ARA-SOMOHANO - Hemorragies dig étudiants.

publicité
HEMORRAGIES DIGESTIVES AU SAU
C.Paquier
Introduction
C’est un événement relativement fréquent et potentiellement grave comme tout sd hémorragique
avec 5 à 10% de mortalité dans les hémorragies digestives hautes par exemple.
Elle touche une population de tout âge.
Les étiologies principales sont en France la maladie ulcéreuse et l’hypertension portale en relation
souvent avec l’éthylisme.
I Faire le diagnostic d’hémorragie digestive
A/ Définitions
Il s’agit souvent d’un épisode aigu, associant une anémie et une hypovolémie avec hypotension,
tachycardie, polypnée, soif, sueurs, troubles de la conscience plus ou moins profonds.
Mais elle peut aussi être un événement chronique, évoluant à bas bruit, entraînant une anémie sans
hypovolémie avec pâleur, malaise, dyspnée et angor d’effort.
Elle est extériorisée sous forme d’une hématémèse (vomissement de sang rouge), ou d’un maeléna
(selle noires de sang digéré), ou d’une rectorragie (sang rouge par l’anus).
Ou elle est moins évidente, non extériorisée (encore) se manifestant simplement par une anémie
aigue, un malaise brutal, un choc inexpliqué, une cirrhose décompensée. Il faut alors la
rechercher…Examen clinique et toucher rectal (traces de sang rouge ou noir).
Une hémorragie digestive haute c’est à dire en amont de l’angle de Treitz entraine une hématémèse
ou un maeléna, plus rarement d’une rectorragie (1%). Dans ce cas il s’agit d’une hémorragie très
abondante, le sang n’a plus le temps d’être digéré.
Une hémorragie digestive basse s’extériorise sous forme d’une rectorragie parfois d’un maeléna
B/ Signes de gravité
Essayer d’estimer lors de l’interrogatoire la quantité de sang perdu (ce n’est pas fiable mais cela
peut être une aide) et de faire un microhématocrite si on en a la possibilité (meilleur reflet)
Les indicateurs à recueillir sont : le pouls, la pression artérielle, l’état de conscience, la coloration
cutanéo-muqueuse, l’existence d’une soif intense, de sueurs.
Il faut aussi apprécier le terrain (ATCD traitement)
Les signes de gravité sont :
Pouls >110 (attention aux patients sous béta-bloquants),
PA pincée ou PAS inférieure ou égale à 80 mmHg,
Hématémèse ou rectorragies en « flots »,
Troubles de la conscience, coma, confusion,
Polypnée, sueurs, marbrures,
Terrain fragile, patient âgé, anticoagulants.
C/ Diagnostic étiologique
1. en fonction des données de l’interrogatoire et de l’examen clinique
* A l’interrogatoire : rechercher une prise d’AINS, d’AVK, une consommation de tabac, d’alcool,
un stress, une notion d’hépatite.
1
Devant des douleurs épigastriques anciennes, une prise d’AINS ou d’aspirine, l’origine ulcéreuse
est évoquée.
Un traitement par béta-bloquant, un éthylisme avoué, une cirrhose connue d’autre origine, orientent
vers une hémorragie par rupture de varices œsophagiennes ou sur gastrite.
S’il s’agit d’un patient âgé, qu’il existe une altération de l’état général on évoque alors un processus
néoplasique, une complication vasculaire
* A l’examen il y a des signes d’hypertension portale ou d’insuffisance hépato-cellulaire : angiomes
stellaires, circulation collatérale, hépatosplénomégalie, ascite, ictère... penser plutôt à une
hémorragie par rupture de varices œsophagiennes, une gastropathie du cirrhotique.
L’examen est pauvre ou il y a une vague gêne épigastrique : évoquer une autre cause.
2. en fonction du niveau de saignement
2.1. Il s’agit d’une hémorragie digestive haute, penser à :
* Un ulcère gastro-duodénal : 35 à 40% de l’ensemble des hémorragies digestives.
La prévalence de l’ulcère a augmenté du fait du vieillissement de la population, de la prescription
accrue d’AINS et d’aspirine. D’où la nécessité d’une prise en charge de qualité quand l’hémorragie
survient et aussi de la prévention.
5 aspects d’ulcère sont visibles à la fibroscopie : ulcère à base claire, tache pigmentée, caillot
adhérent, vaisseau visible et saignement actif. La mortalité augmente de la première à la cinquième
forme.
* Une hémorragie sur terrain d’hypertension portale : 30% des hémorragies hautes comprenant la
rupture de varices œsophagiennes ou cardio-tubérositaires, la gastrite hémorragique, les érosions
muqueuses.
* Sd de Mallory-Weiss : déchirure de la muqueuse œsophagienne sous forme d’une ulcération
longitudinale lors de vomissements répétés.
* L’œsophagite peptique, la hernie hiatale, les tumeurs malignes (5 à 8%), les gastrites, duodénites,
les anomalies vasculaires, les fistules aorto-digestives sont des causes moins fréquentes.
Rappel concernant la classification de Child-Pugh dans les cirrhoses : selon le TP, la présence
d’ascite, le taux de bilirubine, celui de l’albumine, et la présence d’une encéphalopathie.
TP
Ascite
Bilirubine
Albumine
encéphalopathie
Child A
Sup à 54%
non
Inf à 30 µmoles
Sup à 35 g/l
non
Child B
Entre 44 et 54 %
lame
30 à 40 µmoles
28 à 35 g/l
astérixis
Child C
Inf à 44 %
volumineuse
Sup à 50 µmoles
Inf à 28 g/l
coma
2.2. S’il s’agit d’une hémorragie digestive basse (plus fréquentes chez le sujet de plus de 60 ans),
les étiologies évoquées sont : les polypes, l’angiodysplasie colique, les ulcérations rectales, les
colites, les tumeurs coliques, les hémorroïdes, les diverticules coliques (ceux du colon D saignent,
ceux du colon G s’infectent), le saignement post-polypectomie (0.3%), les tumeurs rectales, la
colite ischémique, le saignement du diverticule de Meckel.
D/ Diagnostics différentiels
Epistaxis dégluti, hémoptysie, hémorragie de la muqueuse buccale, vomissements fécaloïdes,
aliments ou boisson colorés, supplémentation en fer.
2
III Conduite à tenir
Monitoring ECG TA SaO2.
Poser de 2 voies veineuses périphériques de gros calibre (14, 16, 18 gauges).
Prélever : NFS plaquettes groupe RAI TP TCA iono bilirubine enzymes hépatiques ammoniémie
alcoolémie selon le contexte.
Répéter la NFS si l’hémorragie persiste 2 heures après la première pour suivre l’évolution.
Ne pas toujours attendre les résultats pour traiter.
Remplir : cristalloides, colloides selon la PA, membres inférieurs relevés.
Le remplissage ne doit pas être trop excessif car il risque de redéclencher l’hémorragie et
d’augmenter l’hémodilution.
Maintenir une PA moyenne (PAD+ 1/3 (PAS-PAD)) autour de 80 mmHg.
Oxygénothérapie : de l’oxygénothérapie nasale à l’intubation orotrachéale en cas de troubles de la
conscience majeurs avec risque d’inhalation et/ou de détresse cardio-respiratoire dans le cadre du
choc hypovolémique.
SNG, sonde urinaire, radiographie thoracique=> inhalation ? (sans urgence).
Prévenir le médecin endoscopiste et l’unité de soins intensifs, le chirurgien dans les cas
d’hémorragies abondantes et intarissables.
Transfuser quand malgré la correction volémique, la fréquence cardiaque reste supérieure ou égale à
130/minute chez un sujet jeune sans tare cardio-vasculaire, donc avant si c’est un sujet âgé avec des
ATCD multiples.
Transfuser quand l’hémoglobine est inférieure ou égale à 70g/l en aigu et inférieure ou égale à 50
g/l en chronique.
Isogroupe isorhésus ou O- /vérification au lit du malade et après réception des RAI Penser au suivi
transfusionnel.
Un culot globulaire remonte le taux d’Hb de 10 g/l environ (augmentation de 2.5% l’hématocrite).
Amines vaso-pressives parfois nécessaires.
Plasma Frais Congelé chez le cirrhotique au TP effondré et dans les hémorragies massives, PPSB
(10 à 30 UI/Kg) et vitamine K (10à 20 mg) en cas d’accidents aux AVK ou patients sous AVK.
IV Traitements et examens complémentaires en fonction de l’orientation étiologique
A/ lors des suspicions d’hémorragies sur varices œsophagiennes
* Sandostatine (octréotide) : vasodilatateur splancnique (diminue la pression au niveau des V.O) à
passer en intra-veineux au pousse seringue électrique 25 microgrammes par heure pendant 48
heures.Deséquilibre des diabètes d’où la nécessité de mettre en parallèle une surveillance des
glycémies et une insulinothérapie adaptée.
* Sonde de blakemore ou de linton si insuffisant.
* Fibroscopie gastrique dès que possible (patient hémodynamiquement stable) pour une sclérose ou
une ligature des varices qui saignent.
Si échec : on réalise une deuxième fibroscopie, puis si persistance de l’hémorragie, est envisagée
une anastomose porto-systémique-intrahépatique par voie transjugulaire (TIPS)- technique de
radiologie interventionnelle.
En dernier recours : transsection et dérivation portale chirurgicales.
3
Béta-bloquants dès que l’hémorragie est stoppée.
Antibiotiques (fluoroquinolones) et lactulose en cas de décompensation oedémato-ascitique avec
hyperammoniémie.
B/ C’est plutôt un ulcère qui saigne
* fibroscopie gastrique pour sclérose
* anti-sécrétoire (pas d’action sur hémorragie mais traitement de la maladie ulcéreuse sous jacente)
de type mopral 40 (IPP) 1/j ou raniplex 50 (anti-H2) 1 à 4/j
* si échec deuxième fibroscopie puis chirurgie : suture de l’ulcère ou suture + vagotomie ou
gastrectomie partielle. Chirurgie d’emblée si hémorragie cataclysmique. Sur les terrains fragiles
avec contre-indication opératoire, si le traitement endoscopique échoue, une embolisation de
l’artère gastro-duodénale peut être envisagée.
C/ Hémorragies digestives basses :
*On pratique tout d’abord l’examen de la marge anale afin de visualiser une éventuelle origine
hémorroïdaire ou une ulcération anale.
* La fibroscopie gastrique suit afin de ne pas méconnaitre les 10% de lésions haut situées qui se
manifestent par une rectorragie
* Si pas de lésion à la fibroscopie : coloscopie
* Si pas de lésion retrouvée : examens du grêle
Conclusion
Les hémorragies digestives sont les urgences les plus fréquentes en hépato-gastro-entérologie. La
prise en charge endoscopique est préférable tant qu’elle est possible, ce qui implique une mise en
condition adéquate du malade pour qu’il puisse en bénéficier et qu’il soit dans un centre où elle est
pratiquée. Devant la prévalence en augmentation des hémorragies digestives il est important
d’insister sur la prévention et l’impact négatif de la pathologie iatrogène.
Bibliographie
D. Pateron, A. Sauvanet, C. Christidis, JL. Pourriat. Hémorragies digestives hautes aigues : prise en
charge médicale endoscopique et chirurgicale en urgence. Réan urgences 1997, 6 (2) : 111-118
C. Silvain. Hémorragies digestives. Rev Prat 2002, 52 : 193-200
D. Pateron, P. Queneau. Les symptomatologies de la pathologie iatrogène. Impact médecin 464 du
8/10/99
Y. Gruel, A. Maakaroun. Accidents des anti-coagulants. Rev Prat 2002, 52 : 1929-1935.
4
Téléchargement