Dimension des espaces vectoriels () Dimension des espaces vectoriels 1 / 36 1 Familles libres, génératrices et bases 2 Espaces vectoriels de dimension finie 3 Sous-espaces vectoriel de dimension finie 4 Applications linéaires en dimension finie () Dimension des espaces vectoriels 2 / 36 Dans tout le chapitre, on travaille dans R, mais on peut aussi travailler avec C Rappelons qu’une famille (v1 , v2 , . . . , vp ) d’éléments de E est appelée famille à p éléments , que les vi soient distincts ou non. Dans une famille, l’ordre des éléments compte. On va généraliser les notions de familles libres, génératrices et bases vues dans Rn . () Dimension des espaces vectoriels 3 / 36 Plan 1 Familles libres, génératrices et bases 2 Espaces vectoriels de dimension finie 3 Sous-espaces vectoriel de dimension finie 4 Applications linéaires en dimension finie () Dimension des espaces vectoriels 4 / 36 Familles libres ou liées Définition Soit (x1 , x2 , . . . , xp ) une famille finie de vecteurs de E . On dit que la famille (x1 , x2 , . . . , xp ) est libre si et seulement si : Si il existe λ1 , . . . , λp ∈ R tels que λ1 x1 + · · · + λp xp = 0E alors λ1 = · · · = λp = 0. Aucun vecteur de la famille n’est combinaison linéaire des autres (lorsque p > 2). Dans ce cas, on dit que les vecteurs de la famille sont linéairement indépendants. On dit que la famille (x1 , x2 , . . . , xp ) est liée si et seulement s’il existe des scalaires λ1 , λ2 , . . . , λp ∈ R qui ne sont pas tous nuls tels que λ1 x1 + · · · + λp xp = 0E c’est-à-dire si, et seulement si l’un au moins des vecteurs de la famille est une() combinaison linéaire autres vecteurs de cette famille 5 / 36 Dimensiondes des espaces vectoriels Remarque: C’est exactement la même définition (et les mêmes techniques) que dans Rn . Exemple: 1 La famille (1, X , X 2 , . . . , X n ) est une famille libre de R[X ]. En effet n P λk X k est le polynôme pour tous λ0 , λ1 , . . . , λn ∈ R, le polynôme k=0 nul si, et seulement si, tous les λk sont nuls. 2 Une famille qui contient deux vecteurs colinéaires est liée. Par exemple si x1 = kx2 (où k ∈ K), alors x1 − k.x2 + 0.x3 + · · · + 0.xn = 0E . La réciproque de ce résultat est fausse, il existe des familles liées qui ne contiennent pas de vecteurs colinéaires. () Dimension des espaces vectoriels 6 / 36 Proposition 1 Toute famille extraite d’une famille libre est libre. 2 Toute famille contenant une famille liée est liée. () Dimension des espaces vectoriels 7 / 36 Démonstration. 1 Soit (u , u , . . . , u ) une famille libre. On en extrait une famille, quitte 1 2 n à changer l’ordre des vecteurs, on peut supposer qu’on extrait (u1 , u2 , . . . , up ) avec p 6 n. Montrons que cette famille extraite est libre. Soient des scalaires λ1 , . . . , λn ∈ K tels que λ1 u1 + · · · + λp up = 0. On rajoute à cette somme 0.up+1 + 0.up+2 + · · · + 0.un . On a alors . λ1 u1 + · · · + λp up + 0.up+1 + 0.up+2 + · · · + 0.un = 0 2 La famille (u1 , u2 , . . . , un ) étant libre, tous les coefficients de l’égalité sont nuls. Donc en particulier les λ1 , . . . , λn . Donc la famille extraite est libre. Soit une famille (u1 , u2 , . . . , un ) contenant une famille liée. Quitte à changer l’ordre des vecteurs, on peut supposer que la famille (u1 , u2 , . . . , uk ) est liée, avec k 6 n. Ainsi, il existe λ1 , . . . , λk non tous nuls tels que λ1 u1 + · · · + λk uk = 0. On rajoute à cette somme 0.uk+1 + · · · + 0.un . On a alors . λ1 u1 + · · · + λk uk + 0.uk+1 + · · · + 0.un = 0 et les coefficients de cette égalité ne vectoriels sont pas tous nuls, puisque les8 / 36 () Dimension des espaces Théorème Soit F = (v1 , v2 , . . . , vp ) une famille libre. Pour tout vecteur u ∈ Vect(v1 , v2 , . . . , vp ), il existe un unique p-uplet de scalaires (λ1 , . . . , λp ) tels que u = λ1 v1 + · · · + λp vp . Autrement dit pour tous scalaires λ1 , . . . , λp et µ1 , . . . , µp , p X i=1 λi vi = p X µ i vi =⇒ ∀i ∈ [[1, p]], λi = µi . i=1 Cela signifie que la décomposition de tout vecteur u ∈ Vect(v1 , v2 , . . . , vp ) comme combinaison linéaire de