2013 Numéro 2 Développement durable INFLUENCER, MAÎTRISER ET STIMULER LE COMMERCE FORUM DU COMMERCE INTERNATIONAL DÉBLOQUER LA CHAÎNE DE VALEUR Engendrer la croissance économique à travers l'Aide à l'investissement Cultiver la durabilité L'Agriculture au cœur du développement durable UNE ÉCONOMIE PLUS VERTE FORUM Numéro 2 2013 1 Saisir sa chance dans le commerce durable La revue du Forum du commerce international est consacrée à la promotion des échanges et au développement des exportations dans le cadre des programmes de coopération technique de l’ITC avec les pays en développement et les économies en transition. Editeur Jarle Hetland Elle paraît tous les trois mois depuis 1964 en français, anglais et espagnol. Traduction Denise Nopper Consultation de la version en ligne forumducommerce.org Inscription aux alertes e-mail: tradeforum.org/ alerts Abonnements [email protected] Abonnements à la version imprimée $E.-U. 60 par an (gratuit pour les institutions d’appui au commerce et les entreprises des pays en développement) ISSN: 0591-251 Adresse Centre du commerce international Palais des Nations 1211 Genève 10 Suisse t +41 22 730 0111 f +41 22 733 4439 intracen.org twitter.com/ITCnews Reproduction Les articles de cette revue peuvent être reproduits librement en indiquant l'auteur et 'Forum du commerce international, ITC'. Nous serions reconnaissants de recevoir une copie des articles reproduits. Les photos protégées par le droit d'auteur ne peuvent être reproduites. Assistance éditoriale: Susanna Pak Nicki Chadwick Conception graphique, illustrations et direction artistique: Phoenix Design Aid Révision/lecture des épreuves Françoise Donet Impression: Imprimerie Centrale SA Version internet: Centre du commerce international (ITC) Avertissement Les opinions exprimées dans le Forum du commerce appartiennent aux auteurs des articles et ne coïncident pas forcément avec celles de l’ITC, de l’ONU ou de l’OMC. Les désignations employées ne reflètent pas l’expression d’un quelconque jugement de la part de l’ITC en ce qui concerne le statut juridique d’un pays, d’un territoire, d’une ville, d’une zone ou de leurs autorités, les délimitations des frontières ou limites entre pays et territoire, ou l’approbation d’une société commerciale ou d’un produit. Éditeur Le Centre du commerce international est l’agence conjointe de l’Organisation mondiale du commerce et des Nations Unies. 06 Engendrer la croissance à travers l' Aide pour le commerce 26 Sensibilisation durable à travers les arts créatifs LE MONDE EN BREF L'ACTUALITÉ.................................................................................................................................................. 05 Engendrer la croissance à travers l' Aide pour le commerce....................................... 06 Pascal Lamy, Directeur général, Organisation mondiale du commerce PLEINS FEUX SUR LES ENTREPRISES autonomisation biologique dans une communauté zambienne ...................................28 Susanna Pak, ITC L’ITC EN ACTION Centre du commerce international Trouver des solutions pour le climat dans les usines à thé au Kenya .................... 30 Aaban Ali Butt, ITC La couture comme billet de sortie de la pauvreté pour les femmes ........................31 Nicki Chadwick, ITC TRAVAILLER À L’ITC L’ITC recrute des professionnels qualifiés dans différents domaines de compétence. Si vous souhaitez mettre vos compétences au service de l’amélioration de la compétitivité à l’exportation des économies en développement et êtes motivés pour travailler au sein d’un environnement international qui promeut la diversité, veuillez consulter notre site d’offres d’emploi qui est mis à jour chaque semaine: www.intracen.org/about/jobs 2 FORUM Numéro 2 2013 NORMES DE DURABILITÉ DANS LE COMMERCE ET LE DÉVELOPPEMENT .................................... 33 Oliver von Hagen, ITC Stimuler les communautés à travers les possibilités d'exportation ....................... 36 Lilia Naas, Martin Labbe, Mehdi Chaker, Olivier Naray, ITC Outils en ligne OPPORTUNITÉS D'EXPORTATION DANS LE commerce durable ................................................ 38 Helen Lassen, ITC 06 De l'Aide pour le commerce à l'investissement pour le commerce Le Directeur général de l'OMC, Pascal Lamy, fait une rétrospective du travail accompli et des défis qui se posent pour le programme APC à l'avenir. © OMC/CIR Engendrer la croissance à travers l' Aide pour le commerce 14 UN commerce durable pour une économie verte 24 AGRICULTURE: SEMER LES GRAINES D'UN AVENIR DURABLE 30 Trouver des solutions pour le climat dans les usines à thé au Kenya CHRONIQUES Développement économique, réduction de la pauvreté et conservation de la biodiversité................................................................ 09 Dr Supachai Panitchpakdi, Secretaire général, CNUCED FAVORISER le type approprié de commerce et d'investissement.............................................................................................................................. 