L`impact des technologies de l`information sur les structures de

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L’impact des technologies de l’information
sur les structures de gestion des achats :
des leçons pour la gestion de la chaîne
logistique
Jean NOLLET
Professeur titulaire, titulaire de la Chaire de gestion des approvisionnements, HEC Montréal
[email protected]
Martin BEAULIEU
Professionnel de recherche, HEC Montréal
[email protected]
Le déploiement d’une chaîne logistique performante exige une adéquation
appropriée avec les structures organisationnelles. Le domaine des achats a
justement produit des études sur le sujet qui peuvent inspirer les réflexions des
gestionnaires de la chaîne logistique. Souvent, les études dans ce dernier domaine
tendent à classifier les structures comme étant centralisées ou décentralisées.
Cependant, la réalité est plus complexe. D’abord, entre ces deux options extrêmes,
il existe une variété de structures hybrides. Ensuite, d’autres dimensions doivent
être intégrées à la configuration d’une structure, notamment la formalisation et la
spécialisation. Par ailleurs, les technologies de l’information (TI) peuvent
contribuer au déploiement de structures plus complexes. Leur apport a été étudié
dans une multitude de contextes, mais très peu dans le domaine de la gestion des
achats.
Une étude de cas retraçant une expérience de mise en œuvre d’une structure de
gestion des achats dans une société internationale de services financiers permet de
dégager des observations intéressantes à ce sujet. Les résultats de cette étude
indiquent que dans ce cas : 1) la structure est nettement le fruit d’une stratégie
délibérée permettant de rehausser la contribution de la fonction achats ; 2) les TI
facilitent un découpage entre les décisions d’exécution et les décisions de contrôle,
ce qui peut favoriser simultanément la centralisation et la décentralisation de la
structure ; 3) avec l’apport des TI, la centralisation d’une activité ne signifie pas
nécessairement sa déconnection de la base opérationnelle ; 4) les TI renforcent le
formalisme de l’organisation. Nos travaux indiquent aux gestionnaires des achats et
de la logistique qu’au-delà des schémas traditionnellement analysés, ils peuvent
maintenant envisager de nouvelles structures qui leur permettront de tenir compte
des objectifs à atteindre, tout en visant une plus grande efficacité.
Introduction
La structure organisationnelle est une dimension majeure dans l’articulation d’une entre-
prise. D’ailleurs, cette dimension est d’un intérêt tel dans le milieu académique que depuis
une trentaine d’années des revues de littérature
sont réalisées périodiquement (voir entre
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autres les travaux de Dalton et al., 1980 ; Fassoula, 2006 ; James et Jones, 1976 ; Kimberly,
1976). Aussi, chacune des grandes fonctions
d’une entreprise a fait l’objet d’études spécifiques sur ce sujet, à titre d’exemple, celles de :
Tannenbaum et Dupuree-Bruno (1994) en gestion des ressources humaines ; Nonaka et Nicosia (1979) en marketing ; Johne et Snelson
(1988) pour le développement de produits ;
Chen (2007) pour les technologies de l’information; Nahm et al. (2003) en gestion de la
production. Naturellement, de telles études ont
également été menées en gestion de la chaîne
logistique (supply chain management) ; justement, Dornier et Fender (2001), Kim (2007) et
Samii (2001) indiquaient que la structure organisationnelle y joue un rôle majeur dans la performance logistique.
Cependant, dans le domaine de la logistique,
ce sont habituellement les mêmes cinq modèles de structure qui sont étudiés (Kim, 2007;
Tixier et al., 1998) : la structure décentralisée
sans orientation en logistique (non supply
chain management-oriented organization), la
structure fonctionnelle, la structure matricielle, la structure conseil et la structure
intégrée. Ces structures sont relativement
génériques, mais nous sommes d’avis que la
réalité en offre une plus grande variété. Justement, les technologies de l’information (TI)
peuvent libérer les gestionnaires des schémas
organisationnels classiques, ouvrant ainsi la
porte à d’autres configurations.
La gestion des achats nous apparaît comme un
domaine d’étude approprié pour saisir l’apport des technologies de l’information sur la
variété des structures pouvant s’offrir à la gestion de la chaîne logistique. D’abord, la gestion des achats est une composante majeure
du succès de la chaîne logistique, mais surtout
la nature des structures organisationnelles y
est une thématique importante de recherche
depuis plus de 40 ans. De plus, les gestionnaires en chaîne logistique peuvent en tirer des
enseignements intéressants. Par exemple, les
enquêtes tendent à démontrer que la majorité
des organisations adoptent une structure
hybride de gestion des achats, conciliant ainsi
simultanément les avantages d’une structure
centralisée et ceux d’une structure décentralisée. Cependant, une structure hybride n’est
pas clairement définie, puisqu’elle renvoie à
une multitude de possibilités, soit toutes les
combinaisons entre la centralisation et la
décentralisation.
À ce jour, plusieurs enquêtes intégrant les
technologies de l’information (TI) à la gestion
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des achats ou de la logistique ont cherché à
mesurer l’impact de cette variable sur la
nature des relations avec les fournisseurs (par
exemple, voir l’étude de Boulay et de Faultrier, 2005). Cependant, comme le soulignent
Cuganesan et Lee (2006), l’influence des TI
sur la gestion des achats ne se limite pas aux
échanges inter-organisationnels, mais comprend aussi ceux ayant un caractère
intra-organisationnel. En fait, à l’exception de
l’étude de Johnson et Leenders (2004) qui
évoquait les technologies de l’information,
nous n’avons pas retrouvé d’analyse ciblant
spécifiquement l’apport des TI sur les structures de gestion des achats. Bien que notre
recherche porte principalement sur la fonction de gestion des achats, nous sommes d’avis que, pour les raisons mentionnées un peu
plus haut, les observations que nous mettrons
en valeur pourront être également utiles dans
la définition d’une structure organisationnelle
de gestion de la chaîne logistique.
