Neutropénie – Anémie, thrombopénie – Aplasie médullaire

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PRISE EN CHARGE DE LA TOXICITE
MEDULLAIRE DE LA CHIMIOTHERAPIE
Yvan BEAUSSANT
Service d’hématologie
CHU Besançon
27/01/2012
Introduction
Chimiothérapies
Thérapies systémiques anticancéreuses :
Chimiothérapies cytotoxiques → Stress génotoxique
Ac monoclonaux, Glivec® → Interaction avec cible spécifique
Hormonothérapies, antiangiogéniques → Déprivation d’éléments vitaux
Cytokines (IL2, INF) → Immunomodulation
Chimiothérapie cytotoxiques :
Non spécifiquement anti-tumorales
Actives sur les cellules en division
par action directe sur l’ADN
Chimiothérapies
Action centrée sur l’ADN
Antimétabolites
Analogues nucléosidiques
Antifolates
Réactions chimiques (agents électrophiles
/ alkylants)
Modification de structure (intercalants)
Coupures (agents scindants)
Moutardes azotées, dérivés du platine
Nitrosurées
Inhibiteurs de topoisomérase I&II
Poisons du fuseau / antimitotiques
Inhibiteurs polymérisation tubuline
Inhibiteurs dépolymérisation tubuline
Toxicités aiguës des chimiothérapies
-Tissus à renouvellement rapide :
- Moelle Osseuse : atteinte du tissus hématopoiétique et des
cellules souches pluripotentes -> cytopénies
- Revêtement cutané: alopécie, diminution de la pilosité
-Tube digestif: mucite, diarrhée
-Tissu gonadique: stérilité
-Dépendent :
- du type de chimiothérapie (produits, fréquence, dose)
- du terrain du patient (TTT antérieur, comorbidités)
HEMATOPOÏESE
ELEMENTS FIGURES DU SANG
Production quotidienne
Plq : 500 x109
GR : 200 x 109
PNN : 50 x109
Myélotoxicité : généralités
Le plus souvent = LEUCONEUTROPENIE
Parfois associée à une THROMBOPENIE
Anémie retardée car durée de vie des GR plus longue
Nadir entre 8 et 15 jours
Le plus souvent réversible (de 5 à 10j)
Myélotoxicité importante :
Alkylants (sauf cisplatine), inhibiteurs de topo-isomérase, taxanes
Myélotoxicité faible ou nulle :
Vincristine, bléomycine, L-asparaginase
Neutropénie fébrile
mais peut être prolongée
CYTOPENIES
CHIMIOINDUITES
DEFINITIONS des cytopénies
Anémie : Hb < 12 g/dl chez la femme et 13 g/dl chez l’homme
Thrombopénie : plq < 150 G/L
Leucopénie : GB < 4G/L
ou 150 000 / mm3
ou 4000 / mm3
Neutropénie : PNN < 1,5 G/L
Agranulocytose : PNN < 0,5 G/L
Lymphopénie : Ly < 1 G/L
Pancytopénie : atteinte des 3 lignées
Aplasie : pancytopénie d’origine médullaire ou « centrale »
Score OMS: évaluation de sévérité
Toxicité
Grade 0
Grade 1
Grade 2
Grade 3
Grade 4
Hb (g/dl)
> 11
9,5-10,9
8,0-9,4
6,5-7,9
<6,5
GB (/mm3)
>4000
3000-3900
2000-2900
1000-1900
<1000
PNN(/mm3)
>2000
1500-1900
1000-1400
500-1000
<500
pl(/mm3)
>100000
75000-99000
50000-74000
<50000->25000
25000
Hémorragie
Absence
pétéchies
X
XX
XXX
Complications graves
Pronostic vital engagé
Leuconeutropénie : infections graves, choc septique
Thrombopénie : hémorragie cérébrale ou autre
hémorragie interne
Anémie : angor fonctionnel, infarctus du myocarde, AVC
ischémique
LEUCONEUTROPENIE
Leuconeutropénie
Leucopénie : GB < 4G/L
ou 4000 / mm3
Neutropénie: PNN < 1,5 G/L
Agranulocytose : PNN < 0,5 G/L
Lymphopénie: Ly < 1 G/L
Risque +++ = Aplasie fébrile
= PNN < 0,5 G/L (ou attendus < 0,5 G/L)