12 Yurendra Basnett et Pedro Martins, Institut de développement d'Outre-mer UN commerce durable pour une économie verte............................................................................................................................................................14 Achim Steiner, Programme des Nations Unies pour l’environnement Le commerce et les défis du développement durable – Priorités en 2013 ...........................................................................................................16 Ricardo Meléndez-Ortiz, Centre international pour le commerce et le développement durable Le VÉRITABLE marché mondial des capitaux........................................................................................................................................................................19 Peter Bakker, Conseil mondial des entreprises pour le développement durable Le commerce peut-il changer les choses en Afrique? ............................................................................................................................................... 20 Carlos Lopes, Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique Promouvoir l'esprit d'entreprise auprès des petits exploitants ougandais ................................................................................................. 22 Sean Paavo Krepp, Laboratoire d'applications de la Fondation Grameen Préserver l'Afrique à travers le développement du leadership............................................................................................................................ 23 Ndidi Nwuneli, LEAP Africa AGRICULTURE: SEMER les graines d'un avenir durable .................................................................................................................................................. 24 José Graziano da Silva, Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture Sensibilisation durable à travers les arts créatifs ................................................................................................................................................... 26 Nisha Agrawal, Oxfam Inde CRÉER un tourisme durable à partir de la beauté naturelle infinie ................................................................................................................... 27 Sandra Elena Abreu Ortiz, Avia Export FORUM Numéro 2 2013 3 message de PATRICIA FRANCIS Directrice exécutive, ITC Au cours des sept dernières années, j'ai eu le privilège, en tant que Directrice exécutive du Centre du commerce international (ITC), de voyager dans le monde pour promouvoir le commerce et le développement. J'ai vu des pays, des entreprises et des personnes améliorer leur compréhension du système de commerce mondial et tirer parti des possibilités d'exportation. En Afrique, en Asie et en Amérique latine, davantage de personnes sont impliquées dans des chaînes de valeur mondiales qu'en 2006. Cela a été possible malgré la crise économique mondiale qui a débuté en 2008 dans de nombreuses régions dans le monde. Cependant, il est indéniable qu'un grand nombre d'économies mettent plus d'accent sur la création d'un commerce durable, alors que nombreuses sont celles qui semblent ne pas se soucier de l'empreinte laissée par le commerce dans leurs sociétés. Le développement durable en matière de commerce reste un combat difficile qui n'est pas gagné d'avance. Peu importe l'angle sous lequel on le regarde, le commerce – et ses effets – laisseront inévitablement une empreinte sur l'environnement. Et même si le commerce a contribué à sortir des millions de personnes de la pauvreté, il ne fait aucun doute qu'il y a eu également des conséquences sur le plan social. Bien sûr, cela ne signifie pas qu'il faille adopter une approche 'laissez-faire' et ne rien faire au sujet des effets négatifs du commerce. En fait, il est possible d'atteindre une croissance du commerce dans les PED (à l'instar des pays développés) tout en minimisant son impact environnemental et social. Cela nous amène au cœur de ce que nous faisons à l'ITC, et ce numéro du Forum du commerce international présente une partie de ce travail. Ces objectifs sont soutenus par le Programme des Nations Unies pour l’environnement (p. 14), la Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique (p. 20) et la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (p. 9). Comme l'a souligné Pascal Lamy, Directeur général de l'OMC, le programme de l'Aide pour le commerce (APC) est un autre outil dont l'objectif premier est d'atteindre un développement durable (p. 6). Or, nous avons pu observer dans les discussions au sujet du climat et de l'environnement au cours des 10 dernières années qu'un effort considérable a été fait pour défendre des intérêts nationaux égoïstes. Et ce autant par les pays développés que par les PED. De fait, la plupart des citoyens à travers le monde voient ou expérimentent les effets du changement climatique et reconnaissent qu'il y a vraisemblablement un lien avec l'activité humaine. Cependant, de nombreux dirigeants ne réussissent hélas pas à résoudre ce problème grandissant. Cela est déplorable, car ce sont eux qui détiennent la clé d'un avenir beaucoup plus vert, un avenir durable et qui voit évoluer main dans la main le commerce et le