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Fiche d’information sur l’arthroplastie totale de hanche
Docteur Luc Kerboull
L’arthroplastie totale de hanche est le nom donné à l’intervention qui consiste à remplacer
l’articulation de la hanche par une prothèse totale.
Nous aborderons ici les notions indispensables pour vous aider à mieux comprendre les
pathologies de la hanche, les étapes de l’intervention et enfin la gestion des suites
opératoires.
Comprendre
L’anatomie
L’articulation de la hanche se trouve entre le bassin et la jambe et supporte le poids de notre
corps. Elle supporte des forces importantes pouvant aller jusqu’à 4 fois le poids corporel
quand nous sommes en appui sur un seul membre.
La hanche est une articulation portante
formée par deux surfaces articulaires :
l’une sphérique, la tête fémorale est
l’extrémité supérieure du fémur, l’autre
en forme de cavité se nomme le cotyle
et est située au niveau de l’os iliaque
qui forme le bassin. Ces deux surfaces
articulaires sont recouvertes de
cartilage, tissu particulier, lisse, lubrifié
et non renouvelé qui permet le
glissement des deux surfaces l’une sur
l’autre dans de bonnes conditions.
L’articulation est entourée par une
enveloppe, la capsule, elle-même
doublée par une membrane, la
synoviale qui assure la production d’un
liquide de lubrification.
La hanche est stabilisée par des ligaments et
par les muscles puissants qui l’entourent : les
muscles fessiers à l’arrière et sur le coté qui
stabilisent la hanche lorsque le membre est
en appui. Ces muscles fondamentaux pour la
marche s’insèrent sur le relief le plus externe
du fémur appelé grand trochanter.
Les muscles antérieurs qui permettent de
fléchir la cuisse sur le tronc, s’attachent sur le
petit trochanter.
Le respect de ces muscles est indispensable
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pour assurer à la future hanche prothétique une bonne fonction.
Les pathologies de la hanche
L’atteinte de la hanche se traduit initialement par des douleurs. Celles-ci surviennent
principalement à la marche et lors des mouvements de l’articulation, en particulier quand on
écarte la jambe de l’axe du corps.
Les douleurs sont ressenties au niveau de l’aine parfois sur le coté et dans la fesse. Elles
irradient souvent vers le genou et parfois même peuvent être uniquement localisées à cet
endroit. Au fur et à mesure que l’atteinte progresse les douleurs s’accompagnent d’une
boiterie et d’une diminution de la mobilité de l’articulation.
Toutes les maladies de la hanche ont en commun la dégradation du cartilage qui une fois
évoluée est responsable d’une gêne importante.
La dégradation du cartilage peut être primitive et est alors appelée arthrose. Elle correspond
au vieillissement du cartilage, normal par l’âge, ou anormal et prématuré le plus souvent
consécutif à une surcharge due à un excès de poids ou à une importante activité physique.
Une malformation congénitale de l’articulation ou les séquelles d’un traumatisme grave
peuvent également favoriser une usure accélérée du cartilage.
A coté de ces causes mécaniques, il existe d’autres atteintes dites inflammatoires où la
dégradation du cartilage est secondaire à une maladie de l’enveloppe articulaire. Enfin, la
privation traumatique ou métabolique de la vascularisation de la tête fémorale, appelée
ostéonécrose, peut conduire à l’effondrement de l’os qui soutient le cartilage et à terme à
une arthrose.
Dans quelles circonstances est proposé le remplacement de la
hanche par une prothèse totale ?
Cette intervention est l’étape ultime du traitement de l’affection de la hanche. Deux
paramètres principaux sont pris en compte dans la décision opératoire : l’importance de la
dégradation de l’articulation et la gêne ressentie par le patient.
L’importance de la dégradation de l’articulation
Celle-ci est évaluée sur la hauteur de cartilage (appelée interligne articulaire) mesurée sur
la radiographie du bassin de face. S’il est vrai que la gêne n’est pas toujours corrélée à
l’importance des lésions radiographiques, l’intervention n’est proposée que lorsque
l’interligne articulaire a presque disparu.
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A gauche, une hanche normale avec un interligne articulaire de 6 à 7 mm séparant la tête fémorale de la cavité cotyloidienne. A droite, hanche arthrosique dans laquelle cet espace a presque disparu témoignant de l’usure du cartilage.
