analyse de prescription des morphiniques aupres des medecins

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SOUTENANCE A CRETEIL
UNIVERSITE PARIS VAL- DE- MARNE
FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL
∗∗∗∗∗∗∗∗∗∗∗∗∗∗∗∗∗
ANNEE 2008
N°
THESE
POUR LE DIPLOME D’ETAT
DE
DOCTEUR EN MEDECINE
Discipline : Médecine Générale
--------------Présentée et soutenue publiquement le :
à: CRETEIL (PARIS XII)
Par VISU épouse ROSCOULET Doïna-Adriana
Née le 7 Mars 1973 à Bucarest (Roumanie)
------------------TITRE : ANALYSE DE PRESCRIPTION DES MORPHINIQUES
AUPRES DES MEDECINS GENERALISTES DU VAL DE
MARNE
DIRECTEUR DE THESE :
M.BEDIN Arnaud
Signature du
Directeur de thèse
LE CONSERVATEUR DE LA
BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE
Cachet de la bibliothèque
universitaire
REMERCIEMENTS :
A mon directeur de thèse, Monsieur Arnaud Bedin pour m’avoir proposé ce
travail, pour son aide précieuse, sa rigueur scientifique et ses conseils, mes plus
sincères remerciements.
A tous les médecins généralistes du Val de Marne qui ont bien voulu répondre à
mon questionnaire et qui ont permis ainsi la réalisation de cette thèse.
Aux membres du jury de m’avoir fait l’honneur d’être présents lors de ma
soutenance.
A Adrian, mon mari, pour son soutien, son aide et ses compétences techniques,
ainsi que pour sa patience…
A mes parents, pour leur soutien constant et tendre, très précieux même venant
de 2500 km.
2
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION ..................................................................................................................... 5
PARTIE I: LA MORPHINE ...................................................................................................... 6
A-HISTORIQUE ................................................................................................................... 6
B-PHARMACOLOGIE DE LA MORPHINE ...................................................................... 7
C -PROPRIETES PHARMACOLOGIQUES DES MORPHINIQUES ............................... 9
D- MODALITES DE PRESCRIPTION DES MORPHINIQUES ...................................... 10
E-PRINCIPAUX ANTALGIQUES OPIOÏDES FORTS .................................................... 11
F- REGLEMENTATION DE L’UTILISATION DES STUPEFIANTS ............................ 14
G-INDICATIONS USUELLES DE LA MORPHINE ........................................................ 16
PARTIE II: LA DOULEUR .................................................................................................... 20
A-HISTORIQUE DE LA PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR ................................ 20
B- MECANISMES DE LA DOULEUR.............................................................................. 22
C- LES VOIES DE LA DOULEUR .................................................................................... 23
D- MECANISMES PHYSIOPATHOLOGIQUES DES DOULEURS CHRONIQUES .... 27
E-OUTILS ET METHODES D’EVALUATION EN DOULEUR CHRONIQUE ............. 28
PARTIE III: ENQUETE AUPRES DES MEDECINS GENERALISTES DU VAL DE
MARNE ................................................................................................................................... 31
A-INTRODUCTION ........................................................................................................... 31
B- METHODOLOGIE DE L’ENQUETE ........................................................................... 31
C- RESULTATS DE L’ENQUETE .................................................................................... 33
PARTIE IV : DISCUSSION.................................................................................................... 45
PARTIE V : CONCLUSION ................................................................................................... 51
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................... 52
ANNEXES ............................................................................................................................... 55
ANNEXE 1 : DECRET EN CONSEIL D'ETAT 2002-1471 DU 17/12/2002 .................. 55
ANNEXE 2 : DECRET EN CONSEIL D'ETAT 92-963 DU 07/09/1992 RELATIF AUX
SUBSTANCES ET PREPARATIONS VENENEUSES ET MODIFIANT LE CODE DE
LA SANTE PUBLIQUE...................................................................................................... 56
ANNEXE 3 : DECRET EN CONSEIL D'ETAT 92-963 DU 07 SEPTEMBRE 1992 ..... 57
ANNEXE 4 : LA CHARTE DU PATIENT HOSPITALISE .............................................. 58
ANNEXE 5 : QUESTIONNAIRE DOULEUR DE SAINT ANTOINE (QDSA) .............. 59
ANNEXE 6 : HOSPITAL ANXIETY AND DEPRESSION SCALE (HADS) .................. 61
ANNEXE 7 : QUESTIONNAIRE ....................................................................................... 62
ANNEXE 8 : PROJET DE LOI RELATIF A L’ASSURANCE MALADIE ..................... 65
3
TABLE DES ILL
USTRATIONS
FIGURE 1 : STRUCTURE CHIMIQUE DE LA MORPHINE
8
TABLEAU 1 : LES DIFFERENTS RECEPTEURS MORPHINIQUES :
9
TABLEAU 2 : AFFINITE DES MORPHINIQUES POUR LES DIFFERENTS
RECEPTEURS
14
TABLEAU 3 : LES TROIS PLANS TRIENNAUX DE LUTTE CONTRE LA DOULEUR 22
FIGURE 2 : FACTEURS HORMONAUX SUSCEPTIBLES DE SENSIBILISER LES
NOCICEPTEURS A LA SUITE D’UNE LESION TISSULAIRE
24
FIGURE 3 : LES VOIES DE LA DOULEUR : DE LA PERIPHERIE AU CORTEX
25
FIGURE 4 : PRINCIPAUX RELAIS SUPRASPINAUX IMPLIQUES DANS LA
NOCICEPTION
26
FIGURE 5 : MECANISME DE L’HYPERALGESIE :
27
FIGURE 6 : THEORIE DE LA PORTE
28
TABLEAU 4 : DONNEES D’EPIDEMIOLOGIE
35
TABLEAU 5 : GESTION DU TRAITEMENT PAR MORPHINE DANS LA DOULEUR
CANCEREUSE ET NON CANCEREUSE
40
4
« La douleur ne fait pas de morts mais des martyrs ».
INTRODUCTION
En Europe, 75 millions de personnes sont victimes de douleurs chroniques, dont 7 millions de
Français. Un tiers ne reçoit aucun traitement et les opioïdes forts ne représentent que 4% de
prescriptions d’antalgiques en France. Soixante-dix pour cent de ces patients douloureux
chroniques sont pris en charge par le médecin généraliste.
Ces chiffres sont issus de l’étude1 Pain in Europe réalisée en 2002-2003. Ils confirment
l’insuffisance d’évaluation et de la prise en charge de la douleur chronique et soulignent la
sous-utilisation des opioïdes forts en Europe (8).
Les recommandations actuelles de l’AFSSAPS sur le bon usage des opioïdes forts dans le
traitement des douleurs chroniques (2) ont pour but de préciser et rappeler les principaux
éléments permettant de décider, initier, suivre et arrêter un traitement par opioïdes forts.
Environ 60% des consultations chez le médecin généraliste sont motivées par une
symptomatologie douloureuse (28).
Selon la définition de l’Association Internationale de l’Etude sur la Douleur (IASP)2: « la
douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire
existante ou potentielle ou décrite en terme d’une telle lésion ». On admet actuellement que la
douleur comporte un caractère multifactoriel et une dimension émotionnelle et affective qui
font d’elle un symptôme totalement subjectif. Ses caractéristiques dépendent de ce que
ressent chaque être humain. Son expression dans le temps peut aboutir à la création d’un
syndrome à part entière: la douleur chronique.
La prise en charge des douleurs chroniques est différente de celle des douleurs aiguës. Si le
maniement des opioïdes est maintenant bien cerné dans le cadre des douleurs post-opératoires
ou dans le cadre de l’urgence, il persiste encore des incertitudes quant à leur intérêt dans le
traitement des douleurs chroniques, et par conséquent sur leur utilisation en ambulatoire.
C’est pourquoi notre travail se propose d’évaluer les connaissances déjà acquises sur
l’utilisation ou la non utilisation des opioïdes dans les douleurs chroniques d’étiologie
maligne et bénigne, les perceptions et les opinions des médecins généralistes concernant la
prise en charge de la douleur par les morphiniques, ainsi que les problématiques rencontrées
avec l’utilisation de ces produits, à partir des résultats d’une enquête menée auprès des
médecins généralistes du Val-de-Marne.
Dans un premier temps, nous présenterons les caractéristiques de la morphine (et des opioïdes
en général) puis la physiopathologie de la douleur et les mécanismes générateurs de la
douleur chronique. Nous étudierons ensuite quelles sont les habitudes de travail effectives des
médecins généralistes d’après une enquête menée sur 3 le maniement des morphiniques.
La dernière partie portera sur une discussion à propos des pistes d’amélioration possibles.
1
The Pain in Europe-A Report est une étude menée sur 46 000 personnes interviewés à travers l’Europe entre
octobre 2002 et juin 2003.
2
L’International Association of the Study of Pain (IASP) a été créée en 1973, elle a 6900 membres dans 106
pays, un congrès international annuel et un journal official “PAIN”.
5
PARTIE I: LA MORPHINE
A-HISTORIQUE
L’opium est un exsudat laiteux recueilli par incision, avant maturité, de la capsule des
graines de Pavot. « Opium » en grec signifie « jus ».
Les effets de l’opium sont probablement connus depuis plus de 4000 ans avant J-C:
desséché, il est utilisé par les sumériens pour ses propriétés sédatives ainsi que pour ses effets
régulateurs du transit digestif.
Ses propriétés analgésiques étaient déjà reconnues par les Grecs.
THEOPHRASTE le cite dans ses ouvrages et Déméter, la déesse grecque de la terre, se serait
consolée de l’enlèvement de sa fille Perséphone par Pluton grâce aux extraits des graines de
pavot cultivé près de Corinthe (20).
La première introduction de l’opium en Europe remonte au XIVe siècle. On attribue
son utilisation dans la pharmacopée occidentale, au XIVe siècle, à PARACELSE.
Le premier alcaloïde connu de l’opium est la morphine qui tient son nom de la
divinité Morphée, dieu grec de rêves. L’opium brut est mélangé à de l’éthanol et la morphine
extraite de cet alcool se présente sous la forme d’une poudre blanche.
Au 18ème siècle, la connaissance de cette substance tant de point de vue de ses effets
bénéfiques que de ses effets indésirables est de grande qualité puisqu’elle est employée pour
calmer les douleurs cancéreuses et invalidantes.
La découverte de la morphine reste toutefois attribuée à un médecin allemand, F.W.
SERTUERNER, en 1817 qui extrait le principe actif de l’opium et l’alcalinise grâce à
l’ammoniaque Il obtint un précipité blanc qu’il nomme « Morphium ».
GAY-LUSSAC lui attribue sa dénomination actuelle en ajoutant le suffixe « ine » à
« morphium », qui devint « morphine ».
La morphine est d’abord administrée par voie orale puis par voie transdermique.
Son utilisation prend de l’ampleur dès l’invention de la seringue hypodermique de
WOOD en 1853, méthode améliorée par Charles PRAVAZ. L’emploi de ce médicament de
soulagement déborde alors les recommandations pourtant bien codifiées qui régissaient
l’utilisation de l’opium. Son action rapide fait découvrir son potentiel dysphorisant et les
« paradis artificiels ». Rejetée, reniée, elle va conserver longtemps cette connotation
péjorative de drogue.
Lors de la Guerre de 1870, elle est utilisée de façon massive par les médecins
militaires et acquit sa notoriété. Elle était déjà utilisée à grande échelle sur les champs de
bataille de Crimée (1854-1855) et lors de la guerre de Sécession aux Etats-Unis mais dès la
fin de la guerre, apparut la « maladie du soldat », toxicomanie engendrée par l’emploi
important de la morphine.
D’abord iatrogène, la toxicomanie à la morphine devient rapidement hédoniste et sévit
dans les milieux huppés, dans le corps médical, chez les femmes (surnommées «les
morphinées ») et au sein des milieux intellectuels.
Dès 1872, LAHER en Allemagne mène des études cliniques sur la dépendance à la
morphine. Le docteur LEWINSTEIN et le pharmacologue Louis LEWIN attirent l’attention
sur la dépendance physique entraînée par la morphine en 1877, et ils parlent pour la première
fois de « morphinisme », intoxication chronique par la morphine ou ses sels.
L’apparition de la morphinomanie et de la toxicomanie à l’opium aboutit à une série
de mesures restrictives et des lois internationales.
6
La loi française du 29 octobre 1846 réprimait déjà ces abus. En 1895, est crée une
commission officielle constituée de médecins, sous l’égide du ministère de la justice destinée
à lutter contre les toxicomanies.
En 1912, à La Haye, les premières mesures internationales concernant la culture, la
transformation et le commerce de l’opium sont prises.
En 1914, aux Etats-Unis, est votée la « Harrison Act », première loi contre les
toxicomanies qui limite la prescription de morphine à usage médical.
Le 12 juillet 1916, en France, les scandales toujours plus nombreux auxquels
donnaient lieu l’usage des substances toxiques et l’insuffisance de la loi du 1846, ont amené
les législateurs à édicter des mesures spéciales et a voter une loi sur l’importation et l’usage
de substances vénéneuses. Ces substances vénéneuses sont alors classées en Tableau A, B et
C. La morphine est classée dans le Tableau B et n’est délivrée que sur prescription médicale.
Cette loi est modifiée par deux décrets, le 14 septembre 1916 et le 20 mars 1930.
En 1925, le chimiste britannique R. ROBINSON établit pour la première fois la
structure moléculaire de la morphine. La synthèse de la morphine suivit 27 ans plus tard, en
1952.
Le 20ème siècle se révèle riche en découvertes pharmacologiques: synthèse des
différents morphiniques agonistes et agonistes antagonistes ; mise en évidence des récepteurs
morphiniques et des endomorphines au début des années 1970 ; clonage des trois récepteurs
morphiniques principaux: µ, δ, k très récemment. Malgré ces découvertes, il faudra attendre
la fin des années 1970 pour que la morphine récupère péniblement ses lettres de noblesse.
La découverte de la morphine marqua le début de l’ère moderne en matière de
traitement par les médicaments. Historiquement, l’isolement de la morphine est la première
extraction du principe actif d’une plante.
D’après Louis BRASSEUR, une crainte majeure de la morphine naquit suite à
l’apparition de la morphinomanie et des différentes lois répressives édictées alors. (9) .Cette
peur tenace persiste encore actuellement dans l’esprit du corps médical et des patients, et ce
malgré un regain important observé dans l’utilisation de la morphine à des fins antalgiques.
Les années 1990 sont une décennie capitale, un tournant dans l’histoire médicale de la
morphine. Le maniement en est maîtrisé et enseigné et la législation est progressivement mise
en place. Cette période voit se développer l’utilisation sous-cutanée de morphine pour aboutir
au concept d’analgésie auto-contrôlée et est marquée par l’avènement de préparations de
morphine à libération prolongée (Moscontin en 1987 puis Skenan en 1992) qui
améliorent le confort du patient.
B-PHARMACOLOGIE DE LA MORPHINE
Principal alcaloïde issu du « pavot somnifère », la morphine est considérée comme la
référence de la classe des opioïdes forts. Elle est le plus souvent utilisée sous la forme d’un
sel, sulfate ou chlorhydrate, d’efficacité identique.
Elle a une structure pentacyclique, dont la forme naturelle lévogyre représente la forme
active.
7
Figure 1 : STRUCTURE CHIMIQUE DE LA MORPHINE
La morphine subit une conjugaison avec l’acide glucuronique pour donner les morphine-3glucuronide et morphine-6-glucuronide, dont le dernier a clairement une action antalgique et
est plus puissant que la morphine elle-même. La connaissance du rôle du morphine-6glucuronide a considérablement modifié les conceptions en matière de traitement avec la
morphine. Par exemple, pour obtenir en effet donné, les doses nécessaires par voie orale étant
élevées du fait d’un effet premier passage hépatique4, il existe également une production
importante de ce métabolite qui va participer à l’action analgésique ce qui permet d’expliquer
que la voie orale est une voie d’administration parfaitement efficace.
L’élimination est avant tout rénale: lors d’une administration unique, 90% de la dose est
éliminée au cours des 24 premières heures ; En cas d’insuffisance rénale, une accumulation
des métabolites se produit, ce qui, cliniquement, peut se traduire par l’apparition ou la
majoration des effets secondaires.
La morphine est hydrophile, est très faiblement lipophile, avec un passage de la barrière
hémato-encéaphalique relativement faible.
Le clonage des récepteurs morphiniques dans les années 90 a permis une meilleure
compréhension des mécanismes pharmacologiques de la morphine et la mise au point des
molécules agonistes spécifiques. Les morphiniques agissent au niveau de plusieurs types de
récepteurs:
-les récepteurs µ: l’action des morphiniques à ce niveau est responsable de
l’analgésie. Ils existent en grande quantité au niveau de la substance péri-aqueducale, mais
aussi dans la substance gélatineuse au niveau de la moelle.
-les récepteurs k: ils existent en grande concentration au niveau de la moelle épinière.
Ils sont eux aussi responsables d’une analgésie mais également d’une dépression respiratoire
et d’une dysphorie.
-les récepteurs δ: qui seraient également en rapport avec l’analgésie et la dépression
respiratoire.
-les récepteurs σ: ils seraient responsables d’effets psychomimétiques ;
-les récepteurs ε: ils auraient un rôle dans la neuromodulation.
4
Une grande partie de la dose administrée est fortement métabolisée lors de son passage au travers de la
muqueuse intestinale (l'importance de l'extraction intestinale est d'environ 45%) et de son premier passage dans
le foie : la biodisponibilité moyenne est ainsi d'environ 30%.
8
TABLEAU 1 : Les différents récepteurs morphiniques :
Récepteurs
types
actions
µ donnant µ1 Morphine agoniste
analgésie, sédation, bradycardie
µ donnant µ2 Morphine mais moins dépression respiratoire, dépendance
affine
physique, dysphorie
§ (delta)
Enképhaline
analgésie, dépression respiratoire
K (Kappa)
Nalbuphine (NUBAIN)
analgésie, sédation
respiratoire
Sigma
Kétamine (kétalar)
dysphorie,
delirium,
HTA,
hallucinations, tachycardie, nausées
et
dépression
C -PROPRIETES PHARMACOLOGIQUES DES MORPHINIQUES
Effets sur le système nerveux
Les morphiniques provoquent:
-une analgésie qui peut être obtenue à des doses qui ne modifient pas la conscience. La
morphine est particulièrement efficace sur des douleurs par excès de nociception, alors que
les douleurs neuropathiques sont moins sensibles à son action ;
-une modification de l’humeur avec euphorie, parfois dysphorie (anxiété, cauchemars),
quelque fois une sédation, avec ralentissement idéatoire, somnolence, baisse de la vigilance ;
-les nausées et les vomissements sont une complication commune de la prise de ces
médicaments. Leur mécanisme est lié à l’action au niveau de la Chemoreceptive Trigger
Zone bulbaire qui stimule le centre des vomissements. Ces effets secondaires sont fréquents
en début de traitement, mais, habituellement une tolérance s’installe après une période
d’environ une semaine.
Les malades doivent être prévenus de la possibilité d’apparition de ces effets secondaires et
un traitement est habituellement nécessaire pour les contrôler (le métoclopramide, la
scopolamine ou des neuroleptiques, comme l’halopéridol ou le dropéridol)
-des myoclonies, nystagmus, crises convulsives: avec plus particulièrement la pethidine ;
-un myosis.
Effets sur le système digestif
Ils sont multiples:
-un ralentissement de la vidange gastrique, même à des faibles doses, qui peut participer aux
nausées-vomissements; ce phénomène est du à une action vagale et à une action sur les
récepteurs locaux ;
-un ralentissement du transit intestinal, responsable d’une constipation. Tous les
morphiniques sont susceptibles de provoquer cet effet secondaire, pour lequel il ne semble
pas y avoir de tolérance: il faut prévenir les malades et anticiper et prévoir un traitement
prophylactique (laxatifs hyper osmotiques et parfois des anticholinesterasiques) ;
-une augmentation des pression dans les voies biliaires ainsi que du tonus d’Oddi. La
pethidine, le fentanyl et la nalbuphine auraient un effet moindre.
Effets respiratoires
-la dépression respiratoire est le plus connu et le plus craint des effets des
morphiniques . Ils agissent directement sur les centres respiratoires, avec une diminution de
la réponse au CO2. Précédée par une somnolence, véritable signe d’alerte, la dépression
respiratoire est la marque d’un surdosage. Elle ne s’observe pas quand la posologie de
9
