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lité totale et de la mortalité cardiaque, comparativement à la morta-
lité cardiaque subite, était le plus grand nombre de décès par
récidive d’infarctus observé dans le groupe amiodarone, soit 10
morts contre 3 pour le groupe placebo. Trente-huit pour cent des
patients traités à l’amiodarone ont dû interrompre le traitement à
cause d’effets indésirables et d’autres motifs, comparativement à
21 % pour ceux recevant le placebo. Le taux de toxicité à l’amio-
darone, jugé grave ou menaçant pour la vie du patient, était faible,
avec un total de 3 morts par fibrose pulmonaire dues à l’amio-
darone contre une seule de même cause pour le groupe placebo.
D’intéressantes analyses de sous-groupes de patients surveillés par
Holter, ont révélé un taux de mortalité de 20 % pour ceux ayant
plus de 10 extrasystoles ventriculaires par heure, contre 10 % pour
ceux en ayant moins de 10 par heure, confirmant encore une fois
que les extrasystoles ventriculaires accroissent le risque de mort
subite et de mort cardiaque. Les bêta-bloquants, administrés avec
l’amiodarone, semblent avoir eu un effet très bénéfique; le rapport
des risques de mortalité entre l’association amiodarone et bêta-
bloquants et le duo placebo et bêta-bloquants était de 0,5. En
l’absence de bêta-bloquants, le taux de mortalité était semblable
pour les groupes amiodarone et placebo. Même s’il s’agit d’une
évaluation a posteriori, ce résultat suggère que, globalement, les
patients bénéficient non seulement d’un traitement aux bêta-
bloquants, mais retirent également un avantage supplémentaire de
l’amiodarone.
Le DrJulian a conclu que l’administration de l’amiodarone,
comme on s’y attendait, a entraîné une réduction de 35 % de la
mortalité cardiaque subite; cependant, et cela n’était pas prévu, ce
résultat ne s’est pas traduit en une réduction de la mortalité
cardiaque ou totale. Il a fourni quelques explications possibles :
l’hétérogénéité individuelle dans les groupes de l’amiodarone et du
placebo, un nombre de décès supérieur à celui prévu pour d’autres
causes de décès influencées par l’amiodarone, le hasard, et un effet
indésirable possible, bien que peu probable, de l’amiodarone sur
la mortalité autre que par arythmie. On notera que jusqu’à présent,
le taux de mortalité autre que par arythmie n’était pas supérieur
dans les études à grande échelle sur l’amiodarone, comme
CAMIAT, CHF STAT et d’autres. Il a ajouté que les patients dont
la fréquence cardiaque est plus élevée, et spécialement ceux dont
la fréquence au repos dépasse 95 b.p.m., semblent le plus béné-
ficier du traitement à l’amiodarone. Il a conclu en affirmant que,
selon les résultats de l’essai EMIAT, l’amiodarone ne peut être
recommandée comme prophylaxie systématique pour les patients
asymptomatiques dont les fractions d’éjection sont faibles à la suite
d’un infarctus du myocarde, mais que si un traitement aux antia-
rythmiques est indiqué pour d’autres raisons, elle démontre une
bonne innocuité et apparaît efficace pour réduire la mortalité par
arythmie.
Le DrJohn Cairns, actuellement doyen de la faculté de
médecine de l’université de la Colombie-Britannique et membre du
comité de direction du CAMIAT (Canadian Amiodarone
Myocardial Infarction Arrhythmia Trial), a traité des résultats de cet
essai randomisé comparant l’amiodarone à un placebo. Les patients
du CAMIAT (n = 1202) présentaient tous plus de 10 extrasystoles
ventriculaires par heure, à l’examen des résultats obtenus par Holter,
entre 6 et 45 jours après un infarctus du myocarde. Ils ont été
répartis au hasard entre deux groupes, l’un recevant un placebo et
l’autre 10 mg d’amiodarone par jour par kg de poids corporel pour
une durée de 2 semaines; par la suite, ils ont reçu une dose d’entre-
tien de 400 mg par jour, réduite graduellement en se basant sur la
disparition des extrasystoles ventriculaires constatées par Holter. À
la fin de 4 mois d’essai, la dose moyenne était de 300 mg et à la fin
de 12 mois d’essai, elle était de 200 mg par jour. Contrairement à
l’EMIAT, la cible visée dans cet essai était la mort cardiaque subite
ou la réanimation par défibrillation ventriculaire fondée sur une
analyse d’efficacité du traitement (chez des patients qui recevaient
de l’amiodarone ou avaient cessé le traitement depuis moins de 3
mois). Le taux de mort subite ou de réanimation par défibrillation
ventriculaire était de 6 % pour le groupe placebo contre 3,3 %
pour le groupe amiodarone après un traitement de 2 ans, soit une
réduction du risque de 48,5 % (p = 0,016, valeur unilatérale).
L’analyse du projet thérapeutique, plus conservatrice que la précé-
dente, a révélé une réduction de 6,9 à 4,5 % pour l’amiodarone,
soit une diminution du risque relative de 38 %. Le même type
d’analyse démontrait que la réduction du risque relatif de mortalité
totale était diminuée, mais non de façon significative, de 18,3 %
(p = 0,129). Globalement, la mortalité était de 11,8% après 2 ans
chez les patients du groupe placebo, contre 9,9 % pour les patients
qui recevaient de l’amiodarone. Dans cet essai, les morts non
causées par arythmie étaient pour ainsi dire aussi fréquentes dans
les 2 groupes. L’amiodarone, tel que prévu, était très efficace pour
l’élimination des extrasystoles ventriculaires, avec une réduction
presque totale des extrasystoles ventriculaires chez 84 % des patients
après 4 mois. Le traitement a été interrompu après 2 ans chez 28 %
des patients du groupe placebo contre 42 % pour le groupe amio-
darone, soit une différence de 14 % en défaveur de l’amiodarone; cet
écart est presque entièrement dû à un taux plus élevé d’effets
indésirables nécessitant l’interruption du traitement (13 % pour le
placebo contre 26 % pour l’amiodarone). Cependant, il s’est
produit quelques effets indésirables menaçant la vie des patients,
et le retrait provoqué par la toxicité pulmonaire était de 3,8 % pour
l’amiodarone contre 1,2 % pour le placebo; il n’y a eu aucun décès
par toxicité pulmonaire. La toxicité pour le SNC était de 3,1 %
pour l’amiodarone contre 0,8 % pour le placebo, et la proarythmie
était plus fréquente pour le placebo (3,0 % contre 0,3 % pour
l’amiodarone). Même si l’hypothyroïdie biochimique asymptoma-
tique était fréquente, la toxicité thyroïdienne symptomatique s’est
par contre rarement présentée.
Le DrCairns a conclu que l’amiodarone était efficace pour
réduire la mortalité par arythmie ou les cas de réanimation par
défibrillation ventriculaire à la suite d’un infarctus aigu du
myocarde, chez des patients souffrant d’extrasystoles ventriculaires