développement. Patricia Francis Au moment où vous lirez ce numéro de Forum du commerce international, j'aurai quitté mes fonctions en tant que Directrice exécutive du Centre du commerce international. Pendant les sept dernières années beaucoup de choses ont été réalisées, et ce malgré les défis supplémentaires imposés à l'ITC et ses partenaires par la crise économique mondiale. Alors que beaucoup reste à faire en matière de commerce et de développement, je suis persuadée que nous sommes mieux préparés qu'il y a sept ans. Je tiens à remercier toutes les personnes avec lesquelles j'ai travaillé durant mon mandat en tant que Directrice exécutive pour le soutien que vous avez témoigné à l'ITC et pour votre aide afin de s'assurer que l'ITC soit maintenant mieux positionné pour atteindre l'objectif des exportations pour un développement durable. 4 FORUM 4 2011 4 FORUM ISSUE Numéro 2 2013 LE MONDE EN BREF L’ACTUALITÉ L'OMC désigne son prochain Directeur général Le Conseil général de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) a approuvé la désignation de M. l'Ambassadeur Roberto Carvalho de Azevêdo (Brésil) comme prochain Directeur général de l'organisation. Il prendra ses fonctions le 1er septembre 2013. L'ambassadeur Azevêdo, diplomate brésilien, est le représentant permanent du Brésil auprès de l'OMC et d'autres organisations internationales à Genève depuis 2008. Après l'annonce, M. l'Ambassadeur Azevêdo a déclaré qu'il travaillerait avec les États membres afin de rétablir le standing de l'OMC. ‘Je travaille avec cette organisation de manière continue depuis 15 ans. Je l'ai vue dans de bien meilleur jours. Je m'engage auprès de tous les membres à travailler avec eux avec une détermination inébranlable et inconditionnelle en vue de redonner à l'OMC le rôle et la prééminence qu'elle mérite et doit avoir.' Le Directeur général de l'OMC, Pascal Lamy, s’est engagé à travailler en étroite collaboration avec M. l’Ambassadeur Azevêdo pour assurer une transition en douceur: 'J'aimerais également féliciter chaleureusement M. l'Ambassadeur Azevêdo pour sa nomination et je lui souhaite tout le meilleur dans sa préparation à assumer ce poste. Il peut compter sur mon soutien ainsi que sur celui du Secrétariat... afin qu'il puisse être opérationnel dès son entrée en fonction le 1er septembre.’ qualité. Dans six des dix pays considérés, plus de 60% des jeunes sont sans emploi ou ont des emplois de faible qualité, irréguliers ou mal payés, souvent dans le secteur de l'économie informelle, ou ne sont pas inclus dans la force de travail ni dans l'éducation ou la formation. Au Libéria, au Malawi et au Togo, ce chiffre dépasse 70%. 'Le gaspillage de potentiel économique dans les PED est effarant. Pour un nombre impressionnant de jeunes, cela consiste à dire qu'un emploi n'est pas forcément un moyen de subsistance', a déclaré Sara Elder, co-auteure du rapport et chargée de recherche auprès du Programme d'emploi des jeunes de l'OIT. Le rapport traite des emplois atypiques, de la sous-utilisation de la main-d'œuvre, de la qualité de l'emploi, de la satisfaction de l'emploi et de la transition des jeunes vers le marché de l'emploi, entre autres. Les donateurs s'engagent à financer l'ITC à hauteur de $E.-U. 35 millions Les délégués participant à la 47ème réunion annuelle du Groupe consultatif commun (GCC) de l'ITC ont exprimé leur soutien au travail de l'ITC en acceptant le Rapport annuel 2012 et en s'engageant à verser plus de $E.-U. 35 millions de fonds. La réunion du GCC s'est tenue les 6 et 7 mai 2013, sous la direction de S.E. Mme Karen Pierce, Ambassadrice et représentante permanente du Royaume-Uni auprès de l'ONU et d'autres organisations internationales à Genève. ‘Nous sommes heureux que les membres soutiennent notre travail et le considèrent pertinent pour le développement de leurs propres objectifs et pour leurs besoins. Avoir des informations précises de la part des membres sur la stratégie et la mise en œuvre de notre programme de travail est essentiel pour le succès du travail de l'ITC', a déclaré Mme Patricia Francis, Directrice exécutive de l'ITC L'Allemagne, l'Australie, le Canada, la Chine, le Danemark, la Finlande, la Norvège, la Suède et la Suisse, pays donateurs, ont confirmé leur contribution volontaire au fonds d'affectation spéciale de l'ITC pour la période 2013 à 2017. invités à répondre. L'exercice de suivi à l'échelle mondiale a été lancé en octobre 2012. Le 4ème Examen global a aussi traité des réponses à une enquête effectuée auprès du secteur privé, en particulier de sociétés engagées dans des chaînes de valeur de cinq secteurs spécifiques: agro-alimentaire, technologie de l'information et de la communication, textile et vêtement, tourisme et transport et logistique. L'enquête vise à collecter des points de vue sur les obstacles qui empêchent les sociétés de certains PED d'intégrer les chaînes de valeur, les actions qui pourraient aider ces entreprises à intégrer les chaînes de valeur, évoluer au sein de ces dernières et/ou les établir, et les mesures que ces entreprises pourraient déjà avoir prises afin de gérer ces contraintes. L'initiative APC menée par l'OMC, lancée