L’exponentielle de matrices (1) Résumé Il s’agit d’un thème de travail conséquent. Commençons déjà par revoir quelques éléments de bases : il faut savoir avec précision quel résultat on utilise pour justifier tel ou tel point. On suit ici principalement [Dantzer 333, 266, 297]. Ici, K = R ou C (mais pourquoi cette restriction ?) 1 Sur la définition Définition On appelle exponentielle l’application P An exp : A ∈ Mn (K) 7−→ +∞ n=0 n! ∈ Mn (K). Pourquoi la série converge ? - Pour quelle topologie ? Bien que toutes les normes sur Mn (K) sont équivalentes, on ne peut pas choisir n’importe laquelle : on a besoin qu’elle soit sous-multiplicative pour pouvoir faire des majorations. Par exemple, on prend la norme |||A||| = SupkXk=1 kAXk subordonnée à une norme quelconque k.k sur Kn . n n P+∞ An - Maintenant, comme pour tout A ∈ Mn (K) An! ≤ |||A||| , n=0 n! est n! une série absolument convergente à valeurs dans un espace de Banach, elle est donc convergente. - On a utilisé le résultat suivant : P Soit (un ) une suite à valeurs dans un Banach. Si un est absolument convergente, alors elle est convergente. 2 Une propriété algébrique 1 Proposition Si A et B sont deux éléments de Mn (K) qui commutent, alors exp(A + B) = exp(A)exp(B). Et en particulier : Pour toute matrice A de Mn (K), exp(A) est inversible (et son inverse est exp(-A)). 2 démonstrations Une 1e démonstration consiste à prendre le produit de Cauchy des séries P+∞ An P+∞ B n n=0 n! et n=0 n! et on vérifie immédiatement grâce à la formule du binôme (possible car A et B commutent) qu’il s’agit de exp(A+B). On a utilisé le théorème suivant qui n’est pas négligeable (p253) : P P Soient un et vn deux séries à valeurs dans une algèbre de Banach. Si P elles sont absolument convergentes, alors leur produit de Cauchy wn est aussi absolument convergente et P P P wn = ( un ) ( vn ). On peut s’en passer en montrant à la main que exp(A)exp(B) − exp(A + k Pn Ai Pn Pn (A+B) Bj B) = 0, en montrant que la suite ∆n = − i=0 i! j=0 j! k=0 k! tend vers 0, grâce à la formule du binôme et de simples majorations [Gdg 183]. peut être fausse pour Remarque : si A et B ne commutent pas, l’égalité 1 0 0 1 et B = ). n≥2 (prendre par exemple en dimension 2 A = 0 0 0 0 3 3.1 Régularité Continuité Proposition L’application exponentielle est continue sur Mn (K). 2 démonstration n A La série +∞ n=0 n! converge normalement sur la boule ouverte B(0,R) de Mn (K), donc uniformément : exp est continue sur B(0,R), puis sur S R>0 B(0, R) = Mn (K). P On a utilisé les résultats suivants (p289, 290) : - Soit (fn ) une suite de fonctions définies sur un ensemble X à valeurs dans un Banach F. P Si la série fn converge normalement sur X, alors elle converge uniformément sur X. - Soit (fn ) une suite de fonctions définies et continues sur un espace méP trique E à valeurs dans un evn F. Si fn converge uniformément sur E, alors la somme est continue sur E. 3.2 Différentiabilité Proposition L’application exponentielle est de classe C 1 sur Mn (K). démonstration (à la main) [TT1 MP 830] * Montrons d’abord qu’elle est différentiable. P n 1 n Soit U et H dans Mn (K). On a exp(U +H)−exp(U ) = +∞ n=1 n! ((U + H) − U ). On écrit ((U + H)n − U n ) sous la forme Ln (H) + Rn (H) avec Ln (H) = Pn i=1 U...U HU...U qui ne contient qu’un seul H à la i-ème place et Rn (H) est une somme de produits de n facteurs contenant au moins deux H. On montre facilement que P 1 → +∞ n=1 n! Ln (H) est absolument convergente, et définit donc un endomorphisme de Mn (K) P 1 → +∞ n=1 n! Rn (H) est absolument convergente et un petit o de ||H|| (à l’aide de la majoration ||Rn (H)|| ≤ (||U || + ||H||)n − ||U ||n − n ||U ||n−1 ||H||). Ainsi exp est différentiable en U et D(exp)U (H) = 3 P+∞ 1 Pn n=1 n! ( i=1 U...U HU...U ). * Reste à montrer que pour tout H, U 7−→ D (exp)U (H) est continue : on voit immédiatement que cette série converge normalement sur toute boule fermée de Mn (K). Remarques * On retiendra en particulier que l’exponentielle est différentiable en 0 et D(exp)0 = Id ; la démo est bien sûr plus immédiate dans ce cas. * On peut se demander s’il n’y aurait pas un résultat général qui montre qu’une série d’un evn est C 1 . On a le résultat suivant sur les suites de fonctions différentiables (qui n’est pas explicitement au programme) : Soient E et F deux evn, U un ouvert de E et fk : U → F une suite d’applications différentiables sur U. On suppose que : (i) les fk convergent simplement sur U ; (ii) les différentielles Dfk convergent uniformément sur U. Alors l’application lim fk est différentiable sur U et D (lim fk ) = lim (Dfk ). Si les fk sont de classe C 1 sur U, alors lim fk est aussi C 1 . [Rouvière 107] Notons que ce résultat ne simplifie pas vraiment le travail car il faut tout de même montrer le caractère C 1 des fonctions mis en jeu, ce qui revient à faire les mêmes manip que précédemment. * L’exponentielle est même C ∞ ... *************** 4