Le paradoxe de Zenon ou comment la notion d`infini vint aux Grecs

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Université en Ligne
Mathématiques
Annette Decomps
Université Pierre et Marie Curie
Séries à termes réels ou complexes
Introduction
1. Définitions et théorèmes généraux
1.1. Définitions
1.2. Exemples
1.3. Condition nécessaire de convergence
1.4. Propriétés de linéarité
1.5. Critère de Cauchy pour les séries
1.6. Convergence absolue
2. Séries à termes positifs. Règles de convergence absolue
2.1. Critère de convergence
2.2. Théorème de comparaison
2.3. Comparaison à une série géométrique : règles de d’Alembert et de Cauchy
2.4. Séries de Riemann. Conséquences
3. Propriétés des séries absolument convergentes
3.1. Produit de deux séries absolument convergentes
3.2. Séries commutativement convergentes
4. Critères de semi-convergence
4.1. Théorème des séries alternées
4.2. Théorème d’Abel
5. Intégrales impropres et séries
5.1. Théorème général
5.2. Cas des fonctions positives
5.3. Cas des fonctions positives décroissantes
5.4. Séries de Bertrand
6. Calcul approché de la somme d’une série
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6.1. Cas de calculs exacts
6.2. Méthode générale
6.3. Séries satisfaisant aux hypothèses du théorème des séries alternées
6.4. Séries à convergence géométrique
6.5. Séries comparables à des intégrales impropres
2
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Introduction : le paradoxe de Zénon ou comment la notion d’infini vint aux Grecs
Dans la seconde moitié du Ve siècle avant J.C. les Grecs commençaient à entrevoir les notions
d’infini et de continu opposées à celles de fini et de discret moins abstraites. Le paradoxe du
coureur de Zénon illustre leurs difficultés à formuler ces notions qui ne seront correctement
définies qu’au… XIXe siècle.
Un coureur part d’un point A pour arriver à un point B à une distance d de A. Avant d’arriver
en B, il doit parcourir la distance d/2 et arriver en C1, milieu de AB, puis en C2 milieu de C1B
et ainsi de suite. Conclusion : le coureur n’arrivera jamais en B.
Figure 1 avec animation
Que faisait Zénon mathématiquement parlant ? Il considérait la somme
2
3
n
1 ⎛ 1⎞
⎛ 1⎞
⎛ 1⎞
+
+
+ ... +
,
⎝ 2⎠
⎝ 2⎠
2 ⎝ 2⎠
1
⎛
1− n ⎞
1⎜
2 ⎟ = 1 − 1 . Puis il prenait des valeurs de n de plus en plus grandes. Ainsi la
qui vaut
2n
2 ⎜ 1− 1 ⎟
⎝
2 ⎠
somme comportait de plus en plus de termes, mais la valeur des termes ajoutés, quand n
augmentait, était de plus en plus petite. Le paradoxe tenait en ce que, comme ses
contemporains, Zénon ne pouvait concevoir qu’une somme infinie de quantités de plus en
plus petites puisse être égale à une grandeur finie. En fait, comme Monsieur Jourdain faisait
de la prose sans le savoir, Zénon considérait mentalement la série géométrique de raison 1/2,
dont la somme vaut 1. L’expérience lui disait qu’elle vaut 1, mais il ne pouvait le concevoir.
On retrouve souvent dans la vie pratique cette série géométrique de raison 1/2, ainsi dans ce
problème de gastronomie élémentaire bien connu.
J’achète une tarte
-
le premier jour je mange la moitié soit 1/2 tarte,
-
le second jour je mange la moitié de ce qui reste soit (1/2).(1/2)=1/4 tarte,
-
le troisième jour je mange la moitié de ce qui reste soit (1/2).(1/4)=1/8 tarte.
2
3
1 ⎛ 1⎞
⎛ 1⎞
⎛ 1⎞
Au bout de n jours j’ai donc mangé
+ ⎝ ⎠ + ⎝ ⎠ + ... + ⎝ ⎠
2
2
2
2
n
tarte, soit
3
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1
⎛
1− n ⎞
1⎜
2 ⎟ = 1 − 1 tarte.
2 ⎜ 1− 1 ⎟
2n
⎝
2 ⎠
Figure 2 avec animation
Comme dit Woody Allen, l’éternité c’est long surtout à la fin, mais j’aurai alors mangé toute
la tarte.