morphine est adaptée au terrain du patient et à l’intensité du syndrome algique, les influx
nociceptifs ayant un rôle protecteur en stimulant la ventilation. Ces effets sont potentialisés
par d’autres dépresseurs du système nerveux (benzodiazépines, alcool…).
-une activité antitussive: les morphiniques dépriment le réflexe de toux, action
gênante en cas de broncho-pneumopathie chronique ;
-les morphiniques peuvent aussi entraîner un certain degré de rigidité thoracique.
Effets cardiovasculaires
-les morphiniques sont en général responsables d’une bradycardie (action vagale)
-histamino-libération dose-dépendante (morphine à partir de 1 mg/kg iv et pethidine)
responsable d’une hypovolémie, hypotension.
Effets sur l’appareil urinaire
-les morphiniques sont susceptible d’entraîner une rétention d’urine, en particulier
chez les sujets prédisposés (adénome de la prostate), par augmentation du tonus des fibres
circulaires du sphincter vésical.
Effets cutanés
-les morphiniques peuvent provoquer un prurit, qui est levé par de faibles doses de
naloxone.
Tolérance et dépendance
-la tolérance aux propriétés antalgiques de la morphine se développe bien plus
lentement qu’à la plupart de ses autres effets (constipation et myosis exceptés). L’emploi de
la morphine au-delà de 10 à 20 jours s’accompagne d’une dépendance physique, c’est à dire
du risque d’un syndrome de sevrage à l’arrêt brutal du médicament. Pour l’éviter, il est
nécessaire et suffisant de réduire progressivement les doses ;
-quant à la dépendance psychique ou assuétude « addiction », elle correspond à une
envie irrépressible de se procurer une substance pour en ressentir les effets psychiques ; elle
ne se rencontre pas quand la morphine est utilisée dans un but thérapeutique. Une
surveillance particulière s’impose en cas d’administration de morphiniques au long cours
pour des pathologies non cancéreuses.
D- MODALITES DE PRESCRIPTION DES MORPHINIQUES
Instauration et poursuite d’un traitement par morphiniques
La morphine peut être utilisée quel que soit le stade de la maladie, devant une douleur
morphino-sensible et intense, soit d’emblée si la douleur est aiguë et très intense ou s’il s’agit
d’une douleur ne cédant pas aux antalgiques de palier 2. Les contre-indications à sa
prescription restent l’insuffisance respiratoire décompensée, les insuffisances rénale et
hépato-cellulaire sévères, l’allaitement. Il faut rester vigilant chez une personne âgée, un
nourrisson et faire attention aux interactions médicamenteuses.
Si l’on estime approprié l’usage d’un antalgique majeur, quelques règles doivent être suivies:
(27).
-Privilégier toujours la voie orale sauf impossibilité. Les formes injectables ne sont
pas plus efficaces.
-Il faut commencer le traitement de façon (rapidement) progressive en surveillant le
résultat obtenu de façon rapproché, afin d’atteindre rapidement les doses utiles sans les
dépasser.
-La posologie doit être constamment ajustée et peut être diminuée si nécessaire.
-Il faut penser à surveiller les effets secondaires en agissant de manière préventive.
-L’association de traitements adjuvants (anxiolytiques, antidépresseurs, antiinflammatoires, antispasmodiques) permet de corriger des symptômes annexes à la douleur et
10
donc d’améliorer la qualité de l’analgésie tout en diminuant parfois le nombre et l’intensité
des effets secondaires dus aux analgésiques utilisés.
Lorsque le traitement antalgique est insuffisant, il est habituel d’augmenter les doses
de morphine de 30 à 50%. Il n’y a pas de limite supérieure théorique aux quantités de
morphine à administrer, tant que les effets indésirables peuvent être maîtrisés(41).
Rappelons que même bien contrôles par des doses de morphine orale à horaires fixes, des
accès douloureux peuvent survenir. Ils relèvent alors d’une prise de morphine à libération
immédiate supplémentaire dont la dose correspond du sixième au dixième de la posologie
quotidienne.
Il ne faut pas rester plus de 24 à 72 heures à un palier antalgique inefficace, d’où la nécessité
de revoir le patient régulièrement en début de traitement.
La voie orale reste la voie d’administration privilégiée recommandée par l’OMS (34) pour le
traitement antalgique car elle a pour avantages d’être une voie naturelle et simple, non
invasive et laisse le patient autonome. Lorsque cette voie n’est pas ou plus possible (doses
trop importantes en per os, vomissements, occlusion, troubles de conscience, post-chirurgie
digestive), on peut avoir recours à la voie transcutanée (comme le fentanyl) ou aux voies
injectables et centrales:
-voie sous-cutanée soit en injection discontinue, soit en injection continue avec une
seringue électrique ou la technique PCA (analgésie auto-controlée) ;
-voie intraveineuse dont la première indication est le post-opératoire ou en continu
avec la technique PCA ;
-voies centrales dont on peut citer les méthodes: péridurale, intrathécale,
intracérebroventriculaire. Leurs indications se restreignent au fil du temps, du fait de
l’apparition de nouvelles molécules opioïdes et une meilleure maîtrise de leur maniement.
Elles sont maintenant limitées aux échecs des autre voies d’administration chez des patients
ayant encore une espérance de vie de quelques mois au moins.
Récemment, une nouvelle forme galénique est apparue : forme pour absorption par la
muqueuse buccale, citrate de fentanyl ou Actiq pour le traitement des accès douloureux
paroxystiques aigus.5
-D’autres systèmes sont en développement tels que l’utilisation de la voie
transdermique avec autocontrôle (fentanyl ITS6), Ionsys®, dans le cadre de l’analgésie
postopératoire.(38)
E-PRINCIPAUX ANTALGIQUES OPIOÏDES FORTS
Les formes à libération immédiate
Jusqu’à un passé récent, on utilisait une solution aqueuse de chlorhydrate de morphine dans
de l’eau distillée ou purifiée, qui était administrée à l’aide d’une seringue graduée en
millilitres. Cette préparation magistrale n’a plus lieu d’être puisqu’en 1999 est apparu le
sulfate de morphine à libération immédiate (Sévrédol, puis Actiskenan en 2000), plus
simple à manier pour le patient et de prescription moins fastidieuse.
En 1997, une nouvelle forme orale à libération immédiate a été commercialisée: la Morphine
Cooper, solution buvable en ampoule directement utilisable (dosée à 10 et 20 mg de
chlorhydrate de morphine).
5
Il s'agit d'un traitement des accès douloureux paroxystiques, en complément d’un traitement opioïde de fond,
stabilisé au moins depuis 3 semaines, chez des patients présentant des douleurs chroniques d’origine cancéreuse.
Afin d’optimiser le passage du fentanyl par voie transmuqueuse, les patients doivent placer le comprimé avec
dispositif pour application buccale d’Actiq® dans la bouche, à l'aide du dispositif pour application buccale,
entre la joue et la gencive, en déplaçant de temps en temps le comprimé.
6
Patchs iontophorétiques avec analgésie auto contrôlée qui utilisent le courant électrique, ce qui permet au
patient d’accélérer le passage du fentanyl à travers la peau.
11
Il n’existe pas de consensus quant aux modalités de début de traitement et l’ajustement des
doses. Le groupe de l’OMS (34) propose une dose initiale de 10 à 30 mg de chlorhydrate de
morphine toutes les 4 heures, celui de l’ANDEM (6) et les experts français proposent au
moins 10 mg toutes les 4 heures. Chez les sujets âgés, il est préférable de réduire les
posologies initiales d’au moins 50% par rapport à celle de l’adulte jeune.
Il faut laisser au patient la possibilité d’auto administrer des prises intermédiaires
supplémentaires si l’analgésie est insuffisante.
L’efficacité du traitement s’apprécie au bout de 24 heures et l’évaluation du total de la dose
prise dans les 24 heures précédentes permet de déterminer la posologie pour les 24 heures
suivantes.
Dans l’idéal, les comprimés de morphine à libération immédiate doivent être utilisés lors de
l’instauration d’un traitement afin de trouver rapidement la dose quotidienne nécessaire. Ils
sont également nécessaires dans certaines situations cliniques telles que l’urgence, les
douleurs très instables ou intenses. Ils peuvent être également utilisés en interdoses si les
douleurs intermittentes persistent malgré un traitement de fond par morphine à libération
prolongée.
Les formes à libération prolongée
Durée d’action de 12 heures
Le sulfate de morphine (Moscontin
 et Skenan
)
Le sulfate de morphine représente un agoniste pur qui stimulent les récepteurs opioïdes µ et
partiellement les récepteurs k, situés au niveau médullaire et supra médullaire. Cette
stimulation est dose-dépendente et sans effet plafond(10).
Le Moscontin et le Skenan se présentent sous forme de comprimés pour le premier et de
gélules déconditionnables pour le second (ce qui permet l’administration en micro-granules
dans des sondes gastriques par exemple). Ils sont dosés à 10, 30, 60, 100 et 200 mg de sulfate
de morphine, le dosage à 200 mg étant réservé à l’usage hospitalier.
Les doses de départ sont en général de 30 mg toutes les 12 heures avec la possibilité de
prendre des interdoses à l’aide des formes à libération immédiate ; la consommation totale sur
24 heures déterminera la posologie à prescrire pour les 24 heures suivantes.
L’oxycodone (Oxycontin LP
, Oxynorm
) est prescrite soit d’emblée en cas de
douleurs d’origine cancéreuses, intenses ou rebelles aux antalgiques plus faibles, soit en cas
d’intolérance à la morphine. La posologie initiale est de 10 mg toutes les 12 heures d’
Oxycontin LP, avec de prescription d’interdoses d’Oxynorm associées.
L’hydromorphone (Sophidone LP
)
La Sophidone LP se présente sous forme de gélules à libération prolongée libérant
sur 12 heures du chlorhydrate d’hydromorphone, un agoniste opioïde sélectif des récepteurs
µ, ayant une plus grande affinité pour ces récepteurs que la morphine et une puissance
analgésique per os 7.5 fois plus grande que la morphine. Cette molécule est indiquée dans le
traitement des douleurs cancéreuses intenses en alternative à la morphine en cas d’intolérance
ou de résistance. Cette alternative s’appuie sur la théorie de « la rotation des opioïdes »: la
réponse à un traitement opioïde est variable d’un patient à l’autre et chez un même patient,
variable au cours du temps. En cas d’intolérance ou d’inefficacité du traitement chez un
patient, il est possible, en utilisant un autre opioïde, d’obtenir l’effet antalgique souhaité tout
en améliorant la tolérance(37).
Les gélules de Sophidone LP sont dosés à 4, 8, 16 et 24 mg d’hydromorphone.
Durée d’action de 24 heures: le sulfate de morphine (Kapanol®)
Le Kapanol se présente sous forme de gélules contenant des micro granules, dosées à 20,
50 et 100 mg de sulfate de morphine. La dose initiale est en général de 50 mg par jour. Cette
12
spécialité a un prix avoisinant celui du Moscontin® et du Skénan® et offre peu d’avantages
supplémentaires en dehors de sa prise unique quotidienne.
Durée d’action de 72 heures: le Fentanyl en patchs transdermiques (Durogésic
)
Le fentanyl est un antalgique morphinique agoniste pur.
Le fentanyl partage les propriétés pharmacodynamiques générales de la morphine. En
revanche, il est beaucoup plus liposoluble, ce qui entraîne d’une part une diffusion plus
rapide au niveau du SNC, et d’autre part, un stockage important dans les graisses avec le
risque d'une possible redistribution après l'arrêt de l'administration. Il est également moins
émétisant. Il est antagonisé par la naloxone.
Le Durogésic se présente sous forme de dispositif transdermique libérant sur 72 heures du
fentanyl, et dosé à 12, 25, 50, 75 ou 100 µg par heure. Il est indiqué lorsque le recours à la
voie orale est impossible ou bien encore lorsque les effets indésirables digestifs deviennent
gênants.
Lors de la première application, le délai pour l’obtention d’un taux plasmatique antalgique
varie d’un patient à l’autre mais est en moyenne de 12 heures, ce qui nécessite le
chevauchement en début de traitement avec une autre spécialité morphinique. Pour
déterminer la première dose de Durogésic à administrer il faut savoir que 60 mg par jour de
morphine correspondent à 25 µg par heure de Durogésic.
Le citrate de fentanyl transmuqueux (Actiq
) est un comprimé avec applicateur
buccal dont l’emploi est uniquement réservé au traitement des exacerbations passagères
paroxystiques d’une douleur chronique, contrôlée par un traitement de fond morphinique.
La buprénorphine (Temgésic
)
La buprénorphine est un agoniste partiel des récepteurs µ lorsqu’elle est utilisée seule, mais
elle developpe une activité antagoniste sur les récepteurs k en présence de la morphine(10).
Le Temgésic se présente sous forme de comprimés sublinguaux de 0.2 mg buprénorphine,
qui doivent être administrés toutes les huit heures. Il s’agit d’un antalgique à effet plafond: il
n’y a plus d’augmentation de l’effet antalgique au-delà d’une posologie quotidienne de 4 à 5
mg par jour.
La buprénorphine existe également sous forme de dispositif transdermique avec une
libération sur 72heures (Transtec).
Certains opioïdes (Actiskenan, Skenan, morphine injectable) ont l’AMM pour
l’utilisation en pédiatrie pour l’enfant de plus de 6 mois, et le Durogesic chez l’enfant de
plus de 15 ans.
13
TABLEAU 2 : AFFINITE DES MORPHINIQUES POUR LES DIFFERENTS
RECEPTEURS
F- REGLEMENTATION DE L’UTILISATION DES STUPEFIANTS
La prescription et la dispensation des stupéfiants sont régies par les articles R.5209 à
R.5218-2 du code de la Santé Publique. Ces articles sont basés sur un décret du 29 décembre
1988 modifié par un décret du 7 septembre 1992 (ANNEXE 3).
Le décret du 29 décembre 1988 remplaçait les tableaux A, C et B par les listes I, II et de
stupéfiants.
Le décret du 7 septembre 1992 paru au Journal Officiel du 10 septembre entraîne des
modifications des durées de prescription des stupéfiants avec trois durées de prescription
possibles : 7. 14 et 28 jours selon les cas (ANNEXE 2). Par ailleurs, il mentionne l’examen
clinique obligatoire du malade avant toute prescription des stupéfiants.
Un arrêté du 6 février 1998 a apporté quelques modifications: prescription à 28 jours pour le
fentanyl et 10 substances non encore commercialisées en France.
Depuis octobre 2000 la durée maximale de prescription a été portée à 28 jours pour tous les
morphiniques de palier 3, formes orales ou transdermiques. La durée de prescription est
également réduite à sept jours pour les substances injectables sans système actif de perfusion.
(3)
Par ailleurs, l’arrêté du 20 septembre 19997 est accompagné de trois arrêtés relatifs:
-au fractionnement de la délivrance de spécialités contenant plus de 0.2 mg de
buprénorphine administrée per os (Subutex, utilisé dans le sevrage des toxicomanes): les
fractions doivent correspondre à des durées de sept jours8;
-à leurs conditions particulières de prescription et de délivrance, en raison d’un risque
de pharmacodépendance et d’abus9 ;
7
Arrêté du 20 septembre 1999 (publié au J.O.R.F. du 24 septembre 1999) fixant la liste des médicaments
classés comme stupéfiants dont la durée maximale de prescription est réduite à quatorze jours ou à sept jours
8
Arrêté du 20 septembre 1999 relatif à l’application de la réglementation des stupéfiants à certains médicaments
à base de buprénorphine.
14
-au fractionnement de délivrance de spécialités à base de fentanyl ou de ses sels sous
forme de dispositifs transdermiques, qui peuvent être prescrits pour 28 jours mais dont la
délivrance doit être fractionnée à 14 jours maximum10.
Utilisation des ordonnances sécurisées
a)Date de mise en oeuvre
Dans le cadre de la politique de lutte contre la douleur11, développée sous la forme du
« Programme de Lutte contre la Douleur » (24) avec trois plans triennaux de prise en charge
de la douleur (1998-2001, 2002-2005 et 2006-2010), il a été décidé de faciliter la prescription
des antalgiques majeurs en supprimant les carnets à souches obligatoires pour la prescription
des stupéfiants et en les remplaçant par des ordonnances sécurisées. Ces mesures avaient
également comme objectif de protéger les prescriptions des contrefaçons, falsifications et
vols, et de faciliter l’authentification des prescriptions par le pharmacien qui dispense le
traitement.
Ces dispositions ont été prévues par trois textes parus au Journal Officiel du 1er avril 1999, et
font partie des objectifs du premier Plan d’action triennal contre la douleur (1998-2001). A
dater du 1er octobre 1999 les utilisateurs ont eu l’obligation de prescrire les stupéfiants
uniquement sur les ordonnances sécurisées, l’utilisation du carnet à souches devenant
interdite (ANNEXE 1).
Cette idée a été reprise dans le cadre du troisième Programme de Lutte contre la Douleur
2006-2010 (24) , avec la notion d’amélioration des traitements médicamenteux et des
méthodes non pharmacologiques dans des conditions de sécurité et de qualité. Il est
nécessaire de mieux connaître la consommation des antalgiques et de simplifier le circuit des
substances exerçant un effet physiologique similaire à celui de la morphine.
Les principales priorités de chacun de ces trois plans de prise en charge de la douleur seront
repris dans le chapitre suivant concernant « La Douleur ».
b)Caractéristiques
Les caractéristiques de l’ordonnance sécurisée sont fondées sur des référentiels techniques et
organisationnels élaborés par l’Association Française de Normalisation (AFNOR)12.
Le format est laissé au choix du prescripteur et la prescription peut être faite de façon
manuscrite ou à l’aide de l’ordinateur.
Les éléments de protection retenus sont les suivants:
-un papier filigrané blanc naturel sans azurant optique,
-une zone permettant à chaque professionnel de santé prescripteur d’indiquer son
nom, sa qualité, les numéros de téléphone et télécopie auxquels peut être contacté,
-un numéro d’identification par lot d’ordonnances,
-un double carré pré-imprimé en micro-lettres pour indiquer le nombre de
médicaments prescrits.
En cas de perte ou de vol, une déclaration doit être faite sans délai aux autorités de police.
Pour se procurer les ordonnances sécurisées, les prescripteurs disposent d’une liste des
industriels (papeteries, imprimeurs, éditeurs) certifiée par l’AFNOR, qui est publiée au
9
Arrêté du 8 février 2000 (publié au J.O.R.F. du 16 février) modifiant l’arrêté du 20 septembre 1999 fixant la
liste des médicaments classés comme stupéfiants dont la durée maximale de prescription est réduite à quatorze
jours ou à sept jours.
10
Arrêté du 23 avril 2002 (publié au J.O.R.F. du 3 mai 2002) relatif au fractionnement de la délivrance de
certains médicaments à base de fentanyl.
11
Circulaire DGS/DH N° 98 -586 du 22 septembre 1998 relative à la mise en oeuvre du plan d’action triennal
de lutte contre la douleur dans les établissements de santé publics et privés.
12
L’Association française de normalisation (AFNOR) est l'organisme officiel français de normalisation.
L'AFNOR a été créée en 1926 ; elle est placée sous la tutelle du ministère chargé de l'industrie. Elle édite la
collection des normes NF qui identifie habituellement un document par la forme NF L CC-CCC.
15
bulletin officiel solidarité santé du Ministère de l’emploi et de la solidarité, consultable sur le
site Internet – www santé.gouv.fr
c)Modalités de rédaction
La rédaction des ordonnances sécurisées comporte quelques règles à respecter. Il faut rédiger
en toutes lettres:
-l’identité du patient : nom, prénom, l’age pour un enfant,
-la dénomination du stupéfiant prescrit ,
-sa présentation (ampoules, gélules, comprimés, patchs) ,
-le dosage de la présentation ; en cas d’association de plusieurs dosages, il faut les
détailler ,
-la séquences des prises durant le nycthémère, la quantité et les horaires des prises,
leurs intervalles ,
-le mode d’administration ,
-la posologie sur 24 heures, qui n’est plus limitée à 180mg/24 heures ,
-la durée autorisée du traitement ,
-la date de prescription.
Si la quantité est insuffisante pour la durée antérieurement prévue, il faut rédiger une
nouvelle ordonnance en précisant obligatoirement « en complément de l’ordonnance du…. ».
Les doses complémentaires seront délivrées pour la durée prévue par l’ordonnance
précédente. En cas de commande de stupéfiants à usage professionnel, il faut mentionner sur
l’ordonnance, outre les formalités usuelles:
-le nom commercial du médicament ,
-la quantité (limitée à 10 unités de prise),
-« usage professionnel ».
L’ordonnance ne peut être exécutée que si elle présentée dans les 24 heures suivant sa date
d’établissement. Au-delà de ce délai, le pharmacien ne délivre que la dose qui sera utilisée
