Revue de la littérature sur les thérapies non

publicité
Revue de la littérature sur les
thérapies non médicamenteuses
dans la maladie d’Alzheimer
Mémoire de DIU d’Alzheimérologie et Pathologies
Apparentées, Lyon-Reims
Dr Genoveva Miriana Dedu
3 décembre 2011
Table des matières
1 Introduction
3
2 Méthodologie des synthèses prises en compte
2.1 Synthèse de synthèses . . . . . . . . . . . . . .
2.2 Synthèses Cochrane . . . . . . . . . . . . . . .
2.3 Synthèses multi-thérapie . . . . . . . . . . . .
2.4 Synthèses sur des thérapies spécifiques . . . .
4
4
5
6
7
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
3 Thérapies basées sur la cognition
4 Thérapies basées sur l’environnement
4.1 Rééducation de l’orientation . . . . .
4.2 Éducation de l’entourage . . . . . . .
4.3 Thérapie par animaux . . . . . . . .
4.4 Jardins thérapeutiques . . . . . . . .
8
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
9
. 9
. 9
. 10
. 10
5 Thérapies basées sur l’activité motrice
11
6 Thérapies basées sur la stimulation sensorielle
6.1 Musicothérapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
6.2 Aromathérapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
6.3 Thérapie par massage . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
6.4 Luminothérapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
6.5 Acupuncture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
6.6 Stimulation nerveuse électrique transcutaneuse (TENS)
6.7 Stimulation multisensorielle (Snoezelen) . . . . . . . . .
.
.
.
.
.
.
.
12
12
13
13
14
15
15
16
7 Thérapies par l’art
7.1 Musicothérapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
7.2 Dessin, peinture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
7.3 Danse, mouvement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
16
16
17
17
8 Interventions psycho-sociales
8.1 Thérapie par évocation du passé (réminiscence)
8.2 Thérapie par empathie (de validation) . . . . .
8.3 Thérapie basée sur la rectitude (l’humanitude) .
8.4 Sociothérapie . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
17
17
18
19
19
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
9 Résultats récapitulatifs
20
10 Conclusions
21
2
Objectif
L’objectif de ce mémoire est de présenter, dans le cadre de la maladie
d’Alzheimer, « les différentes thérapies non-médicamenteuses, les différentes
catégories et formes qu’elles peuvent prendre, les principales indications par
famille de thérapies non-médicamenteuses et les résultats que l’on peut en
attendre en fonction de ce qui apparaît dans la littérature » et cela « en prenant simplement les quelques revues de la littérature bien faites sur ce sujet
qui sont parues depuis 2 ou 3 ans, et de faire une synthèse ».
1
Introduction
Non seulement la population, mais aussi et surtout la proportion de personnes âgées augmente sans cesse, et comme conséquence l’incidence de la
démence augmente aussi. En 2005 en France par exemple, il y avait 855 000
cas de démences, et ce chiffre devrait passer à 1 300 200 en 2020 et 2 100 000
en 2040 si l’incidence et la durée de la maladie ne changent pas d’ici là [9].
Une étude française sur la maladie d’Alzheimer (MA), PAQUID (Personnes
Âgées Quid), commencée en 1987, à très large échelle en nombre (environ
3800 patients âgés) et en temps (15 ans), montre toute l’importance donnée
à cette maladie en France [15].
La démence décrit un ensemble de symptômes, incluant l’altération de
la mémoire, raisonnement et capacités de communication, ainsi qu’une perte
graduelle de capacités nécessaires dans la vie quotidienne. C’est une détérioration irréversible de la mémoire, de la fonction exécutive et de la personnalité.
Généralement, la démence est divisée en quatre catégories [13] : la maladie d’Alzheimer, la démence vasculaire, la démence du corps de Lewy et
la démence fronto-temporale. La maladie d’Alzheimer, la plus fréquente des
démences, a une étiologie inconnue et se caractérise par un début insidieux,
une détérioration lente et implique des troubles du langage, de la motricité,
de la personnalité et de la fonction exécutive. La démence vasculaire résulte
d’un infarctus de cerveau suite à une maladie vasculaire ; elle apparaît d’une
manière soudaine et la progression peut être ralentie en contrôlant les facteurs de risque comme la pression artérielle. La démence du corps de Lewy
est générée par des structures anormales dans les cellules du cerveau appelées
corps de Lewy, et se caractérise par des symptômes fluctuants, la présence
d’hallucinations visuelles et des certains symptômes parkinsoniens. La démence fronto-temporale est générée par des désordres des lobes frontaux et
temporaux antérieurs du cerveau, et se caractérise par des difficultés de lan3
gage, perte de mémoire et d’autres. Ce mémoire se focalise sur la maladie
d’Alzheimer, cependant beaucoup d’articles traitent MA et les pathologies
apparentées ensemble.
Pour les patients atteints de démence, le traitement médicamenteux a des
effets adverses. Pour éviter le recours aux antipsychotiques, la Haute Autorité
de Santé propose pour la prise en charge de ces malades d’envisager dans un
premier temps des interventions non médicamenteuses [11].
Dans ce mémoire seront présentées les différentes thérapies avec leurs
indications et résultats.
Ce mémoire présente ces interventions (thérapies). Il est organisé selon
les thérapies, et dans chacune des thérapies les indications et les résultats
seront présentés également.
2
Méthodologie des synthèses prises en compte
Plusieurs recherches ont été faites en novembre 2011 avec des mots clés
variés sur les thérapies non médicamenteuses de la démence (reminiscence,
validation, dementia et beaucoup d’autres) dans PubMed (MedLine), le site
Cochrane et Internet. Les critères d’inclusion ont été : l’article doit présenter
des résultats de thérapies non médicamenteuses sur des patients atteints de
démence, l’article doit être un article de synthèse, l’article doit être récent
(2008–2011) et doit être écrit en anglais ou en français. Ont été prises en
compte 18 synthèses : une synthèse de synthèses, dix synthèses Cochrane,
quatre synthèses générales (multi-thérapie), et trois synthèses spécifiques à
une thérapie.
2.1
Synthèse de synthèses
Avec ses environs 150 pages en rapport complet, Hulme et al. 2010 [13]
est la synthèse la plus riche dans le domaine. Les auteurs ont recherché en
novembre 2007 dans sept bases de données électroniques (AMED, CINAHL,
EMBASE, MEDLINE, PSYCINFO, Cochrane, DARE) des synthèses suivant
les mots clés dementia/Alzheimer’s AND review AND non-drug therapies.
Ont été pris en compte seuls les articles écrits en anglais, sur le traitement
non pharmacologique, publiés à partir de 2001 et dont le but principal a
été d’évaluer l’efficacité du traitement. Ils ont trouvé 784 références uniques.