la famille F est unique. () Dimension des espaces vectoriels 9 / 36 Familles génératrices Définition En toute généralité : une famille (vi )i∈I (finie ou non, I étant un ensemble d’indices) d’éléments de E est dite génératrice de E si, et seulement si, tout élément de E s’exprime comme une combinaison linéaire d’un nombre fini d’éléments de cette famille (vi )i∈I . Dans le cas particulier d’une famille finie : Une famille (v1 , v2 , . . . , vn ) de E est dite génératrice de E si, et seulement si, E = Vect(v1 , v2 , . . . , vn ) autrement dit si, et seulement si, tout élément de E s’écrit comme une combinaison linéaire des éléments v1 , v2 , . . . , vn ou encore si, et seulement si, on a : ∀u ∈ E , ∃λ1 , λ2 , . . . , λn ∈ R, u = n X λi vi . i=1 () Dimension des espaces vectoriels 10 / 36 Remarque: Si une famille est génératrice de E , il en est de même pour toutes les familles obtenues par permutation de ses éléments. Exemple: 1 2 (1, i) est une famille génératrice de C en tant que R-espace vectoriel car tout nombre complexe z s’écrit z = a.1 + b.i avec a, b ∈ R. (1, X , X 2 , . . . , X n ) est famille génératrice de Rn [X ] puisque tout polynôme de degré inférieur ou égal à n s’écrit sous la forme n X ak X k avec a0 , . . . , an ∈ R. k=0 3 La famille infinie (X i , i ∈ N) est une famille génératrice de R[X ] puisque tout polynôme est une combinaison linéaire d’un nombre fini de monômes. () Dimension des espaces vectoriels 11 / 36 Proposition Toute famille contenant une famille génératrice de E est génératrice de E . () Dimension des espaces vectoriels 12 / 36 Bases Définition Une famille (e1 , . . . , en ) de vecteurs de E est une base de E si, seulement si, elle est libre et génératrice de E . Théorème Une famille B = (e1 , . . . , en ) est une base de E si, et seulement si, pour tout vecteur x ∈ E , il existe un unique n-uplet (λ1 , . . . , λn ) ∈ Rn tel que x= n X λk ek . k=1 Le n-uplet de scalaires (λ1 , . . . , λn ) est appelé le n-uplet de composantes ou de coordonnées de x dans la base B. () Dimension des espaces vectoriels 13 / 36 Exemple: 1 (1, i) est une base du R-espace vectoriel C. Les coordonnées d’un nombre complexe dans la base (1, i) sont sa partie réelle et sa partie imaginaire. 2 Dans le plan, deux vecteurs non colinéaires forment une base. 3 Dans l’espace, trois vecteurs non coplanaires forment une base. 4 La famille (1, X , . . . , X n ) forme une base de Rn [X ]. Cette base est appelé base canonique de Rn [X ]. Les coordonnées du polynôme n P ak X k dans la base canonique de Rn [X ] sont (a0 , . . . , an ). k=0 () Dimension des espaces vectoriels 14 / 36 Plan 1 Familles libres, génératrices et bases 2 Espaces vectoriels de dimension finie 3 Sous-espaces vectoriel de dimension finie 4 Applications linéaires en dimension finie () Dimension des espaces vectoriels 15 / 36 Définition et propriété fondamentale Définition On appelle espace vectoriel de dimension finie tout espace vectoriel E possédant une famille génératrice de E formée d’un nombre fini de vecteurs. Dans le cas contraire, on dit que E est n’est pas de dimension finie. Exemple: Rn , Rn [X ] sont des espaces vectoriels de dimension finie, R[X ] n’est pas de dimension finie. () Dimension des espaces vectoriels 16 / 36 Remarque: Le cardinal d’une famille finie de vecteurs de E est le nombre de vecteurs (distincts ou non) qui la composent. Proposition Dans un espace vectoriel E de dimension finie, le cardinal de toute famille libre est inférieur ou égal au cardinal de toute famille génératrice de E . () Dimension des espaces vectoriels 17 / 36 Existence d’une base- Dimension Théorème Un espace vectoriel E de dimension finie possède au moins une base. Plus précisément, toute famille génératrice finie de E contient une base de E . Démonstration. Soit F1 = (e1 , . . . , en ) une famille génératrice finie de E . Si F1 est libre, alors c’est une base de E , sinon, l’un des vecteurs de la famille est une combinaison linéaire des autres (supposons que ce soit le cas de en , quitte à changer la numérotation