Dans les deux cas, on a donné un sens à une somme d’un nombre infini de nombres :
2
3
n
1 ⎛ 1⎞
⎛ 1⎞
⎛ 1⎞
+
+
+ ... +
+ ... = 1.
⎝ 2⎠
⎝ 2⎠
2 ⎝ 2⎠
Le problème général schématisé dans ces deux exemples est le suivant :
peut-on donner un sens à une somme d’un nombre infini de termes ?
C’est l’objet de ce chapitre dans lequel on considère des suites (un ) dont les termes sont des
nombres, réels ou complexes, (suites numériques). Dans les chapitres suivants, nous
considèrerons des éléments de certains espaces vectoriels, en particulier des espaces de
fonctions. Dans tous les cas, on cherche à quelles conditions on peut donner un sens à
l’expression
+∞
n
n= 0
k =0
∑ un . On associe pour cela à la suite (un ) la suite (sn ) définie par sn = ∑ uk ; on
cherche alors des conditions, en général suffisantes, sur la suite (un ) pour que la suite (sn ) soit
convergente. Lorsque la suite (sn ) est convergente, on peut se demander si les propriétés de
commutativité et d’associativité des sommes finies s’étendent à des sommes comportant un
nombre infini de termes.
L’étude des séries joue un rôle fondamental en analyse : les séries réelles permettent de
construire des nombres comme e qui ne sont ni rationnels ni même algébriques (un nombre
algébrique est un nombre qui est racine d’une équation algébrique P(x) = 0 , où P est un
polynôme à coefficients entiers) et d’en calculer des valeurs approchées. Les séries de
fonctions conduisent à définir de nouvelles fonctions. Les séries entières et les séries de
Fourier, en particulier, sont à la base d’une partie importante de l’analyse : l’analyse
harmonique.
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1. Définitions et théorèmes généraux
1.1. Définitions
Définition. Série convergente, série divergente. Soit (un ) une suite de nombres réels ou
complexes, et, pour tout n ∈N , soit
n
sn = u0 + u1 + ... + un = ∑ uk ,
k=0
la somme des n+1 premiers termes de cette suite.
Si la suite (sn ) est convergente, on dit que la série de terme général un (ou série
convergente. La limite, notée s, de la suite (sn ) est la somme de la série
∑u
n
∑u
n
) est
. On écrit
+∞
alors : s = ∑ un .
0
Si la suite (sn ) est divergente, on dit que la série de terme général un (ou série
∑u
n
) est
divergente.
Il existe donc pour les séries numériques, deux sortes de séries divergentes :
- les séries telles que la suite (sn ) n’a pas de limite,
- les séries telles que la suite (sn ) tend vers +∞ ou − ∞ .
n
Définition. Somme partielle d’ordre n. Le nombre sn = u0 + u1 + ... + un = ∑ uk est appelé
k=0
somme partielle d’ordre n de la série
∑u
n
.
Remarques
a. Du point de vue purement logique la série de terme général un s’identifie complètement
avec la suite (sn ) et le mot série ne désigne pas une notion réellement nouvelle. La théorie des
séries pourrait se ramener à celle des suites, mais du point de vue pratique, il est plus
commode d’étudier la convergence de la série à partir de la donnée de un. C’est pour une
grande part l’objet de ce chapitre.
Réciproquement, si une suite (sn ) est donnée, on peut lui associer la série de terme général
n
u0 = s0 et ∀n ≥ 1, un = sn − sn−1 . On a alors : ∀ n ≥ 0, sn = ∑ uk .
k=0
b. À propos des notations
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Si on considère une suite définie à partir d’un certain rang XX n0 XX (un )n≥ n 0 , on note alors la
∑u
série
n
ou
∑u
n
s’il n’y a pas d’ambiguïté. Un cas très fréquent est celui où la suite (un )
n≥ n 0
est définie pour n ≥ 1. C’est le cas des séries de Riemann ou séries de terme général
1
ns
(n ≥ 1, s ∈R).
+∞
Lorsqu’une telle série est convergente, on note
∑u
n
ou
∑
n= n 0
+∞
n =n 0
un sa somme (le choix de
l’une ou l’autre notation étant d’ordre typographique et non mathématique) c’est-à-dire la
⎛ n ⎞
limite de la suite ⎜ ∑ uk ⎟ quand n tend vers +∞ .
