Insuffisance cardiaque en 2007 Dr Y Moreau L insuffisance cardiaque (IC) peut se définir comme étant l incapacité du cœur à assurer dans des conditions normales, le débit sanguin nécessaire aux besoins métaboliques et fonctionnels des différents organes. Ce n est plus seulement une maladie de la pompe cardiaque mais avant tout une maladie neuro-hormonale. EPIDEMIOLOGIE La prévalence de l IC augmente avec l âge . Selon l étude de Framingham : - 0,8 % entre 50 et 60 ans - 4,9 % entre 70 et 80 ans - 9,1 % entre 80 et 90 ans . La maladie coronaire représente 50 % des causes, les autres étant les myocardiopathies, valvulopathies, HTA et diabète. 60 % sont dues à des dysfonctions systoliques et 40 % à des dysfonctions diastoliques. Son pronostic a beaucoup changé ces 20 dernières années mais l IC reste une maladie grave. Pour l IC systolique, la mortalité à un an est - 5 % si moins de 65 ans et classe I - 25 à 30 % si moins de 65 ans et classe IV - plus de 50 % si plus de 70 ans et classe IV. En moyenne, la mortalité de l IC est 2 à 3 fois plus importante que celle d un sujet de même âge indemne. 1 patient sur 2 ou 3 décède de mort subite. La mort subite rend compte de 64 % des décès en classe II et seulement 33 % en classe IV L IC consomme 2 à 3 % du budget de la Sécurité Sociale. Améliorations diagnostiques. 1- Le BNP c est un peptide sécrété par les myocites du VG étirés en réponse à une surcharge de pression ou volume. - < 100 pg / ml : pas d IC - > 300 pg / ml ( 450 si âgé) :IC probable Il a aussi une valeur pronostic en période de stabilité. 2- l écho-doppler cardiaque Détermine des facteurs de gravité ( FE< 30 %, VG dilaté > 30mm / m², TDE < 150 ms, PAPS > 50 mm Hg.) Permet de calculer les pressions de remplissage du VG (proche des P capillaires pulmonaires) par des indices écho-doppler. Permet de rechercher des asynchronismes inter et intra ventriculaires; Il guide le traitement médicamenteux mais aussi non médicamenteux ( Défibrillateur, triple chambre). 3 – L étude de la VO2 d effort L étude du pic de VO2 d effort permet de classer les IC en groupe de gravité croissante et de déterminer la date de la greffe ( pic > 20 ml/mn/Kg = classe A minime, 10 à 15 ml/ mn/Kg classe C , sévère = greffe). LES MEDICAMENTS DE L IC PRINCIPES ET BASES DU TRAITEMENT - On ne cherche plus à augmenter la force contractile du myocarde altéré. - On agit sur la part neuro-hormonale de l IC. - On cherche à éviter le remodelage ventriculaire et la fibrose myocardique. - Les diurétiques ne sont utiles que pour gérer la surcharge hydro-sodée. - Il faut accepter une part d insuffisance rénale fonctionnelle et d hypotension artérielle. Le traitement comporte toujours une restriction sodée et parfois hydrique, une surveillance régulière du poids ( 2 fois par semaine); Traitements de l IC : - de base : IEC/ARA 2, bétabloquants - souvent : diurétiques, anti aldostérones, digitaliques - parfois : amiodarone, AVK, aspirine, nitrés. Médicaments à éviter dans l IC : - anti arythmiques autres qu amiodarone - ICA ralentisseurs - vasoconstricteurs ( nasaux) - AINS, corticoïdes - lithium, antidépresseurs tricycliques - glitazones. LES IEC Ils ont permis : - une baisse de 23 % de la mortalité globale - une baisse de 31 % de la mortalité par IC, IDM,MS - une baisse de 35 % du critère hospitalisation et décès Principes : - introduction prudente - augmentation progressive des doses sous contrôle de la PA et de la créatininémie - maximum des doses tolérables - tolérer une part d insuffisance rénale ( 180 à 200 micromol/L de créat. ou clairance à 30 ou 40 ml/mn) - peuvent être utilisés en cas d IR chronique - Si hypotension, réduire d abord les diurétiques. - indiqués dès le stade I NYHA LES ARA2 Pas plus efficaces que les IEC mais effet comparable. Indiqués en cas d intolérance aux IEC ou en adjonction en cas