La gêne ressentie par le patient
Son évaluation est parfois difficile car son appréciation reste subjective et donc variable d’un
patient à l’autre. C’est l’interrogatoire guidé par le praticien qui permettra au patient, bien
informé, de prendre la décision de l’intervention quand il estimera que l’atteinte de sa hanche
retentit suffisamment sur son confort de vie pour justifier le recours à la chirurgie.
L’âge est-il un facteur limitant ?
La moyenne d’âge habituelle des candidats à cette intervention est de 65 ans et n’influe pas
sur la décision opératoire. En fait, seuls les âges extrêmes imposent une discussion : d’un
coté, les sujets jeunes et actifs de moins de 50 ans et de l’autre les sujets de plus de 80 ans.
Les premiers, de part leur espérance de vie et leur activité physique sont exposés au risque
de voir leur prothèse s’user et donc être changée. Les seconds, souvent atteints de
pathologies cardiovasculaires, sont exposés à un risque plus important de complications
péri-opératoires. Dans les deux situations, l’information est fondamentale pour que le patient
puisse faire un choix éclairé. D’une manière générale, c’est toujours l’importance de la
douleur et le retentissement sur le confort de vie et l’autonomie qui conduisent à
l’intervention et ce quel que soit l’âge du patient, pourvu qu’il soit apte à la supporter et que
l’atteinte articulaire soit réelle et évoluée.
Comment préparer l’intervention ?
La préparation de l’intervention a comme but principal de prévenir la survenue de
complications. Dans son ensemble, cette préparation à l’intervention est faite dans le mois
précédent l’intervention.
Coordonnée par le médecin anesthésiste et le chirurgien, elle commence par un bilan de
santé approfondi qui permettra d’évaluer et traiter les pathologies, connues ou inconnues,
susceptibles de se décompenser au cours ou au décours de l’intervention.
Outre le bilan biologique et la consultation d’anesthésie, le patient sera examiné par un
cardiologue qui demandera les explorations nécessaires pour compléter son examen
clinique.
En fonction des pathologies le patient pourra être amené à consulter d’autres spécialistes.
Certains états pathologiques pourront même justifier leur traitement médical ou chirurgical
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préalable pour éviter qu’ils ne viennent compliquer les suites de l’arthroplastie totale de
hanche.
Au cours de ce bilan, la recherche de foyers infectieux est une étape fondamentale car les
bactéries sont susceptibles par le biais du vecteur de la circulation sanguine de venir
contaminer la hanche prothétique. Les foyers dentaires et urinaires sont les plus fréquents et
de plus parfois méconnus ; ils sont donc systématiquement recherchés et traités avant
l’intervention.
La chirurgie osseuse étant hémorragique, il est le plus souvent nécessaire de compenser les
pertes sanguines. Quand cela est possible, ces pertes sont compensées par le propre sang
du patient récupéré et traité au cours de l’intervention. Quand les pertes sont importantes ou
l’état général précaire il est alors nécessaire de réaliser une transfusion pour protéger le
cœur et éviter une fatigue importante.
Il faut également parler des importantes surcharges pondérales qui doivent être corrigées
avant l’intervention. En effet, si l’obésité est un facteur responsable de la dégradation
articulaire, c’est également un important facteur de risque à court et à moyen terme. A court
terme, l’obésité augmente le risque de complications vasculaires et infectieuses et à moyen
terme, elle augmente le risque d’usure prématurée de la prothèse. De plus, les masses
graisseuses, en gênant l’accès et l’exposition de l’articulation, diminuent la précision du
chirurgien et de fait risquent de nuire à la qualité de l’implantation de la prothèse.
Comment se déroule l’hospitalisation ?
Le patient est hospitalisé la veille de l’opération.
Il est nécessaire d’apporter l’ensemble des documents relatifs à l’intervention (examens,
compte rendus de visite et radiographies).
Il faut se munir de vêtements confortables et faciles à mettre, de chaussures aisées à enfiler
et fermées par des velcros. Si un transfert direct en maison de repos est prévu il faut penser
à préparer les effets nécessaires à ce séjour qui peut durer un mois.