Notre étude démarre par une recension des
écrits qui offre un portrait des courants de
recherche dans le domaine des structures de
gestion des achats et de la logistique, ainsi que
des impacts des TI sur les structures organisationnelles en général. Par la suite, en recourant à une étude de cas portant sur la révision
des structures de gestion des achats d’une
grande société internationale du secteur des
services financiers, cet article permet d’analyser le sens de la relation entre les TI et la structure organisationnelle. En adoptant les
paramètres d’analyse de Stanley (1993), soit
la centralisation, la formalisation et la spécialisation, l’article étudie l’impact des TI sur ces
paramètres. Ces derniers permettent d’enrichir l’analyse ultérieure du cas qui verra aussi
à formuler des observations plus spécifiques à
la gestion de la chaîne logistique.
Recension des écrits
Pour beaucoup d’organisations, la gestion des
achats est la fonction autour de laquelle s’articule la gestion de la chaîne logistique (Andersen et Rask, 2003 ; Chandra et Kumar, 2000 ;
Durand et de Faultrier, 2007 ; Fung, 1999).
Pour lui permettre de bien jouer ce rôle, la
fonction achats doit dépasser sa focalisation
historique sur la réduction des prix pour
rechercher des sources d’approvisionnement
répondant mieux aux besoins de l’organisation (Fung, 1999). Dans ce contexte, l’adoption d’une perspective plus stratégique est
essentielle, tel que souligné tant récemment
(Durand et de Faultrier, 2007), que depuis
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plusieurs années (Spekman et al., 1994). Ce
passage vers une orientation plus stratégique,
qui prendrait en compte des enjeux de la
chaîne logistique, exige une adaptation des
structures du service des achats (Leenders et
al., 1994).
L’atteinte d’un niveau stratégique d’un service des achats s’inscrit d’ailleurs dans une
démarche évolutive. Par exemple, Keough
(1993) identifie cinq niveaux de maturité d’un
service des achats. Le niveau inférieur se
caractérise par une intervention très opérationnelle des acheteurs où la structure est
décentralisée (ce que Keough nomme serve
the factory). Le second niveau voit la constitution d’un service des achats (lowest unit cost)
qui effectue des analyses de coûts. Le troisième niveau est celui des achats coordonnés
où la centralisation des achats est plus
poussée. Le quatrième niveau se caractérise
par
une
structure
transfonctionnelle
(cross-functional purchasing) où il y a des travaux faits en équipes pour solutionner des
problèmes liés aux achats. Enfin, le dernier
niveau est celui d’une structure de classe
mondiale (world-class supply management).
Un tel modèle aide les organisations à se positionner, mais également à déterminer la direction à prendre pour apporter les changements
stratégiques requis (Dubois et Wynstra,
2005). Cette évolution de la stratégie impliquera inévitablement une transformation de la
structure organisationnelle.
Le concept de structure organisationnelle est
un thème de recherche majeur dans le
domaine de la gestion des achats. Dès 1968,
Fearon étudiait les structures de cette fonction
en retraçant des citations remontant au début
du 20e siècle. Depuis, il y a eu une première
vague de travaux qui ont décrit des structures
de gestion des achats par l’ampleur des responsabilités de cette fonction, le niveau hiérarchique ou le service auquel est rattaché la
fonction achats (Cavinato, 1992 ; Farmer,
1981 ; Zemansky, 1970; Zenz, 1981).
Naturellement, des enquêtes empiriques ont
émergé à la suite de ces premiers travaux.
Depuis la fin des années 1980, aux États-Unis,
le Center for Advanced Purchasing Studies
(CAPS) mène périodiquement des sondages
sur la nature des structures de gestion des
achats (Fearon, 1988 ; Johnson et al., 1998,
2006). Cependant, une attention particulière
est accordée à la dimension de centralisation/décentralisation. Cette dimension réfère
à la concentration ou à la dispersion du processus décisionnel (Dewett et Jones, 2001;
Kim, 2007). Pour Kim (2007), la centralisation impliquerait que les décisions seraient
prises par un cadre supérieur qui se trouve
près de la haute direction (Kim, 2007). Kirkwood et al. (2005) identifient trois niveaux de
décision : 1) la définition des politiques, des
orientations et des objectifs stratégiques, 2) la
configuration des processus et le choix des
moyens et 3) l’exécution au quotidien. Les
deux premiers niveaux ont un caractère stratégique par l’impact à long terme qu’ils auront
sur l’organisation, alors que le dernier niveau
renvoie à des décisions opérationnelles.
Le fait que la fonction de gestion des achats
soit à l’interface entre les besoins des requérants internes et l’offre des marchés fournisseurs externes (Fung, 1999) explique que les
chercheurs étudient fréquemment la dimension de centralisation. En effet, c’est dans ce
contexte que le concept de centralisation/décentralisation prend toute son importance : la centralisation afin d’établir un
rapport de force favorable avec les fournisseurs potentiels (Carter et Carter, 2007;
Dubois et Wynstra, 2005) et la décentralisation afin de bien saisir les besoins des requérants (Fearon, 1988). Carter et Carter (2007)
ajoutent qu’une fois les bénéfices de la centralisation obtenus, l’organisation peut souhaiter
une décentralisation pour que les achats soient
effectués au niveau des unités administratives
afin de gagner en réactivité. Justement, Krishnamurthy et Yauch (2007) indiquent que la
décentralisation serait une option à privilégier
pour une organisation qui souhaite mettre en
œuvre un système lean, la décentralisation
offrant plus de souplesse. Dubois et Wynstra
(2005) vont dans le même sens lorsqu’ils
affirment que la décentralisation est une
réponse au contexte d’affaires turbulent et
incertain. Cependant, en retenant cette formule, il y a alors un danger de perdre les bénéfices de la standardisation (Carter et Carter,
2007). La perception qu’ont les dirigeants de
l’organisation quant aux avantages et inconvénients de l’une et l’autre des deux grandes
options peut expliquer le mouvement de
balancier entre une structure centralisée et
décentralisée (Tchokogué et Nollet, 1998).
