle ou une rechute devant une élévation de la thyroxine et une scintigraphie corps entier négative. Dans ces conditions, la TEP FDG offre une meilleure sensibilité que la scintigraphie et a une bonne spécificité lorsqu’elle est associée à la tomodensitométrie. La TEP FDG sera d’autant plus indiquée qu’il existe un enjeu thérapeutique. THÉRAPEUTIQUE Chirurgie Le Pr Guerrier a insisté sur l’obligation de dispenser une information loyale, claire et appropriée aux patients atteints d’une ● 6 I T É pathologie thyroïdienne, afin qu’ils puissent donner un consentement ou un refus éclairé. Il a rappelé que le consentement éclairé n’a pas à être écrit, qu’il peut être émis oralement après que le patient a reçu une information qu’il a comprise. Cette information donnée oralement, et si nécessaire complétée par un document écrit, doit porter sur quatre points : – l’état de santé du patient et l’évolution prévisible de sa maladie ; – la thérapeutique proposée : sa nature, ses bénéfices escomptés et ses éventuelles conséquences ; – les risques graves liés, d’une part, à l’investigation ou au traitement proposé et, d’autre part, à l’absence de soins ou d’investigations ; – les alternatives thérapeutiques. Il a été rappelé que la chirurgie est un traitement de référence des cancers différenciés de la thyroïde, mais qu’il n’existe pas de référentiel sur les modalités de cette chirurgie, qui peuvent donc varier d’une équipe à l’autre. Par ailleurs, la création de réunions de concertation pluridisciplinaires est dorénavant obligatoire pour décider de la prise en charge des patients atteints de cancer différencié de la thyroïde. ● Les Drs Gérard et Hofman ont discuté de la place de l’examen histologique extemporané d’un nodule thyroïdien. Trois situations ont été distinguées en fonction des résultats de la cytoponction : – en cas de cytoponction en faveur de la bénignité, l’examen extemporané ne semble pas obligatoire, car le risque de cancer est très faible (environ 1 %) et le résultat de l’analyse extemporanée change les modalités chirurgicales dans moins de 0,5 % des cas ; – en cas de cytoponction en faveur d’un carcinome thyroïdien ; l’analyse extemporanée peut être discutée, car la spécificité de la cytoponction est excellente (99 %) ; – en cas de cytoponction indéterminée ou douteuse, l’analyse extemporanée est obligatoire. En cas de goitre multinodulaire avec un nodule prédominant, la place de l’analyse extemporanée se discute de la même façon que pour le nodule unique. En cas de goitre multinodulaire sans nodule prédominant, l’analyse extemporanée ne semble pas nécessaire, car le rapport coût-bénéfice est élevé et la recherche d’un microcancer (inférieur à 5 mm) est le plus souvent négative. ● Le Dr Percodani a présenté une étude rétrospective ayant pour but de rechercher la corrélation entre les métastases ganglionnaires jugulo-carotidiennes et les métastases médiastino-récurrentielles dans les cancers différenciés de la thyroïde. Soixantetrois cas de patients atteints d’un cancer thyroïdien différencié, sans adénopathie clinique et radiologique, ont été analysés. En cas de métastase ganglionnaire jugulo-carotidienne, il existait toujours une métastase ganglionnaire médiastino-récurrentielle. La sensibilité et la spécificité de l’évidement médiastino-récurrentiel étaient respectivement de 100 % et 87 %. Les valeurs prédictives négative et positive de l’évidement médiastino-récurrentiel étaient respectivement de 100 % et 73 %. Ces résultats méritent donc une confirmation, mais ils suggèrent que, en l’absence de métastase médiastino-récurrentielle, l’évidement jugulo-carotidien pourrait être évité, alors qu’il serait indiqué La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no 301 - novembre-décembre 2005 dans un deuxième temps opératoire en présence d’une métastase médiastino-récurrentielle. ● Le Dr Venissac a présenté une technique de vidéomédiastinoscopie permettant de réaliser une exploration et un