Un dernier bilan biologique de contrôle et de référence est fait à l’entrée ainsi que des
radiographies réalisées pour planifier l’intervention (choix de la taille de la prothèse et
ajustement de la longueur du membre).
Pour diminuer les risques de complications infectieuses, la peau du patient est préparée par
une épilation et une détersion. Avant l’intervention (la veille et le matin), deux douches sont
prises avec un antiseptique et en salle d’opération deux autres détersions du site opératoire
sont faites sur la table d’opération.
Après son accueil au bloc opératoire et la réalisation des dernières vérifications (identité,
côté à opérer, allergies), le patient est anesthésié (modalités choisies avec le médecin
anesthésiste) puis installé sur la table d’opération.
La durée de l’intervention est fonction de sa complexité. Une arthroplastie simple nécessite
environ 1 heure 30. La technique est détaillée dans le chapitre suivant.
Après l’intervention le patient est conduit en salle de réveil pour un séjour de 2 à 3 heures
durant lequel il sera réchauffé, réveillé, calmé de ses douleurs et transfusé. Une fois l’état du
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patient stabilisé et jugé normal par le médecin anesthésiste, le malade est reconduit à sa
chambre et installé dans son lit.
La première nuit est généralement inconfortable en raison des multiples visites de
surveillance qui rendent difficile l’endormissement. Les douleurs sont efficacement traitées
par des dérivés morphiniques puis par des antalgiques conventionnels dès que l’intensité
douloureuse diminue. Des antibiotiques sont maintenus pendant 48 heures. Le traitement
anticoagulant, destiné à prévenir la survenue de thrombose veineuse, est débuté le soir de
l’intervention et poursuivi 4 semaines. Des anti-inflammatoires sont administrés pendant la
durée de l’hospitalisation.
Le lendemain de l’intervention est consacré au repos et à la surveillance des constantes
cliniques et biologiques (douleur, tension artérielle, recherche d’une anémie). Le patient
reçoit la visite du kinésithérapeute qui lui enseigne quelques mouvements de base et lui
explique les principes de la rééducation qui se déroulera au cours de son séjour. Si le patient
se sent bien, il est levé au bord de son lit et souvent fait ses premiers pas aidé par un
déambulateur ou deux cannes anglaises.
L’autonomie est le plus souvent rapidement acquise entre 3 et 5 jours après l’intervention. Le
patient est autonome pour se lever, se déplacer et réaliser les gestes de la vie quotidienne.
En général, il est possible de commencer à marcher sans canne sur de petites distances à
partir du 5ème jour, il est en revanche prudent de conserver une canne à l’extérieur et dans
les escaliers pendant 3 semaines.
La sortie est possible dès l’autonomie acquise. En fonction des cas (type d’atteinte de la
hanche, conditions de vie du patient), la convalescence se déroule au domicile ou dans un
centre de rééducation spécialisé.
L’Arthroplastie totale de hanche
Qu’est ce qu’une prothèse totale de hanche?
La prothèse totale de la hanche a pour but de remplacer les parties osseuses et le cartilage
endommagés de l’articulation.
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Elle se compose de deux pièces. Un implant cotyloïdien, sphérique en forme de cupule
implantée dans le bassin pour remplacer le cartilage cotyloïdien. L’implant fémoral est
composé d’un pivot implanté dans le canal médullaire du fémur et prolongé par un col et une
tête sphérique remplaçant la tête et le col fémoral sectionnés.
Les prothèses sont en fait des composites de plusieurs matériaux. Les parties de support et
de fixation à l’os sont toujours faites à partir d’un alliage métallique, à base de titane d’inox
ou de chrome cobalt.
Les
parties
articulaires
sont
constituées de différents matériaux,
céramique, métal ou plastique.
La fixation de la prothèse à l’os dite
cimentée ou non cimentée. Le
ciment est une résine qui permet de
combles les espaces entre la
prothèse et l’os. En l’absence de
ciment, la prothèse est recouverte
d’une substance qui permet de
favoriser une repousse de l’os au
contact intime du métal. De
nombreuses combinaisons sont
possibles. Le choix est fonction de
différents paramètres comme l’âge
du patient, la qualité et enfin la forme
de l’os.