+ Fièvre > 38,3 °C ou > 38° C à 2 reprises, à 1 heure d’intervalle
Parfois hypothermie (BGN)
Leuconeutropénie
Risque infectieux selon le nombre de PNN
< à 0.5G/L: risque x par 2.5
< à 0,1G/L: risque x par 10
5
Toutes infections
4
Infections sévères
3
Bactériémies
2
1
0
0
100
500
1000
Bodey, Ann Int Med,1966;64:328-40
Aplasie fébrile
Fréquent
Répété
Tumeurs solides: 3% ont au moins 2 épisodes Cullen et al NEJM 2005
Leucémies/greffe: 15% des patients Akova et al CID 2005
Rarement documenté
Tumeurs solides: 13% des patients et 3,6% des cycles Cullen et al NEJM 2005
Leucémies/greffe: 70% des patients Bucaneve et al NEJM 2005
Tumeurs solides: 5-7% Cullen et al NEJM 2005
Leucémies/greffe: 22-39% des infections Bucaneve et al NEJM 2005
Grave
Mortalité 4% chez l’adulte
Hann, Br J Haematol 1997
Aplasie fébrile
10
30
60
BGN
CG+
Pseudomonas aeruginosa
Fièvre d'origine inconue, ni foyer ni
germe
Fièvre microbiologiquement
documentée, avec ou sans foyer
Fièvre cliniquement documentée :
foyer sans germe
Pourquoi une telle modification de l’épidémiologie des infections ?
Plus de cathéters veineux centraux ou PAC
Chimiothérapie plus intensives : mucites
Pression de sélection des C3G et quinolones
Décontamination digestive
Aplasie fébrile
Facteurs de risque :
Compétence immunologique
Neutropénie : profondeur et durée
Immunosuppresseurs
Cytotoxiques
Anticorps monoclonaux
Corticoides
Immunosuppresseurs (allogreffe)
GVH
Irradiation corporelle totale
Comorbidités
Altération des barrières:
Muqueuses :
agents cytotoxiques: Mucite
irradiation
altération de la flore
Dispositifs invasifs : cathéter
Risque infectieux selon le déficit
immunitaire
Immunité cellulaire : taux de lymphocytes T CD4
(VIH, greffé de moelle, chimio lymphopéniante)
infections fongiques (aspergillose, candidose, mucormycose)
Virales (CMV)
bactéries intracellulaires (legionellose, tuberculose)
Parasite : toxoplasmose, pneumocystose
Immunité humorale : taux de lymphocytes B (Ac)
(myélome, splénectomisé, asplénie, greffé):
germes encapsulés : pneumocoque, méningocoque, haemophilus
virus
Risque infectieux selon la durée de
la neutropénie
Courte (<7 jours) :
Prolongée (>7 jours) :
BGN : E. Coli, pyocyanique
Idem
Tube digestif (diarrhée)
Urines
+
COCCI gram +
ORL (mucite) : streptocoque
Tube digestif : entérocoque
Peau : KT centraux : staphylocoque
coag neg,
staph aureus (doré)
Poumon : pneumocoque
HSV (mucite)
Candidose (mucite, antibiothérapie)
Infections fongiques (aspergillose)
PRISE EN CHARGE DU
RISQUE INFECTIEUX
Prise en charge préventive
Eviter le contact avec les enfants ou adultes infectés (grippe,
gastro…)
Limiter le nombre de visite
Eviter les sorties dans les lieux publics
Hygiène bucco dentaires et lavage des mains
Eviter toutes les blessures (même anodines), si elles existent ne
pas les négliger
Renforcer les règles d’hygiènes (s’il y a dans l’environnement des
animaux et des plantes vertes).
Respecter les règles d’hygiène alimentaire (cuisson des aliments au
dernier moment et éviter les restes)
Antibioprophylaxie selon indication : oracilline, bactrim (greffe, splénectomie..)
Alimentation protégée : Aliments à éviter
Produits laitiers : tout ce qui n’est pas pasteurisé !
