Hémoglobine glyquée
Le glucose se fixe àtoutes les protéines sur leur fonction
amine, par une liaison cétoamine, selon un processus
non enzymatique :laglycation. L’intensité de cette gly-
cation dépend du niveau de la glycémie, de la durée de
vie de la protéine, de sa structure et de son accessibilité.
La protéine la plus utilisée est l’hémoglobine, en raison
de ses faibles variations intra-individuelles et de sa
durée de vie importante :120 jours. L’hémoglobine gly-
quée (HbA
1c
)est le produit de la réaction de condensa-
tion du glucose sur la valine N-terminale des chaînes.
Elle constitue un enregistrement de la glycémie durant
la période de 8à12semaines précédant le prélèvement ;
la concentration de protéines ayant subi ce mécanisme
de glycation reflète donc l’équilibre glycémique et ses
variations, constituant une sorte de «mémoire glycé-
mique ».
Problèmes techniques
Les techniques de dosage doivent reconnaître spécifi-
quement l’HbA
1c
àl’exclusion des autres molécules,
normales ou non. Leurs principes sont basés sur les dif-
férentes caractéristiques structurales et les composés
dosés ne sont pas tous les mêmes (tableau 6).
La fixation du glucose modifie les caractéristiques
physicochimiques des molécules dont le pH isoélec-
trique, ce qui permet la séparation et le dosage par de
nombreuses techniques lectrophorèse, chromato-
graphies (parmi lesquelles l’HPLC), spectrométrie de
masse ;d’autres techniques utilisent les propriétés
immunologiques de la molécule.
Les techniques utilisées en routine peuvent être classées
en deux groupes :
celles qui dosent l’HbA
1c
:
–les techniques chromatographiques sont basées sur
Tableau6.Principales fractionsdel’hémoglobine et principaux termesutilisés caractérisant l’hémoglobine glyquée
HbA tramèreα2 β2
HbA0 Composant majeur de HbA,comprend desformesnon glyquéesetdes formesglyquéesailleursque surl’extrémité
N-terminaledes chaînesβ
HbA
1
(α 2β 2) –Hémoglobine(s) rapide(s) ou fast hemoglobins, HbA glyquée surl’extrémité N-terminaledes chaînesβquel que
soit l’ose
HbA
1c
–Hbformée parfixation de glucosesur l’extrémité N-terminaledes chaînesβde l’HbA
1
–Fraction cétoamine stable
–Fragment de référencepour la standardisation desméthodes
Hb pré-A
1c
Forme labile de l’HbA
1c
caractérisée parune fonction aldimine (basedeSchiff), ne doit patrvaluée en même
tempsque l’HbA
1c
Hb glyquée –HbA glyquée parleglucosesur l’extrémité N-terminaled’au moinsune chaîne β
D’après :GilleryP.–L’hémoglobine A1c. –Biotribune 2002 ;N
o
2:p.23.
la plus grande électronégativité de l’HbA
1c
par rap-
port àl’HbA0. Elles peuvent se présenter sous
forme de colonne aussi bien en HPLC qu’en chro-
matographie liquide basse pression. L’HbA
1c
est
éluée de façon spécifique par rapport aux autres Hb
rapides et quantifiée par calcul des aires des pics
d’élution. Ces méthodes sont soumises aux interfé-
rences des autres composés d’addition de l’hémo-
globine de charge proche de celle de l’HbA
1c
(dérivés de l’urée…) et de quelques variants de
l’hémoglobine ;
–les techniques électrophorétiques utilisent les
mêmes propriétés de la molécule et sont sujettes
aux mêmes interférences. La précision en étant
cependant critique, elles sont de moins en moins
utilisées ;
–les techniques immunologiques utilisent des anti-
corps dirigés contre le peptide N-terminal glyqué
des chaînes â.L’HbA
1c
est calculée par rapport à
l’Hb totale àl’aide d’une gamme d’étalonnage
titrée. La spécificité est bonne, l’interférence des
composés d’addition minime, cependant l’interfé-
rence des variants de l’hémoglobine peut se mani-
fester ou non suivant la caractéristique des
anticorps.
celles qui dosent l’hémoglobine glyquée totale.