Ce choix est fait par le chirurgien qui
vous l’expliquera. A la fin de ce
document vous pourrez trouvez plus
de détails pour mieux comprendre
les éléments conditionnant ces choix
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Quelles sont les étapes techniques ?
Différentes techniques sont possibles et nous les comparons à la fin de ce document. Nous
décrirons ici la technique dite « voie antérieure » que nous utilisons préférentiellement. Nous
la réservons aux hanches simples, sans trouble morphologique majeur. Pour les autres,
nous préférons la voie dite transtrochantérienne . C’est en particulier la voie élective des
reprises de prothèses totales.
La voie antérieure
Le patient, une fois en salle d’opération, est installé sur une table opératoire spécifique
appelée « table orthopédique » qui permet la manipulation du membre inférieur durant les
différentes étapes de l’intervention. Un appareil de radioscopie permet de contrôler le
positionnement des implants pendant l’intervention.
Une fois endormi et installé correctement, l’accès à l’articulation est fait par une incision en
haut et en avant de la cuisse.
Cette approche antérieure est la seule
technique qui suit un espace intermusculaire à distance des axes nerveux et vasculaires.
L’accès à l’articulation se fait ainsi sans qu’il soit nécessaire de sectionner le moindre muscle
ou tendon. Le cotyle et le fémur sont successivement exposés et préparés pour recevoir les
implants appropriés en terme de taille. Le choix des implants est prévu par la réalisation d’un
projet opératoire sur lequel des calques apposés sur la radiographie permettent de
prévisualiser les implants les mieux adaptés à l’os.
La hanche est alors réduite et la plaie opératoire fermée sur
un drainage qui permet d’évacuer le sang et d’éviter la
constitution de volumineux hématomes
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La durée de l’opération varie entre 1 et 2 heures.
Après l’intervention, le patient est ensuite conduit en salle de réveil. Le temps d’absence de
la chambre est largement supérieur au temps opératoire sans que cela ne préjuge de la
moindre complication. Ce temps est requis pour votre préparation avant l’intervention,
l’administration des anesthésiants, l’intervention chirurgicale et la surveillance postopératoire
Une fois de retour dans votre chambre, l’important est de contrôler la douleur. N’hésitez pas
à appeler les infirmières même au milieu de la nuit, pour ne pas laisser la douleur s’installer.
Les avantages de cette technique :
1 Diminution de la douleur post-opératoire
En comparaison avec les autres techniques, cette approche permet en général de réduire
les douleurs post-opératoires puisqu’aucun muscle n’est sectionné.
2 Récupération rapide de la marche et de l’autonomie
La musculature étant préservée, la rééducation peut généralement commencer le lendemain
de votre opération en accord avec votre médecin qui le décidera en fonction de votre état
post-opératoire.
3 Séjour hospitalier écourté
Généralement, grâce à l’habituelle rapide récupération de l’autonomie il est possible de
réduire significativement la durée du séjour hospitalier (entre 4 et 7 jours). Votre chirurgien
peut tout de même vous conseiller un séjour plus long en fonction de votre état postopératoire.
4 Taille de la cicatrice réduite
La taille de l’incision cutanée et donc de la cicatrice est souvent plus petite que celle d’une
technique «conventionnelle». Ceci étant il s’agit d’un point mineur et sans réel intérêt majeur.
6 Prévention du risque de luxation
Cette technique épargnant les muscles, une fois la capsule articulaire cicatrisée à la fin du
mois, il n’est plus nécessaire de respecter des consignes particulières pour éviter la luxation
de l’articulation.
Comment se déroulent la convalescence et la rééducation ?
La hanche est une articulation simple. Le simple fait de s’asseoir et de marcher suffit le plus
souvent à réveiller la musculature et à assouplir l’articulation. Des exercices
complémentaires permettent dans certaines circonstances d’améliorer les amplitudes
articulaires si celles-ci étaient très réduites avant l’intervention. Il est généralement possible
de marcher sans canne vers la fin de la troisième semaine parfois avant pour les patients les
plus toniques. La hanche retrouve sa souplesse et son indolence dans un délai allant de 2 à
3 mois. La récupération complète s’obtient par des exercices réguliers et simples. Il faut de
toute façon être patient et progressif car les exercices intensifs sont déconseillés et parfois
même nocifs. Durant le premier mois il est recommandé d’éviter les mouvements sollicitant
une forte flexion de la hanche. De même il faut éviter les fauteuils et canapés bas dont il peut
être difficile de sortir. Après le premier mois il est possible de reprendre une vie normale
sans plus se soucier de sa hanche.