⎝ k =n 0 ⎠
De façon générale, on prendra bien soin de distinguer la série
+∞
∑u
n
∑ un de sa somme
+∞
∑u
n= 0
n
ou
qui est un nombre réel ou complexe. Ainsi si on considère les suites (un ) et (v n )
n= n 0
définies respectivement par :
n
⎛ 1⎞
∀ n ∈N, un = ⎝ ⎠ , v 0 = 2 et ∀ n ≥ 1, vn = 0 ,
2
+∞
on a
+∞
∑u = ∑v
n
n= 0
n
∑u ≠ ∑v
, mais
n
n
.
n= 0
Définition. Reste d’ordre n. Si la série
∑u
n
est convergente et de somme s, le nombre rn
défini par rn = s − sn est appelé reste d’ordre n de la série
Ainsi quand la série
∑u
n
∑u
n
.
est convergente, la suite (rn ) tend vers 0. C’est la rapidité de la
convergence de la suite (rn ) vers 0 qui caractérise la rapidité de convergence de la série.
1.2. Exemples
a. Étude de la série de terme général un = (−1)
n
On a, pour tout entier h : s2h = 1 et s2h +1 = 0 . La suite (sn ) n’a pas de limite et la série de terme
général un = (−1) est divergente.
n
b. Étude de la série de terme général un =
1
(n ≥ 1)
n
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On a, pour tout entier n ≥ 1 : sn = 1+
1
1
n
+ ... +
≥
= n.
2
n
n
Donc la suite (sn ) tend vers +∞ et la série de terme général
c. Étude de la série de terme général
1
(n ≥ 1) est divergente.
n
1
n!
On a défini, dans le cours sur les suites, le nombre e comme la limite commune des deux
suites adjacentes (v n ) et (w n ) définies, pour tout entier n ≥ 1 par :
vn = 1 +
1 1
1
1 1
1
1
et wn = 1 + + + ... + +
.
+ + ... +
1! 2!
n!
1! 2!
n! n.n!
En fait, on reconnaît dans la suite (v n ) la suite (pour n ≥ 1) des sommes partielles de la série
de terme général
La série
1
.
n!
1
∑ n! est donc convergente et a pour somme le nombre e.
d. Étude de la série géométrique
On considère la série de terme général un = x (x ∈R) .
n
On a : sn = 1+ x + x + ... + x .
2
n
Dans le cas où x =1, on a : ∀n ≥ 0, sn = n + 1. La suite (sn ) tend vers +∞ et la série diverge.
Sinon, pour x ≠ 1, on a : sn =
x
n +1
−1
. La suite (sn ) est convergente si et seulement si la suite
x −1
(x ) est convergente. On distingue donc les cas x < 1 et x ≥ 1.
- Si x vérifie x ≥ 1, la suite (x ) est divergente et la série ∑ x l’est également.
- Si x vérifie x < 1, la suite (x ) est convergente et a pour limite 0. La série géométrique
n
n
n
n
∑x
n
est convergente et a pour somme
1
. Le reste rn vérifie, pour tout entier n,
1− x
n +1
x
et la convergence de la série est d’autant plus rapide que x est petit.
rn ≤
1− x
Pour tout x appartenant à l’intervalle ]−1,1[ , on a :
+∞
∑x
n= 0
n
=
1
.
1− x
1.3. Condition nécessaire de convergence
Comme pour les suites, la nature d’une série (convergence ou divergence) ne dépend que du
comportement du terme général un quand n tend vers l’infini. C’est ce que montre la
proposition suivante.
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Proposition. Soient (un ) et (v n ) deux suites à termes réels ou complexes. S’il existe un rang
N, tel qu’on ait pour tout entier n ≥ N , un = v n , alors les séries de terme général un et v n
sont de même nature.
Preuve
n
n
k =0
k =0
On pose, pour tout entier n : sn = ∑ uk et tn = ∑ v k . On a donc, pour tout entier n ≥ N ,
n
N −1
k =0
k=0
sn − t n = ∑ (uk − v k ) = ∑ (uk − vk ). Cette différence étant constante à partir du rang N, les
deux suites (sn ) et (t n ) sont de même nature.
Théorème. Pour que la série de terme général un soit convergente, il est nécessaire que
lim un = 0 .
n→ +∞
Mais cette condition n’est pas suffisante.
Preuve
On a, pour tout entier n ≥ 1, un = sn − sn −1 . La convergence de la suite (sn ) entraîne l’égalité
lim un = 0 .
n →+∞
Corollaire. Si un ne tend pas vers 0 la série de terme général un est divergente.
On retrouve ainsi le fait que la série de terme général (−1) est divergente. On voit aussi
n
immédiatement que la série géométrique
∑z
n
, pour z ∈C est divergente pour tout z vérifiant
z ≥ 1.