jusqu’à la fin de la duré prévue de prescription.
Une copie de toute ordonnance comportant une prescription de stupéfiant doit être conservée
pendant 3 ans par le pharmacien.
G-INDICATIONS USUELLES DE LA MORPHINE
Utilisation de la morphine en France:
Il y a une vingtaine d’années la France accusait un retard en ce qui concerne la
prescription d’opioïdes par rapport aux autres pays. Ainsi une enquête nationale réalisée en
1996 (23) concluait que le traitement des douleurs cancéreuses ou post-opératoires était
insuffisant: le patient s’attendait à souffrir et il pensait que la douleur n’était soulageable
qu’en partie notamment dans le cas d’un cancer.
Parmi les facteurs responsables de cette sous-utilisation figurait « l’opiophobie » (ou peur de
voir se développer une toxicomanie) des soignants, des malades et de leur famille, liée à la
croyance que l’utilisation de la morphine dans le cadre d’une prescription médicale
conduisait inéluctablement à une dépendance physique et psychique.
La prise de conscience de la nécessité d’améliorer la prise en charge de la douleur date des
années 80. La création de l’International Association of Pain (IASP) en 1973 et la
sensibilisation des professionnels de santé a permis d’amorcer un changement des attitudes:
en une dizaine d’années, la consommation mondiale de morphine à des fins médicales est
passée de 3 tonnes en 1985 à 17 tonnes en 1995, mais cette augmentation était principalement
imputable aux pays anglo-saxons.
La prise de conscience en France date du début des années 90. En 1993, un rapport de l’ONU
sur la consommation de morphine plaçait notre pays au 43ème rang mondial (en kg, pour 1
million d’habitants: Portugal 0 ; France 4.6; Angleterre 29 ; Danemark 52). (17).
16
Depuis il semble que notre pays ait rattrapé son retard et fait maintenant figure de leader dans
ce domaine. Grâce à une vaste campagne politique incluant information des soignants et du
public, textes de lois et facilitation de la prescription, la consommation de morphine par
habitant en France se situe à présent au 5° rang européen et est équivalente à celle de la
Grande Bretagne (33).
Ainsi même si la consommation de morphine en France a été multipliée par 14 en dix ans
comme il le montre un rapport du 1996, le soulagement des patients reste insuffisant (23).
En avril 2003 le COMITE D’ORGANISATION DES ETATS GENERAUX DE LA
DOULEUR a fait appel au département santé de la Sofres13 pour établir une photographie de
l’opinion publique sur la prise en charge de la douleur sur un échantillon représentatif de la
population française (11). La synthèse des principaux résultats retrouve que 78% des
individus de plus de 18 ans ont été confrontés à la douleur au cours de 2 dernières années,
soit personnellement (54%) soit par le biais d’un de leurs enfants ou d’un proche (21%).
Quatre vingt-six pour cent des individus confrontés à la douleur ont consulté un professionnel
de santé et 74% ont eu une prescription médicale.
Le médecin généraliste est consulté dans 65% des cas.
Le soulagement de la douleur: la douleur a été partiellement ou pas du tout soulagée pour
74% à 82% des cas suite à la consultation (tous professionnels de santé confondus), d’où
l’intérêt de poursuivre les mesures pour l’amélioration de la prise en charge de la douleur
encore aujourd’hui.
Morphiniques et douleurs cancéreuses:
Chez les malades souffrant d’un cancer, la douleur physique est un symptôme fréquent, dont
la prévalence augmente en cas de progression de la maladie cancéreuse. Ainsi, il existe une
symptomatologie douloureuse chez environ un tiers des malades à la phase initiale du
traitement curatif, et chez 60 à 90% des malades atteints de cancer localement avancé ou
métastatique(37).
Il existe des règles de prescription bien codifiées, qui, en étant correctement utilisées,
permettraient d’obtenir un soulagement satisfaisant de ces patients cancéreux, en cas
d’utilisation à domicile, comme on l’a déjà présenté dans le chapitre « Modalités de
prescription des morphiniques ».
Une étude française réalisée en 2003 par le Centre Régional de Lutte contre la Douleur de
Marseille (35) confirme la prescription très répandu des morphiniques chez les patients
atteints d’une pathologie cancéreuse évoluée ( 85.4% des patients de cette étude reçoivent des
morphiniques). Elle met également en évidence que les morphiniques sont prescrits plus
facilement par les médecins généralistes qui ont reçu une formation spécifique à la prise en
charge palliative, d’où la nécessité de développer la formation aux soins palliatifs des
médecins généralistes pour harmoniser les pratiques entre l’hôpital et la ville.
Selon une étude italienne réalisée en décembre 2000, la morphine orale représente l’opioïde
la plus prescrit (64% des patients) chez les patients atteints d’un cancer en phase avancée
(39).
En fin une enquête prospective réalisée en 2000 auprès des médecins du Réseau Sentinelles14
sur la prise en charge médicamenteuse de la douleur cancéreuse en médecine générale(1)
conclut que les efforts de formation des médecins généralistes sur la douleur semblent avoir
porté leurs fruits mais de manière encore insuffisante et doivent impérativement être
poursuivis. Notamment une proportion encore importante de malades n’avait pas reçu de
proposition de soulagement adéquat (20% des malades) et les interdoses ont été rarement
prescrites (seulement chez 46% des patients qui avaient un morphinique).
En conclusion, chez un malade souffrant d’un cancer, la prescription de morphine doit être
rapidement envisagée si les douleurs nociceptives sont intenses ou rebelles aux traitements
13
14
TNS Sofres a été crée en 1963 et il est actuellement le leader français des études marketing et d’opinion.
Réseau national de généralistes participant à une surveillance épidémiologique.
17
antalgiques de palier inférieur. L’initiation d’un tel traitement est parfaitement possible au
domicile du malade.
Il peut arriver que les malades expriment des réticences à la majoration du traitement
antalgique par les dérivés morphiniques, mais le médecin doit chercher à anticiper et à
vaincre ces réticences par une information adaptée accompagnant la prescription.
Morphiniques et douleur non cancéreuse:
L’utilisation des morphiniques généralement acceptée et répandue aujourd’hui dans la prise
en charge de la douleur cancéreuse, suscite encore de débats et controverses en ce qui
concerne le traitement des douleurs chroniques non cancéreuses (DCNC).
Pourtant les Recommandations AFSSAPS de juillet 2004 (2) sur le bon usage des opioïdes
forts dans le traitement des douleurs chroniques non cancéreuses proposaient une mise au
point dans ce domaine, en parlant du rapport bénéfice/risque d’une telle prescription dans ce
type de douleurs. Ce rapport doit être évalué avec précision afin de ne pas utiliser un
médicament qui pourrait être inefficace, soit provoquer des effets indésirables délétères voire
entraîner le patient vers un état de dépendance physique et/ou psychique.
Les recommandations AFSSAPS à ce sujet peuvent être résumées en six points essentiels:
-la prise en charge des DCNC est globale: la plainte du patient doit être évaluée en tenant
compte des facteurs somatiques, psychologiques et socioprofessionnels;
-la stratégie d’utilisation des antalgiques par paliers préconisée par l’OMS pour le traitement
des douleurs cancéreuses ne s’applique pas à tous les syndromes douloureux chroniques;
-le recours aux opioïdes forts dans les DCNC est un traitement de deuxième intention: les
douleurs de type neuropathique (secondaires à des lésions ou à un dysfonctionnement du
système nerveux) réagissent de manière imprévisible au traitement opioïde;
-certains syndromes douloureux chroniques sont peu sensibles aux opioïdes et constituent une
non indication, notamment ceux dont le mécanisme physiopathologique n’est pas clairement
établi;
-en cas de doute sur l’indication, il faut savoir solliciter un avis spécialiste auprès d’un
praticien d’une structure de prise en charge de la douleur;
-les risques liés à l’usage des opioïdes forts doivent être pris en compte avec :
-la survenue des effets indésirables,
-la possibilité d’induire une dépendance physique et/ou psychique ou un phénomène de
tolérance ;
-lors d’une utilisation au long cours: éventuelle survenue d’un dérèglement endocrinien,
d’une altération des réponses immunitaires, peut-être d’altérations génétiques en rapport avec
des propriétés génotoxiques potentielles.
Avant la mise en route d’un traitement par un opioïde fort dans le cadre d’une douleur
chronique non cancéreuses, il faudrait de s’assurer que: (30)
-la cause somatique est clairement identifiée ;
-la douleur est intense et non suffisamment calmée par les autres traitement étiologiques ;
-les traitements antalgiques symptomatiques »usuels » (autres que les opioïdes forts) sont
inefficaces alors qu’ils ont été correctement prescrits et évalués ;
-les éléments du contexte psychologique personnel, familial et socioprofessionnel, ayant
éventuellement favorisé la persistance au long cours de la douleur, ont été évalués, lors d’un
éventuel bilan, si possible, dans une structure pluridisciplinaire d’évaluation et de traitement
de la douleur ;
Une évaluation complète est indispensable en cas d’antécédents d’abus, de dépendance, de
toxicomanie, ou de troubles graves de la personnalité. Le traitement opioïde doit être intégré
dans une prise en charge globale, faisant appel à d’autres traitements médicamenteux et à des
traitements non médicamenteux (psychothérapie, traitement physique et réadaptatif).
En effet, ce ne sont pas des douleurs chroniques que l’on traite par des morphiniques mais
des patients douloureux chroniques. Lors de situations complexes, en particulier avec
18
retentissement psychosocial important, il peut être utile de recourir à un avis spécialisé
psychiatrique et/ou psychologique.
Le patient doit être informé avant la mise en route du traitement opioïde que si le traitement
ne permet peut-être pas de supprimer toute douleur, il doit apporter un soulagement
significatif afin de permettre une amélioration fonctionnelle et de la qualité de vie, une
reprise des activités familiales, sociales ou professionnelles.
Il est recommandé de débuter avec une posologie faible. La posologie et la durée du
traitement doivent être adaptées en fonction de l’évolution de la douleur, de la survenue
d’effets indésirables ou des problèmes connexes à la prescription apparus au cours du
traitement.
Le traitement doit être interrompu et une réévaluation doit être effectuée en cas d’absence de
soulagement satisfaisant après le premier mois de traitement, d’épuisement de l’effet en
dehors d’une aggravation de la pathologie somatique responsable de l’effet algique, en cas de
survenue d’effets indésirables importants et/ou non contrôlés par les médicaments appropriés,
et en cas de survenue d’un comportement incompatible avec une prescription à long cours
(mésusage, non respect de la prescription, abus répétés).
L’arrêt du traitement doit toujours être progressif pour éviter un syndrome de sevrage, avec
une diminution de la posologie de 1/3 de la dose précédente chaque jour, au mieux chaque
semaine en cas de traitement prolongé.
Cependant, lors du Congrès Mondial de la Douleur déroulé à Sydney en août 2005 (XIe
congrès de l’IASP) une session entière a été consacrée à la démonstration expérimentale et
clinique de l’efficacité des opiacés dans la douleur non cancéreuse, en spécial dans la prise en
charge de la lombalgie chronique (14).
Les praticiens du Centre de Traitement de la Douleur (CTD) de Copenhague constatent que
les épisodes récurrents de douleur sévère sont fréquents chez les patients traités par des
opiacés pour des douleurs chroniques non cancéreuses (18).
Une étude prospective dans la population générale danoise (11000 individus) montre que
19% des individus souffrent de douleur chronique (durée supérieure à 6 mois) et que l’usage
régulier des opioïdes faibles ou forts concerne 3% de la population, dont 1% prennent des
opiacés. Chez près de 80% des utilisateurs des opiacés, il persiste une douleur modérée à
sévère et la qualité de vie, ainsi que l’état fonctionnel global sont fortement diminués.
Environ 60 % de ces patients utilisent quotidiennement 74 mg de sulfate de morphine en
moyenne (entre 5 et 520 mg) et 35% utilisent simultanément deux types d’opioïdes ou plus.
Les auteurs de ce travail concluent que les opiacés n’ont pas d’effet bénéfique dans la douleur
chronique non cancéreuse et que leur utilisation complique la prise en charge thérapeutique
plutôt que de la simplifier.
Quant à l’utilisation d’un opiacés plutôt qu’un autre (notion de rotation des opioïdes) dans la
lombalgie chronique, les études concordent toutes, qu’elles soient contrôlées ou en ouvert:
aucune molécule ne fait la preuve de sa supériorité, pour des administrations variant entre 6 et
15 mois, que ce soit en terme d’efficacité ou de tolérance (26).
Un autre groupe nord-américain (43) rapporte que les troubles cognitifs fréquemment
rencontrés chez les patients lombalgiques chroniques ne sont pas directement imputables aux
opiacés: comme l’avait déjà suggéré d’autres études, notamment belges et néerlandaises, ils
sont la résultante de la chronicité douloureuse. En outre, il existe chez ces patients une
association significative entre l’intensité douloureuse et le niveau des traits anxieux et
dépressifs mesurés par l’échelle HAD (Hamilton Anxiety and Depression scale)15 (ANNEXE
6).
La morphine n’est ni la panacée universelle ni la drogue magique. Elle est actuellement
reconnue comme un antalgique majeur utilisable de l’enfance jusqu’à la fin de vie, et elle
occupe une place capitale dans le cadre du soulagement de la douleur aujourd’hui.
15
L’échelle HADS cumule trois fonctions : dépistage, appréciation de l’intensité et coévaluation de l’anxiété et
de la dépression. Elle est utilisée dans le cadre de la douleur chronique en raison du brouillage critériologique et
thérapeutique permanent qui risque toujours de régner dans ce domaine.
19
PARTIE II: LA DOULEUR
Définie de façon simplifiée dans le dictionnaire Robert comme étant une « sensation pénible
en un point ou une région du corps », la douleur selon la définition de l'Association
internationale de l'étude de la douleur (IASP)16 en 1980 est « l’expression d’une expérience
sensorielle et émotionnelle désagréable, liée à une pathologie tissulaire existante ou
potentielle, ou décrite en termes de telles lésions ».
A-HISTORIQUE DE LA PRISE EN CHARGE DE LA DOULEUR
Sensation subjective, la douleur est influencée par l’environnement sociologique: les
croyances, les coutumes et les règles de vie en vigueur à une époque donnée en modulant
l’expression, parfois jusqu l’abolir.
La littérature épique autour du 10ème siècle abonde en descriptions de mutilations effroyables
mais elle le fait toujours avec détachement: il n’y a jamais dans cette exaltation des vertus
chevaleresques de place pour la douleur physique. La douleur, c’est le lot des femmes
(notamment lors de l’enfantement) et des faibles, qui ont le droit de se plaindre mais non de
revendiquer la guérison de leurs souffrances.
La notion de compassion et donc l’acceptation de l’existence de la souffrance n’apparaissent
qu’au 12ème siècle lorsque le Christianisme avoue la souffrance, la magnifie et invite les
hommes à l’imitation de Jésus Christ mort pour eux sur la croix. Les chansons des Croisades
entraînent le Chevalier à méditer sur le corps fait de chair et du sang du fils de Dieu qui a
souffert pour la rédemption des hommes, et les représentations de la crucifixion montrent
désormais non plus le Christ qui trône en majesté au tympan des églises romanes, mais les
membres tordus de la douleur, la face crispée, la plaie béante au flanc du supplicié et Marie,
mère de Dieu, laissant couler des larmes de douleur sur son visage. (19)
Admettre la souffrance, c’est aussi admettre que l’on doit la soigner. De lieu d’accueil, voir
de simple mouroir, l’hôpital devient un véritable établissement de soins au tournant des 12è
et 13è siècles. Les médecins et les chirurgiens reçoivent un enseignement approfondi. La
Faculté de Montpellier, fondée en 1230, devient la première école médicale d’Europe. Les
étudiants y apprennent la pharmacopée du temps: les médicaments pour la plupart obtenus à
partir de la distillation des plantes complètent l’action des onguents, pommades, emplâtres et
baumes adaptés à l’usage externe.
Les frais des hôpitaux sont généralement supportés par des riches fondateurs ou des
communautés qui reçoivent des dons généreux: les testaments montrent bien que contribuer
au soulagement d’autrui est une façon d’œuvrer à son propre salut.
Finalement, les chevaliers continuent à guerroyer mais ils ont le droit d’avouer leurs
souffrances et de bénéficier des soins des chirurgiens qui suivent l’armée en campagne, tout
en améliorant leurs techniques: des instruments sont inventés ; la suture d la plaie après
l’avoir lavée au vin ou à l’alcool est préconisée au détriment de la « suppuration louable » des
blessures; l’analgésie est découverte: des « éponges somnifères », imbibées du jus de
jusmiaque, de chanvre indien ou de pavot sont trempées dans de l’eau chaude puis appliquées
sur le nez et la bouche du patient.
Ainsi, l’idée d’une valeur rédemptrice de la douleur, principe même du dolorisme, disparaît
progressivement au fil du temps. Certes l’on a pu observer quelques déviances: les
« flagellants » au 14è siècle, les convulsionnaires au 18è siècle ou plus proches de nous les
kamikazes qui se jouent de la douleur et de la mort au péril de leur vie. Si la douleur peut
constituer une alerte pour l’organisme, ayant ainsi une fonction de « sentinelle avancée » et
peut aider à la recherche du diagnostic, elle ne peut rien contre ce dont elle avertit: « par elle16
L’International Association of the Study of Pain (IASP) a été crée en 1973, elle a 6900 membres dans 106
pays, un congrès international annuel et un journal official “PAIN”.
20
même, la douleur est stérile, voir destructrice », ce qui se confirme lorsqu’elle devient
chronique. (29)
Grâce aux progrès sur la connaissance des mécanismes de la douleur et son traitement, la
douleur est finalement à sa place et dûment combattue: les médecins ne se sentent plus le
droit de faire souffrir pour le bien du patient.
C’est dans les années 50 que l’anesthésiste américain John J. Bonica révolutionne l’approche
des pathologies humaines: dans son ouvrage « The Management of Pain », (40) il explique
que le développement de l’usage de l’anesthésie locale, des analgésiques, de la chirurgie et
des antibiotiques a permis de faire des progrès dans le traitement des causes de la douleur,
mais en aucun cas de la douleur elle-même, que les médecins « ne savent pas comprendre ».
J. J. Bonica préconise de ne plus porter l’intérêt sur les causes de la douleur mais sur la
douleur en elle–même, et de trouver une méthode pour que le médecin puisse évaluer la
douleur, sachant que celle-ci est en partie subjective.
Les efforts développés par J.J. Bonica pour créer une médecine de la douleur ne se
concrétiseront cependant qu’en 1973, années symbolique où s’ouvre le Congrès d’IssaquahSeattle (7). En 1974 se crée l’Association Internationale pour l’étude de la douleur (IASP),
suivie de la naissance l’année suivante de la revue scientifique « Pain ». Du point de vue
conceptuel, le Congrès de Seattle permit de dégager une définition très générale de la
douleur, qui rend légitimes les douleurs sans lésions, d’ordre psychosomatique, auparavant
considérées comme imaginaires. En outre se dégage la notion de douleur chronique- opposée
à la douleur aiguë- , définie comme toute douleur qui dure depuis trois à six mois et qui a
résiste aux traitements habituels. Enfin, le docteur Ronald Melzack17 établit lors de ce même
congrès une théorie de la douleur, vue désormais non plus comme en simple signal d’alarme
mais comme un système de régulation naturelle: la douleur y est décrite comme pouvant
varier en intensité et en qualité selon des nombreuses variables physiologiques et
psychologiques.
La prise de conscience en France date de du début des années 90. En 1993, un rapport de
l’ONU sur la consommation de morphine plaçait la France au 43ème rang mondial (17). Grâce
a une vaste campagne politique incluant information des soignants et du public, textes de lois
