ARTICLE ORIGINAL
Le Rachis - Tome 3 - N° 5 Novembre 2007 14
Sil’histoire moderne de la chi-
rurgie du rachis ne démarre
réellement qu’avec l’inven-
tion de la radiologie par Konrad
Röntgen (1895) et les travaux de
Semmelweis (1847) et Lister avec
l’emploi des antiseptiques (1867),
ontrouve dans les siècles précédant
le 20ème siècle une série d’observa-
tions pertinentes sur la pathologie
rachidienne.
La première allusion à une fracture
du rachis cervical avec troubles neu-
rologiques se trouve dans le papyrus
Smith.
LE PAPYRUS SMITH
Le papyrus Smith (du nom de son
acquéreur) est une copie de docu-
ments plus anciens effectuée vers
1650 avant Jésus Christ sous le
règne du pharaon Hyksos Auser
au milieu du XVIII ème siècle av. J-
C. Il est constitué de 22 colonnes.
Les 17 colonnes du verso sont un
traité de chirurgie traumatologique
et les observations 31, 32 et 33
traitent des fractures du rachis cer-
vical. La tétraplégie y est décrite
avec son pronostic sombre :
“Instructions concernant une
luxation dans une vertèbre du cou.
Si tu examines un homme ayant
une luxation dans une vertèbre de
son cou, et si tu trouves qu’il n’a
plus le contrôle de ses deux bras et
de ses deux jambes à cause de
cela, alorsque sa vergeest en
érection à cause de cela, et que
l’urine tombe de son membre sans
qu’il en ait conscience ; sa chair
par ailleurs a reçu de l’air et ses
yeux sont remplis de sang ; c’est
une luxation d’une vertèbre de son
cou, s’étendant jusqu’à sa colonne
vertébrale, qui est cause qu’il n’a
plus le contrôle de ses deux bras et
de ses deux jambes. Et si c’est la
vertèbredu milieu de son cou qui
est luxée, c’est une émission de
sperme qui survient à son membre.
Tu diras à son sujet : un homme qui
aune luxation dans une vertèbre
de son cou, tandis qu’il n’a plus le
contrôle de ses deux jambes et de
ses deux braset que son urine
s’échappe goutte à goutte, c’est
une maladie pour laquelle on ne
peut rien faire”.
Dans les autres cas le repos
allongé est conseillé ainsi que le
traitement des plaies par bandages
enduits de gomme ou de résine.
Les vertus hémostatiques de la
viande fraîche sont maintes fois
signalées en application locale sur
les plaies récentes. Rappelons que
Harvey Cushing emploiera des
muscles de pigeons dans ses inter-
ventions crâniennes et que cette
pratique se maintiendra jusqu’en
1960.
Les soins étaient pratiqués par des
médecins spécialistes issus d’une
formation familiale et de la fréquen-
tation de Maisons de Vie (regrou-
pant différents intervenants répu-
tés), et parfois des prêtres (comme
les prêtres de Sekhmet) s’il faut en
croire Strabon.
Anoter que nombre de momies de
nos musées et du British Museum
sont porteuses d’une atteinte par
tuberculose vertébrale (qui sera
décrit par Percival Pott, 1714-1788)
et rénale avec lithiases calicielles.
De même on constate chez elles des
fractures rachidiennes par chute de
char ou de cheval ou d’accidents de
chantiers, et des déformations sco-
liotiques.
Du fait que ces manuscrits ont
été copiés sur plusieurs siècles,
on vaobserver comme pour
notre Moyen-âge, une sclérose
lente de la pensée médicale en
Egypte car il était hors de ques-
tion pour les médecins de l’épo-
que de s’écarter de ces recom-
mandations. La renaissance
viendra avec Hérophile
d’Alexandrie 1300 ans plus
tard.
Première grande amnésie, au fil
du temps nous en verrons d’au-
tres cas.
HIPPOCRATE
460-377(ou 356) av. J-C
Il fit un long séjour en Egypte
(Memphis). Ses connaissances ana-
tomiques et son expérience théra-
peutique proviennent de l’observa-
tion de cadavres de guerriers tués au
combat dans les nombreux conflits
de l’époque (fin des guerres médi-
ques, conflits entre cités : guerre du
Péloponnèse), et probablement de
dissections animales.