Remarque
Cette condition n’est pas suffisante comme le montre l’exemple de la série de terme général
1
1
(n ≥ 1). On a vu que cette série est divergente, or le terme général
(n ≥ 1) tend vers 0.
n
n
Exemple
On considère la série de terme général un = cos n .
On montre, par l’absurde, que le terme général un ne tend pas vers 0 quand n tend vers +∞ .
On suppose que le terme général un = cos n tend vers 0. On a donc, pour n assez grand,
cos n <
1
1
. On en déduit l’encadrement −1≤ cos2n = 2cos 2 n − 1 < − et donc l’inégalité
2
2
cos2n >
1
. D’où la contradiction. Ainsi, quand n tend vers +∞ , le terme général un = cos n
2
ne tend pas vers 0 et la série de terme général un est divergente.
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1.4. Propriétés de linéarité
La somme d’une série étant définie comme limite d’une suite, les théorèmes concernant les
suites convergentes s’appliquent aux séries convergentes (cf. module Réels et suites et
module Espace vectoriel). En particulier :
Théorème. Soient (un ) et (v n ) deux suites à termes réels (resp. complexes) telles que les
séries ∑ un et
∑v
soient convergentes. Alors la série
n
∑ (u
n
+∞
+∞
+∞
n=0
n= 0
n= 0
+ v n ) est convergente et :
∑ (un + v n) = ∑ un + ∑ vn .
Soit (un ) une suite à termes réels (resp. complexes) telle que la série
Alors, pour tout λ réel (resp. complexe), la série
+∞
∑ λu
∑ λu
n
∑u
n
soit convergente.
est convergente et :
+∞
n
= λ ∑ un .
n=0
n= 0
Ainsi, l’ensemble des suites (un ) réelles (resp. complexes), telles que la série
∑u
soit
n
convergente, est un sous-espace vectoriel de l’espace vectoriel des suites réelles (resp.
complexes) de limite nulle.
On en déduit en particulier la propriété suivante.
Soit (un ) une suite réelle ; on pose, pour tout entier n, un = max(un ,0) et un = max(−un ,0).
+
+
−
−
+
−
On a : un = un − un et un = un + un .
Donc, d’après le théorème précédent, si les séries
séries
∑u
n
et
∑u
n
−
n
+
n
et
∑u
−
n
sont convergentes, les
sont convergentes.
∑ u est convergente, alors les séries ∑ u
sont convergentes, et donc la série ∑ u est également convergente.
On verra ultérieurement que, si la série
∑u
∑u
n
+
n
et
n
Pour les séries à termes complexes on a la proposition :
Proposition. Une série de terme général un appartenant à C est convergente si et seulement
si les deux séries de terme général respectif Re( un ) et Im( un ) sont convergentes.
Preuve
La suite (sn ) est convergente si et seulement si les deux suites (Re (sn )) et (Im (s n )) le sont.
Cette proposition montre que l’étude d’une série à termes complexes se ramène à l’étude de
deux séries à termes réels.
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1.5. Critère de Cauchy pour les séries
Pour une série à termes réels ou complexes, exprimer que la suite des sommes partielles
satisfait à la condition de Cauchy constitue une condition nécessaire et suffisante de
convergence.
Critère de Cauchy pour les séries. Soit (un ) une suite de nombres réels ou complexes. Pour
que la série de terme général un soit convergente il faut et il suffit que, pour tout ε > 0, il
existe un rang N tel que les inégalités p > m ≥ N entraînent
p
um +1 + um + 2 + ...+ u p =
∑u
k =m +1
k
< ε.
On écrit encore, en langage formalisé,
∀ ε ∈R , ∃N ∈N, ∀(m, p) ∈N , p > m ≥ N ⇒
∗
+
2
p
∑
k = m +1
uk < ε .
On peut retrouver la propriété, vue déjà dans le cours sur les suites, que la série harmonique
ou série de terme général
1
(n ≥ 1) est divergente.
n
On a en effet :
sn = 1+
n
2n
1
1
1
1
n
1
+ ...+ = ∑ et s 2n - sn = ∑
≥
= .
2
n k =1 k
2n 2
k =n +1 k
Cet exemple illustre encore le fait qu’il n’est pas suffisant que le terme général tende vers 0
pour que la série soit convergente.
Remarque
Comme pour les suites, le critère de Cauchy est un outil, essentiellement théorique, très
important. Sur le plan pratique, ce sont ses diverses conséquences qui sont le plus souvent
utilisées.
