A
uteur
Guillaume PAVIC
Septembre 2011
UTILISATION DE LA PEUR EN
PREVENTION
.
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L’UTILISATION DE LA PEUR EN PREVENTION
1- UNE AUGMENTATION POSSIBLE DE LA PERCEPTION DES RISQUES SANITAIRES 2
L’IMPACT DE LA COMMUNICATION PERSUASIVE ................................................................................ 2
LE TRAITEMENT DE LINFORMATION PERSUASIVE : DIFFERENTES MODELISATIONS .......................... 3
Le modèle de probabilité d’élaboration .......................................................................................... 3
Le modèle de Traitement Heuristique - Systématique .................................................................... 3
Le modèle de Traitement de l’information publicitaire .................................................................. 4
INFORMER LES INDIVIDUS POUR TENTER DE MODIFIER LEUR COMPORTEMENT ................................. 4
PEUR ET VIVIDITE : UN LIEN AVEC LA PERCEPTION DE LA MENACE .................................................... 5
2- LES EXPLICATIONS DU FONCTIONNEMENT DE LA PEUR EN PREVENTION ............ 6
UNE CHRONOLOGIE DE MODELES EXPLIQUANT LE FONCTIONNEMENT DE LA PEUR ........................... 6
Le modèle de réduction de la pulsion motivante (Drive Reduction Model) ................................... 6
Le modèle curvilinéaire (The Curvilinear Model) .......................................................................... 7
Le modèle des réponses parallèles (The Parallel Response Model) ............................................... 9
La théorie de la motivation à la protection (Protection Motivation Theory) ................................ 10
Le modèle étendu des processus parallèles (The Extented Parallel Process Model, EPPM) ....... 12
L’ESTIMATION DES EFFETS DE LA PEUR ............................................................................................ 14
L’APPORT DES NEUROSCIENCES SUR LE FONCTIONNEMENT DE LA PEUR EN PREVENTION ............... 16
QUEL LIEN ENTRE LES NEUROSCIENCES ET LES MODELES EXPLICATIFS DU FONCTIONNEMENT DE LA
PEUR EN PREVENTION ? ..................................................................................................................... 18
REPETITION DES MESSAGES UTILISANT LA PEUR : QUELS EFFETS A LONG TERME POUR LES
INDIVIDUS ? ....................................................................................................................................... 19
3- DES RESULTATS CONTRADICTOIRES EN TERMES D’EFFICACITE MAIS DES
CONDITIONS POSSIBLES DE REUSSITE ................................................................................... 20
L’INFLUENCE DES VARIABLES ATTITUDINALES ................................................................................ 20
L’adéquation entre l’attitude et l’objet de la persuasion ............................................................... 20
La nécessité de prendre en compte les prédispositions attitudinales au changement ................... 21
Le degré de connaissance et le délai d’apparition des dommages ................................................ 21
L’impact du cadrage des arguments du message et de l’implication linguistique ........................ 22
L’INFLUENCE DES VARIABLES COMPORTEMENTALES ....................................................................... 23
L’importance des recommandations dans le message .................................................................. 23
L’auto-efficacité concernant la mise en place des recommandations ........................................... 23
4- LES RESISTANCES ET LES FREINS A LA PERSUASION ................................................... 25
LE TRAITEMENT DEFENSIF ................................................................................................................ 25
LA REACTANCE ................................................................................................................................. 27
LA THEORIE DE LINOCULATION ....................................................................................................... 28
L’ENGAGEMENT ET LA RESISTANCE A LA PERSUASION .................................................................... 28
5- SYNTHESE ET RECOMMANDATIONS QUANT A L’UTILISATION DE LA PEUR EN
PREVENTION ET PERSPECTIVE DE TRAVAIL ....................................................................... 30
SYNTHESE ......................................................................................................................................... 30
RECOMMANDATIONS......................................................................................................................... 31
PERSPECTIVES DE TRAVAIL ............................................................................................................... 32
ANNEXE 1 : LE MODELE DES COMMUNICATIONS PERSUASIVES ........................................ 34
ANNEXE 2 : LE MODELE TRANSTHEORIQUE DU CHANGEMENT ......................................... 35
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................................ 36
2
Dans le domaine des risques sanitaires, la communication persuasive et plus précisément les
messages ou actions de prévention ont pour but d’informer les individus le plus précisément
possible des risques qu’ils peuvent encourir, de leur faire prendre conscience d’une
vulnérabilité potentielle et éventuellement de les inciter à changer de comportement (Bryant
et Zillmann, 1994 ; Kreuter et Strecher, 1995 ; Salovey, Rothman, et Rodin, 1998 ; Girandola,
2000, 2002, 2003 ; Pechman, 2001).