et facilitation de la prescription, la consommation de morphine par habitant en France se situe
à présent au 5° rang européen et est équivalente à celle de la Grande Bretagne.
Face aux premiers résultats alarmants, une politique volontariste d’amélioration de la prise en
charge de la douleur a été instituée dès 1994:
-la prise en charge de la douleur est déclarée priorité nationale par la circulaire du 7
janvier 1994 (32),
-les établissements hospitaliers sont tenus de prendre en charge la douleur des patients
qu’ils accueillent (février 1995),
-la loi encourage à constituer des Comités de Lutte Contre la Douleur (CLUD) au sein
des établissements hospitaliers (32), structures de « réflexion et de proposition » ayant pour
but de promouvoir la prévention et le traitement de la douleur chronique, la formation
continue des personnels dans ce domaine, l’information des patients,
-la charte du Patient Hospitalisé établie en Mai 1995 (ANNEXE 4) précise que les
établissements de santé garantissent la qualité des traitements, des soins et de l’accueil. Ils
sont attentifs au soulagement de la douleur et le patient hospitalisé dispose du droit de
demander réparation de préjudice qu’il estimerait avoir subis18,
-la circulaire du 24 septembre 199819 relative à la mise en œuvre d’un plan triennal de
lutte contre la douleur dans les établissements publics et privés fait de la qualité de la prise ne
17
Président de l'International Association for the Study of Pain de 1984 à 1987. Ses théories font grandement
progresser les connaissances scientifiques sur la douleur et il est l’autheur du celebre McGill Pain
Questionnaire, un outil d’évaluation de la douleur chronique.
18
La charte du patient hospitalisé stipule que «tout établissement doit se doter des moyens propres à prendre en
charge la douleur des patients qu’il accueille et intégrer ces moyens dans son projet d’établissement », en
application de la loi No 95-116 du 4 février 1995.
19
Circulaire DGS/DH n ° 98-586 du 24 septembre 1998 relative à la mise en oeuvre du plan triennal d’action de
lutte contre la douleur dans les établissements de santé publics et privés.
21
charge de la douleur un des éléments indispensables pour l’accréditation des établissements
de santé,
-un plan quadriennal a pris par la suite le relais, étayé par des textes de lois, renforçant
les mesures antérieures20.
Actuellement se déroule le troisième plan quadriennal de lutte contre la douleur qui repose
sur quatre nouvelles priorités:
-l’amélioration de la prise en charge des douleurs des personnes les plus vulnérables,
notamment des enfants et des adolescents, des personnes polyhandicapées, des personnes
âgées et en fin de vie,
-l’amélioration de la formation pratique initiale et continue des professionnels de santé pour
mieux prendre en compte la douleur des patients,
-l’amélioration des modalités de traitement médicamenteux et d’utilisation des méthodes non
pharmacologiques pour une prise en charge de qualité,
-structuration de la filière de soins de la douleur, en particulier pour une prise en charge des
douleurs chroniques rebelles.
Les principales priorités de chacun de ces trois plans de prise en charge de la douleur peuvent
être résumés dans le tableau suivant :
TABLEAU 3 : Les trois plans triennaux de lutte contre la douleur
Formation et information des
Programme de Lutte contre la Douleur
1998-2001 (Circulaire du 22 septembre 1998) professionnels de santé
Ordonnances sécurisées
Evaluation de la douleur par EVA
Programme de Lutte contre la Douleur
Amélioration de la prise en charge de
2002-2005
la douleur chronique rebelle et de la
souffrance en fin de vie
La douleur chez l’enfant
La douleur liée au soins
Reconnaître et traiter la migraine
Programme de Lutte contre la Douleur
Amélioration de la prise en charge
2006-2010
des personnes les plus vulnérables
Formation
renforcée
des
professionnels de santé
Meilleurs utilisation des traitements
médicamenteux et des méthodes non
pharmacologiques
Structuration de la filière soins
B- MECANISMES DE LA DOULEUR
En fonction de leur mécanisme générateur on peut classer les douleurs dans trois grandes
catégories (25) :
-Douleurs par excès de nociception: le système nerveux est normal mais il est excessivement
stimulé par des stimulus nociceptifs (exemple: une douleur rhumatismale, une douleur
traumatique. Ce type de douleur peut être amélioré ou supprime par l’utilisation d’antalgiques
(AINS ou morphiniques) ou par l’interruption de la transmission du message par des blocs
nerveux. On pense que pour éviter l’apparition des phénomènes favorisant le passage à la
chronicité, il est souhaitable de traiter de façon efficace la douleur à sa phase initiale.
20
Publication de la circulaire DHOS/E2. No266 du 30 avril 2002, relative à la mise en place du programme
quadriennal de lutte contre la douleur.
22
-Douleur neuropathique: il y a une anomalie du système nerveux central ou périphérique à l’
origine de la sensation douloureuse. La douleur est perçue même en dehors de toute
stimulation, ou bien après une stimulation douce qui, habituellement, n’entraîne pas de
douleur (phénomène d’allodynie). D’un point de vue séméiologique, les patients décrivent
fréquemment des douleurs à type de dysesthesies (fourmillements, picotements), de brûlures,
de décharges électriques, de pincements ; elles peuvent être continues ou paroxystiques.
Classiquement, d’un point de vue thérapeutique, ces douleurs neuropathique ne répondent pas
bien aux AINS ni aux morphiniques: elles sont en revanche souvent améliorées par les
antidépresseurs tricycliques (amitryptiline) pour ce qui est des composantes dysesthesiques
ou des sensations de brûlures, par les antiépileptiques (carbamazepine, clonazepam) pour la
composante fulgurante. Enfin contrairement à ce qui était dit il y a encore peu de temps, dans
un certain nombre de cas, les morphiniques peuvent également être efficaces: les doses sont
souvent plus importantes que celles classiquement utilisées pour traiter les douleurs
nociceptives.
-Douleur idiopathique et psychogène (sine materia): on ne trouve pas de cause à la douleur,
ou bien celle-ci est une manifestation de problèmes psychologiques ou d’une pathologie
psychiatrique. Il s’agit habituellement d’un diagnostic d’exclusion: la description de la
douleur faite par le malade est souvent fort riche, mais également imprécise, variant avec le
temps et ne permettant pas d’évoquer un cadre nosologique connu.
Selon la durée de la douleur, on utilise les termes de:
-Douleur aiguë. Celle-ci est d’installation rapide et de durée brève. Elle peut être d’origine
somatique par excès de nociception ou neurogène (sciatalgie, par exemple). Elle constitue
une douleur - symptôme, qui est une alerte devant une agression et qui constitue un guide
pour le diagnostic.
-Douleur chronique. La douleur perdure au-delà de la durée normale de cicatrisation de la
lésion causale ou bien persiste pendant plus de 3 à 6 mois. Elle devient une douleur-maladie
qui épuise le patient. La douleur chronique, quelle qu’en soit la cause, a des répercussions
importantes sur le fonctionnement psychique et social de l’individu. La plupart des douleurs
neurogènes sont chroniques. Lorsque les douleurs par excès de nociception se prolongent, il
se produit des modifications du système nerveux central qui ajoutent une composante
neuropathique.
Différentes composantes d’une « douleur »:
Une douleur peur être associée à un certain nombre de facteurs:
-Un évènement extérieur (comme un traumatisme): la cause est habituellement évidente,
mais il faut s’assurer que les plaintes ne sont pas disproportionnées par rapport à l’accident
causal.
-Un évènement interne: c’est le cas le plus fréquent. La douleur est en rapport avec une
lésion des tissus ectodermiques (comme la peau), des tissus mésodermiques (squelette,
muscle) ou endodermiques (viscère). Habituellement la douleur indique l’endroit où se trouve
le désordre, mais en certains cas elle se situe dans un endroit qui en est éloigné.
-Une atteinte du système nerveux central: les douleurs peuvent être la conséquence d’un
traumatisme, d’un accident vasculaire, d’une radiothérapie.
-Des facteurs sociaux, psychologiques, environnementaux: ce diagnostic doit être évoqué
si les patients ne présentent aucun des symptômes ou signes décrits dans les trois premiers
cas cités ou, si ce n’est pas le cas, s’il existe une différence énorme entre les signes objectifs
et les plaintes
C- LES VOIES DE LA DOULEUR
Voies et centres nerveux de la nociception :
Les systèmes sensitifs et sensoriel ont pour rôle d’informer les centres nerveux de l’état de
l’environnement extérieur et du milieu intérieur. Ainsi, la sensibilité douloureuse ou
23
nociception met en jeu des structures anatomiques permettant de détecter, percevoir et réagir
à des stimulations potentiellement nocives. Ces dernières créent un « message nociceptif »
qui est transmis des récepteurs périphériques aux centres nerveux supérieurs sous la forme
d’un influx nerveux franchissant plusieurs relais. Des systèmes de régulation inhibiteurs et
facilitateurs modulent ce message nociceptif en permanence.
La notion de douleur comporte 3 composantes- sensori- discriminative, affective et cognitive
liées à l’arrivée du message nociceptif dans le cortex somesthésique, préfrontal et limbique.
Voies anatomiques
Elles sont décrites successivement de la périphérie jusqu’aux centres supérieurs.
1.Nocicepteurs
Ils sont retrouvés aux niveaux cutané, musculaire, articulaire et viscéral.
Ce sont des terminaisons libres de fibres nerveuses sensibles à une stimulation nociceptive,
c’est-à-dire de forte intensité. Les nocicepteurs sont de 2 types:
-les mécano-nocicepteurs sont des terminaisons qui répondent à des stimulations
mécaniques intenses ;
-les nocicepteurs polymodaux sont des terminaisons qui répondent à des stimulus
mécaniques intenses, thermiques et (ou) chimiques.
Ils assurent la transduction qui est la transformation du message nociceptif en influx nerveux.
Figure 2 : Facteurs hormonaux susceptibles de sensibiliser les nocicepteurs à la suite
d’une lésion tissulaire
2.Fibres périphériques
L’influx nerveux nociceptif emprunte dans les nerfs sensitifs 2 types de fibres ;
Les fibres myélinisées Aδ, de faible calibre, assurent une conduction nerveuse de 4 à 30 m/s
responsable d’une douleur rapide, précise à valeur localisatrice.
Les fibres C, non myélinisées, assurent une conduction nerveuse inférieure à 2m/s
responsable d’une douleur retardée, sourde et moins localisée.
3. Corne dorsale spinale
L’influx nerveux nociceptif transite par les cellules bipolaires du ganglion rachidien
(protoneurone), situé au niveau de la racine dorsale du nerf spinal qui se connecte dans la
corne dorsale de la moelle avec le deutoneurone (neurone situé dans les couches I à V de
Rexed). Au niveau de la zone d’entrée de la racine dorsale dans la moelle (DREZ pour dorsal
root entry zone), il existe une organisation spatiale des fibres sensitives: les fibres fines
nociceptives se placent dans la région ventro- latérale de cette zone pour se rendre à travers le
24
tractus de Lissauer aux couches superficielles de la corne dorsale. Les fibres à destinée
cordonale dorsale se disposent dans la région dorso-médiane.
Il existe des collatérales des protoneurons qui entrent en contact avec la colonne végétative de
la moelle et la cône antérieure, responsables des réactions végétatives et motrices à la
douleur.
4. Voies ascendantes
Les axones des neurones nociceptifs de la corne dorsale croisent la ligne médiane
(décussation) et se dirigent vers le cordon ventro latéral controlatéral de la moelle pour
former le faisceau spino-réticulo-thalamique. Ce dernier se divise en 2 contingents.
Dans le contingent superficiel et latéral, le faisceau néospinothalamique à conduction rapide,
paucisynaptique se projette sur le noyau somesthésique ventro-latéral du thalamus.
Dans le contingent profond et médial, le faisceau paléospino-réticulothalamique, à
conduction lente, avec de nombreux relais synaptiques, se projette largement et
bilatéralement au niveau de la réticulée du tronc cérébral.
Figure 3 : Les voies de la douleur : de la périphérie au cortex
5. Centres supérieurs
Au niveau du thalamus, le faisceau néospinothalamique se projette dans le noyau ventropostéro-latéral, rejoignant la voie lemniscale. Le faisceau paléospino-réticulo-thalamique se
projette dans les noyaux médians intra-laminaires qui constituent un prolongement de la
substance réticulée.
Les projections cérébrales sont les suivantes:
-les projections de la voie néo-spinothalamique se font dans le cortex sensitif du gyrus
pariétal post-central assurant la composante sensori-discriminative de la douleur.
-le contingent paléospino-réticulo-thalamique se projette au niveau de la réticulée de façon
diffuse générant une réaction d’éveil. A ce niveau, se font des synapses avec les noyaux des
nerfs crâniens et les centres végétatifs du tronc. Par la suite les projections se font vers les
noyaux médians du thalamus pour gagner ensuite: l’hypothalamus (réaction végétative de la
douleur); -le striatum (réactions motrices automatiques et semi-automatiques à la douleur); 25
le cortex pré-frontal (sensation de souffrance soutenant la composante affective); le cortex
limbique (mémorisation et genèse de comportements de protection assurant la composante
cognitivo-comportamentale).
A l’étage encéphalique, il y a une interaction entre les projections nociceptives et les autres
fonctions corticales et sous-corticales: l’anticipation (attention dirigée vers la douleur) de la
douleur ou l’anxiété majorent le vécu douloureux alors que la distraction (attention dirigée
ailleurs) a un effet inverse. Le stress induit une analgésie probablement par médiation
endorphinique. Des observations cliniques en pathologie humaine ont permis d’observer la
recrudescence de douleurs anciennes (réactivation cognitive) dans certaines atteintes
neurologiques centrales.
Figure 4 : Principaux relais supraspinaux impliqués dans la nociception
26
D- MECANISMES PHYSIOPATHOLOGIQUES DES DOULEURS CHRONIQUES
Si l’on écarte les douleurs psychogènes qui sont le plus souvent une sommation entre une
« épine irritative » organique (souvent peu grave) et des phénomènes d’amplification
psychologique, les douleurs chroniques comportent les douleurs par excès de nociception et
les douleurs neuropathiques.
Douleurs par excès de nociception
L’hyperalgésie primaire correspond à une amplification périphérique du message nociceptif
qui est due à une augmentation des décharges des nocicepteurs (amplification de leurs
réponses aux stimulus douloureux), à un abaissement de leurs seuils de déclenchement et à un
cercle vicieux de la neurochimie périphérique qui provoque une libération accrue de
médiateurs avec leurs effets excitateurs et sensibilisateurs (sur les nocicepteurs).
Figure 5 : Mécanisme de l’hyperalgésie :
Le réflexe de dendrite (dit « d’axone »), déclenché par la stimulation répétée des fibres
afférentes primaires nociceptives, induit une inflammation neurogène périphérique due aux
substances sécrétées en périphérie par les fibres nerveuses nociceptives de façon rétrograde:
substance P, CGRP (calcitonine gene related peptide). Ces substances renforcent le cercle
vicieux périphérique.
Le système nerveux sympathique peut participer à l’entretien de certains types de douleurs par
le biais de la sécrétion de noradrénaline. Deux entités ont été décrites pour lesquelles le
système nerveux sympathique joue un rôle physiopathologique: le « complexe régional pain
syndrome » de types I et II. Le type I correspond à l’algodystrophie et le type II à la
causalgie. Ce sont des syndromes où la douleur, de type brûlure, s’accompagne de troubles
vasomoteurs ainsi que de troubles de la sudation et de troubles trophiques (32).
La contraction motrice réflexe à la douleur aggrave les phénomènes douloureux. L’arc
réflexe se fait entre les collatérales des fibres afférentes primaires nociceptives et la corne
ventrale de la moelle.
L’hyperalgésie centrale est liée à la douleur chronique qui entraîne une augmentation de la
décharge des neurones convergents spinaux, un abaissement de leurs seuils de réponse et une
augmentation de leurs champs récepteurs. Ces phénomènes sont surtout dus au cercle vicieux
de la neurochimie de la corne dorsale faisant intervenir les récepteurs N-methyl-D-aspartate
(NMDA). De même, l’augmentation post-synaptique d’ions de calcium aboutit à des
changements géniques créant ainsi une modification durable des neurones convergents.
Douleurs neuropathiques
Ces douleurs sont consécutives à une lésion du système nerveux soit périphérique, soit
central. Plusieurs mécanismes physiopathologiques ont été incriminés.
27
Les décharges ectopiques sont des influx nerveux qui prennent naissance au niveau des fibres
nerveuses lésées, par prolifération anormale des canaux ioniques rendant ainsi la
dépolarisation de ces neurones plus facile et même spontanée sans stimulus périphérique.
La prolifération anormale des récepteurs adrénergiques au niveau des fibres afférentes
primaires nociceptives les rend plus sensibles à la noradrénaline expliquant les douleurs
mediées par le système sympathique.
L’atteinte des grosses fibres Aβ qui normalement ferment la « porte » au niveau de la corne
dorsale (« gate control ») aboutit à une porte ouverte qui par conséquence facilite la
transmission nociceptive, expliquant ainsi certains types de douleurs neuropathiques.
Figure 6 : Théorie de la porte
Les éphapses sont des néosynapses, c’est-à-dire des connexions aberrantes entre fibres au
niveau de zones lésées du système nerveux. Cela explique certains types d’allodynie qui
correspondent à la perception comme douloureuse d’une stimulation périphérique
normalement non-douloureuse.
La neurochimie de la corne dorsale joue un rôle. La stimulation des récepteurs NMDA, ainsi
que la sécrétion anormale de prostaglandines et de monoxyde d’azote entretiennent un cercle
vicieux de transmission nociceptive exagérée.
Au niveau cérébral, les mécanismes d’amplification nociceptive, devant être également
présents, sont actuellement moins bien connus.
E-OUTILS ET METHODES D’EVALUATION EN DOULEUR CHRONIQUE
La prise en charge de la douleur nécessite une évaluation rigoureuse. La douleur aiguë,
protectrice, est le reflet d’une pathologie sous-jacente: les modalités sensorielles, la
topographie et l’intensité orientent vers une lésion tissulaire permettant ainsi un diagnostic et
un traitement étiologiques. La douleur chronique, quant à elle, présente un caractère
polymorphe: elle a des mécanismes générateurs qui peuvent être différents, n’est perçue qu’à
travers la subjectivité d’un patient qui souffre, est influencée par des facteurs
environnementaux et ne peut être exprimée que par un comportement verbal ou moteur.
Essentielle et souvent imposée dans les structures spécialisées, l’évaluation, au sens de
chiffrage standardisé des divers aspects et composantes de la douleur chronique, conserve un
intérêt clinique non négligeable pour tout praticien de la douleur. Ces méthodes visent à une
quantification réitérée de la situation douloureuse, dans le but de contrôler les effets de la
prise en charge sur ses dimensions les plus importantes. Cette démarche quantitative doit
rester secondaire à la clinique et sera d’ autant plus efficiente qu’elle pourra s’inscrire au sein
d’une relation médecin - malade de qualité.
28
Ces outils d’évaluation ont été validés par l’Agence Nationale d’Accréditation et
d’Evaluation en Santé (ANAES) dés 1999, dans le cadre de l’évaluation et du suivi de la
douleur chronique chez l’adulte en médecine ambulatoire (4).
Les échelles unidimensionnelles (EVA, EVS et EN) ainsi que l’échelle d’anxiété et de
dépression (HADS) sont validées en cancérologie par le programme « Standards, Options et
Recommandations » (SOR)21 (16).
Les principales techniques de mesure dont on dispose à l’heure actuelle sont au nombre de
trois:
-les échelles unidimensionnelles, qui permettent une estimation globale et qui ne
mesurent qu’une seule dimension ;
-les échelles multidimensionnelles, qui apprécient quantitativement et qualitativement
les différents aspects de la douleur ;
-les échelles comportementales, qui quantifient la douleur par des modifications
observables, comme le retentissement sur le comportement général du patient.
1)Les échelles unidimensionnelles:
>l’échelle numérique