en 2005, aide les PED, et particulièrement les PMA, en matière de commerce. Elle encourage les gouvernements des PED et les donateurs à reconnaître le rôle que le commerce peut jouer dans le développement. Elle cherche plus particulièrement à mobiliser les ressources afin de gérer les contraintes relatives au commerce identifiées par les PED et les PMA. La Session de fond ECOSOC 2013 a eu lieu à Genève La session de fond de l'ECOSOC a eu lieu du 1er au 25 juillet au siège de l'ONU à Genève. Les représentants des 54 gouvernements membres ont abordé des sujets tels que la science, la technologie et l'innovation, ainsi que le potentiel de la culture dans la promotion du développement durable et dans l'accomplissement des OMD, l'état de l'économie mondiale et ses répercussions sur l'accomplissement du programme de développement de l'ONU; emploi et travail décent; et l'avenir des affaires humanitaires en termes d'une plus grande intégration, coordination et efficacité. Le segment de haut niveau d'ECOSOC a eu lieu au siège des Nations Unies à Genève du 1er au 4 juillet et était axé sur une large palette Le rapport de l'OIT souligne de thèmes au cœur du programme de déveles sombres perspectives loppement de l'ONU. Parmi les participants se pour les jeunes des PED trouvent des responsables d'organisations de l'ONU ainsi que d'autres organisations internaLes jeunes des PED sont plus susceptibles tionales, chefs d’État, ministres, chefs d'entred'obtenir des emplois de faible qualité dans L'Examen global de l'APC prise et experts techniques. Institué en 1946 aux l'économie informelle que des emplois payant a eu lieu à Genève termes de la Charte fondatrice de l'ONU, l'ECOdes salaires corrects et offrant des avantages, selon le rapport de OIT Tendances mondiales Le 4ème Examen global de l'APC, ‘Relier les SOC se préoccupe des défis économiques, sodu marché de l'emploi des jeunes 2013 lequel chaînes de valeur', s'est tenu au siège de l'OMC ciaux et environnementaux auxquels le monde montre que l'accès à l'éducation et à la forma- à Genève du 8 au 10 juillet 2013. L'accent a été est confronté. Le Conseil est responsable de tion représentent les plus grands obstacles. mis sur les résultats d'un exercice de suivi sur plus de 70% des ressources humaines et finanLe rapport montre que deux tiers des jeunes la base de questionnaires d'auto-évaluation cières de l'ensemble du système de l'ONU, dont en âge de travailler dans certains PED sont soit au auxquels les Membres, gouvernements obser- 14 institutions spécialisées, neuf commissions chômage soit coincés dans des emplois de faible vateurs et organisations observatrices ont été techniques et cinq commissions régionales. FORUM Numéro 2 2013 5 LE MONDE EN BREF ENGENDRER LA CROISSANCE à travers l' Aide pour le commerce Du 8 au 10 juillet, l'OMC a accueilli le 4ème Examen global de l'APC. En amont de ce qui sera son dernier examen en tant que Directeur général de l'OMC avant de quitter ses fonctions au mois d'août, Pascal Lamy fait une rétrospective du travail accompli et des défis qui se posent pour le programme d''APC à l'avenir. Pascal Lamy Directeur général Organisation mondiale du commerce L ' ors de la Conférence ministérielle de l'OMC qui s'est tenue à Hong Kong en 2005, une initiative avait été lancée en vue de mettre en lumière le rôle essentiel que peuvent jouer l'assistance technique en matière de commerce et la création de capacités pour le soutien à la croissance économique dans les PED. Cette initiative était censée fournir également un forum dans lequel des sujets liés au commerce et au développement pourraient être traités. Ce qui finalement est devenu l'initiative APC est né de la reconnaissante collective du fait que les opportunités d'accès au marché pourraient être plus efficaces dans les PED, en particulier les plus pauvres, et qu'elles pourraient créer les capacités en matière d'offre et d'infrastructure liée au commerce nécessaires pour bénéficier de ces opportunités de commerce. Il a été collectivement reconnu qu'en traitant des éléments plus structurels à l'origine des capacités productives limitées, l'accès aux marchés pourrait être économiquement plus significatif. En 2006, un groupe de travail a été créé afin d'élaborer des recommandations sur la mise en œuvre de l'APC. Le rapport publié par ce groupe de travail en 2006 inscrit l'APC 6 FORUM Numéro 2 2013 L' Aide pour le commerce facilite les affaires. © OMC/CIR PMA a augmenté de 94% par rapport aux bases exemple, comment une intervention particude référence, atteignant un total de $E.