Algèbre linéaire pour GM Prof. A. Abdulle Jeudi 14 novembre 2013 EPFL Série 8 (Corrigé) Exercice 1 (a) Les vecteurs de P3 suivants sont-ils linéairement indépendants? (i) p1 = 1 − t2 , p2 = t2 , p3 = t. Sol.: Oui. En effet, x1 p1 + x2 p2 + x3 p3 = x1 (1 − t2 ) + x2 t2 + x3 t = t2 (x2 − x1 ) + x3 t + x1 ≡ 0 ssi x2 − x1 = 0 x3 = 0 x1 = 0 ssi x1 = x2 = x3 = 0. (ii) p1 = 1 + t + t2 , p2 = t + t2 , p3 = t2 . Sol.: Oui. (b) Les vecteurs p1 , p2 , p3 dans (ii) sont-ils une base de P3 ? Sol.: Non, car dim(P3 ) = 4 et il y a seulement trois vecteurs. Exercice 2 Soit V et W deux espaces vectoriels, et T : V → W une transformation linéaire. Montrer que si U ⊂ V est un sous-espace vectoriel, alors l’ensemble image T (U ) est un sous-espace vectoriel de W . Sol.: On doit prouver (i) si w ∈ T (U ) et α est un scalaire, alors αw ∈ T (U ) et (ii) si w1 ∈ T (U ) et w2 ∈ T (U ) alors w1 + w2 ∈ T (U ), et (iii) T (U ) contient 0. (i) En effet: w ∈ T (U ) ⇔ w = T (u) pour un certain u ∈ U . Ainsi αw = αT (u) = T (αu) ∈ T (U ). (ii) De même, w1 + w2 = T (u1 ) + T (u2 ) = T (u1 + u2 ) ∈ T (U ). (iii) On a T (0) = 0, donc 0 ∈ T (U ). Exercice 3 (a) L’ensemble de vecteurs {sin t, cos t} est-il linéairement indépendant dans C[0, 1]? Sol.: Oui: Si c1 , c2 sont des scalaires tels que c1 sin t + c2 cos t ≡ 0, alors en prenant t = 0 puis t = π/6, on obtient c2 = 0 (car sin 0 = 0 et cos 0 = 1) puis c1 = 0 (car sin( π6 ) = 12 ). (b) Même question pour {sin t, sin t cos t, sin 2t}. Sol.: Non: il existe une combinaison linéaire non triviale, sin 2t − 2 sin t cos t ≡ 0. 1 Exercice 4 1 2 3 1 Soit A = 1 2 3 0 . Trouver une base de Ker(A) et de Col(A). 1 2 3 1 Sol.: On note A = (v1 , v2 , v3 , v4 ) les colonnes de A. Les vecteurs v2 et v3 sont proportionnels à v1 , donc ils sont superflus pour calculer Col(A). Les vecteurs v1 , v4 sont linéairement indépendants, ils constituent une base de Col(A). α1 α L’espace Ker(A) est constitué des vecteurs u = 2 tels que Au = 0. On a α3 α4 Au = α1 v1 + α2 v2 + α3 v3 + α4 v4 = (α1 + 2α2 + 3α3 )v1 + α4 v4 ainsi Au = 0 ssi α4 = 0 et α1 = −2α2 − 3α3 . Par conséquent, α2 et α3 sont des variables libres du système linéaire Au = 0. On obtient une base de Ker(A) en choisissant successivement α2 = 1, α3 = 0, puis α2 = 0, α3 = 1: −2 1 0 0 , −3 0 1 0 . Exercice 5 On considère la transformation T : P2 → R2 définie par T (p) = p(0) p(0) ! . (a) Vérifier que T est linéaire. Sol.: Pour tous p1 , p2 , p ∈ P2 et c ∈ R, on a: T (p1 + p2 ) = p1 (0) + p2 (0) p1 (0) + p2 (0) T (cp) = ! p1 (0) p1 (0) = cp(0) cp(0) ! =c ! p2 (0) p2 (0) + p(0) p(0) ! = T (p1 ) + T (p2 ). ! = cT (p). (b) Trouver une base de Ker T . ! p(0) Sol.: T (p) = 0 ⇔ = 0 ⇔ p(0) = 0. Considérons un polynôme p ∈ P2 de la p(0) forme p = c2 t2 + c1 t + c0 . On a p(0) = 0 ⇔ c0 = 0 ⇔ p = c2 t2 + c1 t. Ainsi, une base de Ker T est {t, t2 }. (c) Trouver une base de Im T . Sol.: Soit p de !la forme p!