La d´
emence frontotemporale : revue de la litt´
erature 937
troubles neuropsychiatriques, notamment dans les troubles
´
emotionnels comme dans l’anxi´
et´
e. En SPECT, cette derni`
ere
est associ´
ee `
a une hypoperfusion du lobe temporal droit,
mais de fac¸on inconstante. La diminution de l’empathie,
les difficult´
es dans les interactions sociales, l’impulsivit´
e
et les tendances sociopathiques sont ´
egalement associ´
ees
`
a une hypoperfusion temporale de fac¸on bilat´
erale. Ces
r´
esultats pourraient ˆ
etre interpr´
et´
es comme le reflet d’une
atteinte des boucles sous-corticofrontales notamment lim-
biques avec une atteinte fonctionnelle `
a la fois frontale et
temporale.
On peut ´
egalement noter des symptˆ
omes physiques [6],
comme des troubles neurov´
eg´
etatifs `
a type d’hypotension,
de malaise, voire de syncope. L’incontinence est rare et
secondaire `
a une n´
egligence du contrˆ
ole des sphincters. Les
crises comitiales sont exceptionnelles.
L’examen clinique est normal au d´
ebut de la maladie
[18], sauf s’il s’agit d’une forme associ´
ee `
a une scl´
erose
lat´
erale amyotrophique. `
A un stade ´
evolu´
e, on peut noter
des signes de dysfonctionnement frontal avec r´
eapparition
des r´
eflexes archa¨
ıques de type grasping ou r´
eflexe de suc-
cion. On observe ´
egalement un comportement d’imitation,
une persistance des mouvements passifs, une apraxie de
la marche ou l’existence d’une sous-utilisation motrice,
voire un d´
eficit moteur unilat´
eral. L’examen peut mettre en
´
evidence des signes pyramidaux ou extrapyramidaux notam-
ment dans le cadre des formes li´
ees au chromosome 17.
Les troubles du comportement visuel de type clignement
excessif ou errance du regard sont possibles.
Apr`
es l’interrogatoire de l’entourage, les tests neuropsy-
chologiques sont le deuxi`
eme pilier du diagnostic clinique
de DFT. Les ´
etudes sont le plus souvent r´
ealis´
ees en
comparaison avec la MA. Dans cette derni`
ere, le mini men-
tal test (MMS) est un instrument de d´
epistage et de suivi
bien valid´
e qui ´
evalue principalement les fonctions ins-
trumentales : orientation temporospatiale, langage, praxies
constructives, calcul et m´
emoire. Cependant, il n’est pas
adapt´
e`
a la recherche de troubles cognitifs dans la DFT.
En effet, le MMS ne permet pas de mettre en ´
evidence
l’atteinte frontale sauf quand celle-ci est ´
evolu´
ee. Il est
donc n´
ecessaire de r´
ealiser des tests dits «frontaux »`
a
la recherche d’un syndrome dysex´
ecutif. Une des ´
echelles
en franc¸ais que l’on peut utiliser est la batterie rapide
d’efficience frontale (BREF) [42]. Elle est constitu´
ee de
six sous-tests qui explorent la conceptualisation, le rai-
sonnement abstrait, les capacit´
es de flexibilit´
e mentale,
la programmation motrice et le contrˆ
ole de l’action, la
sensibilit´
e`
a l’interf´
erence, le contrˆ
ole inhibiteur et enfin
l’autonomie par rapport `
a l’environnement [2]. La fluence
verbale est souvent d´
eficitaire d`
es les premiers stades de la
maladie [18].
Le plus souvent, les ´
etudes sont r´
ealis´
ees par compa-
raison aux patients pr´
esentant une MA et plutˆ
ot que les
scores bruts des tests, il faut analyser le type d’erreurs
qui refl`
etent les diff´
erences entre ces deux pathologies
quant aux structures touch´
ees [45]. Concernant la fonction
mn´
esique, le lobe frontal est n´
ecessaire `
a la premi`
ere et `
a
la derni`
ere ´
etape qui sont l’encodage et la r´
ecup´
eration,
alors que l’hippocampe, touch´
ed
`
es les premiers stades
dans la MA, intervient dans le stockage de l’information.
