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« La douleur ne fait pas de morts mais des martyrs ».
INTRODUCTION
En Europe, 75 millions de personnes sont victimes de douleurs chroniques, dont 7 millions de
Français. Un tiers ne reçoit aucun traitement et les opioïdes forts ne représentent que 4% de
prescriptions d’antalgiques en France. Soixante-dix pour cent de ces patients douloureux
chroniques sont pris en charge par le médecin généraliste.
Ces chiffres sont issus de l’étude
1
Pain in Europe réalisée en 2002-2003. Ils confirment
l’insuffisance d’évaluation et de la prise en charge de la douleur chronique et soulignent la
sous-utilisation des opioïdes forts en Europe (8).
Les recommandations actuelles de l’AFSSAPS sur le bon usage des opioïdes forts dans le
traitement des douleurs chroniques (2) ont pour but de préciser et rappeler les principaux
éléments permettant de décider, initier, suivre et arrêter un traitement par opioïdes forts.
Environ 60% des consultations chez le médecin généraliste sont motivées par une
symptomatologie douloureuse (28).
Selon la définition de l’Association Internationale de l’Etude sur la Douleur (IASP)
2
: « la
douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire
existante ou potentielle ou décrite en terme d’une telle lésion ». On admet actuellement que la
douleur comporte un caractère multifactoriel et une dimension émotionnelle et affective qui
font d’elle un symptôme totalement subjectif. Ses caractéristiques dépendent de ce que
ressent chaque être humain. Son expression dans le temps peut aboutir à la création d’un
syndrome à part entière: la douleur chronique.
La prise en charge des douleurs chroniques est différente de celle des douleurs aiguës. Si le
maniement des opioïdes est maintenant bien cerné dans le cadre des douleurs post-opératoires
ou dans le cadre de l’urgence, il persiste encore des incertitudes quant à leur intérêt dans le
traitement des douleurs chroniques, et par conséquent sur leur utilisation en ambulatoire.
C’est pourquoi notre travail se propose d’évaluer les connaissances déjà acquises sur
l’utilisation ou la non utilisation des opioïdes dans les douleurs chroniques d’étiologie
maligne et bénigne, les perceptions et les opinions des médecins généralistes concernant la
prise en charge de la douleur par les morphiniques, ainsi que les problématiques rencontrées
avec l’utilisation de ces produits, à partir des résultats d’une enquête menée auprès des
médecins généralistes du Val-de-Marne.
Dans un premier temps, nous présenterons les caractéristiques de la morphine (et des opioïdes
en général) puis la physiopathologie de la douleur et les mécanismes générateurs de la
douleur chronique. Nous étudierons ensuite quelles sont les habitudes de travail effectives des
médecins généralistes d’après une enquête menée sur
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le maniement des morphiniques.
La dernière partie portera sur une discussion à propos des pistes d’amélioration possibles.
1
The Pain in Europe-A Report est une étude menée sur 46 000 personnes interviewés à travers l’Europe entre
octobre 2002 et juin 2003.
2
L’International Association of the Study of Pain (IASP) a été créée en 1973, elle a 6900 membres dans 106
pays, un congrès international annuel et un journal official “PAIN”.