1.6. Séries absolument convergentes
La notion de convergence absolue est fondamentale car le théorème suivant est le principal
outil pour l’étude des séries. Ce théorème va orienter l’étude des séries vers celle des séries à
termes positifs.
Définition. Soit (un ) une suite à termes réels (resp. complexes). On dit que la série de terme
général un est absolument convergente si la série de terme général un est convergente.
Théorème. Une série à termes réels (resp. complexes) absolument convergente est
convergente.
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Preuve
(Nous donnons ici une preuve qui utilise le critère de Cauchy. Nous donnerons, plus loin, une
autre preuve qui est une conséquence du théorème de comparaison.)
Soit ε un réel strictement positif.
La série
∑u
n
est convergente. Elle satisfait donc à la condition de Cauchy, il existe un rang
N tel que :
∀(m, p) ∈ N , p > m ≥ N ⇒
2
p
∑
k =m +1
uk < ε .
Soient m et p tels que p > m ≥ N . On a alors, en appliquant l’inégalité triangulaire :
p
p
∑
k =m +1
uk ≤
∑
k =m +1
uk < ε .
On a donc montré la propriété suivante :
∀ ε > 0, ∃N ∈ N, ∀ (m, p) ∈ N , p > m ≥ N ⇒
2
p
∑
k = m +1
La série
∑u
n
uk < ε .
satisfait donc à la condition de Cauchy : elle est convergente.
Remarque. La convergence absolue est une condition suffisante de convergence. Nous
verrons des séries convergentes qui ne sont pas absolument convergentes.
2. Séries à termes positifs. Règles de convergence absolue
L’intérêt de l’étude des séries à termes positifs, outre la simplicité du théorème fondamental
lié à la croissance de la suite des sommes partielles, réside dans le fait qu’elle conduit à des
règles de convergence absolue.
2.1. Théorème fondamental
Théorème. Condition nécessaire et suffisante de convergence. Soit (un ) une suite de
termes positifs ou nuls. La série
∑u
est convergente si et seulement si la suite (sn ) des
n
sommes partielles est majorée.
+∞
La somme de la série s = ∑ un est alors égale à la borne supérieure de l’ensemble des réels
n= 0
sn , n ∈N, et on a, pour tout entier n :
n
∑u
k= 0
k
≤ s.
Preuve
La suite (sn ) étant croissante, elle est convergente si et seulement si elle est majorée. Sa limite
est alors la borne supérieure de l’ensemble {sn , n ∈ N} et, pour tout entier n,
n
∑u
k =0
k
≤ s.
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Remarque et convention d’écriture. Dans le cas des séries à termes positifs, la suite (sn ) est
croissante et
- la série est convergente, si et seulement si la suite (sn ) est majorée. On écrit alors
+∞
∑u
n
< +∞ ;
n= 0
- la série est divergente si et seulement si la suite (sn ) n’est pas majorée, elle tend alors vers
+∞ . On écrit
+∞
∑u
n
= +∞ .
n=0
Il convient de ne pas abuser de ces notations qui sont uniquement symboliques et ne
s’utilisent que pour les séries à termes positifs.
2.2. Théorèmes de comparaison
Le théorème de comparaison, qui repose sur les propriétés des suites croissantes, et surtout
son corollaire (second théorème de comparaison) jouent un rôle fondamental dans l’étude des
séries.
Premier théorème de comparaison. Soient (un ) et (vn ) deux suites de nombres positifs
vérifiant : ∀ n ∈ N, un ≤ v n .
- Si la série de terme général vn est convergente, la série de terme général un est
convergente. On a alors :
+∞
+∞
n= 0
n= 0
∑ un ≤ ∑ v n .
- Si la série de terme général un est divergente, la série de terme général vn est divergente.
Preuve
Elle repose sur le théorème de comparaison des suites appliquées aux suites partielles
n
n
k =0
k =0
croissantes (sn ) et (tn ) définies par : sn = ∑ uk et t n = ∑ v k . On a : ∀n ∈ N, 0 ≤ sn ≤ tn .
D’où les implications :
-
∑v
n
convergente ⇒ (tn ) bornée ⇒ (sn ) bornée ⇒
∑u
n
convergente ;
on a alors, d’après le théorème de prolongement des inégalités :
+∞
+∞
n= 0
n= 0
∑ un ≤ ∑ v n .