= c2 t2 + c1! t + c0 . L’image Im T est l’ensemble des vecteurs ! p(0) c0 1 1 T (p) = = = c0 . Ainsi, une base Im T est le vecteur . p(0) c0 1 1 2 Exercice 6 On définit C[a, b] = {f : [a, b] → R, f est continue} et C 1 (a, b) = {f : (a, b) → R, f est dérivable sur (a, b) et f 0 est continue}. (a) Vérifier que C[a, b] et C 1 (a, b) sont des espaces vectoriels. Sol.: Le vecteur nul est bien dans ces deux espaces: la fonction nulle est continue et continument différentiable. On utilise ensuite le fait que la somme de deux fonctions continues est continue, et le produit par un scalaire d’une fonction continue est encore continue. De même pour des fonctions continument différentiables. (b) Montrer que la transformation T : C[a, b] → C 1 (a, b) donnée par (T f )(x) = Rx f (t)dt a est bien définie et linéaire. Sol.: On doit montrer que si f ∈ C[a, b], alors g = Rx f (t)dt est différentiable pour a a < x < b avec g 0 continue. En effet, en utilisant le théorème fondamental du calcul intégral, dg dx = d dx Rx f (t)dt = f (x) existe et est continue, d’où g ∈ C 1 (a, b). a Pour montrer T (αf ) = αT (f ) et T (f1 + f2 ) = T (f1 ) + T (f2 ) on utilise les propriétés de linéarité de l’intégration. Exercice 7 (a) Quelle est la dimension du!sous-espace vectoriel W de R2 donné par W = span{v1 , v2 , v3 } ! ! 1 1 0 où v1 = , v2 = , v3 = . 2 0 1 Sol.: Deux. En effet, les vecteurs v2 , v3 sont linéairement indépendant, donc la dimension est au moins deux. Elle est inférieure ou égale à 2 car c’est un sous-espace de R2 . (b) Trouver un sous-ensemble B de {v1 , v2 , v3 } tel que B soit une base de W . Sol.: B = {v2 , v3 } — c’est la base canonique de R2 . (Note: {v1 , v3 } et {v1 , v2 } sont aussi possibles). (c) Agrandir l’ensemble {v1 + v2 } ⊂ W pour obtenir une base W . Sol.: L’espace W! est de dimension deux, donc n’importe quel vecteur non colinéaire 2 à v1 + v2 = convient. Par exemple, on peut proposer la base {v1 + v2 , v1 } de 2 W. Exercice 8 (a) On considère le vecteur v = 2 3 ! exprimé dans la base canonique de R2 . Trouver 2 les coordonnées de v dans la base {b1 , b2 } de R , où b1 = 3 1 2 ! et b2 = 0 1 ! . Sol.:! Les coordonnées cherchées sont (c1 , c2 ) avec v = c1 b1 + c2 b2 : ! ! 2 1 0 c1 = , on trouve c1 = 2, c2 = −1. 3 2 1 c2 2 (b) Même question pour v = 3 donné dans la base canonique de R3 à exprimer dans 1 1 1 0 la base {b1 , b2 , b3 } donnée par b1 = 0 , b2 = 1 , b3 = 0 . 1 0 1 1 1 0 c1 Sol.: On résout 0 1 0 c2 = v et on obtient c1 = −1, c2 = 3, c3 = 2. 1 0 1 c3 Exercice 9 Soit T : R3 → R3 l’application linéaire donnée par x1 3x1 + x3 x2 → 2x2 + x3 . x3 x1 + x2 Soient E la base canonique de R3 et B une base de R3 donnée par B= 1 0 1 1 0 0 , , . 0 1 1 (a) Donner la matrice M qui représente T par rapport aux bases E (de départ) et B (d’arrivée). (b) Même question pour les bases B (de départ) et E (d’arrivée). (c) Même question pour les bases B (de départ) et B (d’arrivée). Sol.: (a) On commence par prendre les vecteurs de la base de départ et de leur appliquer la transformation T . On obtient 1 3 0 0 0 1 T 0 = 0 , T 1 = 2 , T 0 = 1 , 0 1 0 1 1 0 qui sont encore exprimés dans la base canonique E. Il faut maintenant calculer la matrice de passage de la base E à la base B. On sait, du cours, que cette matrice est l’inverse de la matrice de passage de la base B à la base E. Cette dernière est donnée par 1 1 0 PEB = 1 0 0 . 