le soutien social et l’ajustement émotionnel, ceci pour
les 133 patientes atteintes d’un cancer du sein concer-
nées par cette deuxième étude. Le soutien émotionnel
et le statut socio-économique agissent directement sur
les stratégies de coping qui sont à leur tour liées à
l’ajustement psychosocial mesuré à 3, 6, 9, et 12 mois.
En ce qui concerne la survie, nous avons recensé sept
études prospectives ou quasi-prospectives, menées
entre 1979 et 1992, qui ont consisté à suivre pendant
plusieurs années un nombre important de sujets can-
céreux (COUSSON-GÉLIE, 2001). Toutes ces études
sont unanimes : le soutien social perçu est significati-
vement associé à une évolution favorable du cancer et
c’est surtout le soutien émotionnel apporté par la
famille, par le conjoint ou par les collègues de travail
qui semble être le plus prédictif.
6. VALEUR ADAPTATIVE DES STRATÉGIES DE
COPING
Certaines études ont montré que le coping centré sur
le problème était associé à une survie plus longue à 5,
10 et 15 ans (GREER et al., 1979, 1990; PETTINGALE
et al., 1985, WIRSHING et al., 1985). Hélas, ce résultat
n’a pas été confirmé par l’étude de WATSON et al.
(1999) qui a répliqué cette recherche auprès de 578
femmes atteintes d’un cancer du sein (l’étude initiale
de GREER et ses collaborateurs ne comportait que 69
patientes). Ces auteurs ne trouvent, en effet, aucune
association entre l’esprit combatif et la survie à 5 ans.
Dans une recherche quasi-prospective, menée auprès
de 75 patientes, nous n’avons pas observé non plus de
relation significative entre un coping centré sur le pro-
blème et la survie à deux ans (COUSSON-GÉLIE,
1997).
Par ailleurs, certaines études n’ont pas montré le rôle
salutogène du coping centré sur le problème sur l’ajus-
tement émotionnel. Au contraire, cette stratégie s’est
révélée associée à un mauvais ajustement émotionnel
(CARVER et al., 1993; MANNE et al., 1994;
COUSSON-GÉLIE, 2000). Ce résultat est surprenant.
On s’attendrait plutôt à trouver que les patientes qui
affrontent directement le problème, qui recherchent
des solutions et de l’aide auprès de leur entourage
aient moins de problèmes physiques et psychologiques
que les autres. LAZARUS et FOLKMAN (1984) émet-
tent l’hypothèse que le coping centré sur le problème
ne serait efficace que lorsque la situation est objective-
ment contrôlable. Or, être atteinte d’un cancer est un
événement qui est objectivement peu contrôlable.
L’évitement cognitif et comportemental serait égale-
ment associé à un mauvais ajustement émotionnel
(IRVINE et BROWN, 1984; BLOOM et SPIEGEL, 1984,
MANNE et al., 1994). CARVER et al. (1993) a montré
par une analyse de pistes causales que les stratégies de
déni, d’acceptation et de désengagement comporte-
mental jouaient un rôle médiateur dans la relation
entre l’optimisme et la détresse ultérieure. En revanche,
aucune étude n’a montré son lien avec l’évolution de
la maladie.
Le contrôle émotionnel est associé à une évolution
défavorable du cancer du sein (DEROGATIS et al.,
1979; JENSEN, 1987; LEVY et al., 1988) et à un mau-
vais ajustement émotionnel (LAVERY et CLARKE,
1996). De même, L’impuissance-désespoir est liée à
une évolution défavorable de la maladie (WIRSCHING
et al., 1982; JENSEN, 1987; COUSSON-GÉLIE, 1997;
WATSON, 1999) et à un mauvais ajustement émotion-
nel (MANNE et al., 1994; LAVERY et CLARKE, 1996,
COUSSON-GÉLIE, 2000).
Toutefois, certaines études ne trouvent pas d’associa-
tion entre les stratégies de coping spécifiques et l’évo-
lution du cancer (HISLOP et al., 1987; BUDDEBERG
et al., 1996). GERITS (1997) a essayé de synthétiser les
résultats contradictoires de ces études en réalisant une
méta-analyse à partir de 6 études. Les résultats mon-
trent que les stratégies de coping centrées sur l’émo-
tion, en particulier l’impuissance, prédisent une évolu-
tion défavorable du cancer du sein.
CONCLUSION
Les recherches menées auprès des patients cancéreux
ont désormais permis d’identifier, en partie, parmi les
stratégies de coping spécifiques mises en évidence
chez ces sujets, celles qui ont un impact défavorable
sur l’état somatique et émotionnel des patients.
L’impuissance-désespoir semble s’avérer particulière-
ment nocive. D’après la recherche que nous avons
menée auprès de 75 patientes atteintes d’un cancer du
sein (COUSSON-GÉLIE, 1997; 2000), les stratégies
d’ajustement rendent compte d’environ 50% de la
variance de la qualité de vie et de 8% de l’évolution
de la maladie (à deux ans).
Ceci suggère des implications pratiques et thérapeu-
tiques diverses. En effet, pouvoir identifier, parmi les
patients atteints d’un cancer, ceux qui présentent un
pattern de stratégies de coping «à risque» devrait per-
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Recherche en soins infirmiers N° 67 - décembre 2001
STRATÉGIES DE COPING ÉLABORÉES POUR FAIRE FACE À UNE MALADIE GRAVE :
L’EXEMPLE DES CANCERS