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Un premier rendez-vous avec votre chirurgien sera organisé environ 5 semaines après
l’intervention, avec une radiographie de contrôle.
Selon votre condition générale, vous pourrez reprendre la conduite avec l’autorisation
préalable de votre médecin à trois semaines de votre intervention, si vous êtes capable
d’entrer et de sortir de votre véhicule sans la nécessité de prendre des antidouleurs, si vous
entrez dans votre voiture en pivotant l’ensemble du bassin avec les jambes côte à côte et si
vous avez un bon contrôle de votre jambe.
Quelles activités physiques peut-on pratiquer avec une prothèse de
hanche ?
Dans la plupart des cas, en l’absence d’un autre handicap, la hanche artificielle autorise tous
les types d’activité physique. Néanmoins, il paraît prudent d’éviter les sports ou activité à
haut risque de traumatisme violent. La prothèse peut facilement absorber un choc violent
sans se rompre mais c’est alors le fémur osseux qui se casse. Le problème est alors
représenté par la complexité plus grande de la réparation d’une fracture du fémur autour de
la prothèse.
La pratique du jogging doit également restée modeste et limitée. En effet, la course entraîne
une succession de chocs absorbés par la prothèse qui peuvent à terme altérer sa fixation ou
accélérer son usure.
En résumé, il est tout à fait possible de continuer à pratiquer les sports que l’on maitrisait
avant l’intervention. La prudence recommande simplement d’accepter de dégrader un peu
son niveau ou l’intensité de la pratique. Pour illustrer ce propos et pour répondre à une
question fréquente, oui il est possible de continuer à skier mais il faut abandonner les pistes
noires et les bosses et se contenter de pistes simples avec une neige de bonne qualité.
Quelles sont les principales complications de cette chirurgie ?
La loi nous obligeant à informer objectivement les patients, voici le chapitre le plus
désagréable et parfois anxiogène pour nos patients. Il est important de comprendre qu’il
s’agit d’une chirurgie sérieuse exposant à des complications rares mais parfois très graves
qu’il convient de prévenir chaque fois que cela est possible.
1. Les complications locales ou liées à l’acte chirurgical lui-même
a. Les blessures vasculaires et nerveuses
Heureusement rarissimes, elles peuvent être graves et lourdes de séquelles quand elles
intéressent des vaisseaux ou des nerfs importants. Elles sont plus fréquentes dans les
interventions complexes surtout quand il existe des modifications anatomiques dues à des
malformations congénitales ou à des interventions multiples.
b. Les fractures du fémur
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Parfois occasionnées par les manœuvres opératoires elles sont exceptionnelles dans les
arthroplasties simples. A distance de l’intervention elles sont dues à des chutes le plus
souvent violentes.
c. Les luxations
Ce terme décrit la sortie de la tête fémorale en dehors de la cavité cotyloidienne. Elle
entraîne une douleur violente, une déformation et un raccourcissement du membre sur
lequel il devient impossible de prendre appui. Elles conduisent le plus souvent à une
hospitalisation de courte durée au cours de laquelle, sous anesthésie, la tête fémorale sera
remise en place par des manœuvres externes. Les causes des luxations sont multiples et
parfois intriquées. Il faut distinguer les luxations précoces des luxations tardives. Les
luxations précoces sont souvent isolées dues à une sollicitation excessive ou à un manque
de tonus musculaire alors que la capsule articulaire n’est pas cicatrisée. En général, une fois
la musculature renforcée et la capsule cicatrisée elles ne se reproduisent pas. Les luxations
tardives sont souvent récidivantes et sont dues à des causes plus graves. Les deux plus
fréquentes sont l’insuffisance musculaire et le mauvais positionnement de l’une ou des deux
pièces de la prothèse. Cette dernière cause est la plus grave car dans ce cas la luxation
récidive fréquemment et pour des mouvements anodins. Il devient alors indispensable de
corriger chirurgicalement le défaut existant. En l’absence de défaut de la hanche prothétique,
l’origine est alors musculaire et correspond à une incapacité de la musculature périarticulaire
à maintenir la coaptation de la hanche prothétique. Cette inefficacité musculaire peut-être
définitive s’il existe des lésions musculaires constituées. Celles-ci sont en générales
consécutives à des interventions multiples sur la hanche, raison qui justifie logiquement le
choix de techniques opératoires respectant intégralement la musculature.
d. La dégradation des surfaces articulaires prothétiques
L’articulation prothétique comporte deux surfaces en contact, mobiles l’une sur l’autre et
donc soumises à un frottement.
