Enfin, au delà des connaissances médicales, il faudrait
garantir au médecin l’acquisition de plusieurs
compétences, valeurs et attitudes. «Le processus actuel
d’évaluation en cours de formation (RECF) n’est pas
nécessairement fiable pour assurer la qualité et la rigueur
de l’enseignement des rôles CanMEDS autres que celui
d’expert médical», précisent ainsi les rédacteurs du
rapport.
Il s’agit d’une vision idéale de la formation et des
différents rôles des médecins selon le Dr Dahine, qui n’est
peut-être pas très réaliste. «On sait qu’il y a des besoins
en médecine, mais les ressources ne sont pas toujours au
rendez-vous. On est en train de former des grosses
cohortes de résidents qui vont être capables d’entrer en pratique, mais qui ne trouveront
peut-être pas un emploi.»
Ainsi, en dépit des listes d’attente aux urgences ou dans les cliniques, si le milieu n’est pas
capable d’avoir des infirmières en nombre suffisant ou de proposer un bureau à un
médecin pour faire sa clinique, ils ne pourront pas l’engager. Et les médecins qui ont une
place sont quant à eux obligés de travailler plus vite et de voir plus de patients, sans avoir
le temps de les écouter. Une autre source de stress puisqu’on met «en compétition le souci
de performer avec le souci de voir les patients et de passer du temps avec eux».
Comme la profession médicale a le privilège de pouvoir s’autoréguler, ses membres
devraient aussi, selon le Dr Dahine, «prendre les devants quand ils voient des situations
inacceptables soit parce qu’un collègue est en détresse, soit parce qu’un collègue n’a pas
un comportement exemplaire envers les autres et que cela est au détriment des patients,
des apprenants ou même des collègues en pratique depuis 10, 20, 30 ans et qui sont
victimes encore de certains comportements non professionnels».
Un défi dans un système où, visiblement, il y a encore des personnes qui ne demandent
pas d’aide quand c’est nécessaire, et des situations où des médecins sont isolés parce
qu’ils ne sont pas en mesure de suivre le rythme surchargé.
La Dre Marie-France Bergeron, pneumologue, témoignait par exemple sur Twitter qu’il lui a
fallu perdre trois bébés «pour moins sentir qu’on (la) jugeait pour exemption de garde».
Selon le Dr Dahine, ce n’est même pas une question de mauvaise volonté. «Simplement,
on est dans un système qui doit rendre le plus de services possibles et cela a des effets
secondaires ou dommages collatéraux qui ont été dénoncés de façon particulièrement
courageuse par le Dr Leroux Groleau dans sa lettre publiée dans La Presse.»
Toutefois, cela risque de prendre encore du temps pour faire changer la culture. D’autant
qu’il y a encore des médecins qui véhiculent l’idée que les étudiants en médecine ne sont
pas plus à risque de dépression ou de suicide que la population en général.
«La pression aujourd’hui est bien moins forte qu’elle ne l’était, mettons il y a 15 ans. Le
milieu est bien, bien, bien plus accommodant qu’il ne l’était à cette époque», a déclaré
Gaétan Barrette à La Gazette . Une affirmation qui ne tient ni compte des statistiques (5 %
des étudiants en médecine ont des idées suicidaires), ni compte de la masse de
connaissances en pleine expansion que les étudiants en médecine doivent ingurgiter ou de
la lourdeur des cas qu’ils prennent en charge dans les hôpitaux québécois, sans parler de
leurs inquiétudes à obtenir le poste de leur rêve une fois diplômé.
Recommandation no 3
L’apprentissage doit se
dérouler dans des milieux
collaboratifs et positifs,
centrés sur le patient et
fondés sur le principe voulant
que l’on fournisse des soins
de la plus haute qualité dans
le contexte de l’enseignement
et de l’apprentissage des
compétences requises.