S’il est possible de repérer des effets de la communication persuasive notamment en termes
d’impact, ce type de communication peut également entraîner chez les individus des
résistances. En effet, il ne suffit pas que les individus soient exposés à des messages ou à des
actions de prévention pour obtenir chez eux une modification de leur comportement qui sera
plus ou moins durable (Killeen, 1985 ; Girandola, 2002 ; Milhabet et Priolo, 2002). Bien
souvent les arguments ou informations proposés dans ce type de communication sont connus
et admis par un nombre important de personnes et ne favorisent alors pas l’acceptation de
ceux-ci (Falomir-Pichastor et Perez, 1995). De plus, de nombreux comportement visés par la
prévention ont des effets addictifs et sont plus résistants au changement (Priolo & Milhabet,
2008). Après avoir présenté les modèles faisant état du traitement de l’information de type
persuasive, nous nous intéresserons plus précisément au fonctionnement de la peur en
prévention (principaux modèles explicatifs et effets de la peur, conditions de réussite et freins
à l’utilisation de la peur) afin de proposer des recommandations concernant l’utilisation de la
peur.
1- Une augmentation possible de la perception des risques
sanitaires
L’impact de la communication persuasive
Le modèle séquentiel de la communication persuasive, proposé par McGuire (1969, 1989),
envisage les différentes étapes intervenant dans une communication à visée persuasive. Ces
étapes sont autant de processus cognitifs de traitement de l’information qui vont de
l’exposition au message jusqu’à l’adoption éventuelle d’un nouveau comportement. Dans ce
modèle, différentes variables sont à prendre en compte à chacune des étapes : identité et
crédibilité de la source, type de message (cadrage du message, vividité du message, utilisation
de la peur…), canal et support utilisés, caractéristiques du récepteur du message et contexte
de présentation… L’ensemble de ces variables est à considérer en tant qu’entrée dans le
modèle. En sortie, on retrouve les étapes successives de la persuasion (exposition, attention au
message, compréhension, changement d’attitude, décision…).
1
Attention
Compréhension
=>
Acceptation
=>
Rétention
=>
Action
Figure 1 : modèle de la communication persuasive (McGuire, 1989)
Ces processus cognitifs sont hiérarchisés et suivent une progression linéaire. Une rupture à
une des étapes va entraîner une altération de la communication. Dans ce modèle, la phase
1
Voir Annexe 1.
3
d’attention est primordiale. En l’absence d’attention, ou plus tard de compréhension la
communication n’aura pas d’effet. La phase d’acceptation va porter sur la validité des
arguments et des contre arguments en lien avec le message. Cette phase ne va pas
nécessairement aboutir à un changement d’attitude, ou à une modification comportementale
(action). La phase de rétention contribue à la mise en mémoire des éléments du message.
Le traitement de l’information persuasive : différentes modélisations
Différentes modélisations visent à montrer de quelle façon les individus vont traiter les
informations persuasives : les modèles duaux de traitement de l’information (modèle de
probabilité d’élaboration ; le modèle de traitement heuristique - systématique) ou encore le
modèle de traitement de l’information publicitaire.
Ces modèles montrent qu’il existe différents niveaux de traitement de l’information (plus ou
moins profond). Cette profondeur va dépendre de trois principales variables : la motivation,
l’implication et la capacité de traitement du message. En ce sens, le récepteur est considéré
comme actif dans le traitement de l’information. Les changements éventuels de comportement
ne sont pas uniquement liés aux arguments présents dans les messages, mais dans la
production de réponses cognitives (positives, négatives ou neutres).
Le modèle de probabilité d’élaboration
Le Modèle de Probabilité d’Elaboration Elaboration Likelihood Model » : ELM), proposé
par Petty et Cacioppo (1981, 1986) envisage la persuasion selon une approche à la fois
cognitive et motivationnelle. Selon ce modèle, deux voies peuvent conduire au changement
d’attitude : une voie centrale et une voie périphérique. Les individus, lorsqu’ils sont
exposés à des arguments persuasifs, peuvent subir une modification ou un changement de leur
attitude en empruntant soit la voie centrale, soit la voie périphérique, ou soit encore les deux.