Il s’intéressa aux fractures sans
troubles neurologiques mais avec
cyphose évolutive. Le patient était
étendu sur le ventre et placé en
traction par le jeu de deux rouleaux
crantés. Le praticien s’asseyait sur
le dos du patient ou lui transmettait
la force de son propre poids par
l’intermédiaire d’une planche. En
décubitus dorsal il était conseillé
de placer une outre pleine d’eau
sous le sommet de la cyphose.
Cette même idée sera reprise par
Rauchfuss (1835-1915) et Bohler
(1885-1973) en utilisant un cadre
pour réduction posturale.
Cette technique connue sous le
nom de la planche d’Hippocrate est
relayée par celle dite de l’échelle
dans laquelle le sujet attaché sur
une échelle est suspendu par les
pieds.
Outre la description des cyphoses
post-traumatiques le traité des arti-
culations du Corpus Hippocraticum
(72 livres dont 6 consacrés à la chi-
rurgie) fait état des scolioses, des
fractures d’épineuses, des sidéra-
tions médullaires (concussion) et
des dislocations vertébrales, de la
douleur sciatique.
ALEXANDRIE
Par la pratique des autopsies de
criminels, autorisées par Ptolémée
ISoter (dit le sauveur, 323-283 av
J-C), cette ville fut durant 40 ans
le berceau des pères de l’anatomie
(Hérophile) et de la physiologie
(Erasistrate).
Ptolémée II Philadelphe groupa
tout le savoir d’alors dans une
bibliothèque de 500 000 volumes.
L’héritage gréco-égyptien nous
donne, grâce à Hérophile (325 ou
340-255 av J-C) et Erasistrate
(310 ou 330-250 av J-C), lesiège
dela pensée dans le cerveau et la
notion que les nerfs (dissociés des
tendons) sont conducteurs de l’in-
flux moteur et de la sensibilité.
Les dissections reprendront de
manière ponctuelle (Montpellier :
1342), puis surtout avec Vésale,
1800 ans plus tard.
C’est la deuxième grande amné-
sie.
Dans la Bible, dans la lutte de Job
contre l’Ange, il est clair que le
rôle moteur du nerf sciatique est
connu (Genèse 32 :25-32).
En résumé le rôle du cerveau,
dela moelle épinière contenue
dans le rachis et des nerfs est
bien identifié dés le 2ème siècle
avant J-C.
L’HÉRITAGE GRECO-ROMAIN
Les compilations de Celse (De re
medica) écrites pendant le règne
de Tibère (14-37 ap.J-C) n’amè-
nent rien de plus sur le rachis
GALIEN
(129 ? [130 ou 138]-200 [ou 201]
après J-C)
Né à Pergame, il décrivit correcte-
ment la colonne vertébrale avec 24
vertèbres. Mais son décompte de 58
nerfs rachidiens est faux (29 paires,
alors qu’il y en a 31). Sa connais-
sance de la pathologie traumatique
lui viendrait de ses fonctions de
médecin des gladiateurs et surtout
de ses vivisections animales. En
effectuant des sections étagées de la
moelle chez le singe et le cochon il
évalua le type de déficit d’autant
plus sévère que la lésion est plus
haut située. Il isole les cyphoses, les
lordoses, les scolioses et comme
Hippocrate rattache certaines
cyphoses à la présence de “tubercu-
les” dans les poumons. Le pronostic
étant meilleur dans les localisations
sous-diaphragmatiques en raison de
la possibilité d’évacuation sponta-
née d’abcès ossifluents dans le pli
de l’aine. Il fit un voyage d’étude à
Alexandrie qui lui permit de
connaître les travaux d’Hérophile.
Mais comme les dissections de
corps humains étaient interdites,
beaucoup de ses extrapolations de
l’animal à l’humain sont entachées
d’erreur. Ainsi, concernant le
sacrum, il décrit 3 ou 4 pièces
sacrées et 3 vertèbres coccygiennes.
Au 4ème siècle, Aurelianus Caelius
décrit la douleur sciatique et ses
traitements empiriques.