Différents matériaux sont utilisés pour la fabrication des prothèses : le polyéthylène, les
céramiques, et les alliages métalliques.
Le polyéthylène, utilisé uniquement pour la cupule est historiquement le plus ancien. Ce
matériau est soumis à l’usure mais très facile à fixer durablement avec ou sans ciment
quelque soient les conditions anatomiques. L’usure normale de l’implant est en général lente
garantissant en théorie une durée de vie de 15 à 20 ans en l’absence d’autre complication.
Cependant, le plastique étant un matériau inhomogène certaines cupules en polyéthylène
échappent à cette règle et peuvent s’user en moins de 10 ans. Moins utilisés pour les
prothèses de première intention il reste néanmoins parfois le seul matériau utilisable dans
certaines reprises complexes de prothèse, notamment quand il faut reconstruire le cotyle
osseux par des greffes
Les céramiques, utilisées pour la cupule et la tête fémorale, sont très résistantes à l’usure.
Le risque de rupture, important au début de l’expérience, est maintenant très faible. Etant
très rigides, elles ne peuvent être bien ancrées au niveau du cotyle que si l’os est dur et sans
malformation. Ces céramiques sont très intéressantes et représentent à mon sens le meilleur
choix si la qualité de l’os est bonne pour garantir leur fixation sans ciment
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Les alliages métalliques, acier inox, titane et chrome cobalt, sont utilisées généralement
pour la tête fémorale et la tige prothétique. Quand ils sont utilisés en couple, la résistance à
l’usure est bonne mais ils peuvent libérer des particules dont la toxicité potentielle pour
l’organisme reste encore à évaluer. L’acier inox est le matériau le plus fiable pour les
prothèses cimentées, le titane est surtout utilisé pour les prothèses non cimentées.
La libération de particules, quelle que soit leur nature, hormis les particules de céramiques,
peut entraîner une réaction inflammatoire chronique au contact des implants qui à terme
conduit à la résorption du tissu osseux avoisinant. Cette altération progressive de l’os vient
peu à peu rompre le lien qui unit la prothèse à l’os. Celle-ci se met alors à bouger puis se
mobilise. Ce descellement de la prothèse s’accompagne de douleurs et ne peut être traité
que par une nouvelle intervention au cours de laquelle l’os sera reconstruit par des greffes et
les implants changés.
e. Le descellement des implants
Comme nous venons de le voir ce terme décrit la perte de la fixation initiale de l’implant à
l’os, obtenue soit par l’intermédiaire d’un joint en résine communément appelée ciment
chirurgical, soit par une repousse osseuse au contact direct de la surface poreuse de la
prothèse dite alors « sans ciment ». L’apparition d’une mobilité est souvent progressive et
parfois minime et non douloureuse. Dans la plupart des cas, l’évolution se fait vers
l’aggravation et conduit à une nouvelle intervention devant la récidive des douleurs ou la
constatation d’altérations du tissu osseux qui est érodé par l’implant mobile et la réaction
inflammatoire générée par les différents débris d’usure qui circulent alors. Les descellements
précoces correspondent à une mauvaise fixation initiale ou à une infection. Les
descellements tardifs sont en général dus à l’usure des implants.
f. L’infection articulaire
Il s’agit de la complication locale la plus grave car elle conduit systématiquement au
changement de la prothèse et peut parfois demander pour guérir plusieurs interventions. Elle
est heureusement rare, environ 1 cas pour 1000 dans notre expérience personnelle.
Elle est toujours due à une bactérie, le plus souvent un staphylocoque par exemple, et
jamais dans l’état actuel des connaissances à un virus. Elle peut avoir deux causes : soit la
contamination externe de la hanche en cours d’intervention ; soit la contamination interne à
partir d’un foyer infectieux distant porté par le patient, le germe étant véhiculé par le sang.