Après lecture des titres et résumés, seuls 114 articles ont été jugés potentiellement pertinents. Après lecture des articles, seuls 35 articles représentant
33 études ont été pris en compte.
4
La méthodologie de recherche étant un facteur important, d’autres synthèses ont été prises en compte aussi, souvent plus récentes aussi, présentées
dans ce qui suit.
2.2
Synthèses Cochrane
Cette section présente les dix synthèses Cochrane 1 prises en compte dans
ce mémoire. Ces synthèses cherchent notamment dans la base de données
Cochrane Dementia and Cognitive Improvement Group’s Specialized Register (CDIG), qui contient notamment les bases de données majeures de santé
MedLine, EMBASE, CINAHL, LILACS et d’autres, ainsi que dans la littérature grise 2 . Toutes ces synthèses prennent en compte seuls les essais contrôlés
aléatoires (RCT, randomised controlled trials) sur des patients déments. Plus
de détails sur la méthodologie se trouvent dans les synthèses.
Clare et al. 2008 [5] est une synthèse Cochrane sur les thérapies basées
sur la cognition pour les personnes avec Alzheimer ou démence vasculaire. La
base de données Cochrane CDIG a été recherchée en septembre 2006. Neuf
RCTs ont été pris en compte.
Vink et al. 2011 [21] présentent une synthèse sur la musicothérapie. Des
RCTs ont été recherchés en avril 2010 dans le registre Cochrane CDIG et
dans MEDLINE, EMBASE, PSYCinfo, CINAHL et LILACS, ainsi que la
littérature grise. Dix RCTs sur des patients atteints de démence ont été
inclus.
Chung et al. 2009 [4] font une synthèse sur Snoezelen pour la démence.
La base de données Cochrane CDIG a été cherchée en mars 2008 avec les
termes snoezelen OR "multi-sensory". Quatre RCTs ont été pris en compte.
Woods et al. 2009 [23] prennent en compte pour la réminiscence quatre
RCTs avec un total de 144 participants. La base de données Cochrane CDIG
a été cherchée en février 2005 avec le terme "reminiscence", ainsi que certains
spécialistes du domaine et Internet.
Cameron et al. 2009 [3] ont fait une recherche en décembre 2005 avec les
mots TENS, transcutaneous et d’autres dans la base Cochrane CDIG. Neuf
RCTs ont été acceptés, mais seulement trois ont pu être utilisés, les autres
n’ayant pas suffisamment de données.
1. The Cochrane Collaboration est un réseau international de personnes du domaine
de la santé qui publie régulièrement des synthèses sur des sujets particuliers.
2. « La littérature grise est, selon l’AFNOR, tout “document dactylographié ou imprimé, produit à l’intention d’un public restreint, en dehors des circuits commerciaux
de l’édition et de la diffusion et en marge des dispositifs de contrôle bibliographiques ».
Exemples de littérature grise : rapports d’études ou de recherches, actes de congrès, thèses,
brevets, etc.” (de http://fr.wikipedia.org/wiki/Litterature_grise).
5
Neal et al. 2009 [18], dans leur synthèse sur la thérapie par empathie, ont
fait une recherche en décembre 2005 en utilisant les mots clés validation therapy, VTD et emotion-oriented care dans la base de données CDIG Cochrane.
Trois RCTs ont été identifiés, sur un total de 116 patients déments.
Holt et al. 2009 [12] ont fait des recherches en mars 2008 pour l’aromathérapie dans la base de données Cochrane CDIG et auprès des experts dans
le domaine pour des RCTs avec des termes aroma therap*, complementary
therap*, alternative therap* et essential oil*. Quatre études ont été incluses
dans la synthèse, mais une seule, après avoir contacté l’auteur, a pu être prise
en compte.
Hansen et al. 2008 [10] présentent une synthèse sur la thérapie par le massage. La base Cochrane CDIG a été recherchée en juillet 2005 avec les termes
massage, reflexology, touch et shiatsu, ainsi que les organisations concernées.
Sur 34 références initiales, seules sept étaient des RCTs éventuelles ou non,
et seulement deux ont rempli le critère minimum de qualité.
Forbes et al. 2009 [7] ont fait une recherche en mars 2008 pour la luminothérapie dans la base Cochrane CDIG en utilisant les termes "bright light*",
"light box*", "light visor*", "dawn-dusk*", phototherapy et autres. Huit études
ont rempli les conditions d’inclusion, dont seulement cinq avaient des données
utilisables et ont donc été prises en compte.
Forbes et al. 2008 [8], dans une synthèse sur l’activité physique, ont recherché en septembre 2007 dans la base Cochrane CDIG en utilisant des
termes comme exercise OR "physical activity" OR cycling OR tai chi OR
. . . Quatre études ont rempli les conditions d’inclusion, mais seulement deux
avaient des résultats disponibles.
2.3
Synthèses multi-thérapie
O’Connor et al. 2009 [19] présentent une synthèse des traitements psychosociaux pour les troubles de comportement dans la démence. Les traitements
psycho-sociaux sont définis comme des stratégies dérivées de l’un des trois paradigmes orientés vers la psychologie (théorie de l’apprentissage, les besoins
non satisfaits et les seuils de stress modifiés). La musicothérapie, l’aromathérapie, la stimulation multisensorielle font partie des méthodes présentées. Des
articles en anglais parus au plus tard en décembre 2006 ont été cherchés dans
les bases de données Medline, CINAHL, PsycInfo et Cochrane, ainsi qu’en
demandant à une soixantaine de chercheurs dans ce domaine. Les articles pris
en compte sont des RCTs ou des études à mesures répétées. Pour augmenter
la qualité des résultats, la barrière d’inclusion des articles a été augmentée :
nombre de participants adapté, tous les participants doivent être déments,
l’intervention et la description des participants doivent être bien expliquées,
6
la randomisation et l’aveuglement doivent être bien faits etc. Seuls 25 articles
sur 118 trouvés ont rempli les spécifications de la synthèse.
Kong et al. 2009 [14] font une synthèse des cas cliniques randomisés
(contrôlés ou cross-over) sur les interventions non pharmacologiques pour
l’agitation dans la démence. Sept bases de données (MEDLINE, CINAHL,
PsycINFO, AARP Ageline, Cochrane, ACP Journal Club et ISI index) ont
été recherchées en 2004 suivant les mots clés agitations OR agitated OR dementia OR demented OR Alzheimer ; les références des articles éligibles ainsi
trouvés ont été prises en compte aussi. Seuls les articles en anglais et en coréen ont été éligibles dans la synthèse. Sur 317 articles trouvés, seuls 14 ont
rempli les spécifications et ont été analysés.
