M2 Math – Topologie Alg´ebrique
(version du 17 f´evrier 2009)1
7. Triangulation des espaces quotient
Espaces topologiques quotient
Soit une relation d’´equivalence sur un ensemble X. On note eq la relation d’´equivalence sur Xengendr´e par
: c’est la plus petite relation d’´equivalence contenant au sens de l’inclusion des graphes. Pour x, y Xon
axeq ysi et seulement si x=you s’il existe un entier k1 et des ´el´ements x0,...,xkde Xtels que x0=x,
xk=yet xixi+1 ou xi+1 xipour 0 in1.
On note X/et on appelle ensemble quotient de Xpar l’ensemble des classes d’´equivalence de Xpour la
relation eq. On note πla projection XX/.
Propri´et´e universelle : Soit fune application de Xdans un ensemble Y. Il existe une application ¯
f:X/∼ → Y
telle que f=¯
fπsi et seulement si
x, xX, x xf(x) = f(x).
Un tel ¯
fest alors unique ; on l’appelle l’application induite par f.
Si Xest un espace topologique on munit l’ensemble X/de la topologie la plus fine rendant πcontinue. Ainsi
une partie FX/est ferm´ee ssi π1(F) est ferm´ee dans X.
Si fest une application continue de Xdans un espace topologique Yinduisant une application d’ensembles
¯
f:X/∼ → Y, alors ¯
fest continue.
Rappelons qu’un espace topologique Xest dit compact si de tout recouvrement ouvert de Xon peut extraire
un recouvrement fini. Xest dit epar´e si pour toute paire d’´el´ements x, y Xil existe des ouverts U, V de X
d’intersection vide tels que xUet yV. L’image d’un compact par une application continue est compact.
Si Xest epar´e, toute partie compacte de Xest ferm´ee dans X. On en d´eduit le :
Lemme 7.1 Soient Xun espace compact, Yun espace s´epar´e et f:XYune application continue surjective.
On d´efinit la relation sur Xpar xxf(x) = f(x) ; alors l’application X/∼ → Yinduite par fest un
hom´eomorphisme.
Ex. 1) On choisit pour mod`ele du cercle S1l’ensemble des nombres complexes de module 1. L’application
[0,1] S1,t7→ exp(2t) induit un hom´eomorphisme [0,1]/∼ → S1o`u est la relation sur [0,1] donn´ee par
01.
2) L’application de S1×[0,1] dans le tore S1×S1, (z, t)7→ (z, exp(2t)), induit un hom´eomorphisme (S1×
[0,1])/∼ → S1×S1o`u est la relation sur S1×[0,1] donn´ee par (z, 0) (z, 1) pour tout zS1.
3) Soit ϕ: S1S1l’application z7→ ¯z(sym´etrie par rapport `a l’axe r´eel). La bouteille de Klein est le quotient
du cylindre S1×[0,1] par la relation (z, 0) (ϕ(z),1).
4) Soit Gun groupe fini agissant sur un espace topologique X. On d´efinit la relation sur Xpar xg.x
pour tout xXet gG. On note X/G le quotient X/appel´e quotient de Xpar G. L’espace projectif
eel de dimension n,RPn, est le quotient Sn/(Z/2) o`u Z/2 agit sur Snpar la sym´etrie centrale par rapport `a 0
(antipodie).
Cas particulier : les sommes amalgam´ees
Soient X, Y, Z des espaces topologiques et f:XY,g:XZdes applications continues. On note YXZ
le quotient de la eunion disjointe YZpar la relation donn´ee par f(x)g(x) pour tout xX. L’espace
topologique YXZs’appelle la somme amalgam´ee de Yet de Zsous Xou encore la somme amalgam´ee du
diagramme YXZ. Notons (p, q) la projection YZYXZ(p:YYXZ, q :ZYXZ).
L’espace topologique YXZmuni des applications p, q erifie la propri´et´e universelle suivante :
1F.X. Dehon, [email protected]
24
Soient Tun espace topologique et p:YT,q:ZTdes applications continues telles que pf=qg
alors il existe une application continue h:YXZTet une seule v´erifiant p=hpet q=hq.
On en eduit :
Soient YXZet YXZdes diagrammes d’espaces topologiques et XX,YY,ZZ
des hom´eomorphismes tels que le diagramme
YXZ
↓ ↓
YXZ
commute ; alors l’application induite YXZYXZest un hom´eomorphisme.
Complexes simpliciaux quotient
Soient Kun complexe simplicial et une relation sur SK(l’ensemble des sommets de K). On note πla
projection SKSK/. L’ensemble form´e par les parties π(Sσ) de SK/,σecrivant K, est un complexe
simplicial abstrait. En effet π(Sσ) est un ensemble fini non vide et pour toute partie non vide Ade π(Sσ) il
existe une face τde σtel que Sτ=π1(A)Sσde sorte que π(Sτ) = A.