évidement du médiastin moyen dans les cancers thyroïdiens. Si cette technique semble relativement simple, elle nécessite cependant une bonne connaissance de la chirurgie thoracique, car, outre les risques récurrentiels, il existe des risques de plaie vasculaire et/ou œsophagienne et de pneumothorax. Traitements médicaux Le Dr Bussière a rappelé les principes de l’IRAthérapie, qui repose sur l’administration orale d’iode 131 au cours d’une hospitalisation de trois à cinq jours, après un arrêt de la lévothyroxine de quatre à cinq semaines. Le délai optimal entre l’intervention chirurgicale et l’IRAthérapie est de quatre à six semaines. Les précautions liées à l’IRAthérapie consistent à éviter une surcharge iodée au préalable (TDM injectée, etc.) et à ne pas être enceinte avant le traitement et un an après. Les complications de l’IRAthérapie peuvent être aiguës (œdème cervical, sialadénite, dacryocystite) ou retardées (infertilité transitoire, hyposialie et, selon les auteurs, cancers radio-induits). Au CHU de Nice, les indications retenues pour l’IRAthérapie dans le traitement des cancers différenciés de la thyroïde sont : un patient âgé de plus de 40 ans et/ou un cancer de plus de 1 cm et/ou une métastase ganglionnaire ou générale. L’IRAthérapie est optionnelle en cas de patient de moins de 40 ans et de cancer T1 ou de microcancer inférieur à 5 mm, en l’absence de métastase ganglionnaire et générale. ● Le Dr Bensadoun a présenté les indications de la radiothérapie externe retenues par le groupe PACARAD dans le traitement des cancers thyroïdiens : – Dans les cancers différenciés, une irradiation (50 Gy en moyenne ± champs d’électrons sur les adénopathies métastatiques en rupture capsulaire) est réalisée dans les deux mois postthyroïdectomie totale si au moins trois des critères suivants sont présents : sexe masculin, âge supérieur à 40 ans, adénopathie métastatique en rupture capsulaire, rupture de la capsule thyroïdienne par le cancer, cancer classé T4. Le but de la radiothérapie externe est de diminuer la récidive locorégionale. – Dans les cancers médullaires, une irradiation est réalisée après thyroïdectomie totale, selon les mêmes modalités que dans les cancers différenciés, si au moins deux des critères suivants sont présents : adénopathie métastatique en rupture capsulaire, rupture de la capsule thyroïdienne par le cancer, cancer classé T3 ou T4. – Dans les cancers anaplasiques, l’irradiation peut être réalisée après thyroïdectomie totale ou en traitement exclusif. Si le patient est âgé de moins de 70 ans, et en l’absence de contre-indication, une chimiothérapie néoadjuvante par deux cycles de sels de platine (cisplatine) associés à l’adriamycine précède l’irradiation (54 Gy en moyenne), qui est suivie de quatre cycles de chimiothérapie adjuvante (cisplatine + adriamycine). Si le patient est âgé de plus de 70 ans, l’irradiation est réalisée en association avec de l’adriamycine hebdomadaire, en l’absence de contreindication. ● PRÉVENTION DES RISQUES DE LA CHIRURGIE THYROÏDIENNE ● Le Pr Dehesdin a présenté les principes du monitorage récurrentiel au cours de la chirurgie thyroïdienne, tout en rappelant la place prépondérante du repérage anatomique du nerf récurrent. La revue de la littérature ne dégage pas de consensus pour un monitorage récurrentiel de principe. Le monitorage est optionnel et semble donc justifié en cas de goitre plongeant, de paralysie récurrentielle préopératoire, de chirurgie secondaire ou postradiothérapie, de curage récurrentiel ou chez l’enfant. Par ailleurs, dans plusieurs études qui restent à confirmer, le monitorage récurrentiel pourrait avoir une valeur prédictive de paralysie récurrentielle en cas d’élévation du seuil de stimulation (supérieur à 0,8 %) entre le début du repérage et la fin de l’intervention. ● Le Pr Périé et les Drs Ferrari, Bozec et Breuil ont abordé les risques parathyroïdiens de la chirurgie de la thyroïde en rappelant la valeur du repérage anatomique