d efficacité partielle de ceux-ci. Trois ont fait leurs preuves mais un seul a l AMM en France ( candésartan ) à la suite du programme Charm. C est la seule molécule ARA 2 qui réduit les hospitalisation pour IC en cas d IC diastolique. LES BETABLOQUANTS D après CIBIS 2, ils permettent une réduction de : - 29 % des décès CV - 35 % de la mortalité globale - 36 % des hospitalisations pour IC - 45 % des morts subites. Traiter 23 patients pendant 1 an sauve une vie. 4 bétabloquants sont efficaces et autorisés: - bisoprolol, carvédilol, tartate de métoprolol, nebivolol. Principes : - débuter par une microdose sous surveillance stricte de la PA et de l ECG. - augmentation progressive par paliers de 10 à 15 jours puis un mois pour atteindre la dose maximale tolérée. - Sur IC stable, indiqués en stade II ou III - en cas de mauvaise tolérance, revenir à la dose précédente - contre-indiqués en cas d asthme et d IC décompensée. LES ANTIALDOSTERONES Dans l étude RALES, la spironolactone a permis une baisse de: - 30 % de la mortalité - 31 % des décès CV - 29 % des morts subites - 35 % des hospitalisations pour IC. Principes : - associer aux IEC pour bloquer le SRAA - petite dose initiale et augmentation progressive - dose entre 12,5 et 50 mg/J - sous surveillance de la Créat. et de la kaliémie ( 8e J, à 1 mois puis tous les trois mois - à interrompre si creat > 180 micromoles/L (clairance créat.< 30 ml/mn) ou Kaliémie >5,5 mmole/L - indiquées dans les stades III et IV LES DIURETIQUES Aucune étude n a prouvé leur avantage en terme de morbimortalité mais ils restent indispensables pour réguler l équilibre hydro-sodé du cardiaque. Principes : - diurétiques de l anse surtout - par voie IV en aigüe, per os en chronique - mauvaise absorption intestinale en IC congestive - fortes doses initiales puis diminuer vite - minimum utile en chronique voire pas du tout - surveiller la biologie et le poids - les thiazidiques peuvent être associés en cas de poussées congestives. LES AUTRES TRAITEMENTS Les digitaliques ils n améliorent pas le pronostic vital mais améliorent le pronostic fonctionnel. ils réduisent les hospitalisations pour IC surtout en FA. faibles doses recommandées chez la personne âgée. L amiodarone inotrope neutre, seul anti-arythmique utilisable en cas de FE basse utile pour prévenir le passage en FA, sur des ESV dangereuses ou TV inutile en cas de FA permanente difficile à utiliser avec les bétabloquants et digitaliques surveillance TSH( 1/6 mois) et thorax (1/an) Les nitrés souvent utiles en phase aigüe améliorent la pré-charge et les symptomes. Les AVK et l aspirine envisagés parfois en rythme sinusal si FE très basse surtout si patient en FA produits à longue demi vie INR entre 2 et 3 contrôlé 1 fois par mois ou toutes les 3 semaines, 4 à 5 jours après toute modification de dose aspirine si cardiopathie ischémique. LA RESYNCHRONISATION VENTRICULAIRE Au cours de l insuffisance cardiaque systolique, le VG se dilate, la force de contraction diminue, des troubles conductifs apparaissent (QRS élargis) du fait de la fibrose, la cavité ventriculaire se remodèle. Cela entraine des désynchronisations auriculo ventriculaires, inter ventriculaires et intra ventriculaires. Tout cela avec une perte de rendement myocardique et l apparition d insuffisance mitrale Principe de la resynchronisation : Utiliser un stimulateur triple chambre pour resynchroniser les cavités cardiaques en s aidant pour le réglage de l échodopller cardiaque. Une sonde est placée dans le VG par le sinus coronaire Une sonde dans le VD au milieu du septum Une sonde dans l OD. Résultats : Amélioration du rendement myocardique sans augmentation de la consommation d O2 Amélioration fonctionnelle du stade NYHA Augmentation de la FE Diminution de l insuffisance mitrale Diminution des hospitalisations pour IC Diminution de