En matière de gestion des achats, tant les premières enquêtes de Fearon (1988) que les plus
récentes de Johnson et al. (2006) démontrent
qu’une majorité d’organisations tendent à
retenir une structure hybride. Naturellement,
les organisations ne sont pas statiques. Des
chercheurs ont souhaité comprendre les facteurs expliquant le passage d’une forme centralisée/décentralisée à une autre forme (voir
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par exemple Johnson et Leenders, 2004 ;
Tchokogué et Nollet, 1998). Cependant, dans
ces analyses, l’apport des technologies de
l’information (TI) est à peine évoqué. Baglieri
et al. (2007), Banerjee et Sriram (1995), ainsi
que Boulay et de Faultrier (2005) traitent de
l’impact des TI, mais principalement en fonction des rapports qui s’établissent avec les
acteurs externes de la chaîne logistique. Ces
études s’intéressent surtout aux changements
pouvant survenir dans la relation entre un
acheteur et ses fournisseurs à la suite de l’implantation des TI, mais sans observer les
transformations à l’interne. Garrido Samaniego et al. (2006) identifient pour leur part
les facteurs expliquant le déploiement de certaines technologies facilitant les processus
d’achat et, encore une fois, l’impact des structures internes n’est pas pris en compte. Ces
observations nous ramènent aux propos de
Cuganesan et Lee (2006) qui constataient le
peu d’analyses traitant des impacts des TI sur
les réseaux internes de l’organisation des
achats.
Ce constat pour le domaine des achats peut
sembler étonnant, puisque l’impact des TI sur
les structures organisationnelles a fait l’objet
de multiples travaux (Heintze et Bretschneider, 2000). D’ailleurs, Lau et al. (2001) indiquent que les structures organisationnelles se
développent pour générer et traiter de l’information. Par leur capacité de traitement, les TI
améliorent la coordination et la communication à l’intérieur de la firme (Hitt et Brynjolfsson, 1997), ouvrant la porte à de nouvelles
structures organisationnelles qui auraient été
inimaginables auparavant sans ces technologies. Il y a déjà plusieurs années, Foster et
Flynn (1984) évoquaient la même idée. Naturellement, la dimension de centralisation a fait
l’objet d’analyses nombreuses. Cependant,
ces études ne dégagent pas de véritable
consensus à savoir si les TI favorisent la
concentration ou la dispersion du processus
décisionnel (Dewett et Jones, 2001 ; Wang,
2001). Les propos de Nault (1998) offrent
cette explication : la centralisation et la décentralisation poursuivraient des objectifs distincts, la centralisation favorisant le respect et
la continuité des règles organisationnelles,
alors que la décentralisation encouragerait les
innovations, ou comme nous le disions plus
tôt une plus grande souplesse de réaction face
aux mutations de l’environnement d’affaires.
Toutefois, Bloomfield et Coombs (1992) ainsi
que Wang (2001) nuancent le fait que la centralisation viserait à contrer la possibilité de
dispersion du processus de décision. Ces
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chercheurs soulignent que les décisions (stratégiques et opérationnelles) exercées par des
gestionnaires et le contrôle de ces mêmes
décisions constituent deux considérations distinctes. Justement, Lau et al. (2001) estiment
que les TI peuvent favoriser une décentralisation des décisions, mais parallèlement mener
à une centralisation du contrôle.
Par ailleurs, Dalton et al. (1980) ajoutent deux
autres dimensions à la configuration d’une
structure organisationnelle : la spécialisation
et la formalisation. La spécialisation réfère au
nombre de différentes spécialités ou des types
d’emplois dans une organisation. La formalisation est le développement de routines afin
de répondre à des problèmes récurrents; elle
permet de formuler explicitement les rôles et
leurs relations. Elle normalise également les
tâches, les politiques et les procédures et cela,
indépendamment des individus.
Ces deux dernières dimensions peuvent, elles
aussi, être remodelées par les TI. Justement,
Dewett et Jones (2001) constatent que la spécialisation peut mener à une multiplication
des sous-unités administratives qui répondront à des problèmes très pointus, mais avec
le danger de perdre de vue la performance globale du système. Les TI peuvent atténuer cet
effet d’isolement administratif, en rendant
plus aisément accessibles aux différents spécialistes des informations qui leur permettent
de situer leurs actions dans le contexte général
de leur organisation. Les spécialistes peuvent
ainsi avoir une rétroaction plus rapide sur les
impacts de leurs décisions sur les autres composantes de l’organisation. Dewett et Jones
(2001) avaient aussi précisé que les TI favorisaient la formalisation en enregistrant des
données sur les événements se déroulant dans
les organisations, facilitant ainsi le contrôle
des comportements. À l’inverse, Lau et al.
(2001) croient que les TI réduisent la formalisation en laissant plus de liberté aux individus,
ce qui aide à briser les anciennes règles organisationnelles et à créer de nouveaux environnements de travail.
De la recension des écrits, nous dégageons
quelques constats utiles pour cette recherche.
Les études dans le domaine des structures
organisationnelles encadrant la gestion des
achats sont abondantes. Ces études accordent
une grande attention à la dimension de centralisation/décentralisation. Entre ces deux
options, la réalité s’avère souvent différente,
puisque de nombreuses organisations adoptent des structures hybrides. L’apport des
technologies de l’information pourrait expli-
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quer l’engouement pour des structures plus
complexes et plus novatrices, mais cette
avenue n’a pas fait l’objet de recherche spécifique dans le domaine de la gestion des achats.
Enfin, l’étude des structures devrait s’attarder
à d’autres dimensions (spécialisation et formalisation) (Stanley, 1993 ; Kim, 2007) afin
de mieux tenir compte de la complexité du terrain.
Dans ce contexte, cet article poursuit deux
objectifs qui prennent la forme de deux questions pour cette recherche exploratoire :
1. Quel est le sens de la relation entre la
configuration de la structure organisationnelle et les choix de technologies de
l’information ? Autrement dit, les technologies utilisées par une organisation ouvrent-elles de nouvelles possibilités quant
aux structures organisationnelles ou, à
l’inverse, les choix de structure se reflètent-ils dans les choix de TI ?
2. Comment les technologies de l’information modifient-elles les trois paramètres
(centralisation, formalisation et spécialisation) des structures en gestion des
achats ?
