112 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXVI - n° 3 - mars 2017
Points forts
Les études qui ont comparé laparotomie et laparo-
scopie ne sont pas de qualité irréprochable, ce qui a
été noté par plusieurs méta-analyses. Trois grandes
études asiatiques de phase III ont été réalisées afin
de répondre sans ambiguïté à cette question. Le
groupe coopérateur chinois est le premier à publier
ses résultats (4). Entre septembre 2012 et décembre
2014, 1 056 patients ont subi une gastrectomie avec
un curage D2 soit par laparotomie (n = 520) soit
par laparoscopie (n = 519). Dans le groupe laparo-
scopie, une conversion en chirurgie ouverte a été
réalisée dans 33 cas (6,4 %). En dehors d’une durée
opératoire plus longue de 30 minutes et d’une hospi-
talisation plus courte d’une demi-journée pour le
groupe laparoscopie, rien n’a distingué les groupes
laparoscopie et laparotomie :
➤
observance pour le curage D2 : 99,4 versus
99,6 % (p = 0,845) ;
➤
nombre médian de ganglions prélevés :
36,1 versus 36,9 (p = 0,738) ;
➤
taux de complications postopératoires :
15,3 versus 12,9 % ;
➤taux de décès postopératoires : 0,4 versus 0 %.
La survie sans récidive sera connue en 2017 et
permettra, en l’absence de différence, de valider
définitivement l’approche laparoscopique.
La chimiothérapie néo-adjuvante améliore la prise
en charge des tumeurs localement évoluées : le
choix du schéma est donc de première importance.
Le groupe allemand AIO a réalisé une étude de
phase II/III comparant un schéma de type ECC (épiru-
bicine, cisplatine, capécitabine) ou ECF ( épirubicine,
cisplatine, 5-FU) à l’association 5-FU + acide foli-
nique + oxaliplatine + docétaxel (FLOT) dans le cadre
d’une chimiothérapie périopératoire proposée à des
patients atteints de cancers résécables de l’estomac
ou de la jonction œsogastrique (5). Les données
de la phase I ont été analysées dès que 265 des
300 patients prévus ont été inclus. Le taux de réponse
complète histologique était statistiquement plus
élevé avec le schéma FLOT (16 versus 6 % ; p = 0,02).
De même, le taux de résection (93 versus 81 % ;
p = 0,01) et, surtout, le taux de résection R0 (85 versus
74 % ; p = 0,02) étaient plus élevés avec ce schéma.
En revanche, les effets indésirables de grade 3-4
y étaient plus fréquents, notamment les toxicités
hématologiques (neutropénies : 52 versus 38 % ;
leucopénies : 28 versus 20 %). Les complications
périopératoires étaient également plus fréquentes
avec le schéma FLOT (40 versus 25 %). Ces résultats
intermédiaires suggèrent que le protocole FLOT pour-
rait devenir le schéma de référence dans le traitement
périopératoire des cancers résécables du cardia et de
l’estomac. Les résultats défi nitifs de l’étude permet-
tront de savoir si ces premiers résultats se traduisent
par une amélioration de la survie globale.
La place de la gastrectomie prophylactique chez
des patients asymptomatiques atteints d’un cancer
gastrique métastatique restait indéterminée. Des
résultats issus d’études relativement anciennes
suggéraient que la gastrectomie pouvait avoir un
impact positif en termes de survie globale. Une étude
de phase III nippo-coréenne (6) a inclus des patients
porteurs d’un cancer gastrique évolué, HER2–,
asymptomatiques, avec une maladie métastatique
limitée (≤ 4 métastases hépatiques, de taille ≤ 5 cm,
carcinose péritonéale sans ascite ou occlusion,
atteinte ganglionnaire cœlio -mésentérique).
Une randomisation était faite entre une chimio-
thérapie associant cisplatine et S1 précédée ou
non d’une gastrectomie associée à un curage D1.
Pour démontrer une différence de survie de 10 %
à 2 ans (20 versus 30 %), 330 patients devaient
être inclus. L’étude a été arrêtée lors d’une analyse
intermédiaire, après l’inclusion de 175 patients, en
raison de l’absence d’intérêt du bras expérimental
(gastrectomie). La survie à 2 ans était de 31,7 % (IC
95
:
21,7-42,2) dans le bras chimiothérapie seule, contre
25,1 % (IC
95
: 16,2-34,9). La médiane de survie était
respectivement de 16,6 et 14,3 mois (HR = 1,09 ; IC95 :
0,78-1,52 ; p = 0,70). On a noté plus d’effets indé-
sirables sévères de grade 3-4 dans le bras chimio-
thérapie + chirurgie (leucopénie, nausées, anorexie,
hyponatrémie). Cette étude est donc complètement
négative. Cependant, des analyses de sous-groupes
suggèrent que la chirurgie pourrait être indiquée
dans les tumeurs distales alors qu’elle est clairement
délétère dans les tumeurs proximales. Une analyse
post-hoc a montré que l’adhésion à la chimiothérapie
était inversement proportionnelle à la perte de poids
postopératoire, corrélant ainsi l’importance du geste
chirurgical à la dénutrition et, à partir de là, à la
mauvaise adhésion à la chimiothérapie.
»Pour les cancers de l’œsophage, la centralisation de la chirurgie est un gage de sécurité.
»
La laparoscopie est désormais validée pour les tumeurs localisées de l’estomac, mais la chirurgie est
inutile en cas de maladie métastatique.
»
Alors que la place de la radiothérapie dans les cancers pancréatiques reste à trouver, elle peut se subs-
tituer à la chirurgie chez certains patients atteints d’un cancer du rectum.
»
En situation adjuvante dans les cancers coliques, les publications cette année nous ont fait entrer
concrètement dans l’ère de la biologie et du démembrement moléculaire.
Mots-clés
Immunothérapie
Centralisation
chirurgicale
CDX2
MSS-BRAF
Highlights
»
For esophageal cancers, the
centralization of surgery is a
guarantee of safety.
»
Laparoscopy is now vali-
dated for localized gastric
tumors, but surgery is unne-
cessary for metastatic disease.
»
While the role of radiothe-
rapy in pancreatic cancers
remains to be determined, it
can replace surgery for selected
patients with rectal cancer.
»
For colon cancers in the adju-
vant setting, this year’s recent
publications are paradigm-
changing with the advent of
biology and molecular classi-
fication.
Keywords
Immunotherapy
Surgical centralization
CDX2
MSS-BRAF