APRÈS LA CHUTE DE L’EMPIRE
ROMAIN D’OCCIDENT,
En 476, (invasions des 3ème, 4ème,
5ème et 6ème siècles dénommées à
présent Grandes Migrations), le
refuge de la pensée médicale fut
pour un temps l’empire d’Orient
(395-1453) et le médecin byzantin
Paul d’Egine (VII ème siècle) dans
son sixième livre consacré à la chi-
rurgie guidera les opérateurs
médiévaux. La connaissance médi-
cale va donc se trouver concentrée
jusqu’à la Renaissance dans les tra-
vaux d’Hippocrate et de Galien
diffusés par Celse (25 av-JC-50 ap-
JC) et Paul d’Egine. Ces compila-
tions gréco-latines seront traduites
enarabe quand les partisans de
Mahomet (Hégire, 622) déferleront
sur le bassin méditerranéen.
Dès 830 les Aphorismes
d’Hippocrate et les œuvres de
Galien font l’objet de traductions et
d’apports personnels par Rhazès,
Avicenne, Ali Abbas, Abulcasis,
Avenzoar, Averroès. L’ouvrage de
techniques chirurgicales le plus
complet est le Kitab al-Tasrif
d’Abulcasis (Abu’l Qasim Khalaf
ibn Abbas Az-Zahrawi, à
Cordoue en 926) avec le traitement
des fractures et luxations vertébra-
les ainsi que celui des caries rachi-
diennes. Les médecins arabes vont
sauvegarder les enseignements
grecs et latins, qui parviendront en
Europe par les traductions des ara-
bisants.
LEMOYEN-ÂGE
(987-1460 pour Georges Duby)
En 1150 Gérard de Crémone donne
une version latine de la Chirurgie
d’Abulcasis.
Vers 1235, le catalan Arnold de
Villeneuvetraduit les textes
d’Avicenne et d’Avenzoar. La chi-
rurgie en générale était faite par
des barbiers chirurgiens dont l’en-
seignement était assuré par com-
pagnonnage. L’enseignement de
l’Anatomie était mené par de rares
dissections (Montpellier, Padoue,
Salerne, Paris, Bologne : 4 à 5 par
an, en hiver, sur des criminels sup-
pliciés) commentée du haut d’une
chaire par un enseignant qui lisait
des passages de Galien en donnant
quelques indications à un démons-
trateur d’anatomie qui effectuait la
dissection.
Les auteurs d’ouvrage consacré à la
chirurgie de l’époque : Henri de
Mondeville (1260-1320 : Cyrurgia)
et Guy de Chauliac (1300-1368 :
La Grande Chirurgie ou Guidon
(1363) ne traitent pas de la patholo-
gie vertébrale de manière originale.
XVI ÈME SIÈCLE ET RENAISSANCE
VESALE André (1514-1564)
Dans sa description de la colonne
(De Humani Corpori Fabrica,
1543) et les illustrations de Van
Calcar,on retient l’identification
du couple atlas-axis dans la rotation
de la tête sur le cou ; par contre il
retient 34 vertèbres puisque, pour
lui, le sacrum est formé de 6 pièces
(5 pièces pour Léonard de Vinci) et
le coccyx par 4 osselets cartilagi-
neux. La colonne vertébrale (dor-
sum) est représentée sans courbu-
res. Les trous de conjugaison sont
dénommés foramina nervi emitten-
dis parata.
La moelle épinière est décrite
jusqu’au canal sacré (elle s’arrête
en L1-L2), les paires de racines
rachidiennes sont au nombre de 30
et dessinées horizontales (elles sont
HISTOIRE DE LA CHIRURGIE
DU RACHIS
JEAN-MARC FUENTES
Jean-Marc Fuentes - Montpellier
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obliques), le canal épendymaire est
omis (redécouvert par J-B Sénac en
1724), les sillons antérieur et posté-
rieur et surtout les renflements cer-
vicaux et lombaires sont négligés.
La même année, Copernic (1543)
sort la compréhension du monde
céleste de l’interprétation d’Aristote
avec son ouvrage De Revolutionibus
Orbium Celestium.