Méthodologie
Compte tenu de l’état des connaissances sur
ce sujet et des deux questions de recherche,
une étude de cas exploratoire est une méthodologie appropriée (McCutcheon et Meredith, 1993 ; Voss et al., 2002). Aussi, un seul
cas est alors suffisant, compte tenu du caractère de la recherche (Yin, 1994). À cet effet,
nous adoptons la même stratégie de collecte
de données que celle retenue par Krishnamurthy et Yauch (2007) qui analysent, entre
autres, la structure organisationnelle d’une
entreprise qui déploie une chaîne logistique
agile. Précisons que la sélection du site analysé relève d’une approche opportuniste,
puisqu’en étudiant une entreprise, nous avons
constaté la présence du phénomène, soit l’interaction étroite et en plusieurs vagues d’une
structure complexe de gestion des achats et de
TI, le tout révélant un potentiel de recherche
intéressant. L’étude de cas offre justement
cette flexibilité permettant de capturer des
phénomènes contemporains (Seuring, 2008).
Bien que la tendance récente soit au recours à
des études de cas multiples, nous croyons
qu’un cas approfondi présente un intérêt évident dans une situation comme celle-ci. À cet
effet, nous reprenons les propos de Dubois et
Araujo (2007, p. 173) : “We regard strong
exemplars as both necessary for the
development of a discipline as well as providing templates against which different theoretical and methodological positions may
sharpen their differences.”
La firme étudiée est une grande entreprise
internationale du secteur financier, œuvrant
dans plus d’une quinzaine de pays. Les informations présentées ici proviennent d’entrevues réalisées auprès de cadres de la gestion
des achats d’une filiale nord-américaine de
cette entreprise. Ces entrevues, totalisant plusieurs heures, ont permis d’avoir une vue
d’ensemble de la démarche de réorganisation
des activités d’achat de cette filiale. Les entrevues ont été codées et analysées selon le système de matrice suggéré par Huberman et
Miles (1991). Cette stratégie a été appliquée
avec succès dans les études de Nollet et Beaulieu (2003, 2005). Par ailleurs, les renseignements amassés lors des entretiens ont été
complétés par la consultation d’artefacts :
articles de presse, livres, documents internes,
etc. D’ailleurs, la diversité des sources et des
personnes interviewées enrichit la compréhension du phénomène et évite de réinterpréter des événements à partir d’un seul point de
vue (Voss et al., 2002).
Précisons que nous avons préservé l’anonymat de l’entreprise afin de ne pas divulguer
des informations qu’elle pourrait juger sensibles. Par conséquent, nous n’avons pas présenté les dates exactes de tous les événements
afin de limiter la capacité du lecteur à retracer
l’entreprise étudiée. Par ailleurs, les délais
entre les événements sont relativement exacts.
Nous soutenons que ce choix n’entrave ni les
objectifs poursuivis par l’étude, ni la qualité
des analyses qui en découlent.
Étude de cas de la société XYZ
La présentation de cette étude de cas s’articule
autour de trois volets. D’abord, nous présentons la gestion des achats à la fin des années
1990 dans la firme XYZ. Ensuite, nous décrivons ce que nous appelons « l’encadrement
global » de la gestion des achats, soit les interactions entre le groupe d’achat situé au siège
social et les services des achats dans les différentes filiales. Par la suite, nous dépeignons
l’encadrement local, soit les relations entre le
service des achats dans une filiale et les relations avec les services requérants.
La situation initiale
Vers l’année 2000, la haute direction de l’entreprise XYZ avait réalisé que les possibilités
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de croissance demeuraient limitées, malgré
l’expansion économique de la décennie précédente. Donc, si elle souhaitait maintenir des
rendements intéressants pour ses actionnaires, elle devait chercher à contrôler davantage
les coûts, dont naturellement les achats.
Malgré que l’entreprise soit une firme internationale avec un chiffre d’affaires de plusieurs
milliards de dollars, la gestion des achats était
beaucoup moins développée qu’on ne serait
porté à le croire sur la base de la taille. Les différentes divisions poursuivaient leurs propres
pratiques de gestion. À l’intérieur d’une
même filiale, il pouvait y avoir une diversité
de pratiques entre les différents services. Ceci
faisait en sorte qu’une même filiale pouvait
communiquer par différents moyens avec un
même fournisseur dépendamment du service
qui lançait une commande. Un fournisseur
pouvait recevoir des requêtes par télécopieur,
par courriel ou même par la poste. Souvent
aussi, ces requêtes comportaient des clauses
différentes. Dans ce contexte, il n’y avait pas
vraiment de politique de gestion des achats, le
tout étant très souvent laissé à la discrétion des
services. Les rares acheteurs que l’on retrouvait dans l’entreprise intervenaient à des
degrés divers dans le processus d’achat selon
la nature des contrats et des requérants. Dans
certains cas, le fournisseur aidait le requérant,
qui n’avait souvent pas d’expertise en matière
de gestion des achats, à préciser ses spécifications. Enfin, il n’y avait aucune consolidation
des besoins similaires entre les différentes
filiales de XYZ.
Selon les critères de la grille de Keough
(1993), la structure de gestion des achats de
XYZ était donc très embryonnaire, vu l’absence de politique d’achats et de procédures
Figure 1 : Chronologie de la mise en œuvre de la structure des achats
dans la société XYZ
normalisées, de même que la décentralisation
très prononcée qui menait à des interventions
variables des acheteurs alors en poste. Outre
les coûts de ces façons de faire (absence de
consolidation pouvant générer des économies
et mauvaise utilisation des ressources qui, de
plus, n’étaient pas des professionnels en
achats), des cadres constatèrent que l’entreprise était peu protégée en cas de litige avec
ses fournisseurs.
L’encadrement global
Suite au diagnostic sur le contrôle des coûts, la
haute direction de l’entreprise déploya différentes mesures tant au niveau du siège social
qu’à celui des filiales. La figure 1 présente les
principaux changements chronologiquement.
Comme première mesure, la haute direction
constitua un Groupe Achat dirigé par un
vice-président. Ce service fut doté d’une
équipe et il était localisé au siège social international de la société. Ce Groupe s’appuyait
aussi sur un réseau d’achat local centralisé
dans les filiales qui serait déployé dans les
mois suivant la création du Groupe Achat.
Une des premières mesures prises par le
Groupe Achat avait été de produire un document décrivant les tâches de chaque poste
associé à la gestion des achats, mais aussi les
procédures et les mesures de contrôle existantes. Ceci visait à permettre une uniformisation
des façons de faire pour chacune des filiales
de la société. Pour soutenir cet effort de normalisation, un Bureau d’orientation stratégique (BOS) avait été mis sur pied. Ce dernier
réunissait les responsables des services des
achats de chacune des filiales et voyait au
développement d’une base de données centralisée sur les contrats signés localement et au
suivi des économies réalisées. Il a également
vu à la sélection des logiciels de gestion des
achats qui seraient déployés dans les filiales :
le système Ariba Buyer pour le lancement des
commandes des requérants vers les fournisseurs pour les articles courants et le système
PeopleSoft Purchasing pour le paiement électronique aux fournisseurs.
Les discussions au niveau du BOS visaient
aussi à identifier des mandats qui pourraient
être négociés globalement par les gestionnaires du Groupe Achat du siège social. Cependant, la base de données centralisée pourrait
permettre de déterminer la filiale la plus performante dans la négociation de dossier. À
terme, cette filiale pourrait obtenir le mandat
de conclure un contrat pour toutes les unités à
travers le monde. Cette comparaison entre les
filiales serait d’autant facilitée que les proces-
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sus seraient normalisés. Ainsi, une filiale se
démarquerait parce qu’elle aurait su développer une connaissance étroite du marché fournisseur et une approche lui permettant de
générer des gains supérieurs. Pour ces raisons, le service des achats de cette filiale
deviendrait alors en quelque sorte une référence mondiale pour les autres sites de l’entreprise.
L’objectif à long terme n’était pas de répartir
tous les dossiers d’achat entre les services des
achats, car des achats locaux allaient demeurer, ne serait-ce que parce que les offres régionales étaient plus compétitives ou parce qu’il
n’existait aucun fournisseur en mesure de
répondre à tous les marchés simultanément.
Cependant, la base de données centralisée
permettrait de contrôler les résultats des négociations faites dans les filiales. Par exemple, si
l’une d’elles décidait de se soustraire à un
contrat global, elle aurait alors à démontrer le
bien-fondé de cette décision par un meilleur
résultat lors des négociations.
L’encadrement local
Pour illustrer ce second niveau d’encadrement, nous utilisons la situation d’une filiale
nord-américaine. Les achats ont été attribués
spécifiquement à une Direction. Les acheteurs, jusqu’alors dispersés dans différents
services, furent rapatriés sous cette Direction.
Au fil des ans, des acheteurs qualifiés furent
embauchés. Ces individus présentaient des
profils variés d’expérience professionnelle et
de formation académique, ce qui permettait à
la Direction de disposer de compétences
diversifiées pouvant être allouées selon la
complexité des dossiers à gérer.
Par la suite, il avait été prévu que la définition
des processus par le Groupe d’Achat amènerait le service des achats de chacune des filiales à veiller à la négociation et à la résolution
des litiges avec les fournisseurs, alors que les
services requérants se chargeraient des tâches
plus opérationnelles, soit le lancement des
commandes par l’entremise du progiciel
Ariba Buyer. Les services requérants verraient
au suivi du service avec des fournisseurs. Une
fois la négociation conclue, le contrat serait
signé par deux responsables locaux : un du
service des achats et un du service demandeur.
Cette procédure permettrait ainsi d’éviter un
isolement entre les acheteurs et les requérants.
Pour cette filiale nord-américaine, la mise en
œuvre de ce découpage n’avait pas été spontanée, ayant consisté en une démarche sur plusieurs mois quant à la réappropriation à
l’intérieur du service des achats des contrats
signés avec des fournisseurs par les différentes unités administratives.
La présence du système Ariba Buyer à l’intérieur de la filiale visait à uniformiser les
approches de transmission des commandes
aux fournisseurs. Pour la filiale nord-américaine étudiée, le transfert vers ce système
d’information ne s’effectua pas sans heurts. Il
fut nécessaire de créer des catalogues électroniques des différents articles afin que les
requérants puissent les repérer facilement
dans le système. Les articles furent regroupés
en une trentaine de familles constituant autant
de catalogues. L’objectif était d’implanter au
minimum deux douzaines de catalogues sur
une période de deux ans. Outre la constitution
des catalogues, la détermination des seuils
monétaires à partir desquels une commande
pourrait être lancée sans exiger l’autorisation
d’un supérieur hiérarchique fut nécessaire.
Cet exercice exigea des discussions sur plusieurs mois avec les différents services requérants.
Le système PeopleSoft Purchasing était vu
comme un outil de contrôle supplémentaire
afin de s’assurer que les achats traités manuellement seraient réalisés auprès de fournisseurs mis sous contrat. Pour assurer ce rôle de
contrôle, à terme, une entente administrative
serait conclue entre le service des achats et le
service des comptes à payer afin d’empêcher
le paiement de toute facture qui ne serait pas
adressée à un fournisseur sous contrat avec
cette filiale. Cette mesure découragerait les
requérants d’opter pour d’autres fournisseurs
que ceux sous contrats cadres.
Analyse du cas
Dès le départ, le cas est une illustration du
concept de maturité d’une fonction de gestion
des achats. Selon la grille de Keough (1993),
la société XYZ est passée d’une structure de
premier niveau où la gestion des achats était
très décentralisée, à une gestion des achats de
troisième niveau, car il y a maintenant une
structure centralisée. Il y a également des
comités d’achats (dans ce cas-ci le BOS), la
construction d’une base de données de gestion
des achats et le développement de politiques
corporatives.
Nous ne pouvons naturellement pas attribuer
ce déplacement uniquement à l’apport des TI,
car la volonté de la haute direction de se doter
d’un service des achats appliquant des pratiques de gestion largement reconnues avait été
un facteur déterminant. Par ailleurs, cette
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volonté a créé une impulsion, mais il était
nécessaire d’obtenir une adhésion de l’organisation au changement, par exemple, par le
biais du système à double signature. L’existence de plusieurs facteurs d’impulsion va
dans le sens des travaux de Tchokogué et Nollet (1998), ainsi que ceux de Johnson et Leenders (2004) qui avaient déjà identifié plusieurs
des facteurs expliquant l’évolution d’un service des achats.
Notre analyse vise à cerner comment les TI
ont soutenu ces efforts de reconfiguration de
la gestion des achats, mais aussi comment les
TI peuvent aider à dégager de nouvelles configurations organisationnelles sortant de l’ornière centralisation ou décentralisation. À
partir de la grille de Keough (1993), on réalise
que la progression d’un service en termes de
maturité peut prendre plusieurs années, ce qui
est normal, puisque cette évolution s’accompagne de plusieurs changements (définition
de politiques et procédures, embauche de personnel, etc.). Dans ce cas-ci, les dirigeants de
la société XYZ ont initié des changements à la
structure organisationnelle entre autres par le
développement d’un service des achats
davantage centralisé. C’est à l’intérieur de ces
nouvelles structures que les gestionnaires responsables des achats ont décidé, conjointement à l’intérieur du BOS, des technologies
qui soutiendraient leurs actions. Bien que tous
les chercheurs ne s’accordent pas sur ce point
(Boschken, 1990 ; Krishnamurthy et Yauch,
2007), en soi, ce résultat rejoint la vision classique de Chandler (1962) voulant que la structure découle de la stratégie. Dans ce
contexte-ci, les technologies d’information
deviennent donc un outil pour concrétiser la
stratégie (enabler) et, dans le cas de la société
XYZ, une façon de gérer plus efficacement les
achats.
Dans le cas de l’encadrement local, il est toutefois intéressant de noter le délai de deux ans
entre le moment où la structure de gestion des
achats fut mise sur pied et le moment où les
technologies d’information furent déployées.
Bien que notre étude ne s’attarde pas à l’analyse de la durée des différentes étapes, ce délai
fut jugé long par quelques-uns des gestionnaires en place. En fait, ces derniers avaient
sous-estimé l’impact des facteurs autres que
la technologie qui peuvent avoir une incidence sur la structuration d’un service des
achats.
Par ailleurs, notre deuxième question de
recherche vise à mesurer l’impact des TI sur
les grands paramètres d’une structure organisationnelle. Pour répondre à cette question de
recherche, nous avons déjà précisé que notre
analyse adoptait les trois dimensions d’une
structure organisationnelle, qui sont par ailleurs souvent reconnues comme les plus
importantes (Dalton et al., 1980) : centralisation, formalisation et spécialisation. Stanley
(1993) avait retenu ces mêmes dimensions
pour étudier la performance des structures de
gestion des achats. Plus récemment, Kim
(2007) avait traité lui aussi sensiblement des
mêmes variables pour analyser les configurations organisationnelles de la gestion de la
chaîne logistique. Le tableau 1 présente les
grandes conclusions de nos observations,
détaillées dans les prochaines sections.
La centralisation
Le cas fait nettement ressortir le caractère
multiforme de cette première dimension,
alors que l’on retrouve différents niveaux de
centralisation. Il tend à supporter les propos
de Foster et Flynn (1984) qui concluaient que
grâce aux TI, les gestionnaires n’avaient plus
à limiter leur choix de structure organisationnelle entre les deux options traditionnelles de
centralisation et décentralisation, de nouvel-
Tableau 1 : Impacts des TI sur trois des dimensions des structures organisationnelles
Centralisation
- Les TI permettent de scinder les décisions d’exécution et celles de contrôle.
- Les décisions d’exécution peuvent êtres mieux réparties entre les différents paliers
(opérationnels, direction locale, direction générale) et éclatées dans différentes zones
géographiques.
- Cette répartition est possible et préserve la cohérence d’action de l’organisation, car
les TI peuvent centraliser le contrôle.
Formalisation
- Les TI renforcent le formalisme, car un contrôle plus étroit assure le respect des
règles organisationnelles.
- Ce formalisme est rendu possible par la centralisation des décisions d’acquisition
des TI, ce qui assure une normalisation des systèmes d’information et permet d’éviter
la multiplication des pratiques.
Spécialisation
- Les TI renforcent quelque peu la spécialisation, car les décideurs peuvent se
concentrer sur les décisions d’exécution ou de contrôle, puisque les TI permettent de
scinder les deux volets.
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les possibilités s’ouvrant à eux. La recherche
de nouvelles options semble nécessaire
puisque dans l’environnement d’affaires turbulent des dernières années, une organisation
a intérêt à tirer profit des bénéfices de la centralisation (le contrôle des coûts) et de la
décentralisation (vitesse de réaction) (Dubois
et Wynstra, 2005).
En reprenant les propos de Kirkwood et al.
(2005), le cas dégage deux niveaux de centralisation, un premier qui est global pour l’ensemble de l’entreprise et un second, local
(figure 2). La centralisation globale s’articule
autour du Groupe Achat du siège social ou
encore, par l’entremise du BOS, qui définit les
tâches, les processus et les solutions technologiques qui seront adoptés par les unités locales. En soi, ces choix concordent avec les deux
premiers niveaux de décisions identifiés par
Kirkwood et al. (2005), la définition des politiques, des orientations et des objectifs stratégiques, ainsi que la configuration des
processus et le choix des moyens. Comme
nous le verrons, la centralisation de ces décisions renforce les deux autres dimensions
organisationnelles (formalisation et spécialisation), ce qui rejoint les observations de
Stanley (1993).
Le second niveau de centralisation est local, la
négociation des contrats étant faite par un
service unique. Parallèlement, il y a une
décentralisation des activités de lancement
des commandes et de suivi auprès des services
requérants. L’opérationnalisation quotidienne est scindée entre une unité administrative
centralisée et des services décentralisés. Toutefois, même cette dernière affirmation doit
être nuancée. En effet, le Groupe Achat ou le
BOS peuvent négocier des contrats pour l’ensemble des filiales de l’entreprise. Donc, une
part des opérations quotidiennes peut être réalisée au niveau d’une unité centrale globale.
Cette répartition des responsabilités de gestion des achats entre différents niveaux administratifs est rendue possible grâce aux TI, car
cette répartition ne doit pas conduire à des
actions désordonnées où chaque palier prendrait des décisions isolées sans se soucier des
impacts aux autres niveaux de l’organisation.
Les systèmes comme Ariba Buyer, Peoplesoft
Purchasing ou la base de données centralisée
des contrats du BOS sont des outils technologiques permettant de contrôler les décisions
prises par différents acteurs. De tels bénéfices
avaient été mis en évidence par Boulianne
(2005) lorsqu’il traitait des cartes d’approvisionnement (p-cards) comme outils de con-
Figure 2 : Les niveaux de centralisation des achats chez XYZ
trôle. En soi, ce cas illustre les propos de Lau
et al. (2001) qui précisaient que les TI permettaient une décentralisation de la prise de décisions et une centralisation du contrôle.
Précisons toutefois que dans le cas de la
société XYZ, les décisions décentralisées ont
un caractère très opérationnel.
Par ailleurs, l’expérience de la société XYZ
permet d’apporter une autre nuance à la
notion de centralisation. Cette dernière est
souvent associée à l’idée qu’un service des
achats soit localisé au siège social (Kim,
2007) et, par conséquent, éloigné physiquement des services requérants. Vu que la
décentralisation évoque le contraire, les acheteurs sont dans ce second cas mieux à même
de saisir différentes nuances associées à l’utilisation d’un article (saisonnalité, problèmes
de qualité, enjeu de formation, etc.), considérations qui pourront être intégrées lors des discussions avec les fournisseurs. Mais la
proximité peut aussi l’être avec les sources
d’approvisionnement, ce qui permet alors aux
acheteurs de mieux saisir l’évolution du marché fournisseur et ainsi d’adapter les stratégies d’achat en conséquence. À cet effet, le
cas XYZ met en évidence une centralisation
de certains mandats de négociation, parallèlement à une déconcentration où certains de ces
mandats globaux sont gérés par des services
locaux des achats. Huguet (2003) décrit ce
concept de déconcentration, soit une localisation physique des acheteurs près des requérants au lieu de les localiser dans un seul site.
Il y a donc une différence entre l’unité qui
prend une décision et sa localisation géographique. Ainsi, certains dossiers peuvent être
centralisés entre les mains d’un acheteur sans
qu’il ne soit localisé au siège social. Les TI
permettent donc de profiter simultanément
des bénéfices de la centralisation et de la
décentralisation.
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La formalisation
Comme nous l’avons évoqué précédemment,
la formalisation est une seconde dimension
fortement mise en évidence à l’intérieur du
cas; après tout, il y a eu une normalisation des
descriptions de tâches, des indicateurs de performance et des logiciels de gestion.
Dewett et Jones (2001) avaient précisé que les
TI favorisaient la formalisation en enregistrant des données sur les événements se
déroulant dans les organisations, ce qui facilitait le contrôle des comportements, rendant
ainsi plus aisé le respect des règles organisationnelles et l’identification des comportements déviants. À la société XYZ, le
déploiement des logiciels de gestion des
achats va dans le sens des observations recensées dans les écrits : il renforce la formalisation des processus d’achat au niveau local en
diminuant les occasions pour les requérants
de retenir un fournisseur qui n’est pas lié par
un contrat cadre. De plus, les logiciels imposent des procédures de travail, balisant donc
ainsi les pratiques et accentuant la formalisation.
La formalisation du choix de logiciels peut
également être associée à un effort d’intégration. Giachetti (2004) avait relevé que l’intégration des systèmes était l’un des défis les
plus significatifs des entreprises, puisque le
fractionnement de l’organisation en de multiples sous-unités possédant leur propre système d’information pouvait complexifier les
efforts de coordination. En centralisant le
choix des logiciels de gestion des achats et des
indicateurs de performance, la haute direction
de XYZ facilite les comparaisons entre les différentes filiales, ce qui permet d’identifier les
acteurs les plus performants dans certains
domaines, facilitant du même coup la spécialisation des dossiers.
La spécialisation
Bien que la réorganisation des activités d’achat de la société XYZ se déroule à des vitesses variables selon les filiales et que le rôle du
BOS se raffinera au cours des prochaines
années, il demeure que l’approche utilisée
vise une division du travail, afin que l’exécution des principales tâches de gestion des
achats soit confiée à des experts dans le
domaine, retirant donc des mains des requérants la réalisation de la grande majorité des
activités liées aux achats.
À l’intérieur des services des achats des différentes filiales, il existe aussi une certaine
forme de spécialisation, car les acheteurs sont
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en charge de dossiers spécifiques. On constate
également une spécialisation globale, car certaines filiales se verraient attribuer la gestion
de mandats pour l’ensemble du groupe et cela,
sur la base de leur performance antérieure.
Donc, les mécanismes de contrôle des TI peuvent prévenir des problèmes ou des comportements déviants. La nature préventive de ces
contrôles évite les investissements dans des
mesures correctives (Boulianne, 2005). Dans
ce contexte, les acheteurs peuvent concentrer
leurs efforts sur la gestion des achats et éviter
d’être des auditeurs internes des comportements d’achat des requérants.
Synthèse des observations et impacts
sur la chaîne logistique
Les conclusions que nous venons de formuler
sont-elles similaires pour la gestion de la
chaîne logistique ? Pour répondre à cette
question, il nous semble pertinent de relater
l’expérience de la société IBM au niveau des
structures des achats et de la logistique. En
2002, Sam Palmisano prend la direction
d’IBM et il souhaite que l’entreprise soit
davantage orientée sur la demande. Une des
solutions à cette stratégie a été de constituer
une vice-présidence exécutive en supply
chain qui regroupait entre autres les activités
de logistique, de production, de gestion des
commandes (order fulfillment) et de gestion
des achats (Radjou, 2005). Ce mouvement de
centralisation était le point culminant d’initiatives prises dans d’autres fonctions. Ainsi, au
milieu des années 1990, un effort important
de réorganisation de la fonction « achats »
avait mené à une centralisation de cette dernière et à un déploiement de différentes solutions technologiques. Quelques années plus
tard, la fonction logistique connut le même
processus de centralisation (Anonyme, 2006).
Par le fait même, nous voyons bien que
lorsque les fonctions « achats » et « logistique » sont distinctes, elles ne sont pas nécessairement centralisées ou décentralisées au
même moment. Ceci rend d’autant plus pertinents nos propos relatifs quant à la maturité
d’un service et au fait que le domaine de la
logistique puisse s’appuyer sur des leçons
vécues en achats.
À l’intérieur d’un service intégré de gestion
de la chaîne logistique, il y aura des fonctions
spécialisées (achat, production, distribution)
qui vont émerger. Le fait que les principales
fonctions de la chaîne logistique soient
regroupées sous une seule entité administrative n’offre aucune garantie d’une plus grande
efficacité, chacune des fonctions pouvant agir
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dans son meilleur intérêt au détriment d’une
finalité d’ensemble (Dewitt et Jones, 2001).
Cependant, nous sommes d’avis que la
dimension de spécialisation prend une plus
grande importance dans le cas des structures
de la chaîne logistique. Hitt et Brynjolfsson
(1997) avaient déjà précisé que les TI améliorent la coordination et la communication à
l’intérieur de la firme. Les gestionnaires
d’IBM ne se sont pas contentés de ce rôle traditionnel des TI. Ils ont reconnu les dangers
de la spécialisation. Ils croient que IBM a pu
éviter un tel piège en développant une série
d’indicateurs de performance qui étaient
communs à chacune des fonctions (Anonyme, 2006). Ces indicateurs communs
étaient liés aux paramètres stratégiques de
l’entreprise, entre autres à la satisfaction des
clients et aux économies (Radjou, 2005).
Conclusion
Selon Wang (2001), les technologies de l’information jouent un rôle considérable en
appuyant une structure organisationnelle pour
qu’elle puisse traiter efficacement une masse
de données. Le cas étudié supporte justement
ce point de vue en mettant en plus l’accent sur
le fait que les TI soutiennent la mise en œuvre
de la stratégie d’achat. En soi, cette constatation offre une réponse à notre première question de recherche. Il demeure qu’au cours des
dernières décennies, ce rôle des TI s’est
accentué entre autres grâce à l’accélération
des innovations technologiques, mais également à une utilisation plus éclairée du potentiel des TI. Notre étude portait aussi sur les
impacts des décisions associés au déploiement des systèmes d’information sur les trois
dimensions de la configuration organisationnelle des achats. En retenant une organisation
qui réorganise ses activités d’achat, nous
avons été à même d’étudier les impacts des
décisions reliées aux systèmes d’information
sur trois des dimensions les plus importantes
de la configuration organisationnelle des
achats (Stanley, 1993).
Notre propos, à l’exemple de ceux de Bloomfield et Coombs (1992), de Lau et al. (2001)
ainsi que de Wang (2001), met en évidence
que la centralisation/décentralisation implique deux grands processus : l’exécution, soit
la prise de décisions stratégiques ou opérationnelles et le contrôle, afin de prévenir ou
corriger des actions déficientes. Tyndall et al.
(1998) suggéraient de scinder les achats entre
les activités opérationnelles et celles stratégiques. Ce que notre étude tend à démontrer est
que cette réflexion devrait se faire entre les
activités d’exécution et celles de contrôle. Les
TI favorisent se type de découpage. Dans ce
contexte, la formalisation devient importante
puisqu’elle conduira à une question majeure :
quelles sont les règles organisationnelles qui
devront être respectées (et contrôlées)? Notre
cas réaffirme l’importance de ces aspects tout
en démontrant que la structure de gestion des
achats ne se limite pas à la seule dimension de
centralisation/décentralisation. À cet effet,
notre description de l’expérience d’IBM
illustre que le contrôle est une dimension d’un
intérêt majeur dans la mise en œuvre d’un service intégré de gestion la chaîne logistique qui
se composera inévitablement de plusieurs
unités administratives spécialisées.
Nos observations peuvent être reliées à celles
de Kim (2007), qui souligne qu’une formalisation et une centralisation d’un service de
gestion de la chaîne logistique peut freiner les
efforts d’intégration de la chaîne logistique
avec les fournisseurs et les clients externes.
L’auteur convient qu’une formalisation et une
centralisation plus poussées sont nécessaires
pour parvenir à une intégration interne, mais
qu’accentuer ces caractéristiques peut devenir
contreproductif avec les partenaires d’affaires
externes. Nous croyons que l’expérience de
XYZ illustre qu’il est possible d’éviter les
excès identifiés par Kim (2007). Une forme
d’autonomie pourrait être accordée aux
acteurs à l’interface avec les partenaires externes, une autonomie leur permettant de réagir
rapidement aux demandes ou aux changements de l’environnement. Les technologies
de l’information pourraient assurer un contrôle centralisé, assurant ainsi une cohérence
globale aux actions de l’entreprise.
Naturellement, l’étude est basée sur un seul
cas. Par exemple, malgré l’analyse faite pour
cette situation, cette situation s’ajoute aux
autres déjà connues et supportant la thèse que
la structure est la résultante d’une stratégie.
Aussi, des enquêtes futures pourraient reproduire la présente analyse afin de valider les
conclusions auxquelles nous en sommes arrivés. De nouvelles études pourraient également analyser plus spécifiquement les
structures de la chaîne logistique.
En terminant, nous ne voulons pas donner
l’impression de surestimer le rôle des TI dans
le déploiement d’une structure de gestion des
achats. Comme le soulignent Buttermann et
al. (2008), il demeure que les TI constituent
l’une des variables permettant au gestionnaire
de maintenir l’équilibre entre les différentes
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forces d’impulsion de l’organisation. Cependant, tant le fait d’accorder une importance
excessive que trop restreinte à l’une de ces
variables peut avoir des conséquences graves
sur la capacité d’une organisation à réaliser
une performance supérieure. Par ailleurs, ce
cas a mis en lumière la recherche d’une contribution appropriée des TI au succès du service
des achats d’une grande organisation. Une
réflexion similaire doit être réalisée quant aux
structures de gestion de la chaîne logistique de
l’entreprise, car les différentes tensions
s’exerçant (contrôle vs autonomie, besoins
locaux vs économie d’échelle) sont présentes
dans toute la chaîne et les TI pourraient permettre de réaliser un juste équilibre.
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