4 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXVI - n° 3 - mars 2017
Cancers bronchiques : quoideneuf entre fin 2015 etfin 2016 ?
RÉTROSPECTIVE
PERSPECTIVES
Lors des 2 derniers congrès de 2016, l’ESMO (Euro-
pean Society for Medical Oncology) et la WCLC
(World Conference on Lung Cancer), les premières
présentations suivies immédiatement de publica-
tions ont montré l’impact important de l’immuno-
thérapie en première ligne. L’étude KEYNOTE-024 (6)
a comparé le pembrolizumab (200 mg en dose fixe
toutes les 3 semaines pendant un maximum de
35 cycles) à un doublet fondé sur les sels de platine
au choix des investigateurs (carboplatine ou cispla-
tine et pémétrexed ou gemcitabine ou carboplatine
et paclitaxel) ; la maintenance par pémétrexed était
possible. L’objectif principal de cette étude était la
survie sans progression (SSP). Les patients devaient
notamment avoir un CBNPC avancé exprimant PD-L1
dans au moins 50 % des cellules tumorales. Ils ne
devaient pas présenter de mutation de l’EGFR ni de
réarrangement d’ALK. Ils ne devaient pas avoir de
métastases cérébrales ou celles-ci devaient avoir
été traitées. La stratification portait sur l’indice de
performance (0 versus 1), l’histologie (épidermoïde
versus non épidermoïde) et le lieu de traitement
(Asie versus reste du monde). Trois cent cinq patients
ont été inclus. Cette étude est positive quant à son
objectif principal, la SSP, mais on note également une
supériorité en termes de réponse au pembrolizumab
(44,8 versus 27,8 % ; p = 0,0011) et de survie globale
(SG). Tous les sous-groupes étudiés ont montré un
avantage en SG du pembrolizumab sur la chimio-
thérapie. Le profil de tolérance était également en
faveur du pembrolizumab, qui a moins d’effets indé-
sirables de tous grades. Cette étude a été suivie de
l’enregistrement par la FDA (Food and Drug Admi-
nistration) du pembrolizumab comme traitement de
première ligne en monothérapie chez les patients
atteints d’un CBNPC et chez qui PD-L1 est positif
dans au moins 50 % des cellules tumorales.
L’étude CheckMate-026 a comparé, en phase III et
en première ligne, le nivolumab chez les patients
PD-L1+ (7). Cette étude a inclus des patients dont
la tumeur exprimait PD-L1 dans au moins 1 % des
cellules, avec une randomisation nivolumab contre
chimiothérapie. Le crossover était autorisé pour
ceux recevant la chimiothérapie. Cette étude n’a
pas atteint ses objectifs et n’a pu démontrer, ni dans
la population PD-L1+ (≥ 5 % des cellules) ni dans la
population globale, un avantage en termes SSP, de
SG ou de réponse. L’analyse complète de cette étude
est en attente, tout comme les résultats de l’étude
CheckMate-227, actuellement en cours d’inclusion
et qui compare nivolumab, nivolumab + ipilimumab
ou nivolumab + un doublet de chimiothérapie à un
simple doublet de chimiothérapie.
L’enregistrement du pembrolizumab en première
ligne aux États-Unis et probablement bientôt en
Europe va modifier de façon importante les pratiques.
La sélection des malades à traiter selon l’expression
de PD-L1 devient de fait indispensable dès que le
diagnostic de CBNPC métastatique est obtenu. Cela
va impliquer une sensibilisation et une formation des
anatomopathologistes, ainsi que la définition d’un
consensus acceptable sur la technique, l’anticorps
et la plateforme automatisée d’immunohistochimie
à utiliser. Si on fait en pratique courante la même
sélection des patients que dans l’étude KEYNOTE-
026, un peu plus de 15 % des patients seront éligibles
pour le pembrolizumab seul en première ligne. Cela
pose la question du traitement de ceux qui ne sont
pas éligibles, et en particulier de ceux qui n’expriment
pas ou faiblement PD-L1. Les stratégies d’associa-
tion avec les anti-CTLA-4 ou avec la chimiothérapie
actuellement en évaluation pourraient représenter
une option d’avenir pour ces patients.
Dans ce contexte des associations, KEYNOTE-021 est
une étude multicohortes qui fait, notamment, une
comparaison pembrolizumab associé à la chimio
-
thérapie contre chimiothérapie seule (cohorte G) [8].
Cette étude a inclus des patients atteints de CBNPC
non épidermoïdes sans mutation de l’EGFR ni réar-
rangement d’ALK. L’expression de PD-L1 devait être
évaluable lors de l’inclusion. Les 2 groupes étaient
traités soit par pembrolizumab associé à carbopla-
tine et pémétrexed pendant 4 cycles avec traitement
d’entretien par pémétrexed possible, soit par chimio-
thérapie seule. L’objectif principal était l’améliora-
tion du taux de réponse, et celui-ci était atteint,
avec 55 % de réponses pour l’association contre
29 % pour la chimiothérapie seule. L’expression de
PD-L1 dans 50 % ou plus des cellules semblait le
seuil au-delà duquel l’amélioration de la réponse
était la plus tranchée. Ces résultats sont encoura-
geants pour les associations avec la chimiothérapie,
mais doivent encore être analysés avec prudence car
de nombreuses questions demeurent, telles que le
seuil d’expression du PD-L1, celui de la meilleure
chimiothérapie à associer ou celle de la place des
antiangiogènes. L’hypothèse d’une optimisation de
l’immunothérapie par l’association avec la chimio-
thérapie chez les malades faiblement expresseurs ne
semble pas se confirmer dans cette étude.
L’étude de phase Ib CheckMate-012 (9) évalue le
nivolumab en monothérapie ainsi que plusieurs
combinaisons ipilimumab + nivolumab à diffé-
rents niveaux de posologie. L’objectif principal est
la tolérance du traitement ; les critères de jugement
secondaires sont le taux de réponse objective, la SSP