0 1 1 4 Pour calculer son inverse, on peut utiliser la méthode vue en cours (avec l’identité à −1 droite)ou calculer son inverse directement en résolvant PEB PEB = I, où l’on pose On résout −1 PEB a b c = d e f . g h i 1 1 0 a b c 1 0 0 1 0 0 d e f = 0 1 0 . 0 1 1 g h i 0 0 1 Comme la matrice PEB contient beaucoup de zéros, il sera plus simple de résoudre le système d’équations obtenus que d’utiliser la méthode vue en cours. On obtient facilement que l’inverse est −1 PEB 0 1 0 1 −1 0 = = PBE . −1 1 1 On applique alors PBE aux vecteurs obtenus précédemment. La matrice M est 0 2 1 M = 3 −2 0 . −2 3 0 (b) 1 3 1 4 0 1 T 1 = 2 , T 0 = 1 , T 0 = 1 , 0 2 1 1 1 0 qui sont exprimés dans la base canonique. La matrice M est 3 4 1 M = 2 1 1 . 2 1 0 (c) On applique PBE aux vecteurs obtenus au point précédent et on obtient la matrice M 2 1 1 M = 1 3 0 . 1 −2 0 Exercice 10 1 0 2 3 Soit A = 1 1 1 0 . 0 0 0 3 5 (a) Déterminer le rang de A et la dimension du noyau de A. Sol.: Les colonnes 1, 2, 4 forment une base de R3 , ainsi, rg A = 3. Par le théorème du rang, on a dim Ker A = (nombre de colonnes de A) − rg A = 4 − 3 = 1. (b) Même question pour AT . Sol.: rg AT = rg A = 3. dim Ker AT = (nombre de colonnes de AT ) − rg AT = 3 − 3 = 0. (c) On suppose qu’une matrice A de taille 7 × 7 possède un pivot dans chaque ligne. Quel est le rang de A? Quelle est la dimension du noyau de A? Sol.: A est équivalente à la matrice identité de taille 7 × 7, ainsi rg A = 7 et dim Ker A = 0. (d) On considère une matrice A de taille n × m et un vecteur b ∈ Rn . Quelle doit être la relation entre le rang de [ A b ] et le rang de A pour que l’équation Ax = b soit compatible? Sol.: Ax = b est compatible ⇔ b est une combinaison linéaire des colonnes de A ⇔ b ∈ Col A ⇔ rg A = rg [ A b ]. Exercice 11 Soit M2 l’espace vectoriel des matrices de taille 2 × 2. (a) Montrer que les matrices A, B et C données par A = C= 0 1 0 0 1 1 0 1 ! 0 0 0 0 ! , B = 1 1 1 0 ! , ! sont linéairement indépendantes. Sol.: α1 A + α2 B + α3 C = α1 + α2 α1 + α2 + α3 α2 α1 ! = ⇔ α1 = α2 = α3 = 0. (b) Trouver a, b, c, d tels que pour D = a b c d ! , les matrices A, B, C, D forment une base de M2 . Sol.: Méthode 1: On vient en fait de calculer au (i) que vect(A, B, C) est l’ensemble des matrices de la forme α1 + α2 α1 + α2 + α3 α2 α1 ! . Comme ce sous-espace est de dimension 3, pour obtenir une base de M2 qui est de dimension 4, il suffit de trouver un vecteur D qui n’est pas dans ce sous-espace, c-à-d 6 a b pas de la forme ci-dessus. Il suffit donc de proposer une matrice D = c d que a 6= c + d. On peut donc proposer par exemple a = 1, b = 0, c = 0, d = 0. ! tel Méthode 2: α1 + α2 + aα4 α1 + α2 + α3 + bα4 α2 + cα4 α1 + dα4 α1 A + α2 B + α3 C + α4 D = α1 + α2 + aα4 = 0 1 1 α1 + α2 + α3 + bα4 = 0 ⇔ 0 α + cα = 0 2 4 α1 + dα4 = 0 1 1 1 1 0 0 1 0 0 a b c d α1 α2 α3 α4 ! =0⇔ = 0. Observons que det 1 1 0 1 1 1 1 0 0 1 0 0 a b c d = 0 ⇔ a − c − d = 0. Ainsi, A, B, C, D forment une base de M2 ⇔ a − c − d 6= 0. Exercice 12 Soit B une matrice sous forme échelonnée. 