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Le p’tit journal de la Maison - Printemps 2014
Rencontre avec le Docteur Darina Krastinova
Chirurgien plasticien de renommée internationale
(Clinique de la Maye à Versailles)
Dr Darina Krastinova
Depuis de nombreuses années, la Maison de Parents reçoit régulièrement des patients envoyés
par la Clinique de la Maye. Nés avec des malformations, brûlés, accidentés, déformés par la
maladie, jeunes ou moins jeunes, on voit au fil des mois, des années, et des interventions ré-
alisées avec une infinie précision, des visages qui se transforment, qui retrouvent vie, des patients
qui recouvrent le sourire. Une « magie » s’opère grâce à une technique très maîtrisée, fruit d’une
grande expérience et d’un lien très fort établi entre le praticien, son équipe et le patient.
Pouvez-vous nous raconter votre
histoire et nous dire comment
vous est venu ce goût pour la
chirurgie réparatrice ?
Enfant, je nourrissais déjà le
rêve de rendre les gens beaux
et je pensais que si cette
chirurgie n’existait pas, il fallait
alors l’inventer. C’est auprès de
mon père, un des pionniers de
la chirurgie cardio-vasculaire
en Bulgarie, et de ses patients
que j’ai appris que l’amour
guérit et que pour être un bon
chirurgien il faut aimer les gens.
Diplômée de médecine à
Sofia, j’ai cherché le moyen
d’aborder la chirurgie
plastique, spécialité qui
n’existait pas dans mon pays.
J’ai pu intégrer en 1972 le
service des brûlés de l’hôpital
Foch, une des chirurgies
les plus lourdes et les plus
ingrates. C’est avec elle que
j’ai appris les bases de mon
métier ; elle m’a permis de
bien connaître la peau, de
savoir la traiter.
Parlez-nous de votre rencontre
et de vos débuts avec le
Professeur Tessier (Hôpital
Foch), père de la chirurgie
crâniofaciale
C’est lors d’un de mes voyages
en Europe que j’ai trouvé
mon Maître : le Professeur
Tessier (hôpital Foch) appelé
par certains « Le maître des
maîtres ».
A ses côtés pendant 10 ans,
en tant qu’assistante, j’ai
appris à « voir » le patient et
à « l’entendre », j’ai découvert
que l’on pouvait repousser
ses limites, programmer
la chirurgie dans le temps
et dans l’espace, j’ai aussi
appris ce qu’il faut faire et ne
pas faire. Mon maître était
passionné par la pathologie
des malformations. J’ai
profité de cette période
pour poursuivre ma
formation en rajoutant deux
compétences : maxillo-faciale
et plastique. J’ai également
étudié l’ophtalmologie, la
stomatologie, la cardiologie…
Comment êtes-vous arrivée à la
clinique de la Maye afin de créer
votre propre service ?
Avec ma naturalisation en
1981, j’ai obtenu le droit
d’exercer en France et décidé
de m’installer dans le privé, à
Versailles. Mon rêve a pu se
réaliser grâce à ma rencontre
avec Mme Barragué,
directrice de la Clinique du
Château. Avec elle, j’ai eu
accès à tous mes désirs :
cabinet dans la clinique,
développement d’une activité
nouvelle, enseignement,
conférences…
Avec M. Tessier, je n’étais
qu’une élève (interne),
position confortable… et là,
me voilà propulsée Maître à
mon tour.
« Ma plus grande joie,
c’est de savoir que je
peux rendre à quelqu’un
son visage, donc sa vie…
donner à la personne ce
qu’elle cherche, la voir
irradier de bonheur
au terme d’un long
parcours. »
Vous pratiquez une chirurgie
de pointe, minutieuse, quelles
techniques avez-vous mises au
point ?
En 1984, j’ai fondé mon
unité de chirurgie orbito-
palpébrale, accompagnée
par un ophtalmologiste.
Avec cette spécialisation j’ai
découvert l’œil, les paupières,
l’orbite… carrefour de
plusieurs spécialités. Dès mes
débuts j’ai été confrontée à
des pathologies orphelines,
difficiles, n’intéressant pas
grand monde : l’orbite
anophtalme, la paralysie
faciale, la face brûlée, les
tumeurs faciales... mon rêve
d’enfant allait enfin se réaliser ;
quoi de plus merveilleux
en effet que de restaurer un
visage déformé. Au fil des
années j’ai pu développer
de nouvelles techniques et
obtenir des résultats non
seulement fonctionnels mais
aussi esthétiques. Le premier
succès est arrivé avec le Mask
Lift en 1986, technique dérivée
de la chirurgie crâniofaciale.
Votre renommée est
internationale, exportez-vous
vos savoirs, vos techniques ?
C’est après mon premier
voyage aux Etats-Unis en
1989 que le succès est arrivé
et que le tour du monde
a commencé. La Bulgarie
et l’Italie m’ont beaucoup
invitée à participer à leurs
Congrès et à opérer. Durant
une dizaine d’années, j’ai
cherché à promouvoir cette
chirurgie orbito-palbébrale
que j’aime tant et à transmettre
ce que j’avais appris auprès
de M.Tessier ainsi que
mes propres techniques.
Patients, adultes et enfants,
ont alors afflué et j’ai voulu
donner à tout le monde la
même chance, qu’ils soient
français ou étrangers, riches
ou pauvres… La chirurgie
esthétique m’a toujours permis
d’offrir mon travail aux plus
démunis. Aujourd’hui, dans
le cadre d’échanges, j’exporte
mes techniques auprès des
meilleurs dans le monde entier.
Votre travail est un travail
d’équipe, pouvez-vous nous
parler de vos collaborateurs ?
Une dizaine de personnes
travaillent à mes côtés. Nous
formons une équipe soudée,
en quelque sorte une grande
famille. Chacun a sa spécialité
(partie haute, partie basse
du visage, anesthésistes,
infirmières, assistantes
précieuses…). Avec eux je
pars régulièrement opérer à
l’étranger, et je sais que le jour
venu… la relève sera assurée.
Dans votre travail quelle est
votre plus grande satisfaction ?
Pour créer un visage il
faut avoir du savoir, de
l’imagination, un sixième
sens et surtout une grande
confiance en soi. Ma plus
grande joie c’est de savoir que
je peux rendre à quelqu’un
son visage, donc sa vie,
donner à la personne ce
qu’elle cherche, et la voir
irradier de bonheur au terme
d’un parcours de plusieurs
années.