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-
∑u
n
divergente ⇒ (sn ) non bornée ⇒ (tn ) non bornée ⇒
∑v
divergente.
n
Remarque fondamentale. Le théorème, en ce qui concerne la nature des séries et non la
somme, reste vrai si les inégalités 0 ≤ un ≤ vn sont vérifiées à partir d’un certain rang.
Application
Le théorème de comparaison permet de donner une autre démonstration du théorème sur la
convergence des séries absolument convergentes.
Preuve
Il s’agit de montrer que toute série
∑u
n
, telle que la série
∑u
n
est convergente, est
également convergente. Compte tenu des inégalités : Re(un )≤ un et Im(un )≤ un , il suffit de
montrer cette propriété pour des séries réelles.
On considère donc une série
∑u
Ainsi, si la série
de la série
∑u
n
n
∑u
n
+
−
à termes réels. On a, pour tout n : un ≤ un et un ≤ un .
est convergente, il en est de même des séries
∑u
+
n
et
∑u
−
n
, et donc
.
Exemples
On se réfère à des séries connues comme séries de comparaison.
a. Étude de la série de terme général un =
On a : ∀n ≥ 0, 0 < un ≤
2 + sinn
n
3
3
1
. La série
=
3n 3n −1
∑
2 + sinn
est convergente.
n
3
b. Étude de la série de terme général un =
1
(n ≥ 1)
ln n + n
On a : ∀n ≥ 1, 0 < ln n + n ≤ 2 n , d’où
1
1
.
≥
ln n + n 2 n
1
1
est divergente, on en déduit que la série ∑
est divergente.
n
n ≥1
n ≥1 lnn + n
Second théorème de comparaison. Soient (un ) et (vn ) deux suites de nombres positifs. On
La série
∑
suppose qu’une des conditions a ou b est vérifiée :
a. un ~ v n
n →+∞
b. le rapport
un
est défini à partir d’un certain rang et admet une limite L non nulle quand n
vn
tend vers +∞ .
Alors les séries
∑u
n
et
∑v
n
sont de même nature.
13
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Preuve
a. La propriété un ~ v n signifie qu’on a un = (1 + ε ( n))v n avec lim ε (n ) = 0 et donc, à
n →+∞
partir d’un certain rang N,
n →+∞
1
3
vn < un < vn . On applique alors le théorème précédent.
2
2
b. Comme la limite L est non nulle, donc strictement positive compte tenu des hypothèses, on
peut prendre ε > 0 tel que L − ε > 0 . Il existe donc un rang n0 tel que
∀n ≥ n0 , 0 < L − ε <
un
est défini et
vn
un
< L +ε .
vn
Le terme général vn est strictement positif pour tout entier n ≥ n0 . On a donc :
∀n ≥ n0 , 0 < ( L − ε )v n < un < ( L + ε )v n .
On applique alors le théorème précédent.
Remarque fondamentale. Les théorèmes de comparaison concernent des séries à termes
positifs (plus généralement de signe constant à partir d’un certain rang). Ainsi, les séries
(−1)
n
∑ ln n
n≥ 2
(−1)
(−1)
(−1)
et ∑
vérifient
~
et ne sont pas de même nature
n
ln n n → +∞ ln n + (−1)n
n ≥ 2 lnn + (−1)
n
n
n
comme nous le verrons au paragraphe 4.1.
Exemple
On considère la série de terme général un =
3n + ln n − 2n − n3
(n ≥ 1).
4
n
n +n +5
n
⎛ 3⎞
, ce
On remarque que les premiers termes de cette série sont négatifs, mais on a : un ~
n →+∞ ⎝ 5 ⎠
qui a pour conséquence que la série est à termes positifs à partir d’un certain rang. Elle est
donc convergente par application du théorème précédent.
Les théorèmes de comparaison constituent un outil fondamental dans l’étude des séries. Il
s’agit maintenant d’avoir un catalogue de séries classiques dont on connaît la nature. C’est le
cas des séries géométriques ; on sait par ailleurs que la série harmonique
1
∑ n est divergente,
n ≥1
il en est donc de même, par comparaison, des séries
1
∑n
n ≥1
s
pour 0 < s ≤ 1. Dans un premier
temps, les règles de d’Alembert et de Cauchy vont nous permettre de rendre plus
opérationnelle la comparaison aux séries géométriques pour certains types de séries à
convergence rapide. Dans un second temps, nous allons élargir le catalogue des séries de
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Université en Ligne. Mathématiques. Séries numériques
référence aux séries
1
∑n
n ≥1
s
pour s > 1.
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