L Prise en charge des métastases osseuses des cancers du sein

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THÉRAPEUTIQUE
Information communiquée avec le soutien du laboratoire Amgen
Prise en charge
des métastases osseuses
des cancers du sein
Treatment of bone metastases in breast cancer
A. Visbecq*
L
* Cheffes-sur-Sarthe.
Principaux critères d’inclusion
Femmes atteintes d’un cancer
du sein avancé et de métastases
osseuses confirmées
Principaux critères d’exclusion
Administration actuelle
ou antérieure de bisphosphonates
intraveineux
e cancer du sein est la pathologie la plus
fréquemment pourvoyeuse de métastases
osseuses, avec une incidence supérieure à
70 % dans les séries autopsiques (1). Plusieurs
mécanismes sont impliqués dans la dissémination
métastatique au niveau de l’os. Tout d’abord,
Denosumab 120 mg en injection s.c.
+ placebo en perfusion i.v. toutes les 4 semaines
(n = 1 026)
Une supplémentation quotidienne
en calcium ≥ 500 mg et en vitamine D ≥ 400 UI
était recommandée
Acide zolédronique 4 mg en perfusion i.v.
+ placebo en injection s.c. toutes les 4 semaines
(n = 1 020)
Critère principal
• Délai de survenue de la première complication osseuse (SRE) en cours d’étude (non-infériorité)
Critères secondaires
• Délai de survenue de la première complication osseuse (SRE) en cours d’étude (supériorité)
• Délai de survenue de la première complication osseuse et des suivantes
(supériorité avec analyse d’événements multiples)
• Tolérance
L’étude était structurée de telle sorte que si le critère principal de non-infériorité était atteint, le test
de supériorité (critère secondaire) était réalisé
SRE défini par les fractures pathologiques, l’irradiation osseuse, la compression médullaire et la chirurgie
osseuse
i.v. : intraveineux ; s.c. : sous-cutané ; SRE : skeletal-related events.
Figure 1. Méthodologie de l’étude de Stopeck et al. (10).
140 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 2 - février 2012
il y a un phénomène de migration et de tropisme,
dans lequel interviennent les chémokines et le
RANK-L (ligand de RANK) : les cellules tumorales
surexpriment des récepteurs aux chémokines et
migrent dans les tissus où elles retrouvent leurs
ligands ; ceux-ci sont présents dans le poumon, le
foie et les tissus osseux (2). Par ailleurs, RANK-L
serait exprimé également par les cellules cancéreuses et se comporterait comme une chémokine
en favorisant la migration (3). Il existe, d’autre part,
un processus de mise en quiescence des cellules
tumorales au sein de niches prémétastatiques qui
semblent se former dès le stade infraclinique (4).
Ultérieurement, la prolifération des micrométastases est déclenchée par la présence de facteurs,
dont le plus connu est VCAM-1 (5). Parallèlement,
un mécanisme d’adaptation à l’environnement
osseux appelé ostéomimétisme se développe
et s’accompagne de l’expression par les cellules
tumorales de gènes normalement exprimés par
les cellules osseuses (6).
Les cellules tumorales sécrètent des facteurs qui
stimulent anormalement la différentiation des
précurseurs ostéoclastiques, agissent sur les ostéoblastes et modifient l’expression de RANK/RANK-L
et de l’ostéoprotégérine, aboutissant à la stimulation de la résorption osseuse (7). Elles sécrètent
également des facteurs qui bloquent la formation
osseuse (DK1, sclérostine) [8]. Par ailleurs, le tissu
osseux contribue à la progression des métastases
par la libération de facteurs de croissance au cours
de la destruction osseuse. Il existe donc un cercle
vicieux au sein duquel ces phénomènes s’entretiennent mutuellement (7).
Résumé
Les métastases osseuses de cancer du sein sont extrêmement fréquentes et peuvent s’accompagner de
complications qui altèrent la qualité de vie des patientes. Leur développement implique des phénomènes
de migration et de tropisme vers le tissu osseux, faisant intervenir les chémokines et RANK-L, l’apparition
de niches prémétastatiques et d’un ostéomimétisme. Le denosumab est un anticorps monoclonal IgG2
humain qui possède une haute affinité pour RANK-L et agit par blocage de l’interaction RANK/RANK-L.
Dans une étude de phase III randomisée qui l’a comparé à l’acide zolédronique chez plus de 2 000 patientes
atteintes de cancer du sein avec métastases osseuses, le denosumab a montré une réduction significative
de 23 % des événements osseux et un allongement significatif du délai d’apparition du premier événement
osseux (réduction du risque de 18 %). La tolérance est acceptable et le traitement est facile d’utilisation
(1 injection sous-cutanée toutes les 4 semaines).
La survie médiane des patientes atteintes d’un cancer
du sein métastatique est d’environ 33 mois (9),
période pendant laquelle peuvent survenir des complications liées aux métastases osseuses et altérant la
qualité de vie : douleurs, fractures et compression
médullaire. La prise en charge des complications
est pluridisciplinaire : différentes options thérapeutiques peuvent être discutées, comme la chirurgie,
la radiothérapie et/ou le traitement médicamenteux.