Cela nous permet d’expliquer les r´
esultats de tests comme
le Grober et Buschke ou sa version r´
eduite, le test des
cinq mots de Dubois et al. [10] dans ces deux pathologies.
Ces deux tests reposent sur l’apprentissage contrˆ
ol´
e d’une
liste de mots avec rappel imm´
ediat et diff´
er´
e et possibi-
lit´
e de donner des indices qui am´
eliorent la r´
ecup´
eration.
Dans la MA, les troubles du stockage entraˆ
ınent une dimi-
nution des scores de fac¸on globale alors que l’atteinte
frontale, comme dans la DFT, entraˆ
ıne des troubles de la
r´
ecup´
eration et donc une am´
elioration par l’indic¸age des
performances mn´
esiques [1,30]. Concernant le langage, les
troubles dans la DFT sont pr´
ef´
erentiellement au niveau
de la compr´
ehension, de phrases notamment, ainsi que
dans l’interpr´
etation des m´
etaphores. Au niveau de la per-
ception visuospatiale, contrairement aux patients atteints
de MA qui pr´
esentent des erreurs dans l’appr´
eciation de
l’espace, ceux atteints de DFT pr´
esentent des erreurs
dans les copies tr`
es ´
elabor´
ees refl´
etant leurs difficult´
es de
planification.
On peut donc conclure qu’en r´
ealisant les deux tests
simples que sont la BREF et le test des cinq mots de Dubois
et al. [10], on peut d´
eceler une atteinte des fonctions
ex´
ecutives qui, si elle n’est pas sp´
ecifique d’une DFT, per-
met, en l’associant avec une ´
evaluation des troubles du
comportement, de donner des arguments pour continuer les
investigations neurologiques.
Examens paracliniques
Selon les recommandations de l’Anaes [1] de février 2000
pour le diagnostic de la MA, le bilan biologique doit
comporter de fac¸on systématique un ionogramme sanguin
incluant une calcémie et une glycémie ainsi qu’un dosage
de TSH. La sérologie syphilitique, HIV, le dosage de vita-
mine B12, de folates, le bilan hépatique et la ponction
lombaire seront prescrits selon le contexte clinique. Une
imagerie cérébrale systématique est recommandée pour
toute démence d’installation récente avec pour but prin-
cipal de ne pas méconnaître l’existence d’une autre cause
de démence (processus expansif intracrânien, hydrocé-
phalie à pression normale, lésions d’origine vasculaire).
L’Anaes précise également que cet examen sera au mieux
une imagerie par résonance magnétique (IRM). De plus,
cette IRM pourra également apporter des arguments en
faveur d’une DFT [22]. En effet, on observe une atrophie
du lobe frontal le plus souvent bilatérale et symétrique
alors qu’on note une atrophie localisée dans un premier
temps à l’hippocampe dans la MA. De fac¸on plus pré-
coce, l’imagerie métabolique, notamment une imagerie par
émission monophotonique (SPECT) peut mettre en évidence
une hypoperfusion des lobes frontaux et des lobes tempo-
raux alors même que l’IRM peut être dans les limites de
la normale [3]. Il ne faut pas hésiter à la demander en
cas de doute car c’est un argument reconnu par l’Anaes
pour faire le diagnostic différentiel entre une MA et une
DFT.
Hypoth`
eses physiopathologiques
Àlafinduxıx
esiècle, Alzheimer décrivait les corps de
Pick [6] : inclusions intraneuronales immunomarquées par
des anticorps anti-tau. La présence de ces corps de Pick
définit actuellement la maladie de Pick stricto sensu. Deux