Elles utilisent l’affinité des hémoglobines glyquées
pour les dérivés de l’acide boronique. Leur précision
est souvent médiocre et le pourcentage d’Hb glyquée
est calculé par rapport àl’Hb totale. Ces méthodes
ne permettent pas le dosage spécifique de l’HbA
1c
,
mais la corrélation par rapport àune méthode de
référence permet la conversion.
Quelle que soit la technique employée, elle doit
répondre àcertains critères définis par l’Afssaps :
intitulé et intérêt clinique du dosage (HbA
1c
pour le
suivi du diabète) ;
exactitude ;
répétabilité (< 3%);
reproductibilité (< 5%);
interférences spécifiques de l’hémoglobine glyquée
(variants de l’hémoglobine) ;
intervalles de référence (doivent être conformes àla
standardisation et aux recommandations).
En France, les recommandations formulées par la
Haute Autorité de Santé et par l’Afssaps préconisent le
dosage de l’HbA
1c
àl’aide d’une méthode certifiée selon
les schémas internationaux de standardisation.
Deux groupes travaillent sur la standardisation des
méthodes de dosages de l’HbA
1c
:
le groupe américain NGSP (National Glycohemoglo-
bin Standardization Program), dont la standardisa-
tion est utilisée dans les études DCCT et UKPDS. Il
est àl’origine de la définition des seuils de risque fixés
à7%pour le diabète de type 1et6,5 %pour le
diabète de type 2;
le groupe IFCC (International Federation of Clinical
Chemistry) aproposé une standardisation plus
récente et surtout plus spécifique conduisant àdes
valeurs de référence plus basses (de 1à2%)que
celles des études DCCT.
Une gold equation té validée pour relier les deux
systèmes de standardisation :
%HbA
1c
(NGSP) =(0,915 ×%HbA1c (IFCC)) +2,15
Cependant, si la standardisation IFCC définit doréna-
vant les matériaux et la méthode de référence avec les-
quels les industriels du diagnostic in vitro devraient se
standardiser, les résultats doivent continuer àêtre ren-
dus selon les normes NGSP/DCCT auxquelles les méde-
cins et les patients sont maintenant familiarisés.
Utilisation de l’hémoglobine glyquée
Malgré l’amélioration des techniques de mesure,
l’HbA
1c
n’est pas encore recommandée pour un dépis-
tage systématique du diabète. Son utilisation en tant
que marqueur de diagnostic de la pathologie, surtout
dans le diabète de type 2, semble évoluer plus rapide-
ment parallèlement àl’évolution de la standardisation,
mais sa définition reste d’être un marqueur rétrospectif
Tableau7
Glycémie moyenne g/l HbA
1c
%
1,2 soit 6,65 mmol/l 6
1,5 soit 8,32 mmol/l 7
1,8 soit 9,98 mmol/l 8
Pour chaque augmentation de 0,3 (1,66 mmol/l) Augmentation de 1
et objectif de l’équilibre glycémique àmoyen terme,
constituant un index validé pour prédire la survenue ou
la progression des complications.
Ce paramètre est indépendant des variations journa-
lières de la glycémie, il n’est pas affecté par le jeûne, par
l’exercice physique ou par l’ingestion récente de sucres.
Il augmente très légèrement avec l’âge. Ses variations
interindividuelles sont faibles, ce qui en fait un bon
marqueur.
Le pourcentage d’hémoglobine glyquée est directement
proportionnel àlaglycémie moyenne (tableau 7).
Les recommandations de l’Anaes pour la pratique cli-
nique précisent que «lesuivi du contrôle glycémique
du diabète de type 2doit reposer sur le dosage de
l’hémoglobine glyquée effectué tous les 3à4mois. Pour
un patient donné, cette détermination doit être prati-
quée dans le même laboratoire pour permettre de com-
parer les résultats successifs… ».
Les objectifs de ces sujets diabétiques se traduisent en
objectifs d’hémoglobine glyquée :
<6,5 %objectif optimal ;
<8%sur deux contrôles successifs :
–équilibre acceptable ;
–modifications thérapeutiques envisageables en éva-
luant le rapport avantages/inconvénients.
>8%sur deux contrôles successifs :
–mauvais équilibre glycémique ;
–modifications du traitement recommandées.
Chez les sujets âgés, les objectifs sont moins stricts,
pour tenir compte des risques d’hypoglycémie liés au
traitement et àl’existence d’une éventuelle insuffisance
rénale.
Difficultés d’interprétation des résultats
d’hémoglobine glyquée
La validité d’un résultat d’hémoglobine glyquée est
conditionnée par une durée de vie normale des globules
rouges, soit 120 jours, et une synthèse normale de
l’hémoglobine, soit 97 à99%d’HbA.
Si l’un de ces paramètres est modifié, l’équilibre entre
synthèse/dégradation et glycation est perturbé. Toute
situation d’hémolyse (mécanique, toxique, auto-
immune) et bien sûr toute transfusion récente modifient
cet équilibre. Cela se rencontre fréquemment dans le
cadre des cirrhoses avancées, qui provoquent une aug-
mentation de la captation splénique des globules rouges
ainsi qu’une hémolyse importante.
Au cours des hémoglobinopathies, les anomalies de
structure peuvent s’accompagner d’une certaine instabi-
lité, responsable d’un degré variable d’hémolyse, ou
bien le dosage peut être perturbé par la présence d’un
variant de l’hémoglobine et de ses formes glyquées tant
sur le plan analytique que sur l’interprétation.
Les problèmes techniques sont le plus souvent évoqués :
il s’agit de détecter l’hémoglobine anormale (le compte
rendu d’analyse doit porter mention de cette présence)
et ensuite d’interpréter ou non les résultats.
Les méthodes de chromatographie d’échange ionique,
CLHP voire chromatographie liquide basse pression,
permettent de détecter les variants les plus courants en
France :HbS et HbC. Certaines méthodes de chromato-
graphie liquide haute performance permettent de détec-
ter HbE et HbD. D’autres variants sont élués sous
forme d’un pic surnuméraire non identifié qui doit être
pris en compte dans l’interprétation qui reste cependant
possible.
En revanche, il existe des spécificités au cours des-
quelles le variant coéluant avec l’HbA
1c
entraîne des
valeurs incompatibles avec la physiologie (supérieure
à20%), le diagnostic le plus difficile étant celui
du variant coéluant avec l’hémoglobine A0. Ce fut
longtemps le cas de l’HbD, qui demande une chromato-
graphie spéciale pour lui permettre une élution spéci-
fique.
Les méthodes électrophorétiques donnent des rensei-
gnements comparables, avec plus ou moins d’efficacité
selon leur capacité de résolution.
Les méthodes immunologiques ne sont sensibles àla
présence d’un variant que si l’épitope concerné est
reconnu. Cependant, la valeur obtenue en cas d’hémo-
globinopathie n’est pas une valeur d’HbA
1c
,puisque la
structure de la globine, en particulier celle des chaînes â,
est modifiée.
Pour l’interprétation, il est important de considérer
qu’au cours d’une hémoglobinopathie, si l’hémolyse
existe et est constante, et si le dosage est effectué avec
la même méthode, les résultats peuvent être comparés
d’une fois sur l’autre, le patient étant son propre
témoin.
Une solution alternative peut être le dosage des
fructosamines plasmatiques, dont les variations sont
totalement indépendantes d’une anomalie de l’hémo-
globine.
Fructosamines
(Afssaps.
Dosagedel’HbA1c :bilan du contrôle national de qualité (1999-2004).
ContrôleNational de Qualité 2006 ;N
o
5:1-4.
Chevenne D, Fonfrède M.
Actualité surles marqueursbiologiquesdudiabète.
Immunoanal BiolSpéc 2001 ;16:215-229.
GilleryP,Hue G, Bordas-FonfrèdeM,Chapelle JP,DrouinP,Lévy-Marchal
C, et al.
Dosage de l’hémoglobine A1c et hémoglobinopathies :problèmes posés
et conduiteàtenir.
Ann BiolClin 2000 ;58:425-430.
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