Elle utilise une série de 5 chiffres de 0 à 4 ou de 1 à 5. Le patient donne une note à son niveau
de douleur. Les intervalles sont égaux mais l’attirance systématique des patients pour
certaines valeurs (chiffres ronds) ne donne pas une même chance aux valeurs proposées. Les
échelles numériques ont une sensibilité équivalente aux échelles visuelles.
>l’échelle verbale simple:
Elle utilise des qualificatifs dans un ordre croissant pouvant être le reflet soit de l’intensité
douloureuse, soit du soulagement apporté par le traitement. Elle est constituée de 4 à 5
niveaux distincts hiérarchisés avec les descriptifs suivants:
Douleur: absente- faible- modérée- intense
Les avantages de ces échelles unidimensionnelles sont qu’elles sont simples, rapides,
facilement comprises par le malade (échelles les plus employées pour étudier l’effet
antalgique ou évaluer l’analgésie post-opératoire). Mais on leur reproche leur manque de
sensibilité: les repères sont en petit nombre. Le même mot ou le même chiffre n-a pas la
même signification pour chaque patient. De plus il existe la problématique de la langue, pour
les patients d’origine étrangère, non francophone.
>l’échelle visuelle analogique (EVA):
Elle représente l’échelle la plus utilisée car la plus fiable et la plus efficace en termes de
rapidité et de sensibilité. Elle se présente comme une ligne de 10 cm de long allant de
« absence de douleur » à « douleur maximale ». Le patient note par un trait (en format
« papier-crayon ») ou il déplace un curseur à l’horizontale ou à la verticale (pour la réglette
plastifiée).
21
L’objectif du programme SOR est d’élaborer des recommandations pour la pratique clinique en cancérologie.
La définition des Standards, Options et Recommandations accompagnés du niveau de preuve, repose sur les
meilleures preuves scientifiques disponibles au moment de leur rédaction (best available evidence).
29
Elle peut se révéler inutilisable pour certains patients (âgés, en particulier) qui ne
comprennent pas son fonctionnement et on pourra alors la remplacer par une échelle
numérique.
Les principales limites de l’EVA sont:
-la sensibilité est moins bonne au milieu du segment qu’aux extrémités ;
-l’état mental (syndrome dépressif par exemple) peut influencer le résultat ;
-certains voient dans l’échelle verticale la figuration de leur rachis et cotent vers le
haut s’ils souffrent du rachis cervical ;
-d’autres prennent le continuum de l’échelle horizontale pour le nycthémère et cotent
le moment de la journée correspondant au maximum douloureux.
Les échelles d’auto évaluation de la douleur sont faciles et rapides à utiliser et font des outils
très utiles. Mais elles sont mal adaptées à l’évaluation des douleurs d’intensité variable
siégeant dans des sites différents en même temps. De plus, elles ne mesurent que l’intensité
de la douleur, ce qui ne constitue qu’un de ses aspects. Les échelles comportementales et
multidimensionnelles sont plus informatives.
2)Les échelles multidimensionnelles
L’instrument multidimensionnel le plus utilisé en France reste le « Questionnaire douleur de
Saint- Antoine » (QDSA) (ANNEXE 5). Elaboré par F. Boureau et son équipe, c’est une
adaptation française du célèbre McGill Pain Questionnaire (MPQ) de Melzack.
Cette échelle d’auto évaluation permet de préciser et de quantifier les participations
respectives du sensoriel et de l’affectif dans l’intensité douloureuse observée.
Cinquante huit qualificatifs sont répartis en 16 classes (9 sensorielles et 7 affectives), qui sont
proposés au patient pour décrire sa douleur. Il est d’abord invité à choisir tous les adjectifs les
mieux adaptés et ensuite de sélectionner, au sein de chaque classe concernée, le meilleur
descripteur de sa douleur et de lui attribuer une note de 0 (pas du tout) à 4 (extrême). On
calcule alors, par sommation, un score sensoriel et un score affectif.
Le score affectif donne une idée de l’ampleur du retentissement douloureux, souvent
proportionnel à la durée de la douleur et composé pour l’essentiel de distorsions cognitives
liées au stress, à l’anxiété et/ou aux affects dépressifs.
3)-Les échelles comportementales
L’auto-questionnaire le plus répandu en France en douleur chronique est l’échelle de
comportement douloureux (ECD) proposée par Boureau et son équipe. Cet instrument est
destiné à mesurer l’impact de la douleur sur la qualité de la vie quotidienne du patient.
Après ce rappel théorique concernant les morphiniques et la douleur, avec les différentes
recommandations actuelles, nous allons essayer de voir quelles sont, en pratique, les
habitudes de prescription des médecins généralistes aujourd’hui.
30
PARTIE III: ENQUETE AUPRES DES MEDECINS
GENERALISTES DU VAL DE MARNE
A-INTRODUCTION
La prise de conscience en France en ce qui concerne la prise en compte de la douleur et de
son traitement, a été amorcée dans les années ’90. Afin de mieux connaître la fréquence de la
douleur et de sa prise en charge, différentes enquêtes ont été réalisées entre 1991 et 1993:
après une intervention chirurgicale (audit donné à l’Assistance publique- Hôpitaux de Paris,
473 patients), au cours du cancer (enquête multicentrique, 605 patients) ou en médecine
générale (2703 patients dans 151 cabinets médicaux: une douleur est retrouvée chez 54% des
patients, toutes pathologies confondues ; elle dure depuis plus de 3 mois chez 15% des
malades interrogés) (23).
La douleur représente donc un motif de consultation fréquent en médecine en général et
particulièrement dans les consultations de médecine générale. Cette hypothèse est d’ailleurs
confirmée par une étude réalisée en Ile de France en 2002 (42) et où la douleur est très
fréquente en soins primaires car elle représente 43% des consultations.
L’usage des morphiniques est bien admis dans la prise en charge des douleurs qu’elles soient
d’origine cancéreuse ou non, mais la France fait encore partie des pays où le recours aux
opioïdes demeure probablement encore insuffisant par rapport aux besoins réels des patients.
(17). L’étude de 2002 (42) retrouve d’ailleurs les antalgiques de pallier III uniquement pour
1% des prescriptions antalgiques.
Les traitements anti -douleur disponibles actuellement se sont multipliés ces dernières années
avec l’apparition de nouvelles formes galéniques (notamment les formes orales à libération
rapide ou prolongée et les formes transdermiques) qui permettent l’administration des
traitements en ambulatoire, plus adaptés à la prise en charge de la douleur en médecine
générale.
A travers cette enquête réalisée auprès d’un échantillon de médecins généralistes français,
une quinzaine d’années après les débuts de la mise en place de toutes les mesures destinées à
améliorer la prise en charge de la douleur et à faciliter la prescription de la morphine,
l’objectif de mon travail est de réaliser une photographie de l’analyse de la prescription des
morphiniques aujourd’hui auprès des médecins généralistes du Val de Marne.
L’objet de cette étude était de connaître les pratiques sur le terrain des médecins généralistes
par rapport aux théories, identifier éventuellement les domaines à problèmes et les facteurs
bloquants, et repérer les besoins en formation.
En tant que futur médecin généraliste, je pense que les résultats de cette enquête peuvent
m’apporter ainsi une expérience supplémentaire avec un aperçu sur les attitudes pratiques de
mes confrères, dans un domaine qui m’intéresse beaucoup : la prise en charge de la douleur.
B- METHODOLOGIE DE L’ENQUETE
1-OBJECTIFS DE L’ETUDE
Décrire les pratiques habituelles de prise en charge de la douleur par les morphiniques en
médecine générale, dans le cadre des douleurs cancéreuses et des douleurs non cancéreuses.
2-METHODE DE L’ETUDE
Analyse de l’utilisation des morphiniques sous la forme d’une enquête d’observation réalisée
auprès des médecins généralistes du Val de Marne, à partir d’un questionnaire portant sur
l’utilisation des morphiniques dans la douleur d’origine cancéreuse et non cancéreuse.
31
La population de référence est représentée par l’ensemble des médecins généralistes du
département du Val de Marne (950 médecins généralistes répertoriés dans les Pages Jaunes,
pour des raisons de simplicité).
Le choix du département s’est porté sur le Val de Marne car c’est un département significatif
en termes de population (le plus grand de la petite couronne, avec plus de 1.2 millions
d’habitants) (13), avec une mixité des populations d’origines ethniques et culturelles
différentes, et où toutes les catégories socioprofessionnelles s’y retrouvent. De plus Créteil (le
chef-lieu du département) accueille également ma Faculté de Médecine.
L’enquête s’est déroulée sur environ un mois, de mai à juin 2007.
3-RECUEIL DES DONNEES:
L’enquête s’est déroulée sous forme de recueil des données auprès des 950 médecins
généralistes du Val de Marne, dont les coordonnées postales ont été obtenues sur le site des
Pages Jaunes, sous forme d’un questionnaire court d’une dizaine de minutes, anonyme,
adressé à chaque médecin par courrier. Le questionnaire (ANNEXE 7) a été accompagné
d’une lettre courte qui expliquait la démarche de ce travail dans le cadre d’une thèse de
médecine générale, ainsi que d’une enveloppe pré-timbrée avec mon adresse, destinée au
retour du questionnaire, pour faciliter l’acheminement des réponses et maximiser le nombre
des réponses exploitables.
Le choix du public s’est porté à la totalité des médecins généralistes répertoriés dans le Val
de Marne pour essayer d’obtenir une analyse de prescription la plus exhaustive et globale
possible dans le cadre du département choisi. La densité de médecins généralistes pour
100.000 habitants du Val de Marne est représentative par rapport à la moyenne en Ile de
France mais elle est inférieure à la moyenne nationale22.
En termes de démographie médicale la population médicale du Val de Marne est la plus jeune
d’Ile de France (avec un age moyen de 45.9 ans pour les généralistes), et c’est un des
départements franciliens les plus féminisés (21). Ces données font penser qu’il s’agit d’un
département dynamique, directement concerné par toutes les mesures prises à partir de 1990
pour améliorer la prise en charge de la douleur et la prescription des morphiniques.
4-LE QUESTIONNAIRE:
Le questionnaire (ANNEXE 7), présenté sous forme d’une feuille A4 recto-verso pour en
faciliter l’emploi, est composé de 28 questions, dont 14 sont des questions fermées et 14 sont
des questions à choix multiples. Les dernières lignes sont représentées par un espace ouvert
destiné aux éventuelles remarques suscitées par le sujet.
Le questionnaire est structuré en trois parties:
La première partie, intitulée « Partie générale » permet de mieux connaître la population
étudiée, avec des données d’épidémiologie.
La deuxième partie, la « Partie spécifique douleur », évalue l’utilisation des morphiniques en
pratique courante. Elle comporte deux volets: un destiné aux prescripteurs des morphiniques,
et un autre aux médecins qui n’utilisent pas la morphine dans leurs prescriptions (ségrégation
faite en début de cette deuxième partie suite à une question fermée).
Les deux premières questions sont communes aux deux profils de médecins (prescripteurs ou
non des morphiniques), et elles concernent la fréquence de la douleur comme motif de
consultation. On a privilégié la quantification des réponses par une estimation en terme de
fréquence (très fréquente, habituelle, rare, exceptionnelle) à la place d’une estimation chiffrée
pour simplifier le raisonnement et le rendre moins chronophage.
Pour la partie destinée aux prescripteurs de morphine les questions concernent par la suite la
fréquence de prescription de morphine dans leur pratique, le type des douleurs traitées, avec
l’initialisation et la gestion d’un traitement par morphiniques dans le cadre de la douleur
cancéreuse et non cancéreuse.
22
Source : CPAM du Val de Marne 1994.
32
Une différenciation est mise en place dès le départ dans les types de douleurs, en douleur
d’origine cancéreuse et douleur chronique non cancéreuse, qui font l’objet de nombreuses
études et recommandations actuellement. La douleur aiguë n’a pas été proposée parmi les
items prédéfinis, mais elle pouvait être évoqué dans la réponse libre (autre).
Un intérêt particulier est porté également aux formes galéniques les plus utilisées, à
l’existence d’un éventuel référent « anti-douleur » en cas d’impasse thérapeutique, ainsi
qu’aux moyens employés pour l’évaluation de l’efficacité.
Dans la partie destinée aux médecins non prescripteurs de morphine les questions concernent
l’orientation du malade en cas d’impasse pour la prise en charge antalgique, les réticences et
les éléments freinateurs vis à vis de la prescription de morphine (ce point constitue un des
principaux objectifs qui a motivé la réalisation de ma thèse).
La troisième partie, qui est une « Partie commune » qui s’adresse aux prescripteurs ou non
des morphiniques, tente d’apprécier les appréhensions en terme d’effets secondaires, ainsi
que l’attitude pratique concernant la prévention de ces effets secondaires, le sentiment sur la
coopération entre l’hôpital et la ville, ou sur l’intérêt personnel pour la formation à la prise en
charge de la douleur, et le type de formation souhaitée.
C- RESULTATS DE L’ENQUETE
1-RETOUR DES QUESTIONNAIRES
Nous avons obtenu un taux de réponse de 36.74% (soit 349 questionnaires retournés). Ce
pourcentage de réponses est très satisfaisant et il s’explique vraisemblablement en partie par
un fort intérêt pour le sujet de l’enquête, comme en témoignent les remarques à la fin du
questionnaire.
2-ANALYSE DE PRESCRIPTION:
I. PARTIE GENERALE SUR LES DONNEES D’EPIDEMIOLOGIE:
Exercice médical:
Les médecins ayant répondu au questionnaire exercent pour 181 (52%) d’entre eux seuls et
pour 166 (48%) en association.
En ce qui concerne l’exercice médical en groupe, 18 médecins (11%) sont associés à des
spécialistes et 147 (89%) à des médecins généralistes.
Année d’installation:
Si nous analysons les résultats en fonction de l’année d’installation (par tranche de 5 ans) 49
médecins (21%) qui ont répondu sont installés depuis 25 à 30 ans, suivis de 44 (20%) avec
une durée d’installation de 15 à 20 ans.
On remarque une présence importante parmi les réponses au questionnaire de « jeunes
médecins installés » avec une ancienneté de l’installation de 0 à 5 ans, avec 26 médecins
(12%) sur le total de réponses.
Les médecins avec une ancienneté d’installation supérieure à 30 ans sont minoritaires, soit 24
médecins (7%) installées depuis 30 à 35 ans, et 7 médecins (2%) installées depuis 35 à 40
ans.
33
Ancienneté d'installation
7% 2%
12%
10%
21%
12%
16%
20%
]0-5] ans
]5-10] ans
]10-15] ans
]15-20] ans
]20-25] ans
]25-30] ans
]30-35] ans
]35-40] ans
On retrouve une moyenne d’installation parmi les médecins qui ont répondu, de 19.24 ans
(IC 95%= [17.14-21.34] )
Une analyse croisée entre l’ancienneté d’installation parmi les prescripteurs de morphine et
les médecins qui déclarent ne pas la prescrire, retrouve une moyenne d’installation de 27,79
ans pour les non-prescripteurs et de 18.91 ans chez les prescripteurs de morphine.
Relation entre durée d'installation et
prescription de morphine
18,91
27,79
moyenne des
durées
d'installation
(années) parmi
les
préscripteurs
moyenne des
durées
d'installation
(années) parmi
les non
préscripteurs
Orientation particulière:
Deux cent soixante trois médecins (76%) déclarent ne pas avoir une orientation particulière.
Parmi ceux qui possèdent une orientation particulière (24%), on constate l’implication dans
des domaines très variés comme: la diabétologie, la médecine du sport, l’acupuncture,
l’homéopathie, la médecine aéronautique, la nutrition.
Parmi les médecins ayant déclaré avoir une orientation particulière, 4 médecins (5%)
pratiquent l’acupuncture, qui est une méthode alternative de traitement de la douleur,
notamment dans la douleur chronique.
Participation à la Formation Médicale Continue:
Selon notre enquête 73% des médecins généralistes questionnés déclarent participer à une
Formation Médicale Continue, avec une moyenne globale de 8.34 sessions par an. (IC 95% =
[5.85-10.83])
34
Réseaux de soins:
En ce qui concerne la participation de médecins généralistes à un ou plusieurs réseaux de
soins, 105 médecins (30%) ont répondu positivement. On retrouve 15 médecins (4.3%) qui
participe au réseau de diabétologie (Revediab) et 11 médecins (3.1%) impliqués dans les
réseaux de soins en cancérologie et en soins palliatifs (Oncoval et Omega).
Toutes ses données d’épidémiologie médicale concernant l’échantillon des médecins qui ont
répondu au questionnaire sont résumé dans le tableau suivant :
Tableau 4 : Données d’épidémiologie
Exercice Médical
Seul
En groupe
Association M.G.
Association Spécialiste
Moyenne d'installation (ans) IC 95%
Orientation particulière (OUI)
Participation F.M.C. (OUI)
Nb. sessions/an (I.C. à 95%)
Participation aux réseaux soins (OUI)
166 (48%)
181 (52%)
172 (89%)
22 (11%)
19.24 ± 2.10 ans
82 (24%)
252 (73%)
8.34 ± 2.49
105 (30%)
II PARTIE SPECIFIQUE « DOULEUR »:
Trois cent trente et un médecins (95%) considèrent que la douleur représente un motif de
consultation fréquent dans la pratique quotidienne, pour 210 d’entre eux (60%) la plainte
douloureuse est estimée comme « habituelle », et « très fréquente » pour 128 d’entre eux
(37%).
La douleur en consultation de
médecine générale
2% 1%
37%
Très fréq
Hab
Rare
60%
Excep
On remarque également que la plainte douloureuse est considérée comme rare ou
exceptionnelle par 10 des médecins questionnés (3%).
PARTIE CONCERNANT LES PRESCRIPTEURS DE MORPHINE:
Ils sont représentés par 328 médecins (94%) qui ont répondu au questionnaire, 20 médecins
(6%) ayant déclaré ne pas utiliser des morphiniques dans leurs prescriptions antalgiques.
35
Fréquence de prescription:
L’emploi des morphiniques dans leur arsenal thérapeutique reste en proportion dominante
« rare » dans 186 cas (57%), et « habituelle » dans seulement 98 réponses (30%).
Fréquence de la prescription des
morphiniques
11%
2%
Très fréq
30%
Hab
Rare
Excep
57%
Pour 36 d’entre eux (11%) la prescription de morphine reste « exceptionnelle », et
uniquement 6 (2%) déclarent prescrire de morphine de façon « très fréquente ».
Indications du traitement par morphiniques :
Pour la douleur cancéreuse
Prescription des morphiniques
dans la douleur cancéresuse
3%
non
oui
97%
On remarque d’emblée que 320 médecins (97%) déclarent prescrire de la morphine devant
une pathologie cancéreuse, et uniquement 9 (3%) qui ne l’utilisent pas dans le cadre de
l’arsenal thérapeutique antalgique d’un cancer.
L’initialisation d’un traitement par morphiniques pour une douleur d’origine cancéreuse les
proportions sont relativement semblables entre le médecin généraliste et l’hôpital, car 174
d’entre eux (51%) déclarent initier le traitement eux même contre 168 réponses (49%)
concernant une initialisation du traitement par l’hôpital.
Pour l’initialisation de prescription de morphiniques par le médecin généraliste on note que
dans 236 cas ils sont utilisés en relais aux antalgiques de palier I et/ou II, et dans 143 des
situations en association avec d’autres antalgiques. On retrouve une prescription d’emblée de
In itialisa tio n d u tra ite m e n t p a r
m o rp h in e d a n s la d o u le u r c a n c ére u s e
49%
51%
vous m êm e
hôpital
36
la morphine dans 44 réponses.
Modes d'initialisation de la morphine
dans la douleur cancéreuse
143
relais
emblée
236
assoc
44
Pour la douleur chronique non cancéreuse:
Une première remarque concerne l’emploi des morphiniques dans le cadre de ces douleurs
chroniques pour les douleurs d’origine rhumatismale qu’on retrouve dans 271 des réponses.
En deuxième position par ordre de fréquence en ce qui concerne la prescription des dérivés
morphiniques pour des douleurs chroniques non cancéreuses, on retrouve chez les médecins
qui ont répondu, les douleurs d’origine neurologique avec 160 réponses.
Le reste de douleurs chroniques non cancéreuses, d’origine vasculaire et cutanée semblent
plus faiblement représentées dans les prescriptions de morphiniques, estimées à 47 et
respectivement à 31.
Parmi les réponses ouvertes sur l’emploi de la morphine dans d’autres indications on retient
essentiellement: la fibromyalgie (6 réponses), les algies dentaires (4 réponses) et les douleurs
post opératoires ou d’origine viscérale (5 réponses).
Types des douleurs non cancéreuses
31
47
23
160
271
neuro
rhumato
