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Lettre mensuelle n°10, novembre 2013
Il est encore temps de réaliser que le monde a changé
La politique
budgétaire dans
tous ses états
Maillons forts
Les rigueurs de la
transition en Chine
Maillons faibles
Un calme trompeur
L’approche de Noël est propice aux exercices d’introspection, toujours salutaires pour
bonifier l’expérience d’une année écoulée, et, occasionnellement, sources d’enseignements
pour l’avenir. On se contentera ici d’aborder les aspects relatifs au contexte économique qui,
une fois n’est pas coutume, pourraient bien être décisifs en 2014.
Tout d’abord, un rapide bilan. Les Etats-Unis nous ont appris qu’un gouvernement
impuissant face à un parlement responsable fiscalement peut engendrer un ajustement
budgétaire presque parfait, tant sur le plan de son ampleur que de son timing. Les Etats-Unis
auront vu leur déficit public se réduire en un an de 3,5% du PIB avec une croissance qui
devrait rester honorable autour de 2% en 2013. Globalement, les pays de la zone euro auront
su maintenir le cap dans l’adversité pour sortir de la phase la plus difficile de leur ajustement.
Le Japon aura rappelé qu’un pays ayant un déficit public de 10% du PIB peut faire une relance
budgétaire de grande ampleur si celle-ci est financée directement par la banque centrale. Le
parti communiste chinois aura encore une fois réussi à mettre la croissance du PIB d’un pays
de 1,3 milliards d’habitant exactement là où il l’avait prévu, il y a un an, lors d’un comité.
Enfin, le déclassement des autres pays émergents s’est confirmé, avec une moindre emprise
sur leur destin et une plus grande vulnérabilité aux conditions imposées par les pays
développés.
En 2014 et au-delà, les perspectives macro-économiques pour l'Europe et les Etats-Unis
s’avèrent solides, avec une croissance qui pourrait surprendre à la hausse dans un contexte
de politiques budgétaires plus conciliantes. Le Japon est plus difficile à appréhender, mais
l'entrée dans 2014 devrait se faire en fanfare, assurant une performance solide sur l'année,
même si un retour de bâton est possible au second semestre. Au total, les pays développés
devraient afficher une croissance en hausse l'année prochaine, mais surtout une capacité de
résistance aux chocs externes élevée. Ce sont les maillons forts de l'économie mondiale.
En décidant de se restructurer en profondeur, la Chine accepte, pour quelques années, de
croître à un rythme beaucoup plus modéré que dans la décennie passée. Bien sûr, ces
réformes devraient permettre de limiter la baisse tendancielle de croissance liée au
vieillissement, mais elles sont d'abord synonymes de moindre croissance à court terme.
L'exercice n'est d'ailleurs pas sans risque, car réformer alimente de profondes rancœurs au
sein même de l'appareil du parti unique. On peut s'attendre à ce que le parti communiste
chinois garde le contrôle de la situation, même si une rébellion de la nouvelle bourgeoisie ne
peut être totalement exclue. La Chine est entrée dans une phase de transition économique,
sociale et politique extrêmement délicate que l'irrésistible montée en puissance des moyens
de surveillance policière ne fait que révéler.
Malgré des éloignements géographiques parfois importants, les pays émergents forment
un ensemble économique de plus en plus cohérent, et pour lequel les pays développés ont
relativement perdu en importance. La globalisation des dix dernières années a surtout pris la
forme d'un approfondissement de l'intégration économique des pays émergents entre eux. Si
cela s’est avéré être une force lors la crise financière américaine de 2008 et de la crise
souveraine de la zone euro en 2011, c'est devenu un handicap majeur maintenant que son
principal moteur, la Chine, a durablement changé de stratégie. Une analyse purement cyclique
de la plupart des pays émergents conduit en outre à une probabilité de récession significative
et en hausse inexorable à partir de l'année prochaine. Ces pays sont devenus les maillons
faibles de l'économie mondiale.
Le monde sera donc constitué en 2014 d'ensembles ayant des dynamiques internes très
différentes. Ceci peut donner l'illusion d'une situation agrégée plutôt solide, les forces des uns
compensant les faiblesses des autres. Malheureusement, il en est tout à fait autrement. En
effet, ces différents blocs ont atteint des niveaux respectifs où les interactions internationales
ne joueront plus un rôle stabilisateur. Au contraire, elles alimenteront les divergences entre
blocs. La sérénité apparente de la macroéconomie mondiale n’a rien de rassurant. Des
changements marginaux dans tel ou tel bloc économique devraient avoir des conséquences
dramatiques sur les dynamiques relatives entre zones, et ce de façon d’autant plus
surprenante qu’elles iront à l’encontre des croyances établies au cours de la décennie passée.
Pour bien comprendre, il faut revenir à l’asymétrie fondamentale dans l’économie