Cas clinique Intérêt de l’évérolimus chez un transplanté hépatique ayant développé un Kaposi Interest of everolimus in a liver transplant recipient patient who developped Kaposi sarcoma Greffe • Kaposi • Évérolimus. Graft • Kaposi • Everolimus. N. Dupin*, S. Leclerc-Mercier***, Y. Calmus**, F. Conti**, O. Soubrane** (* Service de dermatologie, hôpital Cochin, Paris ; ** Unité de transplantation hépatique, hôpital Cochin, Paris ; *** Service d’anatomie pathologique, hôpital Necker, Paris) U n homme de 60 ans est adressé en consultation pour des lésions du tronc. Il a eu une greffe hépatique en octobre 2006 en raison d’une cirrhose compliquée d’un hépatocarcinome. Depuis la transplantation, il a développé un diabète requérant la mise sous insuline et une hypertension artérielle traitée par énalapril 1 comprimé à 20 mg par jour associé à de la nicardipine 1 gélule à libération prolongée (LP) de 50 mg par jour. Son traitement immunosuppresseur repose sur l’association de prednisone 6 mg par jour à de la ciclosporine 125 mg 2 fois par jour et à du micophénolate mofétil 2 gélules de 250 mg par jour. Les premières lésions cutanées sont apparues en juin 2007, soit 8 mois après la transplantation. Examen L’examen clinique montre un homme en bon état général, de 94 kg pour 1 m 75. L’examen dermatologique retrouve des papules et des nodules de couleur violine dans le dos (figure 1), sur le thorax et sur les flancs (figure 2). On note des papules violines en regard de la cicatrice médiane sus-ombilicale (figure 3). Il n’y a pas de lésions muqueuses, les aires ganglionnaires sont libres, et il n’existe pas d’hépatosplénomégalie. L’examen histologique d’une lésion cutanée confirme le diagnostic suspecté cliniquement de maladie de Kaposi. La sérologie HHV-8 est positive, la virémie HHV-8 est négative. La numération formule sanguine (NFS) est normale, les CD4 sont à 966/mm3 soit 60 % des lymphocytes. Le dosage des immunoglobulines est normal. Les sérologies VIH 1 et 2 et human cell leukomia/Lymphoma Virus 1, 2 (HTLV1 et 2) sont négatives. Les sérologies virus d’Epstein Barr (EBV), cytomégalovirus (CMV) et de la toxoplasmose montrent une immunité ancienne. Le scanner thoraco-abdomino-pelvien ne montre pas d’anomalie. Compte tenu de la survenue du Kaposi, il est procédé à une modification du traitement immunosuppresseur. Le micophénolate mofétil est suspendu, la ciclosporine est diminuée progressivement jusqu’à 50 mg le matin et 25 mg le soir, et la prednisone est diminuée à 4 mg par jour. En remplacement du micophénolate mofétil, on introduit un traitement par évérolimus 1 mg x 2/jour. Les lésions de Kaposi vont pâlir et se désinfiltrer progressivement, pour disparaître totalement 6 mois après la réalisation du “switch”. Du fait d’un rejet chronique entraînant un tableau de décompensation œdémato-ascitique avec grande insuffisance hépatocellulaire, le patient est à nouveau transplanté en juillet 2008. L’histologie du foie est compatible avec le diagnostic suspecté de rejet chronique. À un an de cette nouvelle transplantation, le Kaposi n’est pas réapparu. Discussion Ce cas décrit un sarcome de Kaposi iatrogénique : le Kaposi du transplanté. En France, il est le plus souvent observé chez des patients infectés par le virus HHV-8 120 Images en Dermatologie • Vol. II • n° 4 • octobre-novembre-décembre 2009 Légendes Figure 1. Deux lésions de Kaposi du dos. Figure 2. Nodule kaposien du flanc. Figure 3. Papule de Kaposi sur la cicatrice (phénomène de Koebner). Cas clinique 1 2 3 Images en Dermatologie • Vol. II • n° 4 • octobre-novembre-décembre 2009 121 Cas clinique avant la greffe, mais la transmission du HHV-8 par