L Association d’une polyarthrite rhumatoïde et d’un sarcome de Kaposi :

CAS CLINIQUE
Figure 1. Plaques
érythémato-angioma-
teuses rouge violacé
des membres évoquant
un sarcome de Kaposi.
38 | La Lettre du Rhumatologue No 367 - décembre 2010
Association d’une polyarthrite
rhumatoïde et d’un sarcome de Kaposi :
à propos d’un cas
Rheumatoid arthritis and Kaposi’s sarcoma: a case report
I. El Bouchti*, N. Akhdari**, S. Amal**, S. El Hassani*
L
e sarcome de Kaposi est rare chez les patients atteints
d’affections rhumatologiques. Des cas ont été décrits
dans la polyarthrite rhumatoïde (PR) et dans différentes
connectivites. La pathogénie de cette affection souvent viro-
induite n’est pas univoque.
Observation
Une patiente âgée de 65 ans atteinte d’une PR est traitée
depuis 2 ans par prednisone + méthotrexate quand elle déve-
loppe des lésions cutanées érythémato-angiomateuses rouge
violacé non prurigineuses multiples des mains et des pieds
(figure 1). Ces lésions font évoquer un sarcome de Kaposi. La
biopsie cutanée permet de confirmer le diagnostic. Il n’y a pas
de notion de transplantation d’organe et la recherche de cancer
ainsi que la sérologie VIH sont négatives. Le diagnostic de
sarcome de Kaposi est retenu. Cette affection a été favorisée
par l’immunosuppression thérapeutique. En conséquence, une
réduction progressive de la corticothérapie est entamée, ce
qui permet une diminution des lésions (figure 2).
Discussion
Le sarcome de Kaposi est une tumeur vasculaire fréquemment
associée à un déficit immunitaire. Il en existe 4 formes : la
forme classique (d’évolution bénigne), le sarcome de Kaposi
endémique ou africain, la forme épidémique survenant chez
* Service de rhumatologie, hôpital Ibn-Tofail, CHU Mohammed-VI, Marrakech.
** Service de dermatologie, hôpital Ibn-Tofail, CHU Mohammed-VI, Marrakech.
les patients infectés par le VIH, et la forme iatrogène qui se développe
chez les patients immunodéprimés (1).
Deux groupes de patients immunodéprimés risquent de développer
le sarcome de Kaposi :
le premier groupe est traité par des corticoïdes et de l’azathioprine
(ou un autre immunosuppresseur) pour une transplantation d’organe.
L’incidence du sarcome de Kaposi est de 0,52 % parmi les greffés, ce
qui est 150 à 500 fois supérieur à celle de la population générale ;
CAS CLINIQUE
 Figure 2. Régression des lésions érythémato-angiomateuses du sarcome
de Kaposi sur le pied.
La Lettre du Rhumatologue No 367 - décembre 2010 | 39
lupus érythémateux systémique, une maladie de Horton
ou une pseudo-polyarthrite rhizomélique, une leucémie
ou un lymphome, et, plus rarement, un asthme ou une
colite ulcéreuse. L’incidence est 2 à 4 fois plus faible qu’en
cas de greffe d’organe. Le délai d’apparition de la maladie
est beaucoup plus long dans ces formes (60 mois versus
20 mois chez les transplantés d’organe) [1]. La pathogénie
du sarcome de Kaposi chez ces patients nest pas univoque,
car elle associe une prédisposition génétique à une immu-
nosuppression iatrogène. Le facteur inducteur est souvent
une infection virale à herpèsvirus humain 8 (HHV8) [2].
Ce virus est considéré comme l’agent étiologique prin-
cipal des 4 formes clinico-épidémiologiques de sarcome de
Kaposi (2, 3). Il est endémique dans les zones où l’on observe
des sarcomes de Kaposi classiques, en particulier dans la
zone méditerranéenne (3). Des études ont montré que cette
infection est endémique dans la population marocaine. Ainsi,
les tests sérologiques détectent des anticorps anti-HHV8
dans la plupart des cas de sarcome de Kaposi observés au
Maroc (2, 4). Une immunosuppression peut aggraver le
risque viral, en particulier les corticoïdes, qui ont la capacité
d’induire la réplication et l’activation du cycle lytique de
HHV8 in vitro. Ces observations confirment que les corti-
coïdes jouent un rôle dans le développement du sarcome
de Kaposi induit par le HHV8 (1, 5). Ainsi le HHV8 est un
cofacteur important dans le développement de la maladie, en
association avec une immunosuppression iatrogène (2). Dans
la PR, plusieurs observations ont montré qu’un sarcome de
Kaposi pouvait être lié à l’association d’un terrain génétique
et d’une thérapeutique immunosuppressive, y compris les
anti-TNFα comme l’illustre ce cas clinique (2, 6).
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Références bibliographiques
le deuxième groupe est traité par un immunosuppresseur dans
de nombreuses affections, comme une PR, une maladie de Behçet
ou une vascularite, une polymyosite ou une dermatomyosite, un
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