PARÉ AMBROISE
(1517 ou 1510 -1590)
Suivant les armées des guerres
d’Italie, il eut à traiter des lésions
traumatiques rachidiennes et décri-
vit une méthode de réduction en
suspendant le patient par la partie
supérieure de son corps, les mem-
bres inférieurs pendants dans le
vide. On lui devrait le terme de trou
de conjugaison (les nerfs sortent de
lacolonne par paires qui se conju-
guent de chaque côté).
Relevons encore une fois la
conjonction fertile de la guerre
et de la chirurgie
Cela se vérifiera dans le dernier
conflit européen de 1939-1945
avec Seddon et Gutman.
Relevons aussi la probité de
Maître Amboise Paré de Laval
qui répondit à Henri II, qui
l’exhortait à s’occuper de lui
mieux que de ses autres
patients, que c’était impossible
car il les soignait tous comme
des rois.
XVII ÈME SIÈCLE
Borelli Giovanni Alfonso (1608-
1679)
Dans De Motu Animalium étudie
les articulations du rachis et
reconnaît le rôle essentiel des dis-
ques. Il montre que le centre de
gravité est situé en avant de la pre-
mière vertèbre sacrée (en 1990,
White et Panjabi le placeront 4
centimètres en avant de S1).
En 1695, A.M. Vasalva, décrit le
liquide céphalo-rachidien.
Dans ce siècle William Harvey
(1578-1657) découvre la circulation
sanguine, Marcello Malpighi (1628-
1694) la circulation capillaire,
Antonie van Leeuwenhoek (1632-
1723) le microscope, Thomas Willis
(1621-1675) la vascularisation céré-
brale.
XVIII ÈME SIÈCLE
Le siècle des Lumières
Dionis dans sa Cinquième démons-
tration au jardin royal (cours “à
portes ouvertes et gratuits” donnés
entre 1673 et 1706) (Cours d’opé-
rations de chirurgie démontrées au
Jardin Royal) évoque le traitement
des gibbosités par des corsets ingé-
nieux. Il compte 30 vertèbres et
sépare les déformations rachidien-
nes de causes externes (traumatis-
mes, activités pénibles) des causes
internes (relâchements des liga-
ments).
avec une interprétation erronée sur
leurs origines (irritation des gaines
par des agents nocifs).
En1779, Pott fait la description
restée classique, des paralysies
consécutives à la tuberculose rachi-
dienne.
Herbineaux en 1782 reconnaît le
spondylolisthésis comme facteur
d’obstacle aux accouchements.
Sir Percival Pott (1713-1788) et
Clyne préconisent le drainage des
abcès tuberculeux para-vertébraux,
mais les infections post-opératoires
constituent un obstacle considéra-
ble au début de la chirurgie rachi-
dienne puisque le malade de Clyne,
qui effectua la première laminecto-
mie en 1814, décéda d’infection.
Nequittons pas le 18ème siècle sans
rappeler que Nicholas André, en
1741, forge le terme orthopédie
(orthos : droit et paideiaterme prove-
nant du mot pais, enfant) qui va dési-
gner cette partie de l’art médical
dédié à la correction des déforma-
dra le même résultat en Angleterre.
Dans son travail consacré à l‘ostéo-
logie (Osteologia) il décrivit les
courbures normales de la colonne
vertébrale et les cypho-scolioses.
En 1747, Lapeyronie légua au
Collège, l’hôtel Saint Côme avec
un amphithéâtre d’anatomie à
Montpellier.
Cotugno [Domenico Felice Antonio
(1736-1822)] en 1764 décrit la
névralgie sciatique et la cruralgie (De
Ischialde Nervosa Commentarus),
Pourfour du Petit, chirurgien de
l’armée des Flandres, décrit en
1727, soit 125 ans avant Claude
Bernard et 142 ans avant Horner, les
conséquences oculaires de la sec-
tion du nerf sympathique cervical.
En1728, Pierre Chirac crée le
diplôme de Médecin-Chirurgien
scellant la scission complète entre
barbier-chirurgien et chirurgien.
Le collège Royal de Chirurgie fut
fondé en 1741.
En 1745, William Cheselden obtien-
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phie gazeuse et les hydrosolubles
iodés en 1970 (Pantopaque, Dimer
X). Ces deux techniques co-habi-
teront jusqu’en 1975.