vasculaire
cutanée
autre
En conclusion, pour les 329 médecins qui ont déclaré prescrire de la morphine on retrouve
319 réponses pour la douleur cancéreuse, 271 réponses pour la douleur d’origine
rhumatismale, 160 pour la douleur d’origine neurologique, 47 pour la douleur d’origine
vasculaire et 31 pour la douleur d’origine cutanée.
37
Les différentes types des douleurs, cancéreuse et non cancéreuses, chez les prescripteurs
de morphine :
350
319
300
271
250
200
160
150
100
47
50
31
23
cutanée
autre
0
Doul. K.
rhumato
neuro
vasculaire
En ce qui concerne l’initialisation de la prescription des morphiniques pour les douleurs
chroniques non cancéreuses on retrouve une nette prédominance pour le médecin généraliste,
à 276 réponses (84%), par rapport à l’hôpital qui est à dans 51 cas (16%) à l’origine de cette
prescription initiale.
Initialisation du traitement par morphine
dans la douleur non cancéreuse
16%
vous même
hôpital
84%
L’initialisation du traitement morphinique retrouvent des habitudes de pratique semblables a
celles pour des douleurs cancéreuses, en relais aux antalgiques de palier I et/ou II pour 271
prescriptions (70%) ou en association avec d’autres antalgiques pour 106 réponses (27%). En
revanche, la morphine est employée d’emblée dans le traitement des douleurs chroniques non
cancéreuses dans uniquement 10 réponses (3%).
38
Modes d'initialisation du traitement
par morphine dans la douleur non
cancéreuse
106
relais
emblée
10
271
assoc
Produits morphiniques utilisés :
Les voies orale et transdermique sont de loin les principales voies d’administration de la
morphine par les médecins généralistes puisqu’ils sont 338 (97%) à utiliser au moins une de
deux, avec une répartition très proche entre la morphine orale à libération prolongée (sulfate
de morphine commercialisé sous forme de Skenan LP® ou Moscontin LP®), utilisée dans
304 prescriptions de morphiniques, et les morphiniques transdermiques (les patchs de
fentanyl, commercialisés sous forme de Durogésic®), utilisés dans 252 prescriptions.
On note également l’emploi des formes à libération immédiate dans une proportion pas très
éloignée de celle de formes retard, soit 238 contre 304 pour les formes LP. En fin, la voie
injectable (qu’elle soit sous-cutané ou intraveineuse) n’est utilisée que par un très faible
pourcentage de prescripteurs, soit 22 réponses.
Différents produits morphiniques
utilisés:
252
304
prolongée
immédiate
injectable
22
transdermiques
238
La gestion d’un traitement par morphiniques:
La gestion d’un traitement par morphiniques avec les adaptations posologiques et le
traitement des éventuels effets secondaires intercurrents est identique quelle que soit
l’indication initiale du traitement, une douleur cancéreuse ou une douleur chronique non
cancéreuse. Pour les deux types de douleurs c’est le médecin généraliste dans 324 cas (99%)
qui gère les effets secondaires et les adaptations posologiques.
Correspondants « anti-douleur »:
En cas d’impasse thérapeutique, 230 médecins (70%) déclarent disposer dans leurs
correspondants d’un réfèrent « anti-douleur », représenté par un centre spécialisé ou membre
d’une équipe anti-douleur.
39
Correspondants "anti-douleur"
30%
OUI
NON
70%
Efficacité:
Pour évaluer l’efficacité de l’analgésie entraînée par le traitement par morphiniques proposé,
280 médecins déclarent prendre en compte l’évaluation clinique, et uniquement 146 utilisent
une échelle d’évaluation de la douleur.
Evaluation de l'efficacité d'un
traitement antalgique
8
146
eval clinique
echelle
280
autre
Les différents résultats en ce qui concerne la gestion d’un traitement par morphiniques dans
les deux principales types de douleur, d’origine cancéreuse et non cancéreuse, sont résumés
dans le tableau suivant :
Tableau 5 : Gestion du traitement par morphine dans la douleur cancéreuse et non
cancéreuse
Initialisation du traitement par morphine
Par le médecin généraliste
Par l’hôpital
En relais au palier I et/ou II
D’emblée
En association au palier I et/ou II
Gestion des effets secondaires : OUI
Adaptations posologiques : OUI
Douleur
cancéreuse
168 (49%)
174 (51%)
236 (56%)
44 (10%)
143 (34%)
324 (99%)
323 (99%)
40
Douleur
cancéreuse
276 (84%)
51(16%)
271 (70%)
10 (3%)
106 (27%)
320 (99%)
318 (99%)
non
PARTIE CONCERNANT LES NON PRESCRIPTEURS DE MORPHINE:
Parmi les médecins qui ont répondu au questionnaire seulement 20 d’entre eux (6%)
déclarent ne pas utiliser des morphiniques dans le cadre de leurs prescriptions antalgiques.
Correspondants « anti-douleur »
Principaux correspondants "antidouleur"
4
14
11
référent
conf. Lib.
conf. Hosp.
ambul.
9
En cas d’impasse thérapeutique pour la prise en charge antalgique de leurs patients les
médecins interrogés adressent leurs patients à un référent « anti-douleur » (membre d’une
équipe ou centre anti-douleur) dans 14 cas, à un confrère spécialiste libérale (neurologue,
rhumatologue ou autre) dans 9 cas, à un confrère spécialiste hospitalier dans 11 situations et à
une consultation en ambulatoire (type Hôpital de Jour) dans 4 réponses.
Réticences:
Réticences pour la morphine et type de
douleur
8%
doul. Canc.
doul. Chroniq.
92%
Les réticences pour la prescription des morphiniques chez les médecins qui n’en prescrivent
pas sont dans 24 cas (92%) dans le cadre de la prescription de la morphine pour une douleur
chronique d’origine non cancéreuse. Le chiffre de 24 réponses pour cette question est
supérieur aux 20 médecins qui affirment en début de questionnaire ne pas prescrire de la
morphine. L’explication réside probablement dans le fait que parmi les prescripteurs 4
d’entre eux ont répondu également à cette question.
Eléments freinateurs:
Les principaux freins à la prescription des morphiniques pour cette population de médecins
généralistes ne prescrivant pas la morphine, sont représentés premièrement par les difficultés
de la prescription considérée encore comme lourde dans 13 réponses, malgré la suppression
de carnets à souches et introduction des ordonnances sécurisées depuis 1999.
41
On retrouve ensuite dans 11 réponses des réticences liées au médicament en lui même, qu’on
va développer lors de la question suivante.
Une proportion importante, chiffrée à 9 réponses estime que la prise en charge hospitalière de
ses patients pour leur pathologie douloureuse limite la prise en charge antalgique par le
médecin généraliste.
Enfin, une faible proportion, seulement 3 réponses de médecins non prescripteurs de
morphine considèrent qu’une insuffisance de formation pourrait constituer un élément
freinateur.
Eléments freinateurs pour la
prescription de morphine
11
13
médicament
prise en charge
formation
3
lourdeur prescr.
9
Réticences liées au médicament:
Les réticences liées au médicament en lui même sont dans 14 réponses des non-prescripteurs
des morphiniques en rapport avec la crainte d’une éventuelle dépendance.
Réticences pour la prescription de la
morphine liées au médicament
2
2
4
12
eff. sec.
dépend.
surd.
ethiq.
autre
14
En deuxième position parmi les réticences les plus fréquentes liée à l’utilisation de la
morphine on retrouve la crainte des effets secondaires présente dans 12 réponses qui sera
détaillée dans une question complémentaire dans la partie commune.
Elle est suivie dans 4 réponses de médecins non prescripteurs de la crainte d’un éventuel
surdosage.
Deux réponses des médecins ne prescrivant pas la morphine déclarent être réticents pour des
considérations éthiques.
III PARTIE COMMUNE (PRESCRIPTEURS OU NON DES MORPHINIQUES)
Effets secondaires redoutés:
Dans notre enquête, 128 (37%) des médecins qui ont répondu déclarent ne pas associer de
manière systématique des médicaments prévenant la survenue des effets secondaires.
42
Parmi les effets secondaires les plus redoutés chez leurs patients traités par morphine, la
constipation occupe la première place avec 250 des réponses, suivi des nausées et
vomissements dans 188 des réponses.
Parmi les médecins généralistes interrogés 181 redoutent un syndrome confusionnel
La dépression respiratoire constitue un effet indésirable redouté par 101 médecins.
La sédation occupe la même proportion, avec 102 réponses, parmi les effets secondaires
redoutés.
Selon notre enquête 83 médecins interrogés redoutent une rétention urinaire
Effets secondaires de la morphine les
plus redoutés
nausée
83
28
188
101
constip
confusion
sédation
102
250
181
dépression
rétention
coma
Le coma au décours d’un traitement par morphine est redouté par 28 médecins ayant répondu
au questionnaire.
Relation hôpital-ville:
En cas de suivi hospitalier de leurs patients, pour une pathologie douloureuse, cancéreuse ou
non, les médecins généralistes interrogés trouvent la transmission de l’information entre
l’hôpital et la ville satisfaisante dans 122 cas (35%), partielle pour 131 réponses (38%) et
insuffisante pour 92 d’entre eux (27%).
Qualité de la relation hôpital-ville
27%
35%
satisf
partiel
insuff
38%
Formation sur la prise en charge de la douleur:
D’après notre enquête 195 des médecins qui ont répondu (57%) sont intéressés pour
participer à des formations plus spécifiques pour la prise en charge de la douleur.
43
Intéret pour différentes modalités de
formation pour la douleur
8%
FMC
16%
EPU
52%
24%
Internet
Labo
Pour les médecins généralistes qui se déclarent intéressés par une formation spécifique pour
la prise en charge de la douleur cette formation s’inscrit dans le cadre de la Formation
Médicale Continue pour 140 des intéressés ou d’un Enseignement Post-Universitaire pour 66
d’entre eux. Quarante-cinq médecins sont intéressés par une formation fournie sur Internet et
23 seulement par les laboratoires.
Une dernière analyse croisée entre les médecins qui ne prescrivent pas la morphine et leur
éventuel intérêt pour une formation spécifique pour la prise en charge de la douleur on
retrouve uniquement 9 d’entre eux (45%) qui seraient intéressés par une telle formation.
Intéret pour une formation
douleur chez les non
prescripteurs de morphine
45%
non
55%
oui
Ce nombre de seulement 9 médecins (45%) non-prescripteurs de morphine qui serait
intéressées par la participation à une formation spécifique sur la douleur ne parait pas
concordant avec les précédents résultats conformément auxquels uniquement 3 (15%) d’entre
eux considèrent que les réticences à la prescription de morphine serraient liées à une
formation insuffisante.
44
PARTIE IV : DISCUSSION
L’enquête réalisée à l’aide de mon questionnaire semble avoir motivé les médecins
généralistes du Val de Marne car ils sont 349 soit près de 37% à avoir renvoyé le
questionnaire.
EPIDEMIOLOGIE MEDICALE :
Moyenne d’installation :
En ce qui concerne les données d’épidémiologie médicale dans la première partie, on constate
que la moyenne d’installation des médecins qui ont répondu au questionnaire est de 19.24
ans.
L’âge des médecins interrogés n’a pas représenté un item du questionnaire, mais si on ajoute
la moyenne d’installation obtenue, qui est de 19 ans, à l’âge moyenne d’installation qui
débute souvent à la fin de l’internat ou dans les années qui suivent celui ci, on peut supposer
que l’age moyen des médecins qui ont répondu se situe aux alentour de 45 à 50 ans.
Ces données sont tout à fait superposables avec les résultats de démographie médicale
concernant les praticiens du Val de Marne en 199423, et confirmés par le rapport de la
DRASS de juillet 2003 (21), où l’age moyen des généralistes du Val de Marne est à 45.9 ans.
On peut donc supposer que l’échantillon des médecins qui ont répondu peut être considéré
comme significatif pour la population des médecins généralistes du Val de Marne.
Corrélation entre la moyenne d’installation et la prescription de morphine :
La moyenne d’installation plus élevée retrouvée chez les non-prescripteurs de morphine,
située à 28 ans contre 19 ans pour les prescripteurs de morphine peut être liée à la
simplification de procédures en ce qui concerne la prescription de dérivés morphiniques (par
l’introduction des ordonnances sécurisées) et la volonté politique d’amélioration de la prise
en charge de la douleur (les plans triennaux, l’enseignement), avec un changement
d’habitudes de pratique remarqué chez les médecins installés après 1995.
Participation à la Formation Médicale Continue :
En ce qui concerne la participation à la FMC on retrouve une moyenne globale de
participation de 8.34 sessions par an. On rappelle que la formation médicale continue (FMC)
s’inscrit dans le cadre d’une obligation déontologique, mais aussi morale, vis-à-vis du
patient24. Le barème national pour les médecins généralistes a été fixé par le Conseil National
de la Formation Médicale Continue à 200 crédits/ 5 ans.( les différentes formations : congrès,
séminaires, colloques, DU, DIU représente 100 crédits/5 ans) (15).
Participation aux réseaux de soins :
On note parmi les participants aux différents réseaux de soins une nette prédominance de
réseaux de diabétologie (Revediab) et de cancérologie et soins palliatifs (Omega et Oncoval),
ce qui traduit l’intérêt pour deux domaines très importants de santé publique. La participation
23
Source : CPAM du Val de Marne 1994.
L’ordonnance n°96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins, confirmée
par la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, et
complétée par le décret n°2003-1077 du 11 novembre 2003, fait de la FMC une obligation juridique pour tous
les praticiens.
24
45
des médecins généralistes à ceux types de réseaux de soins a été d’ailleurs fortement soutenue
par Bernard Kouchner lors du troisième congrès de réseaux en juin 2001 (22).
Si on prend comme exemple le réseau Revediab25 on retrouve une participation de 50
médecins généralistes du Val de Marne (5) soit une proportion de 5.26% de l’effectif total des
généralistes du Val de Marne. Selon notre enquête, la participation au réseau Revediab parmi
les médecins qui ont répondu est de 4.23%. Ces résultats relativement proches font penser
que les résultats de l’enquête sont pertinents au niveau d’échelon départemental.
ANALYSE CHEZ LES PRESCRIPTEURS DE MORPHINE :
La douleur en consultation de médecine générale :
La motivation du sujet partait de l’analyse de pratiques dans le cadre d’une plainte estimée
pour nous comme courante en médecine de ville, représentée par les consultations pour une
plainte douloureuse. Cette hypothèse se confirme d’après les résultats du questionnaire car
95% de médecins questionnés considèrent que la douleur représente un motif de consultation
fréquent dans la pratique quotidienne.
Prescription de morphine et douleur cancéreuse :
Parmi les prescripteurs de morphine on remarque d’emblée une utilisation très importante
dans la douleur d’étiologie cancéreuse (320 médecins sur 349 réponses).
Cette relative facilité de prescription peut être expliquée par la prévalence de la douleur
physique chez les malades souffrant d’un cancer. Ainsi, il existe une symptomatologie
douloureuse chez environ un tiers des malades à la phase initiale, et chez 60 à 90% des
malades atteints de cancer localement avancé ou métastatique. (37). Les résultats de notre
enquête concernant la facilité de prescription de la morphine dans le cancer semblent
concordants avec les résultats de l’étude de 2002 auprès des médecins généralistes d’ Ile de
France (42) où les antalgiques de pallier 3 était retrouvés uniquement dans un pourcentage de
1% des prescriptions antalgiques, exclusivement pour des douleurs cancéreuses.
Initialisation de la prescription de morphine dans la douleur cancéreuse :
En ce qui concerne l’initialisation de la prescription de morphinique dans la douleur
cancéreuse, les proportions sont tout a fait semblables entre le médecin généraliste et
l’hôpital, conclusion relativement surprenante compte tenu de modalités de découverte de la
maladie cancéreuse, le plus souvent en milieu hospitalier avec un suivi hospitalier quasi
systématique d’après mon expérience.
Pour l’initialisation de prescription de morphiniques par le médecin généraliste on note que
dans 56% des cas ils sont utilisés en relais aux antalgiques de palier I et/ou II, et dans 34% de
situations en association avec d’autres antalgiques). Ces résultats sont plutôt en conformité
avec les recommandations OMS par rapport aux règles de passage des paliers. (34). Cette
analyse reste cependant assez globale car l’enquête n’a pas été très détaillée en ce qui
concerne les changements de paliers (après avoir atteint la posologie maximale
recommandée, changements faits ensuite selon les coefficients de conversion recommandés
pour obtenir une équi-analgésie entre opioïde faible et opioïde fort).
Prescription de morphine et douleur non cancéreuse :
Concernant la prescription de morphine dans la douleur chronique non cancéreuse, une
première remarque concerne l’emploi des morphiniques dans le cadre de ces douleurs
chroniques pour les douleurs d’origine rhumatismale, retrouvé comme prédominante (dans
82.37% des prescriptions). Cette proportion est concordante avec les « Recommandations de
25
Réseau expérimentale Essonne- Val de Marne de soins aux diabétiques de type 2
46
Limoges » (36) qui en 1999 ont retenu des indications très larges de la morphine: « les
rhumatismes inflammatoires dont la polyarthrite rhumatoïde, les spondylarthropathies, les
radiculopathies hyperalgiques, les lombalgies très invalidantes et les arthroses majeures des
membres inférieurs ».
Pour les douleurs neurologiques on rappelle que les opioïdes ont une efficacité moindre
contre ce type de douleurs mais ils peuvent jouer un rôle lorsqu’il existe une douleur
nociceptive du nerf (comme c’est le cas d’une compression directe d’un nerf ou d’une racine
nerveuse).
Selon notre enquête on retrouve une très faible utilisation des morphiniques dans la douleur
d’origine cutanée (9.4 % des réponses). Pourtant la morphine a une place tout a fait
intéressante dans la prévention des douleurs provoquée lors de soins de différentes
pathologies cutanées (soins d’ulcères et des escarres), mais peut être plus réservée à l’usage
hospitalier.
Initialisation de la prescription de morphine et douleur non cancéreuse :
En ce qui concerne l’initialisation du traitement par morphine dans la douleur non cancéreuse
le médecin généraliste semble avoir une place très importante, dans 84% des cas,
prédominance liée peut être au caractère chronique de ces pathologies, avec une implication
accrue du médecin traitant dans le cadre de leur suivi.
Produits morphiniques utilisés :
Parmi les produits morphiniques les plus utilisés on retrouve une nette prédominance des
formes orales et transdermiques, dont les principaux avantages de l’emploi sont probablement
représentés par la facilité d’administration, et l’effet retard avec une couverture de 12h à 24h
pour les formes orales à libération prolongée et de 72h pour les dispositifs transdermiques.
On rappelle qu’une demande d’AMM concernant l’utilisation de patch de Durogesic dans
les douleurs non cancéreuses est actuellement en cours.
L’utilisation des formes LP et à libération rapide dans des proportions relativement
semblables fait supposer que l’association de deux est souvent utilisée pour un meilleur
équilibre antalgique et la possibilité de traitement d’une douleur aiguë en interdose. Nos
résultats sont à ce sujet relativement discordants avec ceux de l’étude Epidol de 2003 (17) qui
retrouvait une sous-utilisation des interdoses de morphine à libération immédiate, car selon
cette étude seulement 11% des patients sous Durogésic et sous Moscontin/Skénan ont
bénéficié d’interdoses de morphine à libération immédiate.
Gestion d’un traitement par morphiniques :
La gestion du traitement par morphiniques est assuré dans 99% des cas par le médecin
généraliste, même pour la douleur cancéreuse, pour laquelle, comme on a vu précédemment,
la prescription est initialisée dans 51% des cas à l’hôpital. Ceci pourrait s’expliquer par une
bonne collaboration entre l’hôpital et le médecin généraliste, comme on va l’évoquer plus
tard.
Correspondants « anti-douleur » :
Les résultats de l’enquête montrent une bonne coordination avec les correspondants anti
douleur qui sont présents pour 70% des médecins qui ont répondu.
On rappelle que les consultations de prise en charge de la douleur existent depuis 1980. Elles
sont actuellement organisées en plusieurs structures:
-Les consultations d’évaluation et de traitement de la douleur sont des consultations
pluridisciplinaires s’adressant à des patients, hospitalisés ou ambulatoires, souffrant de
47