-U. 13,4 lière a mené à un impact précis. Cependant, les nombreux témoignages ainsi que la recherche milliards en 2011. Depuis 2005, l'OMC s'efforce de renforcer connexe nous ont permis de monter un dossier ses partenariats avec des banques multilaté- solide démontrant l'effet positif que l'APC peut rales de développement, des agences de l'ONU, avoir sur le terrain dans les PED en rendant des communautés économiques régionales et les affaires plus faciles à mener, en particudes gouvernements nationaux en vue de mobi- lier les affaires transfrontalières, ainsi que les liser des ressources. À compter de 2007, plu- bénéfices économiques associés en matière sieurs examens régionaux et sous-régionaux de de création d'emplois et de réduction de la paul'APC ont été effectués en Afrique, en Amérique vreté. Lorsque l'ouverture au commerce a eu dans un vaste programme de développement latine et dans les Caraïbes, au Moyen-Orient et et établit une série de recommandations. Ces en Asie-Pacifique afin d'établir le bien-fondé de lieu, associée à des réformes réglementaires et dernières comprennent le renforcement de l'intégration du commerce dans les stratégies de au soutien de l'APC, celle-ci a favorisé les invesl'évaluation des besoins à l'échelle nationale développement sur le plan national et régional. tissements internes et étrangers et stimulé la et régionale, la garantie d'une réponse signifiUn exemple particulier et pratique d'APC croissance économique, ce qui a eu pour effet cative des donateurs, la construction de 'ponts' est la COMESA, la CAE, la SADC, Corridor de réduire la pauvreté. L'exercice a démontré entre les besoins et les réponses, et la garantie Nord-Sud qui s'est tenue à Lusaka, en Zambie, une corrélation positive entre l'APC et l'améliod'un suivi et d'une évaluation solides. en 2009. La conférence a engendré plus de ration de la performance des exportations; il a L'initiative APC s'est différenciée d'autres $E.-U. 1 milliard en promesses de financement également souligné l'importance de la propriémodèles internationaux en ce sens qu'elle par des partenaires de développement destinés té nationale pour atteindre des résultats. Au cœur de ce progrès se trouve une meils'écarte du modèle classique de mobilisation à l'amélioration des infrastructures routières, de ressources à travers un fonds centralisé, ferroviaires et maritimes ainsi qu'au soutien à leure intégration du commerce dans les strapour adopter une approche globale en s'ap- la mise en œuvre d'instruments de facilitation tégies de développement nationales et régiopuyant sur des cadres déjà existants et en les du commerce. Depuis, ces promesses ont été nales. Le contrôle par l'OCDE-OMC a montré améliorant. L'OMC s'est employée à ajouter de traduites en actions; en 2011, les membres du que les pays partenaires ont plus de facilité à la valeur à travers sa capacité de convocation, Corridor Nord-Sud étaient engagés dans la pré- énoncer, intégrer et communiquer leurs objecpermettant à des institutions bilatérales réu- paration, le financement et la construction de tifs et stratégies en lien avec le commerce. C'est particulièrement le cas des PMA, qui nissant donateurs et institutions financières de 1 295 km de routes. ont fait des progrès mesurables avec l'aide du mieux reconnaître le rôle joué par le commerce Cadre intégré renforcé (CIR) – l'outil spécifique dans les stratégies de développement. À travers Suivre la performance et montrer de l'APC pour les PMA. Cela a un effet positif le G8 et plus tard le G20, nous avons réguliè- des résultats rement démontré le bien-fondé d'une APC plus L'OMC s'est associée à l'OCDE afin de contrô- sur l'adéquation de l'aide au développement développée et mieux ciblée. ler et évaluer les résultats, ce qui a permis aux besoins à l'échelle nationale. Depuis 2005 d'accorder une plus grande attention aux résul- une augmentation des stratégies nationales et tats et aux répercussions. Montrer les résultats régionales d'APC a également été enregistrée, Importante mobilisation de ressources La mobilisation des ressources pour l'APC était le thème du 3ème Examen global de l'APC notamment dans les Caraïbes, le Pacifique et depuis 2005. Les engagements ont atteint $E.- de 2011, lequel a été enrichi par un recueil de certaines régions d'Afrique. Ce mouvement U. 48 milliards en 2010, une augmentation de témoignages soulignant le travail accompli par vers une meilleure identification et énonciation des besoins et des priorités, y compris d'un 82% par rapport aux bases de référence de la l'APC et ce qui pourrait encore être amélioré. période 2002-2005. Il est important de souligner Une des difficultés dans l'évaluation des point de vue régional, est une des nombreuses que l'augmentation de l'APC a un caractère ad- résultats consistait à démontrer l'attribution: par réussites du travail collectif entrepris par l'APC. ditionnel et que la croissance de l'assistance au commerce n'a pas été accomplie au détriment d'autres secteurs. Le pourcentage de l'APC L'impact de l'APC sur la facilitation du commerce alloué à des secteurs spécifiques demeure constant depuis 2006, autour de 32%. La crise financière mondiale a com- • En Éthiopie, grâce aux réformes en matière de douane, les importations et les exportations ont augmenté d'environ 200% et les revenus de plus de 51%. mencé à deployer ses effets négatifs sur les ressources pour l'APC en 2011. Des chiffres • Au Burundi, les recettes fiscales ont augmenté d'un quart entre 2009 et 2010 en raison de l'aide à la facilitation du commerce. préliminaires montrent que les engagements • E n Tunisie, les retards des cargos ont diminué d'une moyenne de 10 jours en 2003 à 3,3 jours en 2010, et pour 2011 s'élèvent à $E.