C’est à partir de la 3ème décade du
XXème siècle que l’histoire moderne
dela chirurgie du rachis va démar-
rer et imploser dans des directions
couvrant toute la pathologie de la
colonne vertébrale.
HISTOIRES DES DYNASTIES
(1932 à nos jours)
LaDynastie du Disque
Intervertébral
1932 : Le disque lombaire
Mixter (William Jason Mixter,
1880-1958) opère un malade de 27
ans porteur d’une hernie discale
Le Rachis - Tome 3 - N° 5 Novembre 2007 16
tions du corps. Le frontispice de son
traité L’orthopédie (1741, Paris) qui
représentait un échalas redressant un
jeune plant tordu, deviendra le logo
denombreuses sociétés d’orthopédie
et de groupe d’étude de la scoliose.
XIX ÈME SIÈCLE
En1804, Rousset cité par Dubarry
note les troubles sensitifs apparais-
sant lors des douleurs sciatiques.
Charles Bell (1774-1842) distingue
la paraplégie flasque de la paraplé-
gie spastique, la phase du choc spi-
nal est identifiée avec ses consé-
quences urinaires et rectales. En
1816, il dénoncera et condamnera
lalaminectomie en raison de ses
mauvais résultats.
En1829, Alban Gilpin Smith
(1788-1869) réalise, avec succès,
la première laminectomie lombaire
enAmérique du Nord pour fracture
avec aggravation secondaire.
En 1841, Valleix note que la dou-
leur sciatique peut-être réveillée
par pression sur le trajet du nerf.
Entre 1846 et 1848, Brown-
Séquard (1817-1894), décrit le
tableau clinique de l’hémi-section
dela moelle cervicale qui porte
son nom.
En 1864, Lasègue précise une
manœuvre permettant de diagnos-
tiquer la souffrance du nerf sciati-
que.
Malgaigne (1806-1865) préconise
la trépanation du canal rachidien
pour enlever les séquestres osseux
compressifs ouvrant la voie à
William Mac Ewen (1848-1924)
qui guérit son malade porteur d’une
compression médullaire (probable-
ment une épidurite tuberculeuse)
par laminectomie en 1883.
En 1853, Desormenaux considéré
comme le père de l’endoscopie,
perfectionne le matériel de l’épo-
que en utilisant des lentilles et un
liquide alcoolique pour améliorer
la luminosité.
En 1856 Chassaignac recommande
le drainage des voies d’abord.
Les travaux de Semmelweis (1818-
1865) et de Pasteur (1822-1895)
sur l’asepsie,de Lister (1882-
1912) sur l’antisepsie (1867) vont
permettre le développement de la
chirurgie. En 1882, Robert Koch
isole le bacille tuberculeux mais
l’antibiothérapie ne seradisponi-
ble que 60 ans plus tard.
En 1891, Hadra (1842-1903), réa-
lise probablement la première
ostéosynthèse du rachis cervical
en effectuant un laçage au fil d’ar-
gent entre C6 et C7.
Victor Horsley(1857-1916) en
1887 réussit l’ablation d’une lésion
d’origine méningée sur les indica-
tions de sa localisation proposées
par William Gowers, chez un
patient de 42 ans. Entre 1893 et
1895 il opèrera 3 patients pour des
pachyméningites tuberculeuses et
4autres patients pour traumatis-
mes cervicaux par laminectomies.
En 1891, Abbe ponctionne un
kyste médullaire syringomyélique.
En 1893, Chipault précise la topo-
graphie vertébro-médullaire à par-
tir des processus épineux comme
repères. Il décrira une voie d’abord
trans-orale qui ne sera utilisée
qu’en 1918 par Lefort puis par
Fang et Ong en 1962.
En 1895, Wilhelm Konrad Röentgen,
décrit les rayons X.
Enjuin de la même année Harvey
William Cushing (1869-1939), le fon-
dateur de la neurochirurgie moderne,
décroche son diplôme de médecin.
Ménard V., toujours en 1895, réa-
lise les premières costo-transver-
sectomies dans les paraplégies
pottiques avec drainage latéral. En
1897, il indique qu’une aréflexie
achilléenne peut accompagner cer-
taines douleurs sciatiques.