douleurs chroniques rebelles. Il existe 23 consultations anti-douleur en Ile de France (dont
deux dans le Val de Marne).26
-Les unités d’évaluation et de traitement de la douleur possedent ,en plus de l’organisation
des consultations, des lits d’hospitalisation. Il existe 5 unités anti-douleur en Ile de France
(dont une dans le Val de Marne).27
-Les centres d’évaluation et de traitement de la douleur sont insérés dans les structures
hospitalo-universitaires avec une triple mission de soins, d’enseignement et de recherche. En
Ile de France on dispose de 6 centres anti-douleur (dont un dans le Val de Marne)28.
Evaluation de l’efficacité du traitement par morphiniques :
Parmi les médecins ayant répondu à notre questionnaire on retrouve l’utilisation d’une
échelle d’évaluation de la douleur comme outil d’efficacité d’un traitement par morphine
chez un médecin sur trois. Ces résultats sont plutôt encourageants par rapport aux chiffres
retrouvés par l’étude de 2002 (42) auprès des médecins généralistes d’Ile de France et ceux
de l’étude Epidol (17) où on retrouve l’utilisation de l’EVA chez 6% et respectivement 11%
des médecins participants aux deux études. Cette amélioration des chiffres pourrait être
expliquée éventuellement par la sensibilisation à l’utilisation des échelles de mesure de
l’intensité de la douleur à travers du deuxième programme de lutte contre la douleur 20022005 (31).
On rappelle que l’échelle visuelle analogique est l’outil d’auto évaluation de référence chez
l’adulte et l’enfant de plus de six ans. Elle recouvre les mêmes réalités que l’avis du patient
mais avec plus d’objectivité. Cette mesure a été validé par l’AFSSAPS dans le cadre de
Recommandations de 2004 (2).
ANALYSE CHEZ LES NON PRESCRIPTEURS DE MORPHINE :
Réticences pour la morphine et douleur non cancéreuse :
Les réticences des non prescripteurs de morphine représentent au départ une des principales
motivation à la réalisation de cette enquête pour identifier éventuellement les principaux
éléments freinateurs pour la prescription de morphine.
On retrouve dés le départ une très nette prédominance, dans 92% des cas, des réticences
concernant l’utilisation de la morphine dans la douleur non cancéreuse.
Cette idée rejoint différemment l’hypothèse émise antérieurement que la morphine est
associée encore aujourd’hui avec les pathologies cancéreuses et les phases terminales de
certaines pathologies chroniques. Il peut en effet paraître plus facile pour un médecin de
prescrire de la morphine à un patient chez qui tout espoir de guérison à plus ou moins long
terme a disparu.
Pourtant l’AFSSAPS a mis au point en juillet 2004 des recommandations précises sur le bon
usage des opioïdes forts dans le traitement des douleurs chroniques non cancéreuses (2) afin
de pouvoir évaluer avec précision le rapport bénéfice/risque d’une telle prescription.
Réticences et considération éthiques :
Deux réponses sur les 20 médecins ne prescrivant pas la morphine déclarent être réticents
pour des considérations éthiques, ce qui fait penser que la morphine a encore une mauvaise
presse auprès de certains médecins et probablement auprès des patients. L’idée que la
morphine peut précipiter la fin de vie subsiste encore aujourd’hui, retrouvée dans une étude
italienne de 2003 (39) chez 22.2% des médecins généralistes qui ont participé à cette étude.
26
Les coordonnées de toutes ces structures de prise en charge de la douleur chronique sont disponibles sur le
site de « santé-gouv ».
27
Idem 81
28
Idem 82
48
Réticences et dépendance à la morphine :
Parmi les réticences à l’utilisation de la morphine une place importante revient à la crainte de
développer une dépendance. Le syndrome de dépendance est caractérisé par le désir de se
procurer et d’utiliser une substance psychoactive et par une recherche constante de cette
substance pour en ressentir les effets psychiques. On rappelle que la dépendance ne se
rencontre pas quand la morphine est utilisée dans un but thérapeutique.
Réticences et surdosage en morphine :
La crainte d’un surdosage représente également un élément freinateur important pour les non
prescripteurs de morphine. Les effets du surdosage sont essentiellement marqués par une
dépression respiratoire (traduite par une bradipnéee) et précédée toujours d’une sédation
importante. En pratique elle est surtout à craindre chez l’insuffisant respiratoire d’où tout
l’intérêt d’une bonne évaluation du terrain avant la mise en route d’un traitement par
morphiniques.
Réticences et effets secondaires :
On remarque que les effets secondaires de la morphine constitue un facteur majeur parmi les
réticences vis a vis de l’utilisation de celle-ci. Il est vrai que les effets indésirables de la
morphine sont nombreux et presque constants, mais dans la plupart des cas, ils peuvent être
corrigés par des traitements symptomatiques.
La constipation est un effet constant tout au long du traitement par la morphine, pratiquement
inévitable et elle est dose-dépendante. Elle est à traiter systématiquement et il est donc
nécessaire de la prévenir par un traitement laxatif associé à des règles hygiéno-diétetiques
pendant toute la durée du traitement.
Parmi les médecins ayant déclaré d’associer de manière systématique des médicaments
prévenant la survenue des effets secondaires, la très grande majorité utilisent les laxatifs
comme traitement préventif, associés souvent à des anti-émétiques.
Les nausées et les vomissements sont présents chez 20 à 40% des patients et sont quasiment
toujours transitoires, disparaissant avec la poursuite du traitement en général après 4 ou 5
jours. Elles répondent bien aux traitements antiémétiques usuels tels que le métoclopramide
(Primpéran®) ou le dompéridone (Motilium®).
Les effets psychodysleptiques de la morphine sont bien connus, il semblerait pourtant que les
hallucinations et les troubles psychiques soient plus rares qu’on ne le pense, ils ne
concerneraient que 5% des malades traités et disparaissent 3 à 5 jours après le début du
traitement ou l’adaptation des doses de morphine.
La dépression respiratoire est totalement exceptionnelle voir inexistante lors des
administrations chroniques ou orales et elle est toujours précédée d’une sédation importante.
La somnolence surviendrait dans 20% des cas. Elle est toujours transitoire, survenant lors de
l’instauration du traitement et disparaissant en quelque jours. Si elle persiste, il faut
rechercher une autre cause métabolique telle une insuffisance rénale, médicamenteuse ou
organique.
La rétention urinaire est un effet secondaire plutôt rare, qui survient plus volontiers chez le
sujet âgé, en cas d’adénome prostatique ou des pathologies urétrales.
Le coma n’est pas un effet indésirable, il est le signe d’un surdosage dont la somnolence et la
dépression respiratoire sont des signes précurseurs.
Si on compare les résultats de notre étude en ce qui concerne les effets secondaires les plus
redoutés d’un traitement par morphine aux résultats d’une étude italienne de 2003 (39)
concernant la prescription des opioïdes chez des patients en phase terminale, on remarque une
crainte importante chez les médecins italiens d’une dépression respiratoire (à 49.6% contre
27% dans notre étude).
49
Relation hôpital-ville :
La qualité de la relation hôpital –ville est estimée comme satisfaisante par un médecin sur
trois parmi ceux qui ont répondu. Elle pourrait éventuellement s’améliorer avec l’existence
du Dossier Médical Personnalisé, introduit depuis juillet 2007, qui pourrait apporter une
harmonisation du parcours de santé du patient, avec une coordination des soins et une
meilleure qualité des soins prodigués. On peut supposer également que l’introduction du
DMP pourrait entraîner une diminution des coûts de santé par la réduction des examens
redondants et des prescriptions suite au nomadisme médical (ANNEXE 8).
Formation sur la prise en charge de la douleur :
En ce qui concerne l’intérêt des médecins qui ont répondu au questionnaire pour une
formation plus spécifique pour la prise en charge de la douleur 57% d’entre eux seraient
intéressées. On peut donc supposer que pour le reste de 43% des médecins qui ne se déclarent
pas intéressés par une formation spécifique qu’ils ont déjà bénéficié d’une telle formation.
Ces résultats sont sensiblement superposables à ceux retrouvés par l’étude EPIDOL de 2003
(17), sur la prise en charge de la douleur en médecine générale. Selon cette étude un médecin
sur deux a reçu une formation spécifique sur la prise en charge de la douleur.
De plus, une étude de 2003 (12) a d’ailleurs démontré que le contrôle de la douleur chez des
patients arthrosiques était bien plus élevé lorsque les médecins généralistes recevaient une
formation spécifique.
Les résultats concernant l’intérêt pour participer à des formations plus spécifiques pour la
prise en charge de la douleur par l’intermédiaire de la FMC semblent concordants avec le
taux de forte participation à des FMC, présente chez 73% des médecins questionnés comme
on l’a vu auparavant.
50
PARTIE V : CONCLUSION
En conclusion, les résultats de cette enquête paraissent encourageants : les médecins
généralistes du Val de Marne, n’hésitent plus à utiliser les morphiniques dans les douleurs
cancéreuses, et également de plus en plus dans certaines douleurs chroniques non
cancéreuses, notamment d’origine rhumatologique et neurologique.
Si on compare les résultats obtenus pour la prescription de la morphine dans des douleurs non
cancéreuses aux résultats de 2002 d’une étude réalisée auprès des médecins généralistes d’Ile
de France (42), on remarque une nette progression car dans cette étude la prescription des
antalgiques de pallier III était faiblement représentée et réservée en exclusivité aux douleurs
cancéreuses.
Bien entendu des réticences existent encore concernant la prescription des morphiniques,
essentiellement chez les médecins qui ont débuté leur activité probablement avant la mise en
application de toutes les mesures mentionnées auparavant pour améliorer la prise en charge
de la douleur et faciliter la prescription de la morphine. Les principales réticences restent la
crainte des effets secondaires et de la dépendance, du fait probablement d’un manque des
données suffisantes à ce sujet.
Il n’en reste pas moins que ces résultats encourageants pourraient être améliorés par une
approche plus spécifique lors des formations sur la prise en charge de la douleur. Les résultats
de notre enquête montrent bien qu’il existe probablement des lacunes dans ce domaine, car
parmi les médecins qui ont répondu, plus de la moitié se déclarent intéressées par ce type de
formation.
Les résultats de cette enquête montrent que des progrès ont été réalisés dépuis ces dernières
années mais qu’il est nécessaire de continuer et de généraliser les formations professionnelles
sur la prise en charge de la douleur pour palier certaines insuffisances sur l’évaluation et le
traitement de la douleur.
L’enquête a été réalisée auprès des médecins généralistes car le médecin traitant reste un
pilier fondamental dans la gestion d’un traitement antalgique.
51
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54
ANNEXES
ANNEXE 1 : DECRET EN CONSEIL D'ETAT 2002-1471 DU 17/12/2002
relatif aux supports de prescription des medicaments soumis a la reglementation des
substances veneneuses autres que les stupefiants
Publié(e) au Journal officiel "Lois et Décrets"
296
du 20/12/2002
page :21204
texte :n°26
Le décret en Conseil d'Etat 99-249 du 31 mars 1999 relatif aux substances vénéneuses et
à l'organisation de l'évaluation de la pharmacodépendance a modifié le code de la santé
publique de façon à remplacer les carnets à souche par des ordonnances dites sécurisées
pour la prescription des médicaments stupéfiants.
La généralisation des ordonnances sécurisées à l'ensemble des prescriptions de
médicaments avait été fixée au 1er octobre 2000, puis reportée au 1er octobre 2002.
Compte tenu des difficultés posées par cette généralisation, notamment pour les
prescripteurs, il a été décidé de reporter d'une année supplémentaire la généralisation des
ordonnances sécurisées à l'ensemble des prescriptions médicamenteuses.
Ce délai supplémentaire permettra une montée en charge progressive du dispositif tout
en maintenant l'objectif de généralisation. En outre, cette période sera mise à profit pour
régler, en lien avec les professionnels de santé concernés, les problèmes posés par la
généralisation.
55
ANNEXE 2 : DECRET EN CONSEIL D'ETAT 92-963 DU 07/09/1992 RELATIF
AUX SUBSTANCES ET PREPARATIONS VENENEUSES ET MODIFIANT LE
CODE DE LA SANTE PUBLIQUE
Publié(e) au Journal officiel "Lois et Décrets" du 10/09/1992
page 12476
modification des art. r5151 (al. 1),r5152 (2emement de l'al. 1),r5156 (al. 4),r5161,r5162 (al.
et 2 et 3),r5165 (al. 1 et 2),r5166 (2),r5171 (al. 1,2,3 et ajout d'un 5),r5175 (al.
1),r5179,r5181 (al. 2 et 3),r5182 (dernier alinéa),r5184 (2 et ajout d'un 9),r5185,r5187 (al.
1) et insertion après l'art. r5187 d'un art. r5187-1,modification des art. r5194,r5201
(2emement de l'al. 1,al. 3 et ajout d'un al. 4),après l'art. r5201,ajout d'un art. r52011,modification de l'art. r5205 (al. 2 et 3 et ajout d'un al. 4),après l'art. r5208,ajout au parag.
2 de la section 3 du chap. i du titre III du livre v du code de la santé publique (2eme partie)
d'un art. r5208-1,modification des art. r5210 (al. 2),r5212 (al. 2),r5213 (al. 1),ajout apres
l'art. r5218 au parag. 3 de la section susvisée des art. r5218-1 et r5218-2,modification de
l'art. r5219 et ajout d'un art. r5219-1 après l'art. r5219 au parag. 4 de la section susvisée.
Déconcentration au préfet de région de certaines autorisations de commerce en gros de
stupéfiants ou d'emploi scientifique de psychotropes.
Interdiction de la production, de la mise sur le marche de l'emploi et de l'usage de 5
substances limitativement énumérées.
Compétence de la commission des stupéfiants et des psychotropes.
Réservation a l'usage professionnel des substances dangereuses destinées a la destruction
des parasites nuisibles a l'agriculture et des préparations en contenant lorsqu'elles sont très
toxiques: toxiques, cancérogènes, tératogènes ou mutagènes.
Interdiction de la délivrance et de l'emploi de cadmium.
Rédaction de toute ordonnance comportant une prescription de médicaments ou contenant
des substances vénéneuses ou des stupéfiants après un examen du malade.
Modification des durées de prescription des stupéfiants (3 durées de prescription possibles:
7,14 et 28 jours).
56
ANNEXE 3 : DECRET EN CONSEIL D'ETAT 92-963 DU 07 SEPTEMBRE
1992
relatif aux substances et préparations vénéneuses et modifiant le code de la santé
publique (deuxième partie: décrets en conseil d'état)
publié(e) au journal officiel "lois et décrets" du 10 septembre 1992
page 12476
modification des art. r5151 (al. 1),r5152 (2emement de l'al. 1),r5156 (al. 4),r5161,r5162
(al. et 2 et 3),r5165 (al. 1 et 2),r5166 (2),r5171 (al. 1,2,3 et ajout d'un 5),r5175 (al.
1),r5179,r5181 (al. 2 et 3),r5182 (dernier alinéa),r5184 (2 et ajout d'un 9),r5185,r5187
(al. 1) et insertion après l'art. r5187 d'un art. r5187-1,modification des art. r5194,r5201
(2emement de l'al. 1,al. 3 et ajout d'un al. 4),après l'art. r5201,ajout d'un art. r52011,modification de l'art. r5205 (al. 2 et 3 et ajout d'un al. 4),après l'art. r5208,ajout au
parag. 2 de la section 3 du chap. i du titre III du livre v du code de la santé publique
(2eme partie) d'un art. r5208-1,modification des art. r5210 (al. 2),r5212 (al. 2),r5213 (al.
1),ajout après l'art. r5218 au parag. 3 de la section susvisée des art. r5218-1 et r52182,modification de l'art. r5219 et ajout d'un art. r5219-1 après l'art. r5219 au parag. 4 de la
section susvisée.
Déconcentration au préfet de région de certaines autorisations de commerce en gros de
stupéfiants ou d'emploi scientifique de psychotropes.
Interdiction de la production, de la mise sur le marche de l'emploi et de l'usage de 5
substances limitativement énumérées.
Compétence de la commission des stupéfiants et des psychotropes.
Réservation a l'usage professionnel des substances dangereuses destinées a la destruction
des parasites nuisibles a l'agriculture et des préparations en contenant lorsqu'elles sont
très toxiques: toxiques, cancérogènes, tératogènes ou mutagènes.
Interdiction de la délivrance et de l'emploi de cadmium.
Rédaction de toute ordonnance comportant une prescription de médicaments ou
contenant des substances vénéneuses ou des stupéfiants après un examen du malade.
Modification des durées de prescription des stupéfiants (3 durées de prescription
possibles: 7,14 et 28 jours).
Contrôle particulier de certains types de médicaments, au stade de leur
commercialisation, de leur distribution ou de leur prescription.
57
ANNEXE 4 : LA CHARTE DU PATIENT HOSPITALISE
circulaire
n°
DHOS/E1/DGS/SD1B/SD1C/SD4A/2006/90
relative
aux
droits
des
personnes
hospitalisées
charte de la personne hospitalisée
du
et
2
mars
comportant
2006
une
1 - Toute personne est libre de choisir l’établissement de santé qui la prendra en charge
2 - Les établissements de santé garantissent la qualité de l’accueil, des traitements et des soins
3 - L’information donnée au patient doit être accessible et loyale
4 - Un acte médical ne peut être pratiqué qu’avec le consentement libre et éclairé du patient
5 - Un consentement spécifique est prévu pour certains actes
6 - Une recherche biomédicale ne peut être réalisée sans que la personne ait donné son
consentement après avoir été spécifiquement informée sur les bénéfices attendus, les
contraintes et les risques prévisibles
7 - La personne hospitalisée peut, à tout moment, quitter l’établissement
8 - La personne hospitalisée est traitée avec égards
9 - Le respect de la vie privée est garanti à toute personne
10 - La personne hospitalisée (ou ses représentants légaux) bénéficie d’un accès direct aux
informations de santé la concernant
11 - La personne hospitalisée exprime ses observations sur les soins et sur l’accueil
La dimension douloureuse, physique et psychologique de la prise en charge des personnes
hospitalisées, ainsi que le soulagement de leur souffrance, constituent une préoccupation
constante de tous les intervenants. Tout établissement doit se doter des moyens propres à
organiser la prise en charge de la douleur des personnes qu’il accueille. Une brochure
intitulée « Contrat d’engagement contre la douleur » doit être remise à chaque personne
hospitalisée. L’évolution des connaissances scientifiques et techniques, ainsi que la mise en
place d’organisations spécifiques, permettent d’apporter, dans la quasi totalité des cas, un
soulagement des douleurs, qu’elles soient chroniques ou non, qu’elles soient ressenties par
des enfants ou des adultes. Une attention particulière doit être portée au soulagement des
douleurs des personnes en fin de vie. Lorsque les personnes sont parvenues au terme de leur
existence, l’établissement met tout en œuvre pour leur assurer une vie digne jusqu’à la mort.
58
ANNEXE 5 : QUESTIONNAIRE DOULEUR DE SAINT ANTOINE (QDSA)
59
60
ANNEXE 6 : HOSPITAL ANXIETY AND DEPRESSION SCALE (HADS)
Lisez attentivement chaque série de questions et soulignez la réponse qui exprime le mieux ce
que vous avez éprouvé au cours de la semaine
écoulée.
Je me sens énervé(e) ou tendu(e) A
la plupart du temps
souvent
de temps en temps
jamais
3
2
1
0
Je prends plaisir aux mêmes choses qu ’auparavant D
oui, presque autant
pas autant
un peu seulement
presque plus
0
1
2
3
J ’ai une sensation de peur comme si quelque chose d’horrible allait arriver A
oui, très nettement
oui, mais ce n ’est pas trop grave
un peu mais cela ne m ’inquiète pas
pas du tout
3
2
1
0
Je ris facilement et vois le bon côté des choses D
autant que par le passé
plus qu ’avant
vraiment moins qu ’avant
plus du tout
0
1
2
3
Je me fais du souci A
très souvent
assez souvent
occasionnellement
très occasionnellement
3
2
1
0
Je suis de bonne humeur D
Jamais
rarement
assez souvent
la plupart du temps
3
2
1
0
61
Je peux rester tranquillement assis(e) à ne rien faire et être décontracté(e) A
oui, quoi qu ’il arrive
oui, en générale
rarement
jamais
0
1
2
3
J’ai l’impression de fonctionner au ralenti D
presque toujours
très souvent
parfois
jamais
3
2
1
0
J’éprouve des sentiments de peur et j’ai l’estomac noué A
jamais
parfois
assez souvent
très souvent
0
1
2
3
ANNEXE 7 : QUESTIONNAIRE
62
PARTIE GENERALE :
4) Si OUI (si vous êtes prescripteur des morphiniques)
1) Vous êtes médecin généraliste exerçant :