Olazarán et al. 2010 [20] ont fait en septembre 2008 une recherche systématique des RCTs dans des articles de synthèse et dans six bases de données
(Medline, PsycINFO, CINAHL, Embase, Lilacs et Cochrane) avec des mots
clés variés (non donnés dans l’article), sans tenir compte de la langue. Seuls
les articles avec des participants avec troubles cognitifs ont été pris en compte.
1313 articles ont été ainsi recueillis (une croissance exponentielle des RCTs
dans le temps a aussi été remarquée), et seulement 179 ont été inclus dans
la synthèse (dont 97 % en anglais). Ces articles traitent de diverses thérapies
non médicamenteuses pour MA (réminiscence, musicothérapie, stimulation
cognitive etc.)
Ballard et al. 2009 [1] présentent une synthèse sur plusieurs thérapies
non médicamenteuses, comme l’aromathérapie et la validation, ainsi que des
thérapies médicamenteuses, ayant comme but la réduction de l’agitation et
l’agression des patients avec MA. Les bases de données PubMed (Medline)
et Cochrane ont été recherchées (la date à laquelle la recherche a été effectuée n’est pas donnée) avec des termes comme démence, agression, SCPD et
d’autres. 47 RCTs ont été sélectionnés dans la synthèse.
2.4
Synthèses sur des thérapies spécifiques
Lee et al. 2009 [16] présentent une synthèse sur l’acupuncture seulement.
Vingt bases de données ont été recherchées (Medline, AMED, British Nursing Index, CINAHL, EMBASE, PsycInfo, Cochrane, six bases coréennes,
quatre chinoises et trois japonaises) depuis leur début jusqu’en août 2008,
sans restriction de langue, d’après les mots clé acupuncture AND alzheimer.
Un critère d’inclusion a été un RCT avec des patients atteints de MA. La
recherche a généré 40 articles, qui après lecture et validation du résumé et
de l’article complet ont été réduits à 3. Ce sont ces 3 articles, tous de Chine,
qui ont été pris en compte dans la synthèse. Enfin, ils ont trouvé qu’aucune
étude n’est méthodologiquement rigoureuse.
7
Wang et al. 2009 [22] présentent une synthèse sur le tai chi pour déceler
ses effets sur le bien-être psychosocial. Ont été cherchées pour des RCTs en
anglais les bases de données MEDLINE, CINAHL, EMBASE, HEALT, PsycINFO, CISCOM, Cochrane et actes de conférences et dissertations jusqu’à
août 2008. 15 études ont été trouvées, dont huit de haute qualité. C’est la
seule synthèse récente trouvée sur cette thérapie ; malheureusement, elle n’est
pas spécifique aux patients déments.
Beard 2011 [2] présente une synthèse sur les thérapies par l’art pour
les patients atteints de démence. C’est, d’après l’auteur, la première synthèse spécifique à ces thérapies pour ces patients. La recherche a été effectuée en avril 2010 sur des bases différentes, incluant PubMed, SocAbstracts,
PcychInfo, MedLine, CINAHL et Cochrane, avec de mots clés art-, music-,
drama-, dance- therapy, combinés avec review, dementia et Alzheimer’s, pour
des articles à partir de 1990. 134 articles ont été trouvés, dont 26 synthèses
sur les thérapies par l’art, dont 14 avec patients atteints de démence. Peu
d’études, cependant, sont de bonne qualité ; beaucoup plus d’études et de
meilleure qualité sont nécessaires.
3
Thérapies basées sur la cognition
Les interventions cognitives représentent certaines activités et discussions
en groupe ou individuelles ayant comme but la stimulation de la fonction
cognitive des patients, par exemple la mémoire, l’attention, le langage et la
fonction exécutive. Clare et al. [5] la divise en trois parties : stimulation cognitive (améliorer des activités générales, non spécifiques), entraînement cognitif (améliorer le fonctionnement cognitif, comme la mémoire, l’attention et
la résolution de problèmes) et réhabilitation cognitive (activités spécifiques
à chaque patient pour améliorer le fonctionnement cognitif dans les activités
quotidiennes). Il est aussi possible de la classifier en approches collectives
(stimulation cognitive ; atelier mémoire, qui sollicite les différents types de
mémoire : épisodique, sémantique, lexicale, de travail et procédurale) et approches individuelles (réhabilitation cognitive, apprentissage sans erreurs).
La littérature récente les traite ensemble.
Hulme et al. [13] passent en revue cinq synthèses sur ce sujet, dont la
plupart se focalisent sur MA. La stimulation cognitive pourrait améliorer la
mémoire, le fonctionnement cognitif, les symptômes neuropsychiatriques, le
comportement, la dépression, la qualité de vie, l’apprentissage et les activités
quotidiennes. Cependant, les résultats ne sont pas concluants, car la plupart
des études ont un nombre restreint de patients et ont parfois des défauts
méthodologiques.
8
Clare et al. [5], une synthèse Cochrane, conclut qu’aucun effet positif ou
négatif n’a été remarqué. Également, il n’y a pas de RCT dans la réhabilitation cognitive pour les personnes avec une démence légère. Enfin, davantage
d’études sont nécessaires pour obtenir des conclusions sûres.
Olazarán et al. [20] présentent notamment un RCT de haute qualité où
la stimulation cognitive a été donnée ou non aux patients à la maison en
complément au donépézil ; le résultat montrent que la fonction cognitive a
été améliorée chez les patients ayant reçu aussi la stimulation cognitive.
4
4.1
Thérapies basées sur l’environnement
Rééducation de l’orientation
La thérapie basée sur la rééducation de l’orientation tente d’orienter les
personnes atteintes de démence en temps, lieu et reconnaissance de personnes
dans le but de réduire la confusion et les troubles de comportement de ces personnes. Par exemple, rappeler aux personnes où elles sont et quelle date/heure
il est. Cette thérapie inclut le désaccord avec le patient quand il a tort, ce
qui contraste avec la thérapie par empathie, présentée dans la section 8.2 en
page 18.
Les trois synthèses présentées par Hulme et al. [13] concluent que cette
thérapie pourrait être efficace, notamment dans l’habilitation cognitive, dépression et apathie, mais que les résultats sont insuffisants pour énoncer des
conclusions sûres. La qualité des études trouvées est médiocre, avec en plus
un nombre de personnes réduit.