Rq. On n’a pas en en´eral π(Sσ)π(Sτ) = π(Sστ).
D´ef. On appelle {π(Sσ), σ K}le complexe simplicial quotient de Kpar la relation et on le note K/.
L’application π:SKSK/= (SK)/est un morphisme de complexes simpliciaux et v´erifie la propri´et´e
universelle suivante :
Pour tout application simpliciale fde Kdans un complexe simplicial Lil existe une application simpliciale
¯
f:K/∼ → Ltelle que f=¯
fπsi et seulement si s, sSK, s sf(s) = f(s). Un tel ¯
fest alors unique
; on l’appelle l’application simpliciale induite par f.
La “r´ealisation” de π,|π|:|K| → |K/ | est continue et surjective ; elle induit un hom´eomorphisme |K|/∼ →
|K/∼ |, o`u est la relation sur |K|donn´ee par xy⇔ |π|(x) = |π|(y), en vertue du lemme 7.1
Ex. Soit la relation sur S[2] donn´ee par 0 2, alors [2]/est le complexe simplicial abstrait {{¯
0,¯
1},{¯
0},{¯
1}} ≃
[1], o`u on a not´e ¯
0 la classe d’´equivalence du sommet 0 dans S[2]/, etc.
Cas particulier : sommes amalgam´ees de complexes simpliciaux
Soient K, L, M des complexes simpliciaux et f:KL,g:KMdes applications simpliciales. On note
LKMle complexe simplicial quotient (LM)/o`u est la relation sur SLM=SLSMdonn´ee par
f(s)g(s) pour tout sSK, et on l’appelle la somme amalgam´ee de Let de Msous Kou encore la somme
amalgam´ee du diagramme LKM.
Notons (p, q) la projection LMLKM(p:LLKM,q:MLKM). Le complexe simplicial
LKMmuni des deux applications simpliciales p, q erifie la propri´et´e universelle suivante :
Soit Nun complexe simplicial et p:LN,q:MNdes applications simpliciales telles que pf=qg
alors il existe une et une seule application simpliciale h:LKMNerifiant p=hpet q=hq.
Le diagramme
Kg
M
yf
y
q
Lp
LKM
induit un diagramme commutatif d’espaces topologiques et applications continues
|K||g|
→ |M|
y|f|
y|q|
|L||p|
→ |LKM|
donc une application continue h:|L| ∪|K||M| → |LKM|. Si Let Msont finis, il suffit `a cette application
d’ˆetre bijective pour qu’elle soit un hom´eomorphisme en vertue du lemme 7.1 puisque |L||K||M|est le quotient
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d’un espace compact donc est compact et puisque |LKM|est s´epar´e. On sait d´ej`a que SLSMSLKM
est surjective donc |L| ⊔ |M| → |LKM|est surjective donc ´egalement h.
Notons pour n0 et Kun complexe simplicial, K(n)le sous-complexe simplicial de Kform´e des simplexes
de dimension inf´erieure ou ´egale `a n. Une application simpliciale f:KLse restreint en une application
simpliciale K(n)L(n), laquelle induit une application d’ensembles K(n)L(n), σ 7→ f(σ)
Lemme 7.2 Les deux conditions suivantes sont ´equivalentes :
(i) L’application |L| ∪|K||M| → |LKM|est un hom´eomorphisme.
(ii) Pour chaque entier nl’application L(n)K(n)M(n)(LKM)(n)est une bijection d’ensembles.
Une condition suffisante (avec les notations de la section 5) : f:KLest injective (i.e. f:SKSLest
injective) et satur´ee (i.e. pour toute partie Ade SK, si f(A) = Sτ pour un simplexe τde Lalors A=Sσpour
un simplexe σde K) et pour tout sommet sde Lla restriction de g`a f1SσSt(s)Sσest injective (on dira
que gerifie la condition (Inj) relativement `a f).
Ex. Kest form´e du 1-simplexe {0,2}et de ses faces ; L=[2] ; f:KLest l’inclusion ; gest l’application
Kpt. Alors LKpt est isomorphe `a [1] alors que |L| ∪|K||pt|= ([0,1] [1,2])/02 est hom´eormophe au
cercle S1.fest injective et satur´ee mais gne erifie pas la condition (Inj).
Ex. 1) La triangulation du cylindre et du ruban de Moebius : Lest la triangulation d’un rectangle plein ABHG
du plan donn´ee ci-dessous (figure) ; Kest form´e de la r´eunion disjointe des 1-simplexes AB et GH et de leurs
faces ; Mest form´e du 1-simplexe AB et de ses faces. fest l’inclusion de Kdans L(fest injective et satur´ee).
A
B
C E GA
B D F H H
G
B
A
L K M
gf
Prenons pour gl’application simpliciale A, G 7→ A;B, H 7→ B. Alors gerifie la condition (Inj) relativement
`a fdonc |LKM|est hom´eomorphe `a |L| ∪|K||M| ≃ S1×[0,1] (le cylindre).