-U. 41,5 milliards, $E.-U. 50 000 emplois à plein-temps et 50 000 emplois à mi-temps ont été créés dans les entreprises participantes. 6,6 milliards de moins qu'en 2010. Cependant, ces chiffres représentent une augmentation de • Au Cameroun, le délai entre l'enregistrement par les courtiers et l'évaluation par un agent a diminué d'environ 75%, et les recettes par container ont augmenté de 11,7% en 2010, par rapport à 2009. 56% par rapport aux bases de référence de la période 2002-2005. • En Haïti, le délai pour les formalités douanières est passé de quatre jours à deux heures pour certains produits qui remplissent les conditions du canal vert. Depuis 2005, l'Afrique et l'Asie ont reçu environ 75% des flux de l'APC. Les engagements • Au Kirghizistan et au Tadjikistan, le nombre de formulaires d'exportation a été réduit de 60% depuis 2007. Cela a réduit d'un jour le temps nécessaire pour faire venir un container de 20 pieds au port le plus proche. pour d'autres régions ont aussi fortement augmenté au fil des ans. 30 % sont consacrés aux pays à revenu faible. Le financement pour les Source: OCDE-OMC Aide pour le commerce en action (à paraître) Nous devons trouver des nouvelles manières de mieux intégrer l'intervention du secteur privé dans le programme de l'APC. En effet, le temps est peut-être venu de se départir de l'axe 'Aide pour le commerce' et d'envisager plutôt un 'Investissement pour le commerce'. FORUM Numéro 2 2013 7 01Les petits commerçants participent de plus en plus aux chaînes de valeur mondiales. © OMC/CIR Regarder en avant Au cours des derniers sept ans et demi, le programme de l'APC a revendiqué une place visible dans le paysage commercial. Reste maintenant à s'assurer qu'il s'adapte aux changements intervenus dans le contexte global de l'APC. Demeure cependant un défi de taille: tirer meilleur parti de l'assistance grandissante en matière de commerce Sud-Sud. Nous devons trouver des nouvelles manières de mieux intégrer l'intervention du secteur privé dans le programme de l'APC. Le temps est peut-être venu de se départir de l'axe 'Aide pour le commerce' et d'envisager plutôt un 'Investissement pour le commerce'. L'accent sur l'investissement se reflète dans le dernier sondage effectué pour le 4ème Examen global de l'APC qui aura lieu en juillet 2013. Une de ses principales conclusions est que les PED, notamment les PMA, voient les investissements étrangers et internes comme une source importante de financement pour le développement futur. Cela est confirmé par le fait que les économies en développement constituent plus de la moitié des flux d'investissement étranger direct et, en 2011, l'investissement étranger direct était plus important que le flux de l'APC dans plus de 20 PMA. Grâce à ses liens avec les PME, l'ITC a un rôle important à jouer dans la promotion de l"Investissement pour le commerce'. Le commerce mondial se caractérise de plus en plus par des transactions avec des chaînes de valeur complexes et géographiquement dispersées, dont un grand nombre est de nature intra-entreprise. L'expansion des chaînes de valeur offre de nouvelles opportuni8 FORUM Numéro 2 2013 02Vers plus de commerce de meilleure qualité. © OMC/CIR 01 02 tés à plusieurs PED, vu qu'ils se focalisent sur la manière de tirer un profit équivalent d'une ou plusieurs tâches dans la chaîne de valeur. L'APC peut faciliter ce processus en gérant les principales contraintes auxquelles les entreprises doivent faire face. C'est pourquoi l'Examen global de l'APC de 2013 sera axé sur 'Relier les chaînes de valeur mondiales' et sur comment débloquer leur potentiel en tant qu'instruments de développement. Il sera important de tirer des leçons de l'examen pour le prochain programme de l'APC, en particulier en vue de la Conférence ministérielle de l'OMC qui aura lieu en décembre, à Bali, en Indonésie. Le dernier exercice de suivi et évaluation de l'OMC-OCDE, effectué en amont de l'Examen global, a enquêté auprès d'environ 700 entreprises et associations dans 120 pays et a souligné plusieurs difficultés rencontrées par les entreprises, en particulier les PME, pour intégrer les chaînes de valeur, évoluer au sein de ces dernières, ou les établir. L'accès au financement du commerce, l'environnement réglementaire et commercial, les coûts de transport et d'expédition – notamment ceux liés aux formalités douanières et aux infrastructures de transport et d'énergie – ainsi que les compétences et la formation de la main-d’œuvre sont quelquesunes des difficultés identifiées. L'intégration des objectifs du développement durable dans l'aide officielle au développement pourrait aussi demander une attention particulière. Les 43 donateurs ayant participé au sondage du dernier exercice de suivi de l'OCDE s'attendent à ce qu'une plus grande attention soit accordée au changement climatique et à une croissance verte. Le débat en cours sur le programme de développement de l'après 2015 devrait stimuler ce processus. Il en va de même pour le besoin de continuer à intégrer le développement axé sur l'égalité hommes-femmes dans les programmes et projets de l'APC. Le Programme sur les femmes et le commerce de l'ITC est un exemple concret de la manière dont cet objectif peut être atteint. Beaucoup a été fait depuis le lancement de l'initiative APC en 2005. Plus de $E.