Il est important de réaliser sur la recoupe urétérale un exa-
men histologique extemporané pour éliminer un carcino-
me in situ. Si la recoupe est positive, les uretères doivent
être sectionnés en amont avec une nouvelle analyse
extemporanée de la recoupe. Effectivement, le risque de
récidive tumorale est élevé chez les patients présentant
une recoupe urétérale positive [34]. Dans de rares cir-
constances, il peut exister une dysplasie sévère ou un car-
cinome in situ envahissant la totalité de l’uretère d’un seul
ou voire des deux côtés. Dans ces cas exceptionnels où il
est impossible d’avoir une recoupe urétérale négative, il
est nécessaire soit de pratiquer une néphro-urétérectomie
totale unilatérale soit une réimplantation urétéro-iléale
malgré l’envahissement urétéral. Linker et Whitmore
[16], Johnson [14] ont rapporté des résultats surprenants
de faible taux de récidive tumorale chez les patients ayant
une réimplantation urétéro-iléale malgré une marge urété-
rale positive.
A ce stade, deux possibilités techniques existent : pour-
suivre l’intervention pour réaliser une cystoprostatecto -
mie par voie antégrade, ou aborder le plexus veineux de
Santorini afin de sectionner l’urètre pour réaliser une cys -
toprostatectomie par voie rétrograde.
•LACYSTOPROSTATECTOMIE PAR VOIE ANTÉGRADE :il
faut alors reprendre la dissection par mise en traction
des deux canaux déférents dont la face postérieure a
été disséquée le plus bas possible jusqu’aux ampoules
déférentielles au niveau des vésicules séminales.
-En suivant la face postérieure des deux canaux défé-
rents, on trouve alors facilement le plan de clivage qui
va permettre l’extrapéritonisation de la vessie puis la
dissection du plan inter-prostato-rectal. La dissection
bilatérale se rejoint sur la ligne médiane en sous-péri-
tonéal permettant d’isoler le dôme vésical et la calotte
péritonéale qui le recouvre (Figures 3 a, b, c). Un lacs
va être passé dans le tunnel ainsi ménagé en sous-péri-
tonéal et rétracté vers le haut. Une pince en cœur tire le
dôme vésical vers le haut et l’avant, le sac péritonéal
étant rétracté vers le haut. Une extrapéritonisation est
alors facilement réalisée aux ciseaux de Metzenbaum
ou mieux à l’aide du bistouri électrique. Le péritoine
est souvent ouvert au cours de cette manœuvre. Il faut
alors veiller à réséquer une collerette péritonéale limi-
tée au niveau du dôme de la vessie en réclinant vers le
haut les anses intestinales protégées par des champs
abdominaux. Cette extra-péritonisation sectionne,
entre deux ligatures, l’ouraque.
-L’ouverture de l’aponévrose de Denonvilliers : la
dissection reprend alors vers le plan prostato-séminal
en avant du rectum. Il existe un plan de clivage
exsangue à la face postérieure des vésicules séminales,
loin du rectum. Pour ouvrir ce plan, il faut commencer
l’incision sur la ligne médiane au sommet des vésicules
séminales. Cette incision de l’aponévrose de
Denonvilliers est au mieux réalisée par les ciseaux de
Metzenbaum, dont la concavité est maintenue vers
l’avant. Une fois le feuillet de l’aponévrose ouvert, on
peut facilement passer au doigt en avant de l’aponé-
vrose de Denonvilliers au ras des vésicules séminales
et de la face postérieure de la prostate jusqu’au bec
prostatique, l’urètre étant repéré par la sonde vésicale
(Figures 4 a, b).
-Section des ailerons vésicaux et prostatiques : à ce
stade de la dissection, une arche fibreuse contenant le
feutrage vasculaire des artères génito-vésicales se tend
de part et d’autre du bloc vésico-prostatique. La section
de ces ailerons constitue le temps capital de la mobili-
sation vésico-prostatique. Elle est de difficulté très
variable. Parfois facile lorsque la tumeur vésicale est
peu infiltrante, ménageant alors un bon passage entre la
vessie et la paroi pelvienne. Parfois très diff i c i l e
lorsque la tumeur vésicale est volumineuse ou que le
patient présente un bassin étroit. On va donc sectionner
à droite et à gauche les ailerons par prises successives
entre deux pinces de De Bakey-Cooley permettant des
prises fortes et résistantes. Il faut utiliser du fil à
résorption lente 0 ou 1. Les ailerons vésicaux vont être
sectionnés petit à petit vers la prostate. A ce niveau, les
ailerons sont beaucoup plus minces et de section plus
facile. On peut également utiliser, pour la section des
ailerons, des agrafes automatiques TA55® articulée
(pince Roticulator®). La section progressive des aile-
rons à droite et à gauche permet de libérer le bloc vési-
co-prostatique qui va monter progressivement vers la
ligne médiane. Une fois terminée la section bilatérale,
le bloc vésico-prostatique ne tient plus que par l’urètre
et le plexus veineux de Santorini qui seront sectionnés
après ouverture de l’aponévrose pelvienne de part et
d’autre de la prostate et ligature du plexus veineux (cf
infra). L’analyse extemporanée de la recoupe urétrale
doit faire décider de la conservation ou non de l’urètre
•LACYSTECTOMIE PAR VOIE RÉTROGRADE :cette tech-
nique plus récente est la conséquence de la pratique
depuis plus de 15 ans de la prostatectomie totale avec
abord premier du plexus veineux de Santorini.
L’urologue s’est familiarisé avec cet abord urétral pre-
mier qui rend la cystectomie par voie rétrograde plus
aisée et moins hémorragique.
-Cette technique permet théoriquement de préserver
les bandelettes vasculo-nerveuses et d’espérer une
conservation de l’érection [3, 22, 33]. Cette attitude de
préservation des bandelettes neurovasculaires a été cri-
tiquée par Pritchett [18] qui a mis en évidence des gan-
glions résiduels au niveau des ailerons para-vésicaux
pour près de 60% des patients. La signification clinique
de ces ganglions résiduels reste incertaine. Les pre-
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