Ce type de contamination, dite hématogène, peut survenir à tout moment même à distance
de l’intervention.
C’est la raison pour laquelle tout patient porteur d’une prothèse interne, articulaire, vasculaire
ou valvulaire, doit être bien informé et veiller à traiter rapidement les foyers infectieux
bactériens (infections dentaires, sinusiennes, cutanées, urinaires et digestives). Dans le
même but, les injections intramusculaires dans la fesse opérée sont interdites pour éviter
une contamination de la hanche si une infection se développait au niveau du point
d’injection.
g. La persistance de douleur en l’absence de descellement
Il peut arriver qu’il persiste des douleurs dans la région de la hanche. Le plus souvent elles
sont dues à une insuffisance de récupération de la musculature et finissent par disparaître.
Parfois elles peuvent être consécutives à une irritation musculaire ou tendineuse liée à une
saillie des composants de la prothèse ou d’un autre matériel utilisé en complément. Dans
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ces cas il peut parfois être nécessaire de réintervenir pour supprimer cette saillie en retirant
le matériel (vis ou fil métalliques) ou en modifiant la position de la prothèse. Citons
également la possibilité de sensations d’irritation ou de perte de sensibilité dans la région de
la cicatrice dues à la section des rameaux nerveux cutanés de la peau. Peu gênant, cet
inconfort disparaît généralement dans les mois qui suivent l’intervention
2. Les complications générales
Elles justifient une prévention et un traitement attentif car certaines peuvent grever le
pronostic vital.
a. Les complications thromboemboliques
Elles commencent en général par une phlébite venant boucher l’une des veines de la
jambe. Le diagnostic est en général fait rapidement et le traitement anticoagulant permet
d’obtenir une guérison rapide. La fréquence des phlébites étant importante c’est la raison
pour laquelle un traitement anticoagulant préventif est administré de manière
systématique. Rarement, le caillot de sang peut migrer jusqu’à la circulation pulmonaire
entraînant une embolie pulmonaire pouvant être grave. Quand on constate d’importantes
anomalies de la circulation veineuse avant l’intervention il est préférable de les traiter
avant de réaliser l’arthroplastie totale de hanche de manière à diminuer le risque de
complication thromboembolique.
b. Les complications cardiovasculaires
L’intervention étant hémorragique, le cœur va devoir assurer les modifications du volume
sanguin. S’il existe une pathologie cardiaque non équilibrée, cet effort supplémentaire
imposé au muscle cardiaque peut être mal toléré et conduire à un accident cardiaque.
Pour prévenir ces complications, on recourt à des transfusions pour maintenir le volume
sanguin à peu près constant et surtout on réalise avant l’intervention un bilan
cardiovasculaire pour dépister et traiter toutes les anomalies découvertes à cette
occasion. La surveillance cardiologique après l’intervention sera systématique.
c. Les complications cérébrales
Très rares, elles sont généralement dues à l’existence d’une occlusion des artères
carotidiennes préexistante ou à la migration en cours d’intervention de graisse osseuse à
partir du fémur. Comme pour les varices, l’occlusion sévère des artères carotidiennes
impose de la traiter préalablement.
d. Les autres complications
Il est important de comprendre que toute pathologie préexistante à l’intervention peut se
décompenser dans les suites. C’est la raison pour laquelle il est fondamental de connaître
ces pathologies et de les traiter avant l’acte opératoire. Pour citer un exemple, le diabète
doit être parfaitement équilibré avant la chirurgie.
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En résumé, pour profiter longtemps de votre prothèse:
1 Mener une vie saine et active, mais évitez les activités sportives
intensives et à risque de chute violente.
2 Ne Négligez pas les infections et consultez rapidement
3 Surveillez votre santé et vos dents grâce à des contrôles réguliers.
4 Surveillez votre poids
Pour en savoir plus
Deux questions viennent souvent à l’esprit des patients et ce d’autant que les
techniques utilisées sont nombreuses et l’information, en particulier sur Internet,
facilement disponible. Dès lors, il devient difficile pour le patient de choisir la
meilleure prothèse et la meilleure technique d’implantation.
