LA FISCALITÉ, VUE DE GAUCHE…
Ahmed Laaouej
Décembre
2009
Editrice responsable : A. Poutrain – 13, Boulevard de l’Empereur – 1000 Bruxelles
Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected]e
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1. Introduction ................................................................................... 2
2. L’impôt en quelques chiffres ............................................................. 4
2.1.
Impôt sur les revenus du travail et impôt sur les revenus du capital
........... 4
2.2.
Taux marginaux, taux moyen : clarifier le débat.
................................... 4
2.3.
A quoi sert l’impôt ? Ou vont nos 23 % ?
............................................ 5
2.4.
Du taux facial d’imposition au taux réel d’imposition : focus sur les dépenses
fiscales ».
.................................................................................. 5
3. Les principes d’une fiscalité juste ....................................................... 6
3.1.
Au niveau des ménages
................................................................. 6
3.2.
Au niveau des sociétés
.................................................................. 8
4. Quand certains impôts sont plus injustes que d’autres… ..................... 10
5. La fraude fiscale, facteur chronique de l’injustice fiscale ..................... 12
6. Attaquer la concurrence fiscale aux racines ....................................... 14
7. Mettre les paradis fiscaux hors la loi ................................................. 15
8. Une taxe pour freiner la spéculation et financer la coopération au
développement ............................................................................. 16
9. Un impôt sur les grades fortunes : la piste européenne ....................... 17
10. Une fiscalité favorable à l’environnement .......................................... 18
11. Conclusion .................................................................................... 18
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1. Introduction
L’objet de cette note est de dresser un panorama général de la fiscalité en Belgique et de
dessiner quelques enjeux pour les débats à venir.
Il est important, à ce stade, de rappeler quelques évolutions macro-économiques.
L’écart entre les revenus du capital et la rémunération du travail ne cesse de se creuser en
défaveur des travailleurs.
Une étude de l’ULB a fait apparaitre une évolution importante dans notre pays :
la part des salaires dans le PIB est passée, en trente ans, de 57 % à 50 %
1
. Cela traduit un
affaiblissement de la position des travailleurs dans la répartition des richesses produites.
Dans le même temps, le crédit à la consommation et l’endettement des ménages n’ont cessé
de croître. Pendant que le premier donnait l’illusion d’une augmentation du pouvoir d’achat,
le second précarisait des travailleurs déjà appauvris.
La financiarisation massive de l’économie depuis les années 80 et l’absence de fiscalité
adaptée à cette évolution a mis à mal l’équilibre de l’l’impôt et la redistribution des
richesses.
C’est en effet dans ce contexte de précarisation des travailleurs et de progression de
l’emprise de la finance, qu’un constat s’impose : la fiscalité pèse aujourd’hui lourdement sur
les revenus du travail et faiblement sur les revenus financiers.
Certains revenus financiers échappent même à tout impôt.
A l’intérieur même des revenus du travail, certaines inégalités se sont creusées. Au fil du
temps, à côté de la rémunération de base soumise à l’impôt, se sont développés des modes
complémentaires de rémunérations tels que la mise à disposition de voitures de sociétés, les
assurances groupes ou les stocks options, lesquels sont très inégalement réparties entre
travailleurs. Ces « compléments » salariaux connaissent des régimes fiscaux plus favorables
et échappent parfois même à tout impôt. Ils représentent pourtant plus de 20 % de la masse
salariale
2
.
1
http://dev.ulb.ac.be/dulbea/documents/1235.pdf; « La structure des salaires en
Belgique « . Working Paper DULBEA, Research Report, N°08-01.RR, February 2008 ;
2
Voir l’étude SD Worx publiée en 2007, « SD WORX prend la mesure de l’intégralité du
paquet de rémunération brute »,
http://www.sd.be/site/website/be/fr/1000A/10F00C/10000P_070220_20;
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Paquet salarial
Le nombre d’avantages indirects croît avec la hiérarchie
Les impôts dégressifs, autrement dit ceux qui décroissent à mesure que les revenus
augmentent, prennent une place de plus en plus importante dans la politique fiscale actuelle.
Cette tendance met à mal le principe de justice fiscale, nous aurons l’occasion d’y revenir.
Les attaques répétées contre l’impôt par les forces de droite masquent en réalité des
attaques contre un modèle solidaire de répartition des richesses, qui de surcroît doit être
largement amélioré.
Dans notre société où se développent les tendances au repli sur soi et l’idée que pour exister
il faut consommer, il est indispensable de sensibiliser à nouveau aux bienfaits de l’altruisme
et de la solidarité.
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Pour déconstruire le discours libéral, il importe en effet de revenir à l’essentiel : le meilleur
investissement est celui que nous plaçons dans la solidarité.
2. L’impôt en quelques chiffres
2.1. Impôt sur les revenus du travail et impôt sur les revenus du capital
En 2007, les contribuables ont versé à l’Etat près de 92 milliards d’euros d’impôts.
2007 est l’année qui précède la crise financière et économique. En cela, c’est une année plus
typique. En 2009, les recettes fiscales ont en effet baissé de quasi 15 % !
Les impôts les plus importants sont l’impôt des personnes physiques (qui pèse pour
l’essentiel sur les revenus du travail) : 34 milliards d’euros, la TVA (qui pèse sur les ménages
lorsqu’ils consomment) : 25 milliards d’euros, l’impôt des sociétés (sur les bénéfices) : 12
milliards d’euros, les accises (qui pèsent aussi sur la consommation des ménages) : 7
milliards d’euros.
Suivent ensuite les droits d’enregistrements (3,5 milliards), les droits de succession (1,7
milliard) et d’autres impôts.
Le précompte mobilier (qui s’applique aux revenus financiers tels les intérêts et les
dividendes) rapporte 3 milliards d’euros.
On peut en somme considérer que sur 92 milliards de recettes fiscales, 66 milliards d’euros
(IPP, TVA et accises) pèsent directement sur les ménages (travailleurs et non actifs), soit
plus de 70 %.
L’impôt sur les revenus du capital (investi ou placé) totalise quant à lui 15 milliards d’euros
(impôt des sociétés et précompte mobilier), soit 16 %.
Cette répartition est d’autant plus aberrante que la part des salaires dans la richesse produite
n’a cessé de reculer depuis trente ans.
2.2. Taux marginaux, taux moyen : clarifier le débat.
L’on a trop souvent, à l’occasion des débats politiques, entendu une certaine rengaine
libérale nous expliquer qu’en Belgique «
on paie trop vite, trop d’impôt
».
En réalité, certains agitent l’épouvantail des taux marginaux en affirmant qu’à partir de 18
730 euros, l’on est taxé à 45 % et qu’à partir de 34 330 euros, l’on est taxé à 50 %.
Il s’agit en réalité des taux marginaux prévus au barème de l’impôt des personnes
physiques, lequel compte 5 taux. Cela signifie que seuls les revenus à partir de 34 330 euros
sont soumis à 50 % (et pas la totalité des revenus).
De plus, les montants soumis au barème sont les revenus imposables, autrement dit les
revenus bruts, soustraction faite des cotisations sociales, soustraction faite des frais
professionnels (forfaitaires ou réels) et des dépenses déductibles (déduction des rentes
alimentaires, déduction pour habitation, déduction des frais de garde, etc…).
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