1. Montrer que les colonnes de B qui ont une position pivot (c.-à-d. les colonnes pivots) sont linéairement indépendantes. 2. Montrer que les colonnes de B qui n’ont pas de position pivot sont combinaison linéaire des colonnes pivots. Sol.: (i) On montre par récurrence sur k que si une matrice échelonnée possède au moins k colonnes pivots alors ces k colonnes pivots sont linéairement indépendantes. Si k = 0, il n’y a rien à montrer et le résultat est vrai. On suppose le résultat vrai pour un certain k. On suppose que B possède k + 1 colonnes pivots C1 , . . . , Ck , Ck+1 . On considère la matrice B privée de la colonne pivot Ck+1 la plus à droite. Par hypothèse de récurrence, les k premières colonnes pivots C1 , . . . , Ck sont linéairement indépendantes. Comme la matrice B est échelonnée, on remarque que la ligne de B contenant le pivot de la colonne Ck+1 est de la forme: 0 ··· 0 p ∗ ··· ∗ où p est le pivot. Comme p 6= 0, la colonne pivot Ck+1 ne peut pas s’écrire comme combinaison linéaire des colonnes C1 , . . . , Ck . Ainsi les colonnes C1 , . . . , Ck+1 sont linéairement indépendantes, ce qui achève la preuve par récurrence. (ii) Soit C1 , . . . , Ck les colonnes pivots de la matrice B (dans l’ordre de gauche à droite) et soit C0 une colonne sans pivot. On considère le système linéaire C0 = λ1 C1 + . . . + λk Ck 7 d’inconnus les scalaires λ1 , . . . , λk . On peut l’écrire sous forme matricielle: C1 · · · λ 1 Ck ... = C0 . λk Comme la matrice B est échelonnée, on obtient que la matrice augmentée de ce système linéaire est échelonnée avec un pivot dans chaque ligne non nulle. Il possède donc une solution (unique), et C0 est bien combinaison linéaire des colonnes pivots de la matrice B. Exercice 13 Indiquer pour chaque énoncé s’il est vrai ou faux et justifier brièvement votre réponse. (a) Soient V un espace vectoriel et H un sous-espace de V . Alors on a aussi que V est un sous-espace de lui-même (ou d’un espace vectoriel plus grand) et H est un espace vectoriel. (b) Si H est un sous-ensemble d’un espace vectoriel V , alors il suffit que 0 soit dans H pour que H soit un sous-espace de V . (c) Une matrice carrée A est inversible si et seulement si Ker(A) = {0}. (d) Le noyau d’une matrice A n’est pas nécessairement un espace vectoriel. Sol.: Vrai: (a), (c). Faux: (b), (d). Exercice 14 Indiquer pour chaque énoncé s’il est vrai ou faux et justifier brièvement votre réponse. (a) Le plan définit dans R3 par z = 2 est un sous-espace de R3 . (b) Ker(A) = {0} si et seulement si l’application x 7→ Ax est surjective. (c) Soit V un espace vectoriel et u ∈ V . Alors (−1)u ∈ V est l’inverse de u et est unique. (d) Soit A une matrice de taille m × n, alors Ker(A) est un sous-espace de Rn . Sol.: Vrai: (c), (d). Faux: (a), (b). Informations générales, séries et corrigés: cf. http://anmc.epfl.ch/Algebre.html. Les exercices de type vrai ou faux proviennent du livre: D.C. Lay. Algèbre linéaire : théorie, exercices et applications. De Boeck, Bruxelles, 2005. 8