Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 1 - avril-mai-juin 2010
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h i s t o i r e
D.R.
* Service d’anatomo-
pathologie, hôpital Foch,
Suresnes.
** Karolinska Institute,
Stockholm.
Donald Floyd Gleason,
l’inventeur du grading
du cancer de la prostate
P. Camparo*, L. Egevad**
De la sorte, Gleason propose un score (de2 à10) fondé
sur la somme des 2grades précédemment observés, et
montre que cette somme est le meilleur des éléments
prédictifs de la maladie(1).
Le grading de Gleason est présenté en 1966 et en 1967
dans 3articles regroupant les cas de 280patients (2-4).
L’étude se prolonge ensuite jusqu’en 1974. Quatre mille
patients ont alors été inclus(5).
An de faciliter l’apprentissage de son score, Gleason
fait réaliser par un artiste présent à l’hôpital un dessin
qui résume les résultats dans ce qui est maintenant
considéré comme le classique schéma de Gleason. Ce
dessin a contribué de façon indiscutable à la popu-
larité du système de grading de Gleason. Beaucoup
plus agréable à utiliser que la plupart des grading anté-
rieurs, qui nécessitaient l’examen à fort grossissement
de la morphologie nucléaire et du compte de mitoses,
le score de Gleason est un exemple de beauté et de
simplicité. Il permet d’expliquer clairement la manière
d’appréhender des tumeurs dont les aspects morpho-
logiques sont notoirement hétérogènes.
Cependant, il fallut quelques années pour que le
grading de Gleason soit ociellement reconnu. Il n’est
présenté, pour la première fois, que dans la deuxième
édition de la classication des tumeurs de l’OMS en
2002 à côté du grading de Mosto ; il apparaît comme
seule recommandation pour le grading des cancers de
la prostate dans la troisième édition de cette même
organisation.
Dans une récente étude de l’European Network of
Uropathology, 99,5 % des pathologistes européens
indiquent utiliser le système de Gleason(6). La valeur
pronostique et la corrélation avec d’autres facteurs
pronostiques ainsi que la reproductibilité du grading
de Gleason ont été largement étudiées ces dernières
décennies. Le fait que ce score n’ait pas été modié
durant près de 40ans montre sa robustesse et son
D
onald Floyd Gleason est né le 20novembre
1920 à Spencer (Iowa) et a grandi à Licheld
(Minnesota) où son père tenait une quin-
caillerie et où sa mère était institutrice. Il eectue son
internat à l’université du Maryland (Baltimore) en tant
que lieutenant dans le corps des médecins de l’USArmy.
L’essentiel de sa carrière s’eectuera ensuite dans le
service de pathologie de l’hôpital d’administration des
vétérans (VAMC) de Minneapolis (Minnesota).
À partir de 1959, une série d’études portant sur le
cancer de la prostate est mise en place par le Veteran’s
Administration Cooperative Urological Research Group
(VACURG). Mené par le Dr Georges Mellinger, chef du
département d’urologie du VAMC, ce projet a pour
objectif de comparer l’ecacité versus placebo des dif-
férents traitements alors disponibles dans le cancer de
la prostate. Il devient rapidement évident que l’absence
d’un système de classication histologique consensuel
constitue un obstacle majeur à l’appréciation de l’e-
cacité thérapeutique.
Gleason est donc chargé d’analyser une série de prélè-
vements histologiques de cancers de la prostate, sans
être informé du devenir des patients. La première idée
de Gleason est de décrire les diérents aspects architec-
turaux que peuvent prendre ces tumeurs. Il demande
à un statisticien de corréler ces résultats à la survie du
patient. Certaines de ces associations présentant un
pronostic équivalent, il les regroupe pour réduire le
nombre d’aspects architecturaux à 5 (ou grades de
Gleason).
Il observe également que certains de ces aspects
peuvent être associés au sein d’une même tumeur. Sa
seconde idée est alors de noter l’aspect morphologique
prédominant et de l’associer au deuxième aspect le plus
fréquemment observé dans chaque cas. Le pronostic
des patients avec 2grades associés se révèle être inter-
médiaire entre les patients présentant un seul grade
pris séparément.