-U. 200 milliards ont été mobilisés dans des engagements et quelques $E.-U. 170 milliards ont été dépensés. Les PED intègrent de mieux en mieux le commerce dans leurs stratégies de développement, l'APC les soutenant dans l'intégration de leurs économies dans les chaînes de valeur qui maintenant caractérisent le système mondial du commerce. L'APC a un rôle à jouer afin d'atteindre ces objectifs; mais, elle aura un plus grand impact si elle adopte un modèle axé plutôt sur ‘L'investissement pour le commerce' qui cherche à déjouer les difficultés rencontrées par les PED en relation aux les chaînes de valeur, et qui met l'accent sur les gains en matière de développement durable et soutenu. L'initiative APC a créé un Forum où commerce et développement peuvent se rencontrer. Elle a placé la propriété, l'alignement et l'intégration comme les principes de l'assistance relative au commerce et a souligné le rôle à jouer par le secteur privé en tant que partenaire clé. APC – ou Investissement pour le commerce – est une initiative menée par les PED et détenue par les PED. J'espère qu'elle continuera à remplir son mandat à l'avenir en restant fermement ancrée dans l'OMC tout en bénéficiant du soutien inestimable de l'ITC. CHRONIQUE développement économique, réduction de la pauvreté et conservation de la biodiversité conduire le commerce international peut favo- loppement centré sur l'humain, inclusif et duriser un processus de transformation écono- rable. La contribution potentielle du commerce mique – à travers la production, la consomma- international au développement durable a égation et le commerce – socialement inclusive et lement été soulignée dans plusieurs accords équitable, respectueuse de l'environnement et environnementaux multilatéraux et dans des Dr Supachai Panitchpakdi Secrétaire général économiquement durable. En effet, les chiffres conventions sur les droits de l'homme. de la CNUCED montrent que le commerce inConférence des Nations Unies sur le commerce ternational est déjà responsable d'une grande Changements présents et futurs et le développement partie des revenus économiques des pays: il re- Les deux dernières décennies ont vu s'opérer présente environ un cinquième de revenus dans des changements radicaux dans les secteurs social, économique et environnemental. L'éconon 1987, la Commission mondiale sur les pays développés, et un tiers dans les PED. l'environnement et le développement Le rôle joué par le commerce international mie mondiale a connu une croissance d'environ (Commission Brundtland) a défini le dans le développement a été reconnu par la 170%, la population de la planète est passé de 5 à développement durable comme 'un CNUCED depuis sa création en 1964; il a été 7 milliards et le produit intérieur brut (PIB) par hadéveloppement qui répond aux besoins du réaffirmé plus récemment lors de la CNUCED bitant a doublé, passant de $E.-U. 4 500 à plus de présent sans compromettre la capacité des gé- XIII (tenue en 2012), où les États membres ont $E.-U. 9 000. Tous ces changements ont conduit à nérations futures de répondre à leurs propres adopté le mandat de Doha, lequel souligne que une augmentation dans la consommation par les besoins'. Cependant, ce n'est qu'en 1992, lors la transformation économique initiée par la entreprises et la population, exerçant une presde la Conférence des Nations Unies sur l'envi- mondialisation devrait être axée sur un déve- sion supplémentaire sur l'environnement. ronnement et le développement qui s'est tenue à Rio de Janeiro, que cette définition a été introIntroduction au programme BioTrade de la CNUCED. © CNUCED duite et partagée en tant que vision mondiale du développement. Vingt ans après, lors de la Conférence Rio+20, la communauté mondiale a réaffirmé son engagement envers cette vision, lequel a été traduit dans un document intitulé L'avenir que nous voulons. Le développement durable concerne avant tout le développement humain pour la génération actuelle et pour les générations futures, à travers un processus de transformation économique basé sur l'utilisation durable de l'environnement naturel. Le développement durable repose sur trois dimensions inter liées – économique, sociale et environnementale – qui devraient être promues de manière équilibrée. Le commerce international et le développement durable sont intimement liés. Le commerce international sert de lien entre la production et la consommation aux niveaux local, national, régional et mondial. La manière de E FORUM Numéro 2 2013 9 03 01Une approche pratique de BioTrade. © CNUCED 04Plannifier le prochain produit BioTrade. © CNUCED 02Un produit BioTrade sent meilleur qu'un autre produit? © CNUCED 05Les activités de BioTrade ont bénéficié à des milliers de producteurs. © CNUCED 03Le Dr Supachai mène un débat sur BioTrade. © CNUCED 01 02 Un défi majeur en termes de commerce serait donc la création de marchés plus verts et durables, capables d'engendrer des revenus et des emplois et d'améliorer la qualité et la disponibilité