XX ÈME SIÈCLE
Bohler (1885-1973) précise les
règles de la réduction orthopédique
des fractures et planifie un pro-
gramme de rééducation en lordose.
L’invention des Rayons X par
Röntgen en 1895 sera pleinement
exploité par Sudeck,un élève de
Bohler, (1866-1945) et surtout par
Davis qui demandera systémati-
quement un cliché de face et de
profil dans l’inventaire des fractu-
res rachidiennes (premier cliché
de profil de la colonne en 1925 !
Auparavant, les radiographies
étaient prises de face uniquement).
En 1904, Déjerine, Lortat-Jacob
décrivent la “sciatique radicu-
laire”.
En 1911, Albee, réalise des fusions
postérieures inter-épineuses avec
des greffons autologues tibiaux. La
même année Hibbs Russel met au
point sa technique de greffe pos-
tero-latérale avec décortication,
pour le traitement de la scoliose et
du mal de Pott.
Elsberg en 1916 codifie la lami-
nectomie bilatérale et insiste sur la
fermeture étanche de la dure-mère
en cas d’exploration intra-thécale.
Toujours en 1916 Queckenstedt-
Stookey décrivent une méthode
manométrique permettant de mesu-
rer la pression du liquide céphalo-
rachidien et de déceler un blocage
des espaces sous-arachnoïdiens.
En 1921 Sicard et Forestier utili-
sent la bascule d’une bille de lipio-
dol pour localiser les compres-
sions médullaires. Cette technique
sera utilisée jusqu’en 1965 pour
être supplantée par la myélogra-
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pédiculaire “droit devant”, à un
moment où les plaques de Wilson
et de Meurig-Williams posées sur
les épineuses étaient plus qu’in-
suffisantes.
Le principe du droit devant fut peu à
peu modifié (René Louis, Argenson,
JM Fuentès, Magerl, Dick, Kluger,
W
einstein) pour être actuellement
plus oblique en dedans avec une
porte d’entrée plus haute et plus
externe.
Initialement les montages rigides
(toujours d’actualité dans le traite-
ment des tumeurs et en traumatolo-
gie) se sont complétés par les
ostéosynthèses semi-rigides (B.
Lasalle, G. Perrin, R. Cavagna, Ch.
Mazel), puis dynamiques (Gilles
Dubois, 1994).
Enmême temps Jacques Sénégas
développe l’implant inter-épineux
flottant dans les sténoses lombai-
res (1986), idée qui verra une
seconde naissance avec le X-Stop
en 2004, 18 ans plus tard.
La dynastie des déformations
rachidiennes
En 1958, Harrington, développe
un matériel de réduction par voie
postérieure des scolioses.
Eduardo Luque (1982) propose des
laçages sous-lamaires pour réduire
de manière poly-segmentaires les
déformations rachidiennes. Un
développement avec le Hartshill
System sera abandonné en raison
d’une incidence élevée de troubles
neurologiques.
La même année, Cotrel et
Dubousset, généralisent la dérota-
tion avec un matériel original qui
rendra également d’énormes servi-
ces en traumatologie pour les réduc-
tions difficiles.
En 1964, Dwyer, propose la cor-
rection des scolioses par voie anté-
rieure, suivi par Zielke en 1975 et
Kaneda en 1991 (dérotation ven-
trale). L’abord antérieur thoraco-
lombaire avait été prôné dès 1955
par Hogdson.
Les travaux de Passuti, Chopin,
Stagnara, Guillaumat, Nachemson,
Weinstein, Kostuik, Lonstein ont
permis une meilleure compréhen-
sion des problèmes sans oublier la
contribution de Roussouly et
Duval-Beaupère sur les troubles
de l’équilibre sagittal.
La cimentoplastie voit le jour en
1984 avec Galibert et Deramond.
La kyphoplastie apparaîtra quel-
ques 12 ans plus tard (1996).
Primitivement destinée au traite-
ment des hémangiomes verté-
braux, les indications de la ver-
broplastie furent élargies au traite-
ment percutané des métastases et
des tassements ostéoporotiques.
