représentation qu’offre la figure I semble par-
ticulièrement éclairant dans le cadre de notre
étude. En effet, pour l’entreprise en général et
en particulier pour l’entreprise multidivision-
nelle, la complexité de la réalisation des plans
d’achats a de nombreuses causes : multiplica-
tion des composants ou matières à approvi-
sionner, développement des interrelations
avec les fournisseurs, instabilité de l’envi-
ronnement, etc. Faire face à cette situation
implique souvent de décentraliser le pouvoir
de décision et de contrôle le plus près possible
des compétences locales. Mais, d’un autre
côté, la centralisation de la fonction approvi-
sionnement apparaît à bien des égards comme
un choix d’organisation pouvant le mieux
assurer la cohérence du fonctionnement des
diverses activités et/ou domaines de
l’entreprise et ce, grâce à un meilleur contrôle
de l’action et des résultats.
Dans le cas de la décentralisation, il s’agit de
placer les centres de décisions à proximité des
organismes d’exécution, quitte à les multi-
plier autant que nécessaire pour assurer à
l’organisation l’efficacité maximale ; par ail-
leurs, la centralisation consiste à réduire les
centres de décisions à un nombre minimal et à
les localiser à proximité de la direction géné-
rale. La centralisation et la décentralisation
apparaissent ainsi comme deux états organi-
sationnels extrêmes entre lesquels existe une
espèce de « zone grise » constituée de multi-
ples combinaisons possibles de centralisation
et décentralisation des activités liées aux
achats.
Le choix du degré de centralisation est
à l’évidence capital puisqu’il détermine
la configuration organisationnelle de
l’entreprise. Aussi, est-il logique d’admettre
qu’avant d’opter pour tel ou tel type de struc-
ture, les décideurs tiennent compte de multi-
ples exigences liées entre autres aux types de
produits, aux caractéristiques des entreprises
et de leur secteur d’activités, à la nature de la
relation client-fournisseur qu’elles entretien-
nent dans leur environnement ou qu’elles
comptent y développer (Corey, 1978). En
d’autres termes, le choix d’une forme
d’organisation découle de considérations tant
stratégiques qu’opérationnelles, et on devine
que de multiples facteurs tant internes
qu’externes aux entreprises concourent à la
détermination de ce choix.
Il va de soi que la tendance à la centralisation
de quelques activités de la fonction approvi-
sionnement relève dans certaines entreprises
de la volonté de faire face aux pénuries de
matières premières, et aux fluctuations des
prix sur leurs marchés amont. En plus du fait
qu’elle se justifie souvent par le haut degré de
compétences requises pour la négociation
avec les fournisseurs, la centralisation permet
par ailleurs aux entreprises d’éviter la concur-
rence entre leurs différentes unités, et consé-
quemment, donne à celles-ci la possibilité de
réaliser des économies substantielles. En
effet, la centralisation des besoins d’achats
confère à l’entreprise un pouvoir d’achat (et
donc de négociation) accru auprès de ses four-
nisseurs et conduit généralement entre autres
à l’obtention des remises sur quantité et
d’autres conditions avantageuses telle la
livraison sur demande qui évite de multiplier
les stocks (Nollet, Kélada et Diorio ; 1994).
D’autres facteurs tels le renforcement du
contrôle qualité des matières ou le développe-
ment des relations stratégiques avec les four-
nisseurs peuvent faire que l’entreprise ne
puisse résister à l’attrait que représentent les
gains sous-jacents à la centralisation de certai-
nes activités.
Certes, ces multiples facteurs expliquent lar-
gement les choix différenciés des entreprises
en matière de centralisation (Leclercq, 1989) ;
cependant, demeure la question de savoir la-
quelle des systèmes centralisé et décentralisé
est la plus efficace. S’il était possible de ré-
pondre de manière absolue à cette question, on
expliquerait facilement la préférence de choix
dans certaines entreprises. D’ailleurs, cette
question se pose au niveau même de l’organi-
sation générale des entreprises en ces termes :
les structures centralisées sont-elles plus effi-
caces que les structures décentralisées ? On
sait à ce sujet que pour les théoriciens classi-
ques, une structure très formalisée et très cen-
tralisée est plus efficace, tandis que la théorie
des relations humaines stipule qu’une struc-
ture décentralisée est plus efficace.
Il n’y a donc pas à cette question de réponse
tranchée qui recueille l’assentiment général.
Quelques auteurs (en théorie des organisa-
tions) qui ont réservé une place importante
aux questions touchant au niveau relatif
auquel les décisions sont prises dans les entre-
prises ou les organisations le relèvent au
moins implicitement. Gélinier (1968, p. 37)
souligne ainsi par exemple « ... qu’au niveau
d’une entreprise, la compétitivité résulte
d’abord de l’application d’un management
moderne caractérisé par le principe de décen-
tralisation ». Même si Mintzberg (1979)
estime pour sa part que le problème de la cen-
tralisation (ou de la décentralisation) de la
décision au sein de l’entreprise demeure pro-
Logistique & Management
Vol. 6 – N°2, 1998 115