des vecteurs). Dans ce cas, F2 = (e1 , . . . , en−1 ) est à nouveau une famille génératrice de E et l’on peut recommencer la discussion initiée au début de ce paragraphe. On continue ainsi à retirer des vecteurs tant que la famille Fk est génératrice et après un nombre fini d’étapes, la famille obtenue est libre, si bien que c’est une base de E . () Dimension des espaces vectoriels 18 / 36 Définition Soit E un R−espace vectoriel non réduit au vecteur nul (E 6= {0}). Si E est de dimension finie, alors toutes les bases de E ont le même nombre n d’éléments. Cet entier n est appelé la dimension de E sur R. On convient que l’espace vectoriel {0} est de dimension nulle. Démonstration. Soit B1 et B2 deux bases de E . Notons n1 le nombre d’éléments de B1 et n2 le nombre d’éléments de B2 . Comme B1 est libre et que B2 est génératrice de E , on a n1 6 n2 . Comme B2 est libre et que B1 est génératrice de E , on a n2 6 n1 . Finalement, n2 = n1 . () Dimension des espaces vectoriels 19 / 36 Exemples: 1 Rn est un espace vectoriel de dimension n sur R et la base canonique de Rn en est une base. 2 Rn [X ] est une espace vectoriel de dimension n + 1 sur R et la base canonique de Rn [X ] en est une base. 3 L’ensemble des solutions d’une équation différentielle linéaire homogène d’ordre 2 à coefficients constants forme un espace vectoriel de dimension 2. () Dimension des espaces vectoriels 20 / 36 Théorème Si E est un espace vectoriel de dimension n, alors : 1 toute famille libre a au plus n éléments. Si elle a exactement n éléments, c’est une base ; 2 toute famille génératrice de E a au moins n éléments. Si elle a exactement n éléments, c’est une base. () Dimension des espaces vectoriels 21 / 36 Théorème Soit E un espace vectoriel de dimension finie. Toute famille génératrice de E contient une base. On a même mieux : si G est une famille génératrice de E et si F est une famille libre de vecteurs de G, alors on peut compléter F avec des vecteurs de G pour obtenir une base de E . Toute famille libre peut être complétée en une base. (L99 Théorème de la base incomplète) () Dimension des espaces vectoriels 22 / 36 Plan 1 Familles libres, génératrices et bases 2 Espaces vectoriels de dimension finie 3 Sous-espaces vectoriel de dimension finie 4 Applications linéaires en dimension finie () Dimension des espaces vectoriels 23 / 36 Dimension d’un sous-espace vectoriel Théorème Soit E un R-espace vectoriel de dimension finie. Tout sous-espace vectoriel F de E est de dimension finie, et dim(F ) 6 dim(E ). De plus si dim(F ) = dim(E ) alors F = E . () Dimension des espaces vectoriels 24 / 36 Démonstration. Notons n la dimension de E . Si F = {0}, alors F est de dimension 0. Sinon, soit f1 un vecteur non nul de F . Si F est engendré par f1 , alors F est de dimension 1 car (f1 ) est alors une base de F . Sinon, soit f2 un vecteur de F non colinéaire à f1 de sorte que (f1 , f2 ) est libre. Si (f1 , f2 ) engendre F , alors F est de dimension 2. Sinon, on continue ainsi à ajouter des vecteurs à notre famille libre, jusqu’à obtenir une famille libre (f1 , . . . , fp ) pour laquelle (f1 , . . . , fp , x) est liée quel que soit x dans F . Un tel moment survient forcément, car une famille d’au moins (n + 1) éléments de F (donc de E ) est liée. La famille libre (f1 , . . . , fp ) est alors une base de F . Donc F est de dimension finie. Cette famille libre de p éléments de E se complète en une base de E d’après le théorème de la base incomplète. On en déduit : dim(F ) = p 6 n = dim(E ). Si dim(F ) = dim(E ), une base de F est une famille libre de E à n éléments : c’est aussi une base de E et donc F = E . () Dimension des espaces vectoriels 25 / 36 Corollaire Soit E un espace vectoriel de dimension finie et F et G deux sous-espaces vectoriels de E . On a F ⊂G () et dim(F ) = dim(G ) Dimension des espaces vectoriels =⇒ F = G. 26 / 36 Sous-espaces supplémentaires en dimension finie Théorème Soit E un espace vectoriel de dimension finie et F un sous-espace vectoriel de E . Il existe alors dans E un sous-espace vectoriel G tel que F et G soient supplémentaires. On a de plus : dim(E ) = dim(F ) + dim(G ). Remarque: Attention, il n’y a pas unicité du supplémentaire d’un sous-espace vectoriel. () Dimension des espaces vectoriels 27 / 36 Théorème Soit F et G deux sous-espaces vectoriels d’un espace vectoriel E de dimension finie n. 1 Si F et G sont supplémentaires, alors dim(E ) = dim(F ) + dim(G ). 