Prenons maintenant pour gl’application simpliciale A, H 7→ A;B, G 7→ B.gerifie toujours la condition
(Inj) relativement `a fdonc |LKM|est hom´eomorphe `a |L| ∪|K||M|lequel est un ruban de Moebius.
2) La bouteille de Klein : On choisit une triangulation `a hom´eomorphisme pr`es Ldu cylindre S1×[0,1] et
une triangulation Kde S1avec une application simpliciale injective f:K× {0,1} → Ltelle que la compos´ee
|K| × {0,1} ≃ |K× {0,1}| |f|
→ |L|
S1×[0,1] corresponde via l’hom´eomorphisme |K| → S1`a l’inclusion
S1× {0,1} → S1×[0,1]. (Cf la triangulation de |K| × [0,1] dans la section 6).
On choisit Kde sorte que la sym´etrie par rapport `a l’axe r´eel ϕ: S1S1(Cf l’ex 3 du paragraphe sur
les espaces topologiques quotient) corresponde via l’hom´eomorphisme |K| → S1`a une application simpliciale
φ:KK. Soient i0et i1les inclusions KK× {0,1}. On d´efinit g:K× {0,1} → Kpar gi0= idKet
gi1=φ.
≃ ≃
|L|
(id, ϕ)id×(i0,i1
)
|K×{0,1}| |K|
|f||(id, φ)|
On choisit L(contenant les deux copies de K) de sorte que fsoit satuee et gerifie la relation (Inj)
relativement `a f. Un choix possible pour Kest le bord du carr´e ABCD avec φ:A7→ A,C7→ C,B7→ D,
D7→ B(figure ci-dessous) et pour Lla triangulation du cylindre propos´ee ci-dessous
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B C D AA
E
A
B
C
D
E F G H
L K φ
Somme amalgam´ee de complexes simpliciaux et suite exacte de Mayer-Vietoris
Prop. 7.3 Soient K, L, M des complexes simpliciaux et f:KL,g:KMdes applications simpliciales.
On suppose que fest injective et que la condition (ii) du lemme 7.2 est satisfaite, alors la suite de complexes
de groupes ab´eliens
0C(K)(f,g)
C(L)C(M)(p,q)
C(LKM)0
est exacte, o`u (p, q) est la projection LMLKM.
Sous les hypoth`eses de la proposition on en d´eduit une suite exacte longue en homologie (Cf section 4) qu’on
appelle la suite exacte de Mayer-Vietoris du diagramme LKM.
Ex. Calculer l’homologie de la bouteille de Klein.
Cas particulier : quotient d’un complexe simplicial par l’action d’un groupe
Soient Gun groupe fini et Kun complexe simplicial. Une action simpliciale de Gsur Kest la donn´ee d’un
homomorphisme de groupes φde Gsur le groupe des isomorphismes (simpliciaux) de K. On a donc pour
tout gGune application simpliciale φ(g) : KKavec les relations φ(1) = idKet φ(g.g) = φ(g)φ(g).
L’application g7→ |φ(g)|est une action de Gsur l’espace topologique |K|.
On note K/G le quotient de Kpour la relation sur SKdonn´ee par sφ(g)(s) pour tout sSKet tout
gG. La projection KK/G induit une application continue surjective |K| → |K/G|invariante par l’action
de G, donc une application continue |K|/G → |K/G|. Comme pour les sommes amalgam´ees, si Kest fini, il
suffit `a cette application d’ˆetre bijective pour ˆetre un hom´eomorphisme. (On sait ej`a qu’elle est surjective.)
Lemme 7.4 Les deux conditions suivantes sont ´equivalentes :
(i) L’application |K|/G → |K/G|est un hom´eomorphisme.
(ii) Pour chaque entier nl’application K(n)/G (K/G)(n)est une bijection d’ensembles.
Une condition suffisante : Pour tout sommet sSKet tout gG, St(s)St(φ(g)(s)) = .
Ex. Triangulation du plan projectif r´eel RP2= S2/(Z/2) :
1) On choisit une triangulation Lde la sph`ere S2avec un automorphisme simplicial φ:LLdont la r´ealisation
|φ|s’identifie `a l’antipodie S2S2(en particulier φφ= idL) et erifiant la condition suffisante ci-dessus.
Pour cela on peut ecrire la sph`ere S2comme la eunion de deux h´emisph`eres coll´es le long de l’´equateur S1.
2) RP2est hom´eomorphe `a la eunion d’un disque D2et du ruban de Moebius coll´es le long de leur bord S1.
3) RP2est hom´eomorphe `a la somme amalgam´ee D2f
S1π
S1/(Z/2) S1o`u fest l’inclusion de S1comme
bord du disque et o`u πest la projection de S1sur son quotient par l’action par antipodie de Z/2.
Construire une triangulation suivant chaque programme (1) (2) et (3).
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