des glandes parathyroïdes, qui, dans plus de 95 % des cas, sont au nombre de quatre (cinq glandes ou plus dans 1,5 % des cas). Les glandes parathyroïdes supérieures sont situées à proximité de l’articulation cricothyroïdienne dans 77 % des cas, et les glandes parathyroïdes inférieures se situent à proximité du pôle inférieur de la thyroïde ou dans le reliquat thymique dans 80 % des cas. L’incidence de l’hypocalcémie postopératoire après thyroïdectomie totale est variable selon les études, allant de 4 à 33 % pour l’hypocalcémie transitoire et de 0 à 14 % pour l’hypocalcémie définitive. L’intérêt du dosage postopératoire précoce (une heure postopératoire) de la parathormone (PTH) a fait l’objet d’une étude prospective sur soixante-deux patients opérés de thyroïdectomie totale. Chez les patients ayant présenté une hypocalcémie postopératoire (25,8 %), la PTH précoce était toujours inférieure à 16 pg/ml. La sensibilité et la spécificité du dosage précoce de la PTH étaient respectivement de 100 % et 71,7 %. De plus, les valeurs prédictives négative et positive du dosage précoce de la PTH étaient respectivement de 100 % et 55,2 %. En conclusion, ces résultats méritent une confirmation, mais ils suggèrent que, en présence d’une PTH inférieure à 16 pg/ml, une heure après thyroïdectomie totale, le risque d’hypoparathyroïdie est suffisamment élevé pour qu’une supplémentation calcique précoce soit proposée. D’après la littérature, l’hypoparathyroïdie à long terme ne semble pas augmenter le risque d’ostéoporose, mais elle semble s’accompagner d’une atteinte neurologique (principalement des crises de tétanie) peu régressive lors de la supplémentation calcique, ce qui pourrait faire discuter une supplémentation en PTH en cas d’atteinte neurologique sévère. SURVEILLANCE ● Le Dr Brucker-Davis a rappelé la nécessité d’une surveillance à vie des patients atteints de cancers thyroïdiens différenciés et a présenté les objectifs de cette surveillance : – découvrir aussi précocement que possible la présence d’une maladie persistante ou d’une rechute, ce qui en permettra un traitement efficace, qui pourra améliorer l’espérance de vie ; – s’assurer que le patient est traité par la dose de lévothyroxine La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no 301 - novembre-décembre 2005 7 A C T U A L minimale, c’est-à-dire celle qui permet d’obtenir une suppression de la TSH (thyroid stimulating hormone) suffisante mais non excessive. Les principes de la surveillance endocrinienne publiés dans l’European Journal of Endocrinology en 2004 ont été détaillés (figure 3), puis l’apport de la TSH humaine recombinante (rhTSH) a été présenté. La stimulation par rhTSH (Thyrogen®) intramusculaire fait actuellement l’objet d’un protocole international d’évaluation, car elle semble être une alternative intéressante au sevrage hormonal permettant de réaliser l’IRAthérapie chez un patient euthyroïdien. Les premières études montrent que Thyroïdectomie totale et totalisation par 131I Évaluation au moment de la totalisation : SCE, examen, clinique, Tg : Pas d'évidence de la maladie Surveillance à 3 mois : TSH, Tg, T3-l sous T4l, échographie cervicale, examen clinique : Pas d'évidence de la maladie Surveillance à 6-12 mois : rhTSH-Tg stimulée, échographie cervicale et examen clinique sous T4l Tg indétectable Pas d'autre anomalie Diminution de la dose de T4l Évaluation au moins 1 an après par TSH, Tg sous T4l ± échographie Tg détectable mais < seuil limite institutionnel* Pas d'autre anomalie Tg détectable et autres anomalies** ou Tg > seuil limite institutionnel* Répéter le dosage de Tg stimulée par rhTSH au moins 1 an après*** Sevrage en T4l Traitement par une activité élevée de 131I et/ou chirurgie SCE post-traitement Tg diminuée Tg stable ou augmentée Figure 3. Protocole recommandé pour la surveillance des patients avec cancer différencié de la thyroïde à faible risque, après thyroïdectomie totale et totalisation par l’iode radioactif (d’après Schlumberger M et al. Eur J Endocrinol 2004;150:105-12). Les patients avec métastases à distance, maladie cervicale étendue (pT4), type histologique peu différencié, chirurgie thyroïdienne incomplète ou avec anticorps antithyroglobuline (Tg) doivent être surveillés avec d’autres protocoles spécifiques (T3-l = tri-iodothyronine libre ; T4l = T4 libre ; rhTSH = TSH recombinante humaine ; SCE = scintigraphie du corps entier. * La valeur seuil de la Tg doit être déterminée après stimulation par la rhTSH pour chaque méthode de dosage. **Toute découverte suspecte à l’échographie justifie une ponction à l’aiguille fine pour évaluation cytologique et dosage de la Tg dans le produit de ponction. *** Cet intervalle dépend du taux de la Tg et du contexte clinique). 8 I T É la rhTSH associée au dosage de la thyroglobuline serait aussi efficace que le protocole de sevrage hormonal pour détecter les reliquats cancéreux. Par ailleurs, la rhTSH peut être indiquée pour le traitement de reliquats ou de métastases chez des patients ayant une contre-indication au sevrage hormonal, ou dans les cas où la stimulation endogène de la TSH par le sevrage est impossible (freinage au long cours, insuffisance hypophysaire). DONNÉES DE LA RECHERCHE ● Le Dr Ettore a exposé les bases de la nouvelle classification anatomopathologique des cancers de la thyroïde, qui se caractérisent par un grand polymorphisme, obligeant à une classification transversale qui tienne compte de la clinique, de l’analyse histologique, de l’épidémiologie, de la génétique et de l’immunophénotype. Quatre grands groupes ont été distingués : les tumeurs papillaires, les tumeurs folliculaires ou vésiculaires, les tumeurs peu différenciées ou indifférenciées et les tumeurs médullaires. Une revue de la littérature montre qu’il existe une grande variation des gènes impliqués dans chaque groupe. Dans le groupe papillaire, les mutations mises en évidence portent sur le gène RET dans 2,5 à 35 % des cas, et une mutation du gène BRAF est retrouvée dans 29 à 69 % des tumeurs papillaires pures. Les métastases ganglionnaires des microcancers papillaires semblent liées au caractère plurifocal et à la surexpression de la cycline D1. Dans le groupe vésiculaire, des mutations ponctuelles de RAS sont retrouvées dans 30 à 40 % des cas et un réarrangement PAX8/PPARγ est retrouvé dans 30 % des cas. Dans le groupe peu différencié ou indifférencié, les mutations de p53 sont les plus constantes, jouant probablement un rôle essentiel dans la transformation anaplasique. Par ailleurs, la diminution d’expression de certaines cadhérines serait un facteur lié à l’agressivité du cancer anaplasique, et la présence d’une mutation du gène BRAF serait le témoin de la transformation d’un cancer papillaire en cancer peu différencié. Dans le groupe médullaire, des mutations du gène RET semblent exister. L’ensemble de ces données de biologie moléculaire relève actuellement de la recherche et n’a pas de place dans le diagnostic et le pronostic des cancers thyroïdiens. L’identification de ces anomalies génétiques a pour objectif de guider le développement de molécules contre des cibles prédéfinies. Le Dr Hofman a présenté le projet en cours destiné à réaliser une “tumorothèque” dédiée à la pathologie thyroïdienne. Ce vaste travail initié en septembre 2004 (en parallèle avec deux tumorothèques consacrées l’une au cancer du poumon et l’autre au cancer du sein) repose sur de nombreuses collaborations et sur des bases juridiques solides. La tumorothèque a pour but de recueillir et de conserver suffisamment d’échantillons biologiques pour améliorer les connaissances physiopathologiques, de réaliser une classification histomoléculaire, de découvrir de nouveaux oncogènes, de développer des molécules anticancéreuses et de nouveaux marqueurs, et ainsi d’améliorer l’offre de soins en ■ pathologie thyroïdienne. La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no 301 - novembre-décembre 2005