2 Si on a : dim(E ) = dim(F ) + dim(G ) et F ∩ G = {0}, alors F et G sont supplémentaires. 3 Si on a : dim(E ) = dim(F ) + dim(G ) et F + G = E , alors F et G sont supplémentaires. Dans tous les cas, on obtient une base de E en réunissant une base de F et une base de G . () Dimension des espaces vectoriels 28 / 36 Exercice 1 Dans R3 , on considère G = {(x, y , z) ∈ R3 tels que x + y + z = 0} et F = Vect{(1, 1, 1)}. Montrer que E et F sont supplémentaires dans R3 . () Dimension des espaces vectoriels 29 / 36 Théorème Soit E un espace vectoriel de dimension finie et F et G deux sous-espaces vectoriels de E . On a dim(F + G ) = dim(F ) + dim(G ) − dim(F ∩ G ). Démonstration. Il suffit de compléter une base B de F ∩ G en une base BF de F et en une base BG de G . La réunion des vecteurs des bases BF et BG (où l’on élimine les doublons : les vecteurs de B) forme une base de F + G . On compte alors les vecteurs des différentes bases, et l’on obtient le résultat. () Dimension des espaces vectoriels 30 / 36 Plan 1 Familles libres, génératrices et bases 2 Espaces vectoriels de dimension finie 3 Sous-espaces vectoriel de dimension finie 4 Applications linéaires en dimension finie () Dimension des espaces vectoriels 31 / 36 Dans ce chapitre, E et F sont deux R-espaces vectoriels, l’espace E étant supposé de dimension finie (F peut ne pas être de dimension finie). () Dimension des espaces vectoriels 32 / 36 Image d’une base Théorème Soit B = (e1 , . . . , en ) une base de E et (f1 , . . . , fn ) une famille de vecteurs de F . Il existe une unique application linéaire u de E dans F telle que ∀k ∈ [[1, n]], u(ek ) = fk . Autrement dit une application linéaire est entièrement caractérisée par l’image d’une base de l’espace vectoriel de départ. () Dimension des espaces vectoriels 33 / 36 Corollaire Soit B = (e1 , . . . , en ) une base de E et u et v deux applications linéaires de E dans F . Si l’on a : ∀k ∈ [[1, n]], u(ek ) = v (ek ), alors les applications u et v sont égales (∀x ∈ E , u(x) = v (x)). Autrement dit, deux applications linéaires qui coı̈ncident sur une base de E sont égales. () Dimension des espaces vectoriels 34 / 36 Théorème (dit du rang) Théorème Soit E un R-espace vectoriel de dimension finie et F un espace vectoriel quelconque. Soit f une application linéaire de E dans F . On a : dim(Ker(f )) + dim(Im(f )) = dim(E ) Remarque: dim(Im(f )) est le rang de f . () Dimension des espaces vectoriels 35 / 36 Théorème Soit E et F deux espaces vectoriels de dimension finie et f une application linéaire de E vers F . 1 On a : dim(Im(f )) = dim(F ) si et seulement si f est surjective. 2 Si les espaces E et F sont de même dimension n, alors on a les équivalences suivantes : f est un isomorphisme ⇐⇒ dim(Im(f )) = n ⇐⇒ dim(Ker(f )) = 0. () Dimension des espaces vectoriels 36 / 36 Corollaire Soit E et F deux espaces vectoriels de même dimension finie n et f une application linéaire de E vers F . On a les équivalences : f est bijective ⇐⇒ f est injective ⇐⇒ f est surjective. En particulier, si f est injective ou surjective, alors f est bijective. Remarque: Si on prend F = E (endomorphisme), alors ça marche aussi. Ce résultat n’est pas vrai pour un endomorphisme d’un espace vectoriel de dimension qui n’est pas de dimension finie. () Dimension des espaces vectoriels 37 / 36 Par exemple, l’endomorphisme ϕ : R[X ] → R[X ] de l’espace vectoriel P 7→ P 0 R[X ], qui n’est pas de dimension finie est surjectif (car pour tout polynôme Q de R[X ], on peut trouver un polynôme P tel que P 0 = Q), mais il n’est pas injectif (en effet, l’image par ϕ de tout polynôme constant est le polynôme nul). () Dimension des espaces vectoriels 38 / 36