La voie centrale correspond à un traitement approfondi du message alors qu’avec la voie
périphérique, le traitement de l’information est plus superficiel et guidé par des indices
heuristiques (e.g. la crédibilité de la source). Un traitement approfondi du message et de
l’ensemble de ces composantes nécessite un effort cognitif important de la part des individus.
Lorsque le traitement est superficiel, l’individu a moins besoin de mobiliser des ressources.
Le choix d’une voie plutôt qu’une autre est essentiellement réalisé en fonction de la
motivation de l’individu à traiter le message et également en fonction de ses habiletés propres
à traiter ou évaluer les arguments contenus dans le message. Selon ce modèle, le traitement
central pourrait permettre de prédire un changement durable.
Le modèle de Traitement Heuristique - Systématique
Relativement proche de l’ELM, le modèle de Traitement Heuristique - Systématique (THS)
envisage également un double traitement de l’information et peut rendre compte des
changements d’attitude suite à l’exposition à de l’information persuasive. La distinction entre
les deux modèles réside essentiellement dans le fait qu’avec l’ELM, les individus peuvent
emprunter l’une ou l’autre, ou bien les deux voies alors qu’avec le THS, cette alternative n’est
plus possible. Ce modèle repose donc sur un double traitement de l’information. D’un côté, le
traitement de l’information peut être systématique avec un traitement relativement
approfondi de celle-ci, et de l’autre côté, le traitement peut être de nature heuristique, c’est-à-
4
dire plus superficiel (Chaiken, 1980 ; Eagly et Chaiken, 1984 ; pour une revue de question
voir Meyer, 2000).
Le traitement systématique est un traitement relativement détaillé des informations qui
mobilise des ressources importantes et nécessite des efforts cognitifs. Dans le cadre du
traitement d’un message persuasif, une attention particulière sera portée sur l’évaluation des
arguments ainsi que sur leur validité. Cette analyse motivée du traitement est fonction de sa
pertinence et de son importance. Le traitement heuristique (qui peut coexister avec le
traitement systématique) est plus rapide, sans grande mobilisation de ressources cognitives. Il
repose sur des règles préconstruites (e.g. application de règles simples ou de scripts)
2
. Avec ce
traitement, l’information est traitée la plupart du temps selon le principe de « moindre effort ».
La tendance à s’appuyer sur l’information la plus accessible et l’utilisation de règles trop
simples se révèlent souvent insuffisantes dans un contexte de prise de décision.
Le modèle de Traitement de l’information publicitaire
Ce modèle du traitement de l’information publicitaire (McInnis & Jaworski, 1989) est
conceptualisé par une échelle en six niveaux. Le niveau le plus bas correspond à une attention
qui n’est que très partiellement focalisée sur le message. L’analyse de celui-ci se limite aux
aspects saillants (essentiellement la forme et l’originalité du message). Le niveau le plus haut
correspond à un traitement très détaillée du message avec une forte implication personnelle
(nécessitant l’utilisation de ressources cognitives). Dès lors, l’individu peut plus facilement
s’accorder avec la situation décrite dans le message.
Informer les individus pour tenter de modifier leur comportement
Pour Pechman (2001), quatre types de messages vecteurs d’information peuvent
potentiellement augmenter la motivation à se protéger :
les informations augmentant la perception de la sévérité des conséquences ;
les informations augmentant la perception de la vulnérabilité ;
les informations sur l’efficacité de la prévention ;
les informations sur l’auto efficacité de la prévention.
Pour avoir un impact persuasif efficace, les messages dans le domaine de la santé doivent
posséder certaines caractéristiques. En effet, certains aspects sont primordiaux, tels que
l’identité de celui qui émet le message, l’organisation du cadrage des arguments contenus
dans le message ou bien encore le caractère plus ou moins concret de la menace évoquée dans
le message.
Dans cette optique, le recours à la peur est une alternative possible pour informer les individus
de l’existence d’une menace réelle. Les recherches basées sur cette thématique visant à
montrer les effets de la peur sont assez nombreuses avec des résultats parfois contradictoires
sur la relation entre peur et persuasion (Kapferer, 1990 ; Gallopel, 2006 ; pour une revue de
question voir Girandola, 2000b).
2
Ces règles préconstruites sont généralement mobilisées en fonction d’indices présents dans le message : identité
et crédibilité de la source du message ; contexte dans lequel est émis le message ; utilisation d’applaudissement
pour rendre un message attractif ; longueur du message induisant de la qualité…
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