le greffon a également été rapportée. Nous n’avons pas retrouvé, à l’interrogatoire, de facteurs de risque d’infection par HHV-8 chez notre patient, et n’avons pas pu accéder à son statut HHV-8 au moment de la greffe. Au cours de la greffe, le mot d’ordre en cas de Kaposi est la réduction de l’immunosuppression, qui fait cependant courir le risque d’un rejet. Parmi les immunosuppresseurs, il semble que les inhibiteurs de la voie mTOR, dont font partie l’évérolimus et le sirolimus, ont un intérêt dans la prise en charge du Kaposi du transplanté. Plusieurs essais non contrôlés ont effectivement rapporté des rémissions complètes ou partielles après “switch” de la ciclosporine ou d’un autre immunosuppresseur pour un inhibiteur de mTOR (1, 2). Ces derniers appartiennent à la famille des phosphatidylinositol 3-kinase (PI3-K) et sont des kinases essentielles dans des voies de signalisation de la prolifération cellulaire et de l’angiogenèse. Le changement d’immunosuppresseur pour un inhibiteur de la voie de mTOR n’est cependant pas sans risque pour la survie du greffon, et le rejet chronique ayant abouti à une deuxième greffe pourrait être secondaire au switch II Références bibliographiques 1. Stallone G, Schena A, Infante B et al. Sirolimus for Kaposi’s sarcoma in renal-transplant recipients. N Engl J Med 2005;352:1317-23. 2. Lebbé C, Euvrard S, Barrou B, et al. Sirolimus conversion for patients with posttransplant Kaposi’s sarcoma. Am J Transplant 2006;6:2164-8. N o u v e l l e s d e l ’i n d u s t r i e p h a r m a c e u t i q u e Communiqués des conférences de presse, symposiums, manifestations organisés par l’industrie pharmaceutique Remicade®, pionnier des anti-TNFα fête ses 10 ans La prise en charge des maladies inflammatoires chroniques connaît un bouleversement considérable depuis la mise à disposition des biothérapies, au premier rang desquelles figurent les anti-TNFα. Les anti-TNFα, en bloquant le Tumor Necrosis Factor, ont ouvert de nombreuses perspectives dans le traitement de pathologies inflammatoires chroniques. Ils ont démontré leur efficacité sur les plans clinique, biologique et radiologique. Dix ans après le lancement du pionnier de cette classe en France dans la maladie de 122 Crohn, l’infliximab (Remicade®), les données d’efficacité et de tolérance s’accumulent. Le recul de l’utilisation de cette molécule conforte la confiance acquise au fil du temps et on assiste progressivement à une extension de ses indications dans de nombreux domaines thérapeutiques. Aujourd’hui, Remicade® possède 9 indications dans 3 grands domaines thérapeutiques : ▶ en gastro-entérologie dans le traitement de la maladie de Crohn ; ▶ en rhumatologie pour le traitement de la polyarthrite rhumatoïde, la spondylarthrite ankylosante et le rhumatisme psoriasique ; ▶ en dermatologie dans le traitement du psoriasis en plaques, modéré à sévère, des patients adultes en cas d’échec, de contre- Images en Dermatologie • Vol. II • n° 4 • octobre-novembre-décembre 2009 indication ou d’intolérance aux autres traitements systémiques y compris la ciclosporine, le méthotrexate ou la puvathérapie. Pour cette dernière indication, Remicade® est administré en perfusion intraveineuse de 5 mg/kg pendant une durée de 2 heures, répétée aux semaines 2 et 6 puis toutes les 8 semaines. Si un patient ne répond pas après la semaine 14 (c’est-à-dire après 4 doses), aucun traitement supplémentaire par infliximab ne doit être administré. Remicade® a modifié la prise en charge de ces maladies inflammatoires chroniques en repoussant les limites des objectifs médicaux, en améliorant la qualité de vie et en redonnant espoir à certains malades. CP