des services sociaux et d'infrastructure tout en réorientant les activités économiques dans le but de réduire l'épuisement des ressources naturelles et d'augmenter le niveau de confiance dans des sources d'énergie à plus faible intensité en carbone. Le changement climatique est une menace majeure qui devrait aggraver les problèmes déjà existants, tels que la désertification et la perte de la biodiversité. L'activité humaine a augmenté la concentration de gaz à effet de serre, ce qui a déjà provoqué un changement dans le climat. Selon les institutions de recherche de pointe telles que le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, la température pourrait augmenter de 2°C à 6°C d'ici à 2100. Le changement climatique aura un impact considérable sur l'environnement, l'économie et la société. La pénurie grandissante de ressources naturelles – eau, biodiversité, forêts tropicales, poissons, terres cultivées ainsi que plusieurs métaux et minéraux – demande qu'une attention particulière soit portée à une utilisation durable de ces dernières. L'émission de polluants nocifs et persistants par l'activité minière, la production, les travaux d'assainissement, l'énergie, les transports et l'agriculture reste un problème pour les écosystèmes et la santé humaine. 10 FORUM Numéro 2 2013 Plus d'un milliard de personnes vivent encore dans une pauvreté extrême. Au vu de ces défis sociaux persistants, l'accès à des services de base tels qu'énergie, eau, logement, transports, communication, soins de santé et éducation doit être amélioré: • Plus de 800 millions de personnes dans le monde n'ont pas accès à de l'eau potable; • Plus de 2,6 milliards de personnes manquent d'installations sanitaires de base; • Environ 70 millions d'enfants d'âge scolaire ne sont pas scolarisés; • Seulement 23% de la population des PMA ont accès à l'électricité; • Selon les estimations, seulement 31% de la population des PED avaient accès à internet en 2011. La crise financière et économique de 2008 a mis en lumière le degré de la vulnérabilité économique à laquelle les pays sont exposés dans une économie mondiale de plus en plus interdé- 04 pendante. La crise a provoqué la perte de huit millions d'emplois dans le monde. Les prix des matières premières – pétrole, denrées alimentaires et métaux – est devenu extrêmement volatile. Les mauvaises conditions économiques ont augmenté le risque de troubles sociaux, tandis que l'augmentation de la dette des pays développés a compromis le redressement économique. Entre-temps, l'aide publique au développement s'élève à 0,31% des revenus nationaux combinés des pays développés, loin derrière l'objectif de 0,7% fixé par les Nations Unies; seulement cinq pays donateurs ont atteint ou dépassé cet objectif. Les flux d'échanges commerciaux à l'échelle internationale, qui avaient connu une croissance constante depuis 2000, se sont réduits de plus de 11% en termes de volume en 2009 en raison du ralentissement de l'économie mondiale. Le commerce mondial s'est redressé depuis, mais l'inquiétude subsiste quand à la durabilité de ce redressement, en particulier au vu des difficultés économiques de la zone euro. Si l'on regarde en avant, la population mondiale devrait dépasser les 7 milliards actuels pour atteindre 9 milliards en 2050. Près de 8 milliards de personnes vivront dans des pays qui sont aujourd'hui en développement. La croissance économique est donc nécessaire afin d'atteindre un niveau plus élevé de production mondiale et répondre ainsi aux besoins d'une population grandissante. En effet, le PIB mondial devra s'accroître pour atteindre jusqu'à trois fois les taux actuels en 2050, dont plus de la moitié généré par les PED. Cependant, la simple intensification des méthodes de production actuelles pour faire face à la croissance économique continue n'est pas envisageable. Cette option ne ferait qu'épuiser les ressources naturelles, détériorer les écosystèmes naturels et accélérer le changement climatique. L'intensité de la croissance économique en termes de combustibles fossiles et ressources naturelles doit être considérablement réduite afin de maintenir la viabilité des systèmes naturels et environnementaux. Un défi majeur en termes de commerce consisterait donc en la création de marchés plus verts et durables, capables d'engendrer des revenus et des emplois et d'améliorer la qualité et la disponibilité des services sociaux et d'infrastructure tout en réorientant les activités économiques dans le but de réduire l'épuisement des ressources naturelles et d'augmenter le niveau de confiance dans des sources d'énergie à plus faible intensité en carbone. Le développement durable est une condition sine qua non. Or, il ne va pas de soi; il doit être nourri, encouragé et règlementé. L'Initiative BioTrade de la CNUCED (voir à droite) est un exemple frappant d'initiatives qui peuvent être créées pour aider les PED à atteindre deux objectifs complémentaires: le commerce et le développement durable. Le commerce peut clairement jouer un rôle dans cette transformation, étant donné que les marchés sont de plus en plus verts et favorisent des méthodes de production et de consommