Centre d’Etudes de Politiques pour le Développement (CEPOD)
04, avenue Carde X rue Calmette - Dakar - Sénégal
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renforcement de capacités
« Se faire battre est excusable, se faire surprendre
est impardonnable » Napoléon
L’intelligence économique est un puissant moyen de
rapprochement entre l’entreprise et l’Etat. Ce dernier
doit protéger les intérêts nationaux et aider les entre-
prises locales à combattre à armes égales avec la
concurrence internationale. L’administration doit être
un partenaire du développement de l’entreprise à tra-
vers la diffusion des informations qu’elle détient et qui
sont utiles aux acteurs économiques. Il est impératif de
s’interroger sur le fait de savoir comment le secteur pu-
blic et le secteur privé, peuvent s’engager, en commun,
dans un processus de maîtrise de l’information en vue
de rendre plus compétitive l’économie nationale. Dans
un environnement la concurrence est de plus en plus
acharnée, une bonne politique d’IE contribue à l’at-
teinte des objectifs de la politique économique et de
contribuer à la croissance.
La question qui se trouve ainsi posée est alors : com-
ment intégrer une démarche d’intelligence économique
au sein du Ministère de l’Economie et des Finances
afin de rendre plus comtitive l’économie sénéga-
laise ? Au sein du Ministère de l’Economie et des Fi-
nances (MEF), l’intelligence économique doit être
orientée vers la veille stratégique et le soutien à la com-
pétitivité des entreprises. Elle doit aider à promouvoir
l’innovation et l’influence afin de mieux accompagner
le développement des entreprises au travers des diffé-
rentes étapes de leur évolution et de faciliter leur accès
à l’international, notamment au marché sous-régional.
Cependant, les modalis de mise en œuvre des lo-
giques d’intelligence économique et stratégique au ni-
veau du MEF doivent répondre à un plan formalisé. La
pratique de l’Intelligence économique n’étant pas en-
core systématisée au Sénégal, sa mise en place au sein
du MEF suppose une forte implication des directeurs
généraux, des directeurs conseillers et des chefs de ser-
vices, une adaptation des structures, et surtout une mo-
bilisation et une implication de tous les agents en
référence à des missions et des résultats à atteindre.
Dans le contexte actuel où la croissance et le dévelop-
pement repose de plus en plus sur l’entreprise et l’ini-
tiative privée, les missions et les résultats à atteindre
par le MEF doivent être fortement articulés autour de
la croissance et du veloppement de l’entreprise en
relation avec les autres ministères, notamment les mi-
nistères dits économiques. Les chefs d’entreprises doi-
vent être également formés de manre adéquate en
intelligence économique.
Une série d’actions doivent être engagées pour asseoir
un dispositif d’Intelligence économique au niveau du
MEF. Ce système doit être coordonné par un respon-
sable charde l’Intelligence économique qui travaille
en collaboration avec les directions et services du MEF
à travers des répondants en IE. Il sera placé sous l’au-
torité du Ministre de l’Economie et des Finances.
Première étape : Identification et expression des be-
soins en informations
Toute structure qui veut faire de l’intelligence écono-
mique conçoit sa démarche selon ses propres préoc-
cupations. Il faut faire un état des lieux formel :
analyser les besoins du ministère et des entreprises, les
moyens humains et matériels nécessaires et définir les
secteurs prioritaires. Il s’agit de répondre à une série
de questions : quelle est notre stratégie ? Quels sont
nos objectifs à court, moyen et long terme ? Quels sont
Mise en place d’un système d’Intelligence économique au
sein du ministère de l’économie et des finances du Sénégal
NOTES DE VEILLE
sur les approches, méthodes, stratégies
politiques, programmes et projets de
développement
les besoins du ministère et des entreprises? Que veut-
on savoir ? Que doit-on savoir ? Quelle information
faut-il collecter ? peut-on collecter l’information et
selon quelles contraintes ? Comment et quand peut-on
collecter cette information ? Qui sera en charge de cette
collecte ? Quelle valeur ajoutée peut-on en tirer ? Les
besoins en informations du Ministère de l’Economie
et des Finances concernent surtout des statistiques, des
indicateurs, des agrégats macroéconomiques (le PIB, la
monnaie, les finances et la balance des paiements), la
situation économique, les marchés financiers, les op-
portunités d’affaires, etc.
La plupart des directions et services du MEF peuvent
trouver les informations qui les intéressent au sein des
autres directions et services du MEF. Pour répondre
aux préoccupations des entreprises en matière d’IE, il
faut comprendre leurs besoins. Les entreprises ont be-
soin de toutes les informations sur leur environne-
ment : le contexte politique, les tendances économiques,
la législation et la réglementation, les orientations en
matière sociale, la concurrence, la propriété intellec-
tuelle et les brevets, les clients, les veloppements
technologiques, le marché mondial etc.
La mise en place d’un dispositif d’Intelligence écono-
mique au sein du MEF nécessite des séances de travail
avec les directions générales, directions et services du
MEF mais aussi une enquête sur les besoins des entre-
prises et de leurs dirigeants. Ainsi les entretiens qu’a
déjà eus l’équipe du cabinet DCEG avec les services
du MEF devraient être complétés par une enquête au-
près des entreprises sur leurs besoins en informations
et les capacités existantes pour en tirer un programme
de formation.
Deuxième étape : Collecte des informations
Le fait de connaitre les besoins en informations per-
met d’optimiser et de mieux maitriser cette étape plus
précise, et de minimiser la quantité d’informations inu-
tilisables. Collecter les informations permet, d’une
part, d’apporter des réponses à des questions ponc-
tuelles, d’autre part, de nourrir un fonds d’informations
ou documentaire. L’objectif de cette étape est d’initier
une veille stratégique pour acquérir des informations
sur les évolutions et les défis auxquels est confrontée
l’économie sénégalaise. En particulier, les services de
douanes peuvent jouer un rôle primordial dans une dé-
marche intégrée d’intelligence économique. En effet,
la douane détient une multitude d’informations sur la
circulation des personnes, des marchandises, des capi-
taux et autres informations sur le territoire national,
sous-régional ou africain et dans le monde. De même,
la DGID dispose à travers la TVA, un moyen de retra-
cer le circuit des achats de biens et de services, en plus
des états financiers des entreprises. La DGCPT a plus
que jamais besoin d’établir des relations fiables avec
les banques et le marché des capitaux. L’introduction
des titres d’Etat participe au besoin de rendre compte
du niveau financier avec le développement des actifs
réputés sans risque. La DGCPT a besoin en collabora-
tion de la DMC et de la DRS-SFD de maitriser le dé-
veloppement de l’épargne intérieure et sous- régionale
et des canaux d’investissement. En rapport avec la
DGF, elle enregistre l’information sur les biens et ser-
vices objet de la commande publique et sur les entre-
prises prestataires.
La Direction Générale du Plan et la Direction de la
Cooration économique et financre enregistrent
l’information sur les projets et programmes, l’orienta-
tion des politiques sectorielles, les grandes tendances
lourdes ou émergentes de l’environnement national ou
international.
L’ANSD a une fonction de base de production, de col-
lecte, de gestion et de diffusion de l’information éco-
nomique, sociale et environnementale pour l’utilisation
de tous les acteurs. La DPEE a une mission de gestion
Démarche de lIntelligence Economique au sein du MEF
macroéconomique et de suivi de la conjoncture.
L’UCSPE assure le suivi à court terme de l’action col-
lective sur les plans économique et social, dans une
perspective de moyen terme. La DA assure le suivi des
risques inhérents aux activités économiques et l’IGF
celui des sources d’inefficience interne au MEF. Enfin,
la DTAI assure la veille sur la sécurité et les outils in-
formatiques.
Un réseau doit être mis en place entre toutes les direc-
tions du MEF, la direction d’appui au secteur privé
(DASP), la Cellule nationale de traitement des infor-
mations financières (Centif) et le Centre d’Etudes de
Politiques pour le Développement (CEPOD) pour
créer un dispositif d’Intelligence économique et cen-
traliser toutes les informations. D’autres ministères
peuvent contribuer à alimenter le dispositif en informa-
tions: le ministère des affaires étrangères, le ministère
du commerce, le ministère de la recherche scientifique,
le ministère de l’agriculture, le ministère de l’industrie
et des PME.
Pour faire un suivi régulier de l’ensemble de l’infor-
mation sur tous les secteurs de l’économie, il faut va-
loriser le réseau local et les ressources informatiques
en place. Dans chacun des services du ministère, un ré-
pondant en IE doit identifier et évaluer les sources
d’informations, collecter les informations et les com-
muniquer à la cellule de veille du dispositif.
En ce qui concerne l’information informelle, chaque
agent ou collaborateur est potentiellement un informa-
teur et un détenteur d’informations stratégiques pour
le MEF. Il faut développer une véritable culture d’IE,
c’est-à-dire une culture d’enregistrement et de diffu-
sion de l’information dans un cadre gal. Lintelli-
gence économique recommande aux acteurs de
s’affranchir du goût pour le secret et le cloisonnement,
de la conception élitiste de la circulation de l’informa-
tion en familiarisant les décideurs, chefs d’entreprise,
agents de l’Etat et universitaires à l’esprit de réseau,
au partage et à la gestion collective de l’information et
à l’économie du savoir. Toutes les informations doi-
vent être centralisées et leur gestion confiée à une cel-
lule de veille. Cette dernière dresse la liste de sources
informationnelles accessibles, contrôle les informa-
tions collectées par les répondants en IE et en assure le
suivi dans leur service. Les animateurs en IE assistent
le responsable de l’IE pour :
w traduire les besoins d’informations exprimés par les
autorités en des termes utilisables par la cellule de
veille ;
w exploiter au mieux pour l’utilisation par les auto-
rités, d’informations secondaires et tertiaires produites
par les répondants en IE et la cellule de veille
Troisième étape : Traitement des informations
Les sources d’informations sont innombrables, donc
les informations avant d’être analysées doivent être
traitées, c’est-à-dire triées et classées pour définir les-
quelles sont les plus utiles et significatives pour valider
la fiabilité des sources en termes d’enjeu, d’actualité
et de légitimité et pour interpter objectivement et
analyser les données et les tendances prévisionnelles.