Viande, poisson, œufs :
viandes crues, saignantes, peu cuites
Œufs crus ou peu cuits (coque)
Abats, Charcuteries froides, sauf conserves et jambon emballé sous vide
Plats cuisinés du commerce, sauf surgelés et conserves
Poissons crus et poissons fumés
Fruits de mer, coquillages
Fruits et légumes :
Fromages au lait cru, fromages à la coupe, fromages à moisissure (Roquefort, Bleu …)
Lait cru, crème crue
Desserts lactés, sauf industriels
Légumes crus (y compris ail, oignon, persil)
Fruits qui ne s’épluchent pas
Divers :
Mayonnaise maison
Pâtisseries fraîches du commerce
APLASIE fébrile
=
URGENCE THERAPEUTIQUE
Aplasie fébrile : Prise en charge
AMBULATOIRE
= faible risque
neutropénie courte (<7j)
Fièvre isolée (examen au domicile
par MT)
EG conservé
Pas d’ATCD infectieux grave
Patient non isolé
Complication dans 5% des cas
HOSPITALISATION
= haut risque
neutropénie profonde et
prolongée (>7j)
Fièvre > 48h malgré ATB
EG altéré, diurèse++
Mucite
Patient isolé
ATCD infectieux grave ou
hospitalisation récente
Patho néoplasique active
Type de chimiothérapie
Complication dans 34% des cas
Prise en charge = TTT probabiliste et URGENT
Patient à domicile:
Germes communautaires
(entérobacteries, cocci)
double ATB orale
Patient hospitalisé:
Germes hospitaliers et sélectionnés
(Cocci, pseudomonas aeruginosa)
double ATB IV après prélèvements
microbiologiques
Réévaluation de l’antibio thérapie à 48h00
Prise en charge hospitalière de la neutropénie fébrile
ο Examen clinique complet, recherche signes de gravité
ο marbrures, hypotension, tachycardie, désaturation, trouble
neurologiques
ο Bilan biologique standard
ο NFS, plaquettes
ο CRP
ο Prélèvements bactériologiques :
ο hémocultures KT central et périphérique, répétées aérobies,
anaérobies, +/-fongiques,
ο BU +/-CBU,
ο Radiographie pulmonaire
Prise en charge hospitalière de la neutropénie fébrile
ο Antibiothérapie EN URGENCE
ο Après les prélèvements microbiologiques
ο Réadaptation du traitement ATB en fonction de :
ο l’état clinique
ο du résultat des prélèvements infectieux
ο Augmentation du remplissage par sérum physiologique ou
macromolécules
ο si hypoTA
Prise en charge hospitalière de la neutropénie fébrile
ο Chambre individuelle
ο Isolement protecteur
ο Isolement septique si germe multi-résistant
ο Protections (masques, surblouse pour le personnel),
alimentation bien cuite voire stérile (aplasie prolongée)
ο Attention aux stéthoscopes (survie Gram- 4 à 6H /
Gram+ > 18H)
ο Traitement antiviral (aciclovir si mucite) et
antifongique
ο Support transfusionnel
THROMBOPENIE
THROMBOPENIE
Risque d’hémorragie spontanée :
Plaquettes < 20G/l
CUTANE
MUQUEUX
PURPURA, épistaxis,
gingivorragies
Plaquettes < 10 G/l
VISCERAL : digestive et cérébrale +++
Syndrome hémorragique cutanéo-muqueux
Pétéchies
Bulles
hémorragiques
endobuccales
Ecchymose
HEMORRAGIE VISCERALE
Hématurie
Hématome cérébral
Digestive
Hémorragie rétinienne
→ le pronostic vital peut être engagé
PRISE EN CHARGE DE
LA THROMBOPENIE
Prise en charge d’une thrombopénie
Risque hémorragique
<
50 G/L
Risque vital
<
6 - 10 G/L
Seuil chirurgical
Gestes à éviter si la thrombopénie est inférieure à 50 G/L :
Injection intramusculaire, GAZ du SANG
Biopsies percutanées
Toute intervention chirurgicale
Ponction lombaire
Gestes à éviter si la thrombopénie est inférieure à 20 G/L :
Prise de température rectale
Ponction pleurale
Prise en charge d’une thrombopénie
Rôle de l’infirmier(e)
Vigilance en cas de risque hémorragique
peau et muqueuses (jambes, bouche), état neurologique, voie
centrale
Education thérapeutique et conseils au patient :
Gingivorragie : brosse souple, bains de bouche
Epistaxis : position assise, narine comprimée avec pouce.