LA DERNIÈRE DÉCENNIE DU XXÈME
SIÈCLE
La chirurgie endoscopique
rachidienne
Elle débute en 1983 (Forst et
Haussmann) par la nucléotomie
par voie postérieure interlamaire
(J. Destandau) ou par voie transfo-
raminale (Mathews, 1996). Avec le
perfectionnement des endoscopes
elle sera élargie aux traitements
L5-S1 gauche en 1932 et “référé”
par Joseph S. Barr.
En 1934, Mixter et Barr présentent
une série d’observations similaires
etreconnaissent l’origine discale
des enchondromes, nodules de
Schmorl et autres dénominations
de l’époque, dans un papier resté
célèbre de la New England Surgical
Society.
Ralph B. Cloward (1908-2000),
présent lors de l’attaque de Pearl
Harbour le 7 décembre 1941, eut à
traiter les “low-back pain” des
reconstructeurs de la base ; dès
1943 il développa les PLIF (arthro-
dèse intersomatique par voie posté-
rieure), publiées en 1953 dans le
Journal of Neurosurgery.
Son intérêt pour le rachis cervical
lui fit développer une instrumenta-
tion originale pour les arthrodèses
par voie antérieure (1958). Sans
modestie il se surnommait lui-
même “le Michel-Ange” de la neu-
rochirurgie.
En 1975 Shealy, puis Mac Culloch
(1980) et Bogduk (1987) populari-
sent la thermocoagulation facet-
taire par radio-fréquence.
Les prothèses discales lombaires
apparaissent en 1980, imaginées
par Schellnac et Buttner (ex-RDA)
et implantées pour la première fois
par Zippel en 1984.
Le disque cervical
La chirurgie par voie antérieure du
disque cervical débute aux USA
en 1955 avec Robinson et Smith
et en Europe avec Dereymaker et
Munier en 1956.
En 1957, Cauchoix, Binet et
Evrard proposent l’abord antérieur
de la jonction cervico-dorsale par
cervico-sternotomie.
En 1970, Orosco et Lovet imagi-
nent l’ostéosynthèse par plaque
antérieure vissée des lésions trauma-
tiques du rachis cervical. Jacques
Sénégas en 1972, P. Galibert et P.
Grunewald et W. Caspar perfection-
nent la technique.
Les cages de fusion apparaissent
en 1993 (G. Robert, P. Kehr,
Weidner), rapidement déclinées en
titane (Bagby et Kuslich, Harms, J.
Benézech, 1997) ou en carbone
(Ray) puis en peek avec des masse-
lottes de substituts osseux.
La recherche sur les protéines
ostéo-inductrices (BMP) et leurs
applications cliniques permettent
de diminuer les risques de pseu-
darthroses.
Après les années arthrodèses, en
1989, Brian Cummings imagine
une prothèse métal-métal (Bristol
disk), idée reprise en 1990 par
Vincent Bryan.
Les sténoses rachidiennes
1949. Henk Verbiest dans son
Hommage à Clovis Vincent précise
le rôle du canal lombaire étroit
dans la claudication neurologique
intermittente et José Aboulker en
1965 fait une revue des causes des
myélopathies cervicales d’origine
rachidienne.
La Dynastie du vissage pédicu-
laire
Raymond Roy-Camille (1927-1994)
En 1963 il introduisit le vissage
des lésions du rachis thoracique
(hernie discale dorsale, métasta-
ses) et lombaire par Regan (1994),
Rosenthal, Mario Brock, Zdeblik
(1995) et Le Huec (1996).
Associée aux techniques et voies
d’abord mini-invasives avec Mayer
(1996) et Onimus (1996) elle a
donné un nouvel essor à la chirurgie
rachidienne de la dernière décade du
20ème siècle avec le développement
également de la chirurgie per-cuta-
née (ostéosynthèses et arthrodèses
intersomatiques percutanées).
HISTOIRES PARALLELLES
Iln’est guère possible de dissocier
l’histoire de la Chirurgie en général
etcelle de la Chirurgie du Rachis
en particulier, sans y associer l’es-
sor de l’anesthésie et de l’imagerie.