Pour que l’information soit une force, il faut bien la
gérer et la maitriser.
Le traitement de l’information nécessite des outils
techniques comme le Data Warehouse et le Data Mi-
ning. Le data Warehouse est une architecture déci-
sionnelle capable à la fois de gérer l’hétérogénéidont
l’enjeu est de transformer les informations en rensei-
gnements directement exploitables par les utilisateurs.
Il permet d’organiser les informations par thème, de
les intégrer, de les protéger et de visualiser leur évolu-
tion dans le temps. Quant au Data Mining, il a pour ob-
jectif l’extraction d’un savoir ou d’une connaissance à
partir de grandes quantités d’informations. Il est com-
posé d’outils facilitant l’analyse des données : les tech-
niques de classification et de segmentation, les
techniques suivant les principes d’arbres de décision,
les techniques d’associations ou d’analogies et les
techniques d’apprentissage les plus efficaces. Le mi-
nistère devrait investir dans ces outils pour faciliter le
traitement des informations utiles pour les analystes
qui sont l’élément central de cette phase. Un mini-
mum de deux analystes serait requis au sein de la cel-
lule de veille du fait de la nature hétérone des
besoins et de la taille importante du MEF. A partir des
informations parcellaires et éparses, les analystes doi-
vent sortir un ensemble cohérent et continu d’infor-
mations permettant de prendre des cisions
adéquates. Ils doivent rendre compte aux difrents ser-
vices du ministère à travers les supports de communi-
cation les plus approprs. Des unions de
coordination peuvent être organisées périodiquement
pour évaluer le système et éventuellement l’améliorer.
Quatrme étape : Diffusion et protection des in-
formations
L’information doit être diffusée au bon moment et à la
bonne personne, il faut qu’elle circule ce qui nécessite
des moyens de communication fluides mais surtout un
changement des mentalités.
Il faut donc construire un espace de partage de l’infor-
mation pour alimenter le circuit de décision. Une fois
traitée et analysée, l’information doit aller vers le ser-
vice qui pourra l’exploiter pour répondre à ses besoins.
Il est donc nécessaire que les informations collectées et
traitées, parviennent aux différents responsables
concernés par la prise de décision stragique. Il est
souhaitable de créer un intranet au niveau du minis-
tère, regroupant la production des diverses institutions
administratives y compris celles chargées d’anticipa-
tion et de prospective.
Au niveau du MEF, la Cellule de communication as-
siste les autorités dans la communication avec l’exté-
rieur et gère le site internet du département. Elle pourra
être mise à contribution dans la diffusion des informa-
tions tertiaires en direction des publics appropriés sui-
vant les canaux adéquats.
La mise en place d’un réseau de partage de l’informa-
tion aiderait également les entreprises à asseoir une dé-
marche d’IE. Celles-ci ont besoin d’accéder facilement
et au meilleur coût à l’information ; la Direction d’Ap-
pui au Secteur Privé pourrait servir d’interface entre
elles et le dispositif d’Intelligence économique et leur
permettre d’avoir des informations stratégiques. Dif-
fuser une information n’est pas suffisant, il faut que
cette information se transforme en action pour créer
une véritable valeur ajoutée.
Les informations identifiées, stockées, traitées et dif-
fusées doivent être protégées car elles sont source de
convoitise. Le ministère doit sécuriser son système
d’information. La sécuridoit faire la distinction entre
l’information sensible et celle qui ne l’est pas, celle qui
doit être publiée et celle qui ne doit pas l’être. Pour
cela, il faut au préalable identifier les personnes qui
doivent être alimentées en informations stratégiques.
L’instauration d’une culture d’appartenance et la valo-
risation des agents sont fondamentales pour éviter la
diffusion volontaire ou accidentelle d’informations
sensibles. Aussi, il est nécessaire d’investir dans les
outils de protection de l’information qui respectent la
confidentialité et l’intégrité des informations telles que
les outils de cryptologie, l’antivirus et les firewalls.
Conclusion : L’intelligence économique est une mé-
thode de gestion, une guerre économique, un état d’es-
prit dont le but ultime est de mener à une prise de
décision, à un moment opportun dans le but d’assurer
une compétitivité et une pérennité des agents écono-
miques. En définitive, l’IE est la maîtrise et la protec-
tion de l’information stratégique pour tous les acteurs
économiques pour assurer et renforcer la sécurité éco-
nomique. L’intégration d’une démarche d’IE au sein
du Ministère de l’Economie et des Finances sera un
tremplin vers l’instauration, à terme, d’une stratégie
d’intelligence nationale.
Bibliographie
François JAKOBIAK : « LIntelligence économique : la com-
prendre, l’implanter, l’utiliser », Deuxième tirage, 2006.
Stéphane GORIA et al. : « Le processus d’Intelligence Econo-
mique : Une étude selon le point de vue de l’infomédiaire et des
problématiques de recherche d’information », 2005.
Par les stagiaires :
Wouddou Deme et Madaniou DIEME
Organigramme de la cellule d’Intelligence Economique
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