Contacter un médecin si prolongée.
Eviter traumatismes ou plaies : pas de sport violent, rasoir
électrique
Pas de prise de température rectale
En cas de troubles visuels ou du comportement après un choc :
consulter en urgence
ANEMIE
ANEMIE
Problème très fréquent en onco-hématologie :
30 % à 40% des patients anémiques avant tout traitement
54 % des patients après 2 cures
Toxicité plutôt chronique, d’apparition retardée,
souvent durable et d’aggravation progressive
Altération de la qualité de vie ++++
ANEMIE
Signes fonctionnels
Asthénie
Dyspnée
Douleur thoracique
Palpitations
Céphalées, vertiges, acouphènes
Anorexie
Signes cliniques
Pâleur
Tachycardie
Hypotension artérielle
Souffle cardiaque
PRISE EN CHARGE DE
l’ANEMIE
Prise en charge de l’anémie
Préventive :
Surveillance biologique
Erythropoïétines (EPO) recombinantes +/- supplémentation
martiale
Voie sous-cutanée
1 fois par semaine à 1 fois / 3 semaines selon produit
Ordonnances de médicaments d’exception
Prise en charge d’une anémie
Prise en charge curative:
transfusion isogroupe, isorhésus, phénotypée, +/- (irradiés, CMV
compatiblisés)
Repos
Oxygénothérapie 1 à 2 l/min en attente de la transfusion si mal
supportée
Prise en charge de l’anémie
10< Hb < 12 g/dl
8 < Hb < 10 g/dl
Hb < 8 g/dl
EPO
Nécessité d’une
correction rapide ??
non
oui
Transfusion
érythrocytaire
Objectif : Hb>8g/dl si pas de comorbidités
Hb>10g/dl si ATD cardiaques
Rôle des soins infirmiers
Évaluer :
le degré de gravité de l’anémie : TA, FC, pâleur, hypotension
artérielle, douleur thoracique, confusion
L’asthénie
les besoins d’aide pour la vie quotidienne (ne pas hésiter à
faire appel à l’assistante sociale)
Éducation thérapeutique et conseils aux patients :
Ne pas minimiser les symptômes
Respecter les prescriptions de bilans sanguins
Adapter son activité
Conclusion
La toxicité hématologique est la plus fréquente des
toxicités aiguës des agents anti-cancéreux
Elle atteint les 3 lignées médullaires (PNN > Plq > GR)
Le rôle des soins infirmiers est primordial :
Information
Prévention
Surveillance
Soutien
Information
Du patient et de sa famille
Risques de la chimiothérapie
Moyens de prévention
Hygiène renforcée
Observance
Signes d’alerte et réflexes à avoir
Prise de la température
Appel du médecin
Dispositifs d’aide au domicile (assistante sociale)
Des autres personnels paramédicaux
Traitement envisagé et risques encourus
Prévention
Infections
Hygiène et asepsie +++ Mesures de protections
Isolement
Alimentation protégée
Hémorragies
Gestes à éviter en cas de thrombopénie
Surveillance
Signes cliniques et signes de gravité : donner l’alarme
Interrogatoire du patient
Constantes, diurèse, selles
État cutané et des muqueuses
Biologique sur prescription médicale
Voies veineuses
alimentation
Vérification
Respect des règles d’isolement et d’hygiène
De la bonne information de tous les intervenants
Transmission dans le dossier de soins infirmiers
Soutien
Rôle prépondérant de l’information et de l’écoute
Compréhension de la maladie et des traitements
Acceptation des soins
Soulagement
Besoins objectifs mais aussi subjectifs
Liés au ressenti (besoin relationnel ou psychologique…)
Pas forcément en relation avec la pathologie
Pas toujours exprimés
Souvent mal évalués faute de temps, d’envie ou de
formation des professionnels
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