Plusieurs critères doivent être pris en compte dans
le choix des traitements : l’efficacité, la tolérance,
la facilité d’utilisation et les coûts.
possède une haute affinité avec RANK-L et qui agit
par blocage de l’interaction RANK/RANK-L, inhibant
ainsi la formation et la différentiation des précurseurs ostéoclastiques. L’efficacité et la tolérance du
denosumab dans la prévention des complications
osseuses ont été largement étudiées dans différents
types de cancers et notamment dans le cancer du
sein métastatique au cours d’une étude internationale de phase III randomisée, en double aveugle,
double placebo qui a inclus plus de 2 000 patientes
présentant des métastases osseuses et qui a comparé
le denosumab à l’acide zolédronique (10) [figure 1].
Parmi les traitements médicamenteux qui réduisent
l’incidence des événements osseux et allongent leur
délai de survenue, on dispose des bisphosphonates
(par voie orale ou intraveineuse) et, plus récemment,
du denosumab, qui a obtenu une autorisation de
mise sur le marché européenne en 2011. Ce dernier
est un anticorps monoclonal IgG2 humain qui
Le denosumab a démontré sa supériorité par rapport
à l’acide zolédronique avec une réduction de 23 %
des événements osseux (HR = 0,77 ; IC95 : 0,66-0,89 ;
p = 0,001) et un allongement du délai d’apparition
du premier événement osseux (réduction du risque
de 18 % ; RR = 0,82 ; IC 95 : 0,71-0,95 ; p = 0,01)
[figure 2].
RR = 0,82 ; IC95 : 0,71-0,95
p < 0,001 (non-infériorité)
p = 0,01 (supériorité)
Patients sans complication osseuse (%)
100
* Ajusté pour la multiplicité
75
Mots-clés
Métastases osseuses
Cancer du sein
Bisphosphonates
Inhibiteurs de RANK-L
Summary
Bone metastases are extremely
frequent in breast cancer and
they can result in complications that impair the patients’
quality of life. Their development involves migration and
tropism phenomena with
chemokines and RANK-L
participation, pre-metastatic
niches and osteomimetism.
Denosumab is a human IgG2
antibody with a high affinity
for RANK-L, which blocks the
interaction RANK/RANK-L,
therefore inhibiting osteoclast
formation and action. A phase
III study randomized more
than 2,000 patients with bone
metastases of breast cancer
into 2 groups: denosumab and
zoledronic acid. Those treated
with denosumab exhibited a
statistically significant decrease
in skeletal related events (SKE)
(minus 23%) and a statistically
significant increase in time to
SRE (risk reduction 18%). Tolerance of denosumab proved
acceptable and the treatment
is easy-to-use (1 subcutaneous
injection every 4 weeks).
50
Acide zolédronique i.v. 4 mg toutes les 4 semaines
Denosumab s.c. 120 mg toutes les 4 semaines
25
Le temps médian jusqu’à un SRE avec l’acide zolédronique était de 26,4 mois
alors qu’il n’était pas atteint dans le groupe denosumab
0
0
3
6
9
12
15
18
21
24
27
296
306
291
189
94
99
29
26
Mois de l’étude
Patientes à risque (n)
Acide zolédronique
Denosumab
1 020
1 026
829
839
676
697
584
602
498
514
427
437
Figure 2. Délai de survenue de la première complication osseuse (SRE) [10].
La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 2 - février 2012 |
141
THÉRAPEUTIQUE
particulière ou d’adaptation de dose en fonction des
taux plasmatiques de créatinine. L’expérience chez
les patients dialysés ou présentant une insuffisance
rénale sévère (clairance de la créatinine < 30 ml/mn)
est limitée.
En conclusion, les traitements concernant la maladie
métastatique continuent d’évoluer. Le denosumab
représente une nouvelle alternative thérapeutique
avec des résultats très prometteurs pour retarder et
prévenir les complications osseuses des patientes
traitées pour un cancer du sein métastatique. ■
DMO-FRA-AMG-056-2012/P-O-XG 12 0050-Février 2012
Parmi les effets indésirables observés, l’incidence de
l’ostéonécrose de la mâchoire était similaire dans les
2 groupes. Les réactions aiguës liées à la perfusion
ont été plus fréquentes avec l’acide zolédronique
(27,3 versus 10,4 %). Les hypocalcémies étaient plus
fréquentes sous denosumab (5,5 versus 3,4 %), ce qui
confirme qu’il est important de bien supplémenter
les patients en calcium et vitamine D au cours du
traitement. Le denosumab est simple à utiliser avec
une injection sous-cutanée toutes les 4 semaines.
Par ailleurs, cette molécule, qui n’est pas éliminée par
voie urinaire, ne nécessite pas de surveillance rénale
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patients with advanced breast cancer: a randomized, doubleblind study. J Clin Oncol 2010;28(35):5132-9.
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