4.2
Éducation de l’entourage
À la maison tout comme dans un centre de placement, la personne atteinte
de démence est toujours entourée de divers intervenants (famille, voisinage,
para-médicaux), qui peuvent tous être considérés comme des soignants. Étant
donnée la tâche difficile à laquelle ces soignants sont soumis, une éducation
de ceux-ci, spécifique au travail avec ces personnes, paraît utile. Cela passe
par exemple par des sessions de formation, en partant de situations concrètes
rencontrées au quotidien (par exemple la personne avec démence n’arrive pas
à se coucher).
Dans ce contexte, O’Connor et al. [19] prennent en compte quatre études.
Dans trois études, l’éducation de l’entourage a donné des résultats similaires
au placebo. Dans le quatrième, l’agitation des patients a baissé. Les auteurs
concluent que les soignants certes changent d’attitude, de comportement et
9
d’habileté. Cependant, contrairement aux attentes, les études n’ont pas donné
pour l’instant des résultats prometteurs pour l’éducation de l’entourage.
Kong et al. [14], après analyse de deux études, en concluent qu’il n’y a pas
eu de différences significatives sur l’agitation des patients des deux groupes
(traitement et contrôle).
4.3
Thérapie par animaux
La thérapie par animaux représente l’interaction entre le patient et un
animal entraîné, facilitée par un thérapeute, avec un but thérapeutique. Cela
peut se concrétiser en se concentrant tout simplement sur l’animal pendant
un certain temps (lui donner à manger par exemple), ce qui promeut la
conversation ou l’activité physique.
Hulme et al. [13] prennent en compte deux synthèses dans cette catégorie, une de 2006 et une de 2001, qui se focalisent sur des patients atteints
de démence. Ces synthèses ont trouvé que les études se font avec un animal,
ou bien avec un animal et un thérapeute. L’animal est toujours à côté du
patient, ou bien seulement pour des périodes de temps réduites. Souvent,
l’animal est un chien, un chat ou un poisson en aquarium. L’impact mesuré
a été sur l’anxiété, sur l’agression, le comportement social, sur la nutrition.
Les conclusions de Hulme et al. sont les suivantes. Pour les études avec un
thérapeute il est difficile de mesurer l’impact spécifique lié à l’animal. Tous
les patients ne répondent pas positivement aux animaux ; les résultats dépendent donc des patients (certains patients étant plus habitués/ouverts que
d’autres). L’Association d’Alzheimer 3 suggère même que, pour de meilleurs
résultats, l’activité avec l’animal devrait concorder avec celle du patient. Les
études ont quelques défauts méthodologiques, comme le nombre réduit de
patients ou l’absence de détails qui peuvent s’avérer importants. Cette thérapie pourrait être efficace pour réduire l’agression et l’agitation, améliorer
le comportement social et la nutrition. Cependant, davantage d’études sont
nécessaires pour confirmer le bénéfice de cette thérapie.
4.4
Jardins thérapeutiques
Le jardin thérapeutique est un jardin où les patients atteints de démence
se promènent librement, ce qui a comme effet, surtout pour ceux qui pendant
leur vie ont beaucoup travaillé dans le jardin, de réduire les troubles de
comportement.
3. L’association d’Alzheimer est la plus grande association internationale sur MA, et le
plus grand financeur privé, non profit de la recherche sur MA, cf. http://www.alz.org.
10
Aucune synthèse n’a été trouvée dans la littérature. Un cas clinique, décrit
dans deux articles, a cependant été pris en compte.
Dans l’étude de Detweiler et al. [6] et Murphy et al. [17], 34 patients déments ont été observés pendant 12 mois avant l’ouverture du jardin, et 12
mois après. Les auteurs ont remarqué que le score CMAI total a baissé quand
le jardin était disponible, la baisse dépendant du patient qui peut marcher
tout seul ou non ; cependant, les incidents physiques ont augmenté. Les auteurs concluent que le jardin a eu des effets positifs, mais aussi négatifs, et
que des études additionnelles sont nécessaires pour évaluer les conséquences
des jardins thérapeutiques.
5
Thérapies basées sur l’activité motrice
L’efficacité des activités physiques sur la santé est bien connue depuis
longtemps. Les interventions peuvent être variées : aérobic, endurance, promenade etc. Les activités physiques pourraient être bénéfiques non seulement
pour le patient, mais aussi pour le soignant.
Hulme et al. [13] présentent cinq synthèses sur les effets de l’activité physique sur les patients avec démence. Il s’ensuit que l’activité physique est
efficace : la marche soutenue améliore l’humeur, l’activité physique améliore
la qualité de sommeil, l’exercice intensif modéré pourrait réduire la déambulation. D’autres indications sont présentées : dépression, agression, anxiété,
hallucinations.
L’analyse Cochrane de Forbes et al. [8] faite sur deux articles considère
que les preuves sont insuffisantes sur l’efficacité des programmes d’activité
physique dans la gestion ou l’amélioration de la cognition, le comportement,
la dépression et la mortalité chez les personnes atteintes de démence, car peu
d’études appropriées existent. Également, aucun résultat n’a été présenté sur
les bénéfices des exercices physiques sur le soignant.
Tai chi
Tai chi est un art martial chinois. Souvent réduit en Occident à une
sorte de gymnastique, il est apprécié par les personnes âgées pour son effet
bénéfique sur le corps et la santé.
L’analyse Cochrane n’a inclus aucune étude sur le tai chi. Wang et al. [22]
présentent une synthèse d’études où ont été mesurés ses effets sur le bienêtre. Cependant, aucune des 15 études prises en compte ne s’est faite sur
des personnes avec démence, même si certaines prennent en compte des personnes âgées ou dépressives. Leur conclusion est qu’il y a certains résultats
11
qui montrent effectivement que le tai chi améliore l’état de bien-être des
personnes, mais qu’il est prématuré de tirer des conclusions pertinentes.
6
6.1
Thérapies basées sur la stimulation sensorielle
Musicothérapie
La musicothérapie est un sujet populaire de recherche dans les thérapies
non médicamenteuses. Elle peut être faite sous deux formes : des thérapies
où le patient est passif, en écoutant de la musique par exemple (c’est le but
de cette section), et des thérapies où le patient est actif, où par exemple il
danse, il chante ou il joue d’un instrument (c’est le but de la section 7.1, la
musicothérapie du groupe de thérapies par l’art).
Hulme et al. [13] présentent une analyse sur la musicothérapie passive
et active ensemble. Ils ont analysé dix synthèses, ce qui en fait la thérapie
avec le plus de synthèses. Toutes les synthèses ont pris en compte des études
avec des patients atteints de démence en général, ne se limitant donc pas
à MA. La musicothérapie a été utilisée pour plusieurs symptômes, comme
l’agitation, la déambulation, la nutrition et d’autres. Diverses interventions
ont été essayées : écouter la musique préférée comparée à une musique classique, écouter de la musique pendant la prise du bain, écouter de la musique
comparée aux jeux puzzle, chanter etc. La conclusion est que la musicothérapie donne de bons résultats dans plusieurs troubles de comportement et
psychologiques, comme l’agitation, l’agressivité, la déambulation, la nutrition et d’autres. Plus précisément, l’évidence suggère qu’écouter sa musique
préférée réduirait l’agitation, qu’écouter sa musique préférée pendant la prise
du bain réduirait le nombre de fois quand le patient est agressif, et qu’écouter, chanter et jouer d’un instrument en groupe réduirait la déambulation.
Cependant, les études ont certaines limitations méthodologiques qui font que
les preuves des bénéfices de la musicothérapie ne sont pas évidentes.
Vink et al. [21], dans leur synthèse Cochrane sur la musicothérapie, ont
inclus dix RCTs, qui montraient que la musicothérapie était bénéfique pour
les personnes atteintes de démence. Cependant, la méthodologie de ces derniers a été de faible qualité, et donc leurs résultats n’ont pas pu être validés.
Par conséquent, aucune conclusion utile n’a été tirée.
La musicothérapie est aussi la plus populaire des thérapies non médicamenteuses de la synthèse d’O’Connor et al. [19], avec huit études sur vingt
cinq. La musicothérapie a été trouvée très efficace dans cinq études sur les
huit. L’agitation a diminué lors de l’écoute de musique individualisée, et
12
l’agression a diminué significativement quand la musique préférée était écoutée lors de la prise du bain. Au contraire, la musique aléatoire a donné des
résultats moins intéressants, au même niveau que d’autres thérapies (massage, lecture de livres etc.) La musique « live » (non pré-enregistrée) a des
bénéfices additionnels.
6.2
Aromathérapie
L’aromathérapie représente l’utilisation d’huiles essentielles extraites de
plantes, dont le but est d’améliorer l’état physique et émotionnel. Elle peut
être utilisée par massage, par bain ou par inhalation.
Hulme et al. [13], après analyse de trois synthèses, considèrent que l’aromathérapie pourrait réduire l’agitation, les symptômes neuropsychiatriques
et la déambulation. Cependant, relativement peu d’études ont été identifiées
dans ces synthèses et la preuve d’efficacité est limitée. Une harmonisation des
huiles utilisées et de la méthode d’utilisation, ainsi que davantage d’études
sont nécessaires.
La synthèse Cochrane de 2009 (avec recherche faite en novembre 2008)
[12] a généré une seule étude additionnelle par rapport à la version de 2006,
qui elle est incluse dans la synthèse précédente de Hulme et al. Cette étude
n’a pas été prise en compte à cause de défauts méthodologiques. La synthèse
Cochrane n’apporte donc pas de nouveau résultat. La conclusion de l’analyse
Cochrane est que l’ancienne étude prise en compte montre un effet significatif
en faveur de l’aromathérapie mais qu’elle utilise un petit nombre de patients.
Cependant, des RCTs à plus large échelle sont nécessaires avant de prononcer
des conclusions solides.
O’Connor et al. [19] prennent en compte deux études d’aromathérapie,
impliquant de l’huile de lavande et du baume de citron. Les scores d’agitation
ont baissé pour les deux études. Ils concluent que « l’aromathérapie paraît
prometteuse ».
Ballard et al. [1] considèrent que l’aromathérapie est la thérapie non médicamenteuse qui a le plus de résultats pour le traitement de l’agitation et
de l’agressivité. Ils mentionnent que de plus en plus de résultats positifs
apparaissent avec l’utilisation de l’huile de lavande et du baume de citron.
Des études à plus grande échelle (en temps et en nombre de patients) sont
toutefois nécessaires.
6.3
Thérapie par massage
Cette thérapie a été essayée de deux manières : masser doucement l’avantbras ou masser la main.
13
Hulme et al. [13] utilisent les résultats de trois synthèses. Ils en concluent
que le massage est efficace dans un certain nombre de symptômes. La musique
suivie de massage sur la main, ou bien les deux simultanément, pendant 10
minutes pour chacun réduit pour une courte période de temps l’agitation.
Le massage doux de l’avant-bras avec encouragement verbal augmente la
nutrition. En échange, aucun résultat n’a été trouvé pour la déambulation,
l’anxiété ou l’agressivité.
La synthèse Cochrane [10] trouve qu’il y a des preuves limitées en faveur
du massage pour les patients déments. Les études donnent les mêmes résultats
que le paragraphe précédent (massage sur la main pour l’agitation et massage
doux de l’avant-bras pour la nutrition). Aucune conclusion générale ne peut
être tirée de ces études, et plus d’études sont nécessaires pour avoir des
preuves de cette thérapie.
6.4
Luminothérapie
La luminothérapie signifie l’exposition à de forts niveaux de lumière sous
contrôle.
Hulme et al. [13] présentent quatre synthèses dans cette catégorie. Dans
celles-ci, la luminothérapie a été utilisée pour traiter les problèmes de sommeil, de comportement, d’humeur, cognitifs, d’agitation et psychologiques
des personnes avec démence. Les quatre synthèses concordent dans l’idée
qu’il n’y a pas d’évidence que la luminothérapie soit bénéfique. Elle pourrait
améliorer les symptômes de comportement, psychologiques (sommeil, comportement, humeur, agitation) et cognitifs. Quoique certaines études aient
donné des résultats positifs sur la luminothérapie, des RCTs bien conçus
sont nécessaires pour le confirmer. Enfin, les conditions de traitement (type
de lumière, durée, moments) ou de condition (type de maladie) n’ont pas été
suffisamment analysées et ont pu engendrer des effets variés.
L’analyse Cochrane de Forbes et al. [7], après analyse de cinq études, n’a
montré aucune preuve adéquate sur l’efficacité de la luminothérapie pour les
troubles psychiatriques, de la cognition, du sommeil ou du comportement. La
plupart des études ne sont pas d’une haute qualité scientifique et davantage
de recherches sont nécessaires dans ce domaine.
Ballard et al., dans une étude sur l’agitation et l’agression [1], précise que,
quoique certaines études montrent que la luminothérapie pourrait améliorer
ou stabiliser le sommeil et le rythme repos-activité, les preuves montrant que
cette thérapie réduit l’agitation restent limitées.
14
6.5
Acupuncture
L’acupuncture consiste à introduire de fines aiguilles dans la peau, laissées
dans cette position pour une période courte.
Hulme et al. [13] prennent en compte un seul document dans cette catégorie, une synthèse Cochrane de 2007. Cette synthèse souhaitait prendre
en compte les RCTs avec des participants atteints de démence vasculaire.
Aucune étude remplissant ces critères n’a été trouvée. En conclusion, aucun
résultat ne montre que l’acupuncture soit bénéfique pour ces patients.
Une synthèse plus récente (recherche faite en 2008), Lee et al. [16], arrive
à une conclusion similaire : même si le nombre d’études trouvées est faible,
les résultats existants ne montrent pas d’efficacité de l’acupuncture, seule
ou en complément médicamenteux, pour les patients atteints de MA. Les
cas cliniques pris en compte ont tenté d’améliorer la fonction cognitive des
patients en utilisant l’échelle MMSE, ainsi que les symptômes affectant les
tâches quotidiennes.
La conclusion de ces deux synthèses est que l’acupuncture n’est pas efficace pour les malades atteints de MA ou d’une démence vasculaire, mais que
la littérature actuelle sur ce sujet est trop limitée pour énoncer des conclusions solides.
6.6
Stimulation nerveuse électrique transcutaneuse (TENS)
Il s’agit ici de l’application d’un courant électrique par des électrodes attachés à la peau. C’est une méthode utilisée surtout dans un autre domaine :
soulager la douleur.
Hulme et al. [13] ont analysé une seule synthèse, de très bonne qualité,
analysant neuf RCTs sur des patients atteints de démence, faits par deux
groupes (un aux Pays Bas et un au Japon). Les électrodes ont été attachés
dans le dos ou sur la tête. La synthèse en déduit que cette méthode peut
produire des améliorations à court terme dans certains troubles neuropsychologiques et de comportement, comme le souvenir, la reconnaissance du
visage et la motivation. Hulme et al. considèrent que cette méthode pourrait
être efficace mais plus d’études sont nécessaires pour vérifier cette hypothèse.
Cameron et al. [3] dans l’étude Cochrane précisent que les études prises
en compte ont présenté des résultats positifs à court terme pour TENS dans
la démence, comme le rappel de mots, reconnaissance de visage et motivation. Cependant, trop peu de données existent pour TENS et des conclusions
définitives ne peuvent pas être établies.
15
6.7
Stimulation multisensorielle (Snoezelen)
Il s’agit d’une stimulation visuelle, auditive, tactile ou olfactive appliquée
aux patients dans une chambre ou dans un environnement conçu spécialement pour cela. Cette stimulation est augmentée par l’utilisation de lampes
en fibres optiques, d’arômes agréables, de musique en sourdine et divers matériaux agréables au toucher.
Hulme et al. [13] ont identifié six synthèses, sur la démence en général.
Dans celles-ci, la thérapie a été utilisée pour les troubles de comportement,
de l’humeur et cognitifs, pour la dépression, l’agression, l’apathie, les comportements sociaux, la déambulation et les symptômes neuropsychiatriques.
La conclusion est que la stimulation Snoezelen pourrait fonctionner. En effet, certaines études montrent des résultats positifs pour plusieurs types de
troubles de comportement, notamment une réduction de l’apathie dans les
stades sévères de démence. Cependant, ces études positives ne sont pas statistiquement significatives. Généralement, le bénéfice existe seulement pendant
les sessions de stimulation ou à très court terme. D’autres résultats de bonne
qualité sont donc nécessaires.
Chung et al. [4], dans une synthèse Cochrane, concluent qu’il n’y a pas de
preuve pour l’efficacité de Snoezelen. Des recherches plus approfondies sont
nécessaires pour justifier l’utilisation de Snoezelen pour la démence.
O’Connor et al. [19] prennent en compte trois études Snoezelen. Deux
d’entre elles n’ont montré aucun bénéfice, et la troisième des bénéfices limités
(en déambulation).
Kong et al. [14] analysent trois études Snoezelen. Ils trouvent qu’il existe
des différences statistiquement significatives sur l’agitation en faveur de la
thérapie, avec des effets modérés. C’est d’ailleurs la seule thérapie de la synthèse avec des effets positifs.
7
7.1
Thérapies par l’art
Musicothérapie
Il s’agit des thérapies où le patient est actif, par exemple il danse, il chante
ou il joue à un instrument lui-même.
Hulme et al. [13] présente cette thérapie avec celle où le patient est passif,
voir section 6.1 en page 12.
Beard [2], dans sa synthèse sur les thérapies par l’art, a trouvé que la
musicothérapie est la plus utilisée de ces thérapies. Une des études précise
que dans cette thérapie, les réponses les plus fortes ont été remarquées pour
le mouvement, ensuite pour le rythme, et enfin pour le chant. Généralement,
16
les études trouvées montrent une réduction significative des SCPD, quoique
cela s’estompe au fil du temps.
7.2
Dessin, peinture
Beard [2] a trouvé que les arts visuels sont la deuxième catégorie la plus
populaire parmi les thérapies par l’art. Dans un grand projet impliquant la
peinture faite par des personnes avec démence, 80 % d’entre elles ont eu une
plus grande attention, plaisir, estime de soi pour la peinture que dans un
centre traditionnel.
7.3
Danse, mouvement
Les études prises en compte par Beard [2] trouvent de petites réductions
de SCPD, comme l’agitation, et une augmentation de la performance cognitive. Elles trouvent que le mouvement peut être considéré comme un substitut
de la parole.
8
Interventions psycho-sociales
8.1
Thérapie par évocation du passé (réminiscence)
La thérapie par réminiscence signifie la discussion sur des activités, événements et expériences passées à l’aide d’objets tangibles, comme des photographies, des objets utilisés par la famille et de la musique. Cette idée repose
sur le fait que souvent les personnes atteintes de démence se rappellent des
événements anciens plus facilement que des événements récents, et que l’évocation de faits anciens les anime et les rend intéressées 4 ; à noter toutefois
que les souvenirs peuvent être bons, mais aussi mauvais 5 . Cette thérapie
peut durer quelques semaines, et peut s’appliquer individuellement ou par
groupe. La connaissance de la personne est nécessaire pour l’utilisation de
cette thérapie.
Hulme et al. [13] ont trouvé quatre synthèses, cherchant à traiter par la
réminiscence les symptômes cognitifs, de l’humeur, du comportement, psychologiques et neuropsychiatriques, la dépression et l’agression des personnes
démentes. Il est intéressant de remarquer qu’une des synthèses a présenté un
RCT où l’amélioration a été non significative quand la réminiscence a été
précédée par la rééducation de l’orientation. Hulme et al. concluent que la
4. http://www.alzheimers.org.uk/factsheet/505
5. http://www.alzheimers.org.uk/factsheet/526
17
réminiscence pourrait fonctionner, avec des bénéfices potentiels dans le comportement cognitif, de l’humeur et en général. Cependant, comme les études
portent sur peu de patients et sont de faible qualité, que le type de réminiscence utilisée est varié, les preuves de l’efficacité de cette thérapie ne sont
pas acquises.
Dans l’étude Cochrane sur la réminiscence, Woods et al. [23] présentent
des résultats de quatre études. Des bénéfices évidents de la réminiscence ont
été trouvés dans la cognition, l’humeur et une partie de la fonction de comportement général. Cependant, ces études sont à petite échelle, et présentent
des méthodes de réminiscence différentes. Plus de RCT sont nécessaires pour
tirer des conclusions fiables.
8.2
Thérapie par empathie (de validation)
La thérapie par empathie signifie qu’un soignant communique et aide des
personnes désorientées très âgées par une attitude d’empathie et une vision
positive des individus. Elle considère que plutôt que de ramener la personne
à la réalité, il vaut mieux entrer dans sa réalité 6 . Ainsi, au lieu de la corriger
quand elle a tort, il vaut mieux contourner l’idée, acceptant (validant) ainsi
ses idées pour lui « sauver la face ». Par exemple, si la personne âgée dit « Je
dois partir, ma mère m’attend », une réponse possible serait « Votre mère
vous attendait souvent, n’est-ce pas ? » [13]. Cette thérapie est en contraste
avec la thérapie par rééducation de l’orientation, déjà présentée dans la section 4.1 en page 9.
Pour la thérapie par empathie, Hulme et al. [13] ont analysé trois synthèses. Les trois synthèses, ainsi que Hulme et al., concluent que cette thérapie pourrait être efficace mais qu’il n’y a pas suffisamment de résultats pour le
prouver, notamment à cause de la petite quantité de RCTs et des problèmes
de méthodologie. Dans ces études, les bénéfices ont été cherchés dans les
symptômes neuropsychiatriques, cognition, émotion, habilitation fonctionnelle, dépression, agression et apathie.
Neal et al. [18] ont pris en compte trois études. Cependant, les données de
ces études n’ont pas pu être comparées du fait soit de la durée différente de
traitement, soit du traitement de contrôle, soit des résultats qui n’étaient pas
comparables. Les études ont été positives quant au bénéfice du traitement.
Neal et al. concluent qu’il y a trop peu de données pour avoir des conclusions
utiles.
Ballard et al. [1], dans leur synthèse sur l’agitation et l’agression, après
prise en compte d’une synthèse systématique de 162 études, mais pas très
6. http://www.vfvalidation.org/web.php?request=what_is_validation
18
pertinentes, sur les interventions psychologiques, mettent en première place
la thérapie de validation, qui aurait quelques preuves d’efficacité.
8.3
Thérapie basée sur la rectitude (l’humanitude)
Cette thérapie est basée sur les travaux d’Yves Gineste et Rosette Marescotti : « Nous étudions depuis plus de 25 ans le soin et les communications
non verbales [...] En France, notre travail en gériatrie, psychiatrie [...] nous a
conduit à imaginer la manutention et le soin relationnels, où nous utilisons
le corps comme médiateur afin que la douceur rapproche le soignant et le
soigné dans leur humanitude. [...] La méthodologie des soins, basée sur la
philosophie de l’humanitude que nous avons décrite, permet d’accompagner
les personnes âgées dans la tendresse et le respect de l’autonomie, debout
jusqu’à la fin. » 7 Cette méthode pourrait être utilisée en particulier sur des
patients s’opposant au traitement (les patients agressifs, agités etc.)
Aucune synthèse ou RCT n’a été trouvée sur cette thérapie. Aucune
conclusion ne peut donc en être objectivée.
8.4
Sociothérapie
Les patients atteints de démence souffrent d’une peur phobique de s’impliquer, en plus de leurs déficits. Pour augmenter leur degré d’implication,
il est possible de les faire appartenir à un groupe et de les impliquer dans
certaines activités au sein du groupe. C’est le but de la sociothérapie. Ici,
les patients sont regroupés en petits groupes, qui ne changent pas dans le
temps (l’improvisation doit être évitée), avec un médiateur (similaire à un
animateur). Le rôle du médiateur n’est pas de stimuler leur fonction cognitive
ou de les corriger ou de leur apprendre certaines choses, mais simplement de
les impliquer dans le groupe. Pour les impliquer, diverses activités de la vie
quotidienne sont utilisées (restauration, promenade, discussions sur divers
sujets, bricolage, organisation de spectacles etc.)
Malgré nos recherches, aucune synthèse n’a été trouvée dans la littérature. Toutefois, les résultats de certaines études préliminaires montrent empiriquement qu’il n’y a pas eu d’amélioration d’un quelconque critère pour
les patients de test, cependant l’impression clinique générale est meilleure
que les résultats mesurés 8 .
7. http://www.cec-formation.net
8. Résultats présentés dans le cours de Prof. Louis Ploton, Université de Lyon-2.
19
Thérapie
musicothérapie
(active et passive)
massage
aromathérapie
exercices physiques
réminiscence
TENS
validation
animaux
orientation
cognition
luminothérapie
multisensorielle
dessin, peinture
danse, mouvement
acupuncture
entourage
jardins
humanitude
sociothérapie
Indications
agression, agitation, déambulation, cognition
Hulme
++
Cochrane
+
agitation, nutrition
agitation, agressivité, déambulation
humeur, sommeil, déambulation, dépression
agitation, anxiété, dépression, hallucinations
troubles neuropsychologiques
cognition, dépression, apathie
agression, agitation, nutrition
dépression, apathie, cognition
dépression, cognition
agitation, sommeil, cognition, humeur
agression, dépression, déambulation
attention, estime de soi
agitation, cognition
++
+
++
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
=
+
+
=
=
=
=
=
estime de soi
motivation
Résultats récapitulatifs
L’efficacité des différentes thérapies non médicamenteuses pour les personnes atteintes de démence est résumée dans le tableau 1.
Dans ce tableau, les thérapies notées ++ (efficaces) sont des thérapies
où les études de la littérature donnent des résultats effectifs, mais limités et
parfois mitigés.
Les thérapies notées + (qui pourraient être efficaces) sont les thérapies où
les résultats sont positifs mais ne sont pas concluants, les preuves ne sont pas
acquises. Cela peut venir des faiblesses dans la méthodologie et des résultats
parfois opposés. La critique qui traverse la grande majorité de ces études est
qu’elles se font avec un nombre limité de patients, donc leurs résultats ne sont
pas concluants. Par exemple, la réminiscence montre de très bons résultats,
mais ce fait repose sur des études avec peu de patients et des types variés de
cette thérapie.
Les thérapies notées = (pas de preuve d’efficacité) sont les thérapies où
les études n’ont pas montré de bénéfices. Il est intéressant de remarquer
que l’acupuncture, qui est une méthode complémentaire très populaire dans
20
+, ++
+, ++
Table 1 – Indications et efficacité des thérapies non médicamenteuses pour
la démence, d’après la littérature (++ efficace, + pourrait être efficace, =
pas de preuve d’efficacité).
9
Autres synthèses
++, ++
+
+
=, +
+
+
=
=, =
=
certains pays, fait partie de cette catégorie. C’est aussi le cas de la thérapie
par l’entourage, qui à la première vue paraît efficace.
Les thérapies non médicamenteuses pour les personnes atteintes de démence sont très récentes et par conséquent il n’y a pas beaucoup d’études
sur ce sujet. De plus, la plupart de ces études ne sont pas utilisables, soit
parce que le nombre de patients est faible, soit parce qu’elles ont des défauts
méthodologiques. Plus d’études et de bonne qualité sont donc nécessaires.
La mise en pratique de ces thérapies est beaucoup moins chère que les
thérapies médicamenteuses. De plus, elle n’ont généralement pas d’effet adverse, contrairement aux médicaments. Cependant, les bénéfices, s’il y en a,
sont généralement modérés.
10
Conclusions
Après analyse de la littérature sur les thérapies non médicamenteuses sur
la démence, certaines (la musicothérapie, le massage manuel et l’aromathérapie et d’autres) ont montré des résultats bénéfiques sur certains symptômes,
d’autres doivent encore être soutenues par de meilleures études, et d’autres
enfin (l’acupuncture, l’entourage et les jardins thérapeutiques) n’ont pas encore montré d’effets bénéfiques.
Davantage d’études avec un nombre de patients plus important et avec
une meilleure méthodologie sont nécessaires pour cerner complètement les
effets de ces thérapies sur les personnes atteintes de démence.
Références
[1] C. Ballard, S. Gauthier, J. L. Cummings et al. : Management
of agitation and aggression associated with Alzheimer disease. Nature
Reviews Neurology, 5(5):245–255, mai 2009.
[2] R. Beard : Art therapies and dementia care: A systematic review.
Dementia, p. 1–24, 2011. Disponible sur Internet seulement, à paraître
bientôt en édition papier aussi.
[3] M. Cameron, E. Lonergan et H. Lee : Transcutaneous electrical
nerve stimulation (tens) for dementia. Review, The Cochrane Collaboration, 2009.
[4] J. Chung et C. Lai : Snoezelen for dementia. Review, The Cochrane
Collaboration, 2009.
21
[5] L. Clare et B. Woods : Cognitive rehabilitation and cognitive training
for early-stage Alzheimer’s disease and vascular dementia. Review, The
Cochrane Collaboration, 2008.
[6] M. B. Detweiler, P. F. Murphy, L. C. Myers et K. Y. Kim : Does a
wander garden influence inappropriate behaviors in dementia residents?
American journal of Alzheimers disease and other dementias, 23(1):31–
45, fév.-mars 2011.
[7] D. Forbes, I. Culum, A. Lischka et al. : Light therapy for managing
cognitive, sleep, functional, behavioural, or psychiatric disturbances in
dementia. Review, The Cochrane Collaboration, 2009.
[8] D. Forbes, S. Forbes, D. Morgan et al. : Physical activity programs
for persons with dementia. Review, The Cochrane Collaboration, 2008.
[9] C. Gallez : Rapport sur la maladie d’Alzheimer et les maladies apparentées. Paris : Office Parlementaire d’Evaluation des Politiques de
Santé, juil. 2005. Rapport numéro 2545.
[10] N. V. Hansen, T. Jørgensen et L. Ørtenblad : Massage and touch
for dementia. Review, The Cochrane Collaboration, 2008.
[11] Haute Autorité de Santé : Maladie d’Alzheimer et maladies apparentées : prise en charge des troubles du comportement perturbateurs
— recommandations, mai 2009.
[12] F. Holt, T. Birks, L. Thorgrimsen, A. Spector et al. : Aroma
therapy for dementia (Review). Review, The Cochrane Collaboration,
2009.
[13] C. Hulme, J. Wright, A. House et al. : Non-pharmacological approaches for dementia that informal carers might try or access: A systematic review. International Journal of Geriatric Psychiatry, 25(7):756–
763, juil. 2010.
[14] E.-H. Kong, L. K. Evans et J. P. Guevara : Nonpharmacological
intervention for agitation in dementia: A systematic review and metaanalysis. Aging & Mental Health, 13(4):512–520, juil. 2009.
[15] M. Le Goff, C. Helmer, A. Foubert-Samier, P. Cowppli-Bony
et al. : Activités à la retraite et risque de démence : résultats de l’étude
PAQUID. Comptes Rendus Biologies, 332(4):378–384, avr. 2009.
[16] M. S. Lee, B.-C. Shin et E. Ernst : Acupuncture for Alzheimer’s
disease: a systematic review. International Journal of Clinical Practice,
63(6):874–879, juin 2009.
[17] P. F. Murphy, Y. Miyazaki, M. B. Detweiler et al. : Longitudinal
analysis of differential effects on agitation of a therapeutic wander garden
22
for dementia patients based on ambulation ability. Dementia, 9(3):355–
373, août 2010.
[18] M. Neal et P. B. Wright : Validation therapy for dementia. Review,
The Cochrane Collaboration, 2009.
[19] D. W. O’Connor, D. Ames, B. Gardner et M. King : Psychosocial
treatments of behavior symptoms in dementia: a systematic review of
reports meeting quality standards. International Psychogeriatrics, 21(2):
225–240, avr. 2009.
[20] J. Olazarán, B. Reisberg, L. Clare et al. : Nonpharmacological therapies in Alzheimer’s disease: a systematic review of efficacy. Dementia
and Geriatric Cognitive Disorders, 30(2):161–178, sept. 2010.
[21] A. Vink, M. Bruinsma et R. Scholten : Music therapy for people
with dementia. Review, The Cochrane Collaboration, 2011.
[22] W. C. Wang, A. L. Zhang, B. Rasmussen et L.-W. Lin : The effect
of tai chi on psychosocial well-being: A systematic review of randomized
controlled trials. Journal of Acupuncture and Meridian Studies, 2(3):
171–181, sept. 2009.
[23] B. Woods, A. Spector, C. Jones et al. : Reminiscence therapy for
dementia. Review, The Cochrane Collaboration, 2009.
23
Téléchargement