Quelle est la meilleure prothèse ?
En fait, il n’existe à ce jour aucune prothèse parfaite. Bien des solutions techniques ont été
essayées et toutes ont montré certains avantages et surtout des limites. Si la plupart des
prothèses aujourd’hui disponibles sont à même, si elles sont bien mises, de fournir un bon
résultat pendant 10 ans c’est après que les problèmes surviennent. Comme nous l’avons vu
en passant en revue les complications, le point faible des prothèses reste l’usure de la
cupule. La difficulté est de trouver le meilleur compromis entre la qualité de la fixation et la
résistance à l’usure. Dans l’état actuel des connaissances, on peut admettre que la fixation
cimentée d’une cupule en polyéthylène cimentée reste un compromis fiable. Certes le
plastique peut s’user mais de nombreux progrès ont été réalisés dans sa fabrication qui
permettent de penser que cette usure sera sûrement retardée. Les solutions utilisant des
cupules céramiques offrent la meilleure résistance à l’usure mais ne peuvent être
généralisées à tous les patients. Cependant, le choix d’un couple de friction céramique
apparaît le plus logique aujourd’hui si le tissu osseux du bassin est résistant et de fait
compatible avec un matériau rigide comme la céramique. La fixation de la prothèse
fémorale, quant à elle, n’est plus un réel problème si l’implant est bien dessiné. Le choix de
l’une ou l’autre des solutions (avec ou sans ciment) n’a donc que peu de conséquences sur
la fiabilité de l’ancrage en l’absence d’usure du cotyle.
Quelle est la meilleure technique opératoire ?
Cette question se résume finalement au choix de la voie d’abord puisque par ailleurs la
technique de préparation des surfaces articulaires est relativement standardisée. Concernant
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les voies d’abord on peut identifier trois catégories. La voie antérieure, les voies trans
musculaires et les voies transtrochantériennes.
La voie antérieure passe entre les muscles antérieurs. Cette voie très intéressante car
respectueuse de l’anatomie, autorise une reprise précoce de la marche. Elle n’est cependant
pas toujours utilisable car elle donne un accès limité à l’articulation. Elle demande un
entraînement particulier et surtout une table d’opération spécifique. Pour les hanches
simples elle est idéale.
Les voies trans-trochantériennes préservent également la musculature mais imposent un
délai de consolidation osseux postopératoire qui diffère la reprise de l’appui complet pendant
6 semaines. Elles permettent dans tous les cas une exposition parfaite garante de la
précision de l’acte opératoire. Elles trouvent leur indication idéale dans les reprises de
prothèse totale de hanche ou dans les hanches dont l’anatomie est très perturbée.
Les voies trans-musculaires imposent la section ou la désinsertion d’une partie de la
musculature. Elles peuvent être antérieures ou postérieures et laissent inévitablement des
séquelles musculaires qui affaiblissent la hanche prothétique et augmentent le risque de
luxation postopératoire. Plus faciles à réaliser elles sont choisies par de nombreux
chirurgiens en dépit de leurs inconvénients pour le patient.
Enfin, il faut évoquer la taille de la cicatrice, problème secondaire en apparence seulement. Il
faut comprendre que la mise en place de la prothèse demande une exposition minimale pour
être fiable. La longueur de l’incision peut être réduite pour des soucis esthétiques si
l’épaisseur des parties molles l’autorise. S‘acharner à vouloir réaliser l’intervention au travers
d’une courte incision expose à des dégâts musculaires et nerveux par étirement et surtout à
un mauvais positionnement de la prothèse.
Confronté à ces différents choix, chaque chirurgien doit acquérir en fonction de son
apprentissage et de son expérience des convictions et une confiance dans une technique et
des implants. Le plus important est qu’il sache bien les utiliser pour prévenir les catastrophes
immédiates et que ses choix reposent sur une logique mécanique. Dès lors, la seule vraie
question pour le patient est en fait de choisir son chirurgien en s’assurant que celui-ci a
l’expérience de cette intervention et de la prothèse qu’il utilise.
Docteur Luc Kerboull
Espace Médical Vauban 2 A, avenue de Ségur , 75007 Paris.
Tel : (33) 1 53 59 88 04
[email protected]
site internet : imk-forum.com
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