L’ANESTHÉSIE
Les progrès de l’anesthésie générale
d’abord par inhalation (éther, chlo-
roforme), puis par voie veineuse, la
pratique de l’intubation endo-tra-
chéale (1914-1918) finiront par
supplanter l’anesthésie locale qui
perdurera quelque temps en neuro-
chirurgie crânienne (un assistant de
Bohler,Schneck, l’utilisait dans les
réductions de fractures rachidien-
nes). L’emploi des curares se géné-
ralisant permettra également un
plus grand confortopératoire.
L’IMAGERIE RACHIDIENNE
1970-1973 : Début de l’utilisation
du scanner (Godfrey N Hounsfield,
AM Cormack et Ambrose James)
en utilisant les travaux d’Oldendorf
(1961).
1980 : l’angiographie médullaire
(René Djindjian) et la phlébogra-
phie complètent l’approche diag-
nostique et thérapeutique (emboli-
sation des tumeurs très vasculari-
sées et des malformations vascu-
laires).
1983-1986: l’IRM rachis-médul-
laire. Le principe en est définit en
1946 par Bloch et Purcel, puis
développé par Damadian en 1971
et les premières images utilisables
en 1974 par Lauterbur. Outre les
services rendus en pathologie
tumorale, infectieuse, elle est deve-
nue indispensable en pathologie
dégénérative (Modic M, 1991).
La neuronavigation rachidienne, la
radiothérapie guidée par ordinateur
sont les acquis les plus récents,
ainsi que la fluoro-navigation.
L’ANTIBIOTHÉRAPIE ET LA
RÉÉDUCATION
Elles complètent l’arsenal théra-
peutique du chirurgien du rachis.
LA CHIRURGIE MÉDULLAIRE
Elle va devenir une technique sûre
avec le microscope opératoire (vul-
garisé par Yasargil), la coagulation
bipolaire (Greenwood 1940, Malis),
le laser (Hermann, 1988), le bistouri
ultra-sonique, l’échographie per-
opératoire. Les grands pionniers
furent Cushing (1905) Elsberg
(1911), Eiselberg (1913), Horrax
(1939), Sloof (1964).
LEFUTUR
La chirurgie du rachis est en passe
dedevenir une sur-spécialité.
Exercée par deux corporations
issues de la neurochirurgie et de
l’orthopédie, elle sera bientôt une
spécialité en soi. Les ateliers de for-
mation générés par la Société
Francophone de Neurochirurgie du
Rachis et par la Société Française
deChirurgie du Rachis, l’enseigne-
ment d’un DIU, sont autant de
garanties pour assurer l’avenir de
cette spécialité à hauts risques.
Iln’était pas inutile de rappeler ses
origines et les hommes-phares qui
ont été ses pères.
Les rapports de la médecine avec
l’argent, la gloire, les responsabili-
tés civiles ou pénales, la formation
et les guerres ont toujours été
depuis le début des zones d’ombres.
L’argent était déjà un problème
pour Mondeville qui exigeait d’être
payé sitôt le soin prodigué.
Les implications entre l’industrie
des matériels et les concepteurs
laissent à penser qu’il n’y a rien de
nouveau sous le soleil.
La gloire de soigner les grands de
son temps (Vésale fut médecin de
Charles Quint, Guy de Chauliac
des Papes d’Avignon) une tenta-
tion forte mais dangereuse en cas
d’échec. Hippocrate refusa de soi-
gner Xerxès car en cas de non-
résultat la mortdu médecin pouvait
s’en suivre.
Pétrarque traita Guy de Chauliac de
“vieillard prétentieux et impuis-
sant” quand sa divine Laure fut
emportée dans une épidémie de
peste alors qu’il avait trépané avec
succès le pape Clément VI pour des
céphalées.
On a vu des morts professionnel-
les dans certains procès récents.
Les progrès de la chirurgie suivent
les guerres, faut-il continuer les
conflits armés de par le monde
pour pouvoir sauver d’autres vies ?
Amboise Paré fut écarté de la
Faculté de Paris car il ne parlait pas
latin. Certaines carrières de notre
époque rappellent cet ostracisme
car il faut apprendre un nouveau
latin.
Combien d’idées fécondes ont été
redécouvertes plusieurs siècles
plus tard. Et si on faisait le compte
de celles qui ont été définitive-
ment perdues dans l’incendie de la
Bibliothèque d’Alexandrie et les
grands holocaustes modernes ?
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