Les solutions qui apparaissent par les questions posées en droit constitutionnel sont le résultat d’une
démarche idéologique : droite/gauche, progrès/réaction, optimisme/pessimisme. Toutefois les pensées
politiques sont nuancées et complexes, et pas simplement binaires.
Une constitution se construit par rapport à d’autres constitutions. C’est une différence marquée par
rapport au droit administratif. Ce lien entre les constitutions est frappant. La constitution n’est souvent
qu’une reprise d’une constitution plus ancienne avec un certain nombre d’adaptations mineures.
Constitution du 14 janvier 1952 : cette constitution est très largement inspirée par le modèle de la
constitution consulaire de l’an VIII. Louis-Napoléon Bonaparte, dans son appel au peuple, souligne
que « le système créé par le Premier consul a déjà donné à la France le repos et la sécurité. Il les
garantirait encore. Telle est ma conviction profonde. Si vous la partagez, déclarez-le par le suffrage. »
Malgré cette filiation avouée, il y a des aménagements. Par exemple, la saisine pour le contrôle de
constitutionnalité des lois avec comme organe principal le Sénat. Sous Napoléon Bonaparte, c’était le
sénat conservateur. Ici, c’est la simple dénomination qui change. Ce changement sémantique
s’explique par la connotation idéologique qu’a acquise le mot de « conservateur ». Sous Napoléon
Bonaparte, « conservateur » n’avait qu’une définition technique. La saisine est automatique, alors que
sous Napoléon Bonaparte elle était difficile.
Toutes nos constitutions françaises s’inspirent de modèles français ou étrangers déjà pratiqués. La
Charte de 1814 renvoie à la fois au modèle anglais et à l’Ancien régime. La Charte de 1830 renvoie à
celle de 1814. La constitution de 1848 se rattache à la fois à la constitution de 1791 et à celle de 1793.
Les lois constitutionnelles de 1875 s’inspirent du modèle anglais et de la charte de 1830.
Chaque modèle constitutionnel doit être replacé dans une continuité, par ses éléments positifs et ses
éléments négatifs.
La constitution de la Vème République ne déroge pas à la règle : en négatif à la IIIème et IVème
républiques ainsi que le souvenir du gouvernement de Vichy, la constitution de 1848 et le coup d’Etat
du 2 décembre 1851.
- Continuité de l’inspiration
- Continuité de la formulation
La constitution de 1852, dans son article 1er, renvoie aux « grands principes proclamés en 1789 qui
sont la base du droit public des Français ». Dans le préambule de 1946 et de 1958, idem : « le peuple
français réaffirme solennellement les droits et libertés de l’homme et du citoyen consacrés par la
déclaration des droits de 1789 ».
La notion de continuité constitutionnelle est fondamentale et propre à la matière. Le droit politique est
sensible à son environnement, dans sa pérennité et dans sa mise en œuvre. Cette sensibilité explique
l’instabilité du droit constitutionnel.
La III ème République (1875-1940) va évoluer de manière significative au cours de son existence,
dans des directions différentes. Ce sont des facteurs politiques et électoraux qui expliquent cela. Par
exemple, la montée en puissance des républicains alors qu’à la chute de Napoléon III ils étaient
minoritaires. Ils deviennent majoritaires à la 1ère élection des membres de la chambre des députés en
1876, au sénat en 1879. Ils vont donc moduler la constitution pour que le chef d’Etat n’apparaisse pas
comme un monarque (neutralisation du droit de dissolution, crise du 16 mai 1977 avec Mac-Mahon).
Un autre phénomène très important : l’accès des masses à la vie politique. Théoriquement le suffrage