-seul

-en groupe ( nombre d’associés ?)
Généraliste(s)___Spécialiste(s)___
2) Vous êtes installé depuis : ____ ans
3) Avez-vous une orientation particulière ?

OUI
(Laquelle ?______________________________)

NON
4) Vous participez à une Formation Médicale Continue ?

OUI
(Nombre de sessions
par an ? _________)

NON
5) Participez-vous à un (ou plusieurs) réseaux de soins ?

OUI
(Lesquels ?________________________)
NON
PARTIE SPECIFIQUE « DOULEUR » :
1) La douleur représente un motif de consultation fréquent
dans votre pratique quotidienne ?

OUI

NON
2) Si OUI vous estimez que les consultations pour une
plainte douloureuse sont :

Très fréquentes

Habituelles

Rares

Exceptionnelles
3) Est-ce que vous utilisez des morphiniques dans vos
prescriptions antalgiques ?

OUI (questions 4 à 6)

NON (question 7)
4.1) Diriez vous que l’utilisation des morphiniques dans votre
pratique est :

Très fréquente

Habituelle

Rare

Exceptionnelle
4.2) Quels types de douleurs traitez vous par morphiniques

Douleur cancéreuse

Douleur chronique non cancéreuse :
-d’origine neurologique
-d’origine rhumatologique
-d’origine vasculaire
-d’origine cutanée
-autre______________________
4.3) Pour la douleur cancéreuse la prescription initiale de
morphiniques est le plus souvent:

initialisée par vous même

initialisée à l’hôpital
4.4) Pour la douleur cancéreuse vous utilisez les
morphiniques le plus souvent :

en relais aux antalgiques de palier I et/ou II

d’emblée

en association avec d’autres antalgiques de
palier I et/ou II
4.4) Pour la douleur chronique non cancéreuse la
prescription initiale de morphiniques est le plus souvent:

initialisée par vous même

initialisée à l’hôpital
4.5) Pour la douleur chronique non cancéreuse vous utilisez
les morphiniques le plus souvent :

en relais aux antalgiques de palier I et/ou II

d’emblée

en association avec d’autres antalgiques de
palier I et/ou II
63
4.6) Quelles formes galéniques de morphiniques
utilisez vous ?

morphine orale à libération prolongé

morphine orale à libération immédiate

morphine injectable

morphiniques transdermiques
4.7) Lorsque vous suivez un patient sous
morphiniques pour une douleur cancéreuse :
- vous gérez les effets secondaires intercurrents

OUI

NON
- vous effectuez les adaptations posologiques nécessaires

OUI

NON
4.8) Lorsque vous suivez un patient sous
morphiniques pour une douleur chronique non
cancéreuse :
- vous gérez les effets secondaires intercurrents

OUI

NON
- vous effectuez les adaptations posologiques nécessaires

OUI

NON
5) En cas d’impasse thérapeutique vous disposez dans
vos correspondants d’un référent « anti-douleur »
(centre spécialisé ou membre d’une équipe antidouleur) ?

OUI

NON
6) Comment évaluez vous l’efficacité de votre
traitement par morphiniques ?
 d’après l’évaluation clinique
 en utilisant une échelle d’évaluation de la douleur
 autre :____________________
Veuillez tourner la page s’il vous plait
7) Si NON (si vous n’êtes pas prescripteur des
morphiniques) :
7.1) A qui adressez vous dans ce cas vos patients
nécessitant une prise en charge antalgique ?

à un référent « anti-douleur », membre
d’une équipe ou centre anti-douleur

à un confrère spécialiste libérale
(neurologue, rhumatologue, autre)

à un confrère spécialiste hospitalier
(cancérologue, neurologue, rhumatologue, autre)

à une consultation en ambulatoire (type
Hôpital de Jour)
7.2) Vos réticences pour la prescription des morphiniques
concernent principalement :

la douleur cancéreuse

la douleur chronique non cancéreuse
7.3) Les principaux éléments freinateurs pour vous sont
liés :

au médicament en lui même

à la prise en charge hospitalière de ses
patients pour leur pathologie douloureuse, cancéreuse ou
non

du fait d’une formation insuffisante

du fait de la lourdeur de la prescription
7.4) Les réticences liées au médicament en lui même
sont :

par crainte des effets secondaires

par crainte d’une éventuelle dépendance

par crainte d’un éventuel surdosage

pour des considérations éthiques

autre____________________________
Passez à la question 8) s’il vous plaît pour la suite du
questionnaire.(partie commune pour tout le monde)
PARTIE COMMUNE (PRESCRIPTEURS OU
NON DES MORPHINIQUES) :
8) Parmi les effets secondaires de morphiniques quels sont
ceux que vous redoutez le plus :
 nausées et vomissements
 constipation
 confusion
 sédation
 dépression respiratoire
 rétention urinaire
 coma
9) Associez-vous de manière systématique des médicaments
prévenant la survenue de ces effets ?
 OUI (Lesquels ?_______________________________)
 NON
THESE DE MEDECINE GENERALE
FACULTE DE CRETEIL , PARIS XII
ENQUETE :
« QUELLE EST LA PLACE DES
MORPHINIQUES DANS
L’ARSENAL THERAPEUTIQUE
DU MEDECIN GENERALISTE
POUR LA PRISE EN CHARGE DE
LA DOULEUR
AUJOURD’HUI ? »
10) En cas de suivi hospitalier de votre patient pour une
pathologie douloureuse, cancéreuse ou non, vous trouvez la
transmission de l’information entre l’hôpital et la ville :

satisfaisante

partielle

insuffisante
11) Vous seriez intéressé pour participer à des formations plus
spécifiques pour la prise en charge de la douleur :

OUI

NON
12) Si OUI, quels types de formation ?

Formation Médicale Continue

Enseignement Post Universitaire

Par Internet

Par les laboratoires
Vos remarques m’intéressent
…………………………………………………...
…………………………………………………...
MERCI DE VOTRE PARTICIPATION
64
Doïna ROSCOULET
9 bis rue Raspail
93360 Neuilly – Plaisance
e-mail : [email protected]
ANNEXE 8 : PROJET DE LOI RELATIF A L’ASSURANCE MALADIE
-------Article 1er
La section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité sociale est complétée par un article L.
111-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 111-2-1. - La Nation affirme son attachement à une assurance maladie obligatoire et
universelle, garantissant une protection indépendante des situations d’âge et de santé. Elle affirme le
caractère solidaire de son financement. Les assurés sociaux contribuent à ce financement selon leurs
ressources, sans considération de leur âge ou de leur état de santé.
« Les régimes d'assurance maladie favorisent un accès effectif de tous les assurés sociaux aux soins,
notamment par une bonne répartition de l’offre de soins sur le territoire national. Ils font bénéficier tous les
assurés sociaux des progrès de la médecine, en contribuant notamment à assurer la coordination et la qualité
des soins dispensés. Ils concourent à la réalisation des objectifs de la politique de santé publique et veillent à
un usage efficient des ressources qui lui sont consacrées par la Nation. »
DISPOSITIONS RELATIVES À L’ORGANISATION DE L’OFFRE DE SOINS ET À LA
MAÎTRISE MÉDICALISÉE DES DÉPENSES DE SANTÉ
Section 1
Coordination des soins
Article 2
I. - Le chapitre Ier du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par une section 5 ainsi
rédigée :
« Section 5
« Dossier médical personnel
« Art. L. 161-45. - Afin de favoriser la coordination, la qualité et la continuité des soins, chaque bénéficiaire
de l’assurance maladie dispose, dans les conditions et sous les garanties prévues à l’article L. 1111-8 du
code de la santé publique, d’un dossier médical personnel constitué de l’ensemble des données mentionnées
à cet article, notamment des informations qui permettent le suivi des actes et prestations de soins.
« Ce dossier est créé auprès d'un hébergeur de données de santé à caractère personnel agréé dans les
conditions prévues à l'article L. 1111-8 du code de la santé publique.
« Art. L. 161-46. - Dans le respect des règles déontologiques qui lui sont applicables, et selon les modalités
prévues à l’article L. 1111-8 du code de la santé publique, chaque professionnel de santé, exerçant en ville
ou en établissement de santé, reporte dans le dossier médical personnel, à l’issue de chaque acte ou
consultation, les éléments diagnostiques et thérapeutiques concernant la personne prise en charge. En outre,
les établissements de santé reportent à l’issue du séjour d’un patient sur le dossier médical personnel les
éléments résumés relatifs à ce séjour.
« Le niveau de prise en charge des actes et prestations de soins par l’assurance maladie prévu à l’article L.
322-2 est subordonné à l’autorisation que donne le patient, à chaque consultation ou hospitalisation, aux
professionnels de santé auxquels il a recours d’accéder à son dossier médical personnel et de le compléter ».
65
ANNEE : 2008
NOM ET PRENOM DE L’AUTEUR : VISU/ROSCOULET Doïna-Adriana
DIRECTEUR DE THESE : M. BEDIN Arnaud
TITRE DE LA THESE : « ANALYSE DE PRESCRIPTION DES MORPHINIQUES
AUPRES DES MEDECINS GENERALISTES DU VAL DE MARNE »
La douleur représente un motif de consultation fréquent en médecine générale.
Environ 60% des consultations chez le médecin généraliste sont motivées par une
symptomatologie douloureuse.
Mon travail dans le cadre de cette thèse se propose d’évaluer les connaissances déjà
acquises sur l’utilisation ou la non utilisation des opioïdes dans les douleurs chroniques,
d’étiologie maligne et bénigne, les perceptions et les opinions des médecins généralistes
concernant la prise en charge de la douleur par les morphiniques, ainsi que d’identifier les
problématiques rencontrées avec l’utilisation de ces produits, à partir des résultats d’une
enquête menée auprès des médecins généralistes du Val-de-Marne.
Après un rappel des connaissances concernant les principales caractéristiques des
opioïdes et la physiopathologie de la douleur, le travail s’est concentré sur l’étude des
habitudes de travail effectives des médecins généralistes avec l’interprétation des résultats de
l’enquête sur le maniement des morphiniques.
Les résultats de cette enquête paraissent encourageants : les médecins généralistes du
Val de Marne n’hésitent plus à utiliser les morphiniques dans les douleurs non cancéreuses ,
notamment d’origine rhumatologique et neurologique.
Si on compare les résultats obtenus aux résultas d’une étude similaire du 2002 auprès
des médecins généralistes d’Ile de France, on remarque une nette progression en ce qui
concerne la prescription de la morphine dans les douleurs non cancéreuse.
D’après les résultats de mon enquête des réticences existe encore concernant la
prescription des morphiniques, principalement liées à la crainte des effets secondaires et de la
dépendance, probablement due à un manque des données suffisantes à ce sujet.
Les résultats de cette enquête montrent que des progrès ont été réalisés dépuis ces
dernières années mais qu’il est nécessaire de continuer et de généraliser les formations
professionnelles sur la prise en charge de la douleur pour palier certaines insuffisances sur
l’évaluation et le traitement de la douleur.
MOTS-CLES :
-Morphine, dérivés
-Douleur-thérapeutique
-Médecine générale
ADRESSE DE L’UFR : 8, Rue du Général SARRAIL
94010 CRETEIL CEDEX
66
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