144 | La Lettre de l'Hépato-gastroentérologue • Vol. XX - n° 3 - mai-juin 2017
EVIDENCE-BASED MEDICINE Hépatologie
Faut-il proposer une activité
physique chez les malades porteurs
d’une NASH ?
Marie-Noëlle Hilleret*, Vincent Leroy*
* Service d’hépato-gastroentérologie,
CHU de Grenoble.
L
es options thérapeutiques dans la stéatopathie
non alcoolique (NASH) sont aujourd’hui limi-
tées. L’adaptation du mode de vie des malades
est essentielle (1). L’efficacité de l’activité physique
(AP) fait l’objet d’études depuis plus de 20 ans (2).
Deux types d’exercice ont été testés : “aérobie” et
“en résistance”. L’AP aérobie correspond à la synthèse
d’adénosine triphosphate par l’oxydation de subs-
trats (présence d’oxygène) dans le cadre du cycle
de Krebs. Elle est souvent caractérisée par l’utilisa-
tion de pourcentage de la VO
2
max (quantité maxi-
male d’oxygène que le corps consomme par unité
de temps). La course à pied, la marche rapide avec
utilisation de bâtons, le cyclisme correspondent à ce
type d’AP. Plus récemment, l’AP dite “de résistance”
a été étudiée, elle est fondée sur l’effort mus culaire
contre résistance, souvent pratiqué en salle de sport
(levée de poids). Cette deuxième filière utilise à la
fois une voie de synthèse de l’ATP aérobie et la
glycolyse anaérobie (acide lactique).
L’apport de l’AP dans le contrôle de la NASH repose
sur plusieurs mécanismes. La restauration d’une
insulino-sensibilité est l’élément le plus couramment
reconnu. L’action sur la concentration intrahépatique
en triglycérides dépend de plusieurs paramètres,
tous impactés par l’AP : libération des acides gras
libres (AGL) au niveau du foie en provenance du tissu
adipeux (et des sources alimentaires), lipogenèse de
novo, β-oxydation intrahépatique et synthèse de
VLDL (Very Low Density Lipoprotein – lipoprotéine
de très basse densité). L’AP au seuil de VO2max de
50 à 70 % augmente la lipolyse puis l’oxydation des
acides γ-linoléniques, entraînant leur redistribution
vers le muscle. L’AP répétée dans le temps permet
une modification des caractéristiques mitochon-
driales, entraînant une augmentation de la capta-
tion des AGL, une optimisation de la β-oxydation
et du stockage des triglycérides en intramusculaire.
Parallèlement, l’AP dite “de résistance” promeut la
synthèse de fibres musculaires de type 2, dont les
caractéristiques sont plus favorables à des méca-
nismes de glycolyse par l’augmentation de l’expres-
sion de GLUT4, AMPK et des cavéolines. La fonction
endocrine du tissu musculaire est modifiée par l’AP
avec la sécrétion de myokines, en particulier l’irisine.
Cette myokine, augmentée lors de l’AP en résistance,
est responsable d’une différenciation des adipocytes
de la graisse blanche vers un phénotype proche de
celui de la graisse brune ; il en résulte une augmen-
tation de la thermogenèse et une inhibition de la
lipogenèse hépatique. Plusieurs études ont permis de
démontrer un abaissement du taux d’irisine chez les
sujets porteurs de NASH, son augmentation étant
corrélée à celle de la masse musculaire et à la dimi-
nution de l’adiposité viscérale.
De nombreuses études cliniques se sont intéressées
à l’évaluation de l’impact de l’AP sur les patients
porteurs de NASH. L’analyse de l’efficacité de l’AP
est toutefois limitée par le peu d’études ayant
utilisé l’histologie hépatique comme critère de
jugement. Ainsi, la plupart des études reposent-
elles sur l’analyse de la graisse intrahépatique ou
du tissu adipeux par des techniques d’imagerie, IRM
ou scanner. E. Vilar-Gomez et al. (3) ont montré que
40 mn d’effort aérobie par jour 5 jours/semaine
pendant 6 mois permettaient d’améliorer le score
NAS (4,45 points vs 2,2 points, p < 0,001) ainsi que
la fibrose (– 0,55 ± 0,3 ; p = 0,012). La méta-ana-
lyse de E. Keating et al. (2), retrouve un impact,
quel que soit le type d’AP réalisée, sur le paramètre
L’activité physique permet d’obtenir chez des patients porteurs de NASH,
même en l’absence de réduction pondérale, un impact sur la graisse
viscérale et intra-hépatique voire sur l’inflammation et la fibrose en
anatomopathologie. Tout type d’activité physique aérobie ou de résistance
peut être proposé aux patients, le minimum requis étant l’obtention de
3 séances par semaines d’une durée de 45 minutes chacune, la nature des
activités dépendant essentiellement du goût des patients de manière à
promouvoir la motivation et la persistance dans la pratique de l’activité.
Ce qu’il faut retenir
Niveau
de preuve
1