
3
En 1999, vous présidiez notre Académie, j’étais alors correspondant et j'eus la joie de
vous entendre présenter à la Compagnie la troisième édition de mon traité de Cardiologie.
Les mots solidarité et fraternité ont dirigé votre existence. Dans votre livre « la fin des
patrons » vous soulignez la nécessité de promouvoir les hommes en rappelant qu’économie et
humanité sont complémentaires. Tout au long de votre vie, vous n’avez cessé de défendre les
entreprises à dimension humaine qui constituent le véritable tissu économique de la France.
Vous êtes un homme de conviction et de courage, et vous l'avez démontré à la tête du
CNPF de 1981 à 1986, confirmant cette réflexion de Jaurès en 1890 : "est un chef celui qui procure
aux autres la sécurité en prenant pour soi les dangers". L'appel à vos troupes n'était pas "En avant"
mais "Suivez-moi".
Vous êtes aussi, Cher Président, un homme de fidélité, fidèle à vos engagements, fidèle
à vos amis. Le soutien que vous m'avez apporté dans mon cheminement vers l'Institut, reportant
d'une semaine la date d'une intervention chirurgicale pour être présent le jour de mon élection, en
est un témoignage. Je vous en suis infiniment reconnaissant.
J’adresserai aussi mes remerciements chaleureux à ma famille, aux membres de mon
Comité de l’Epée, à ses organisateurs notamment au Docteur François Charles Mignon,
Président d’honneur du syndicat national de la presse médicale mais aussi à Madame Viviane
Plaise et à mon épouse ainsi qu’à tous les amis, certains venus de loin, qui se sont réunis pour
m’offrir cette épée qui les rappellera toujours à mon souvenir, une épée simple mais glorieuse,
vieille de 2 siècles, symbole depuis le consulat de Bonaparte de l’entrée à l’Institut de France.
Je la dédie à mon épouse Françoise qui n’a jamais cessé de m’épauler depuis 49 ans et
a contribué pour une grande part à tous les succès de ma carrière.
Le 15 Juin 2009, l’Académie des Sciences morales et politiques a donc choisi un
médecin pour succéder au Chancelier Edouard Bonnefous, au fauteuil n° 2 de la section
générale dont les 2 premiers titulaires avaient été le duc Victor de Broglie, ministre de Louis
Philippe et président du conseil, puis Auguste Casimir Perier, ministre de l’Intérieur de
Thiers. J’avais rencontré et soigné le Chancelier en 1979 et il m’a honoré de sa confiance et
de son affection pendant 28 ans. Il avait été élu à l’Académie Nationale de Médecine en 1981
dans la section des membres libres non médecins à laquelle ont appartenu Louis Pasteur et
Marie Curie et c’est Monsieur Renaud Denoix de Saint Marc qui vient de lui succéder.
Participant activement à nos séances, le chancelier Bonnefous fut très apprécié par ses
positions sur l’environnement et sur la nature en péril. J’évoquerai, selon la tradition, sa
personnalité puissante hors du commun, au cours de cette année académique.
Ma vocation médicale est née précocement durant mes études secondaires au Lycée
Voltaire de Paris. J’étais émerveillé par les progrès de la médecine qui maitrisait les grandes
maladies infectieuses des siècles précédents et améliorait d’année en année l’espérance de vie
de nos concitoyens : elle atteint aujourd’hui 80 ans. J’étais fasciné par un métier qui apporte la
guérison à l’homme malade et peut le rendre à la vie. Externe, puis Interne dans le service du
Professeur Jean Bernard à l’hôpital Saint Louis, j’appris au contact d’un maître prestigieux la
rigueur du raisonnement et la hiérarchisation des problèmes mais aussi l’attention à l’autre, le
geste, les mots qui réconfortent et qui donnent l’espoir. Jean Bernard avait coutume de dire
que si la mort des adultes était triste, celle des enfants était intolérable. Il m’apprit à visiter
régulièrement mes malades, tous mes malades, même quand je devins le chef d’un service de
71 lits à l’hôpital Necker. Il m’apprit à assurer ponctuellement mes consultations, il avait le
gène de l’exactitude. Il m’apprit à recevoir les familles, à dialoguer avec mes patients, à leur
donner confiance, à recevoir leurs confidences, à leur redonner l’espoir. Dans l’un de ses
derniers messages, il rappelait cette citation de Spinoza : « les âmes ne sont pas vaincues par
les armes mais par l’amour et par la générosité ». Il disait aussi que le grand malheur pour un