la mortalité ( CARE HF )++ Peuvent être associés au défibrillateur ++ 30 à 40 % des patients ne sont pas répondeurs sans que l on sache pourquoi. Il nous manque des critères prédictifs positifs ( echodoppler cardiaque?) LES DEFIBRILLATEURS IMPLANTABLES Base et principe : La mort subite (MS) est responsable de 30 à 50 % des décès de l IC, surtout dans les stades précoces. L idée est d implanter en sous cutanée un défibrillateur miniaturisé, le plus souvent couplé à un stimulateur cardiaque. Il surveille en permanence le cœur et peut délivrer un over drive ou un choc électrique en cas de TV ou FV Résultats Sont clairement validés par de nombreuses études aussi bien pour la cardiopathie ischémique que pour la CMD. Ils sont pris en charges par la S. Sociale mais de ce fait dans des indications précises. Ils réduisent la mortalité chez les IC, par rapport aux traitements AA guidés par les études électrophysiologiques ou par l amiodarone avec ou sans bétabloquants.( SCEDHeft) Sont principalement indiqués en prévention primaire si FE<30 %, symptomatique ou pas, en cas d arrêt cardiaque récupéré, de TV syncopales. ASSISTANCE VENTRICULAIRE et GREFFE CARDIAQUE 1- assistance ventriculaire implantable ( cœur artificiel ) Elle ne concerne pratiquement que les patients échappant aux mesures précédentes et en attente de greffe. C est une pompe mécanique valvulée, branchée à la pointe du VG et en termino-latéral sur l aorte ascendante. Elle ne remplace pas le cœur mais assiste le VG défaillant. La pompe est implantée dans une poche pré-péritonéale reliée par des fils trans-cutanés à une batterie externe et un ordinateur de contrôle.( Novacor, TCI.) Elle permet le passage en stade I ou II, avec des patients ambulatoires. La durée moyenne d utilisation est de 40 à 120 jours (max 795 j). Les problèmes sont infectieux et thromboemboliques. 2 – La transplantation cardiaque Elle est en baisse actuellement ( < 400 / an ) en raison : - de la pénurie de greffons - des rejets aigües ou chroniques ( maladie des coronaires du greffon ) - des limites et des complications des immunosuppresseurs. Les résultats sont bons, 88 % de survie à 1 mois, 73 à 75 % à 1 an, 65 à 70 % à 3 ans. Indications actuelles de la greffe cardiaque : - Insuffisance cardiaque non contrôlable par le traitement médical. - Insuffisance cardiaque sévère avec pic de VO2 inférieur à 14 ml / kg / mn. - Ischémie sévère, stade IV, non cotrôlable par la revascularisation. - Troubles rythmiques ventriculaires graves non améliorables par les traitements validés. l AVENIR Il commence par la préservation de la fonction cardiaque : - contrôler tôt les facteurs de risques cardiovasculaires - thrombolyse ou angioplastie précoces dans l infarctus - revascularisation complète chirurgicale ou non - réadaptation des insuffisants cardiaques - l organisation des réseaux de soins Quid de la réimplantation des cardiomyocytes ? LES NOUVELLES MOLECULES A L ESSAI 1- les antagonistes de la vasopressine Ils réduisent le poids, la dyspnée, les oedèmes mais pas la morbi-mortalité CV ( Everst 4000 pts) 2- les analogues du BNP (néséritide et ulratide) ils réduisent la P cap des patients en OAP ou IC sévère mieux que les diurétiques classiques mais effet inconnu sur la morbi mortalité 3- les antagonistes des récepteurs A1 de l adénosine pourraient éviter l insuffisance rénale fonctionnelle induite par les diurétiques. 4- l EPO l augmentation trop rapide du taux d hémoglobine a montré un effet défavorable en terme de mortalité chez les patients insuffisants rénaux chroniques sévères et chez les cancéreux. En cours d évaluation dans l IC. 5- Autres La thalidomide qui agirait sur la FE et le remodelage Les statines ( Corona et Gissi-HF) Les vasodilatateurs ( dinitrate d isosorbide et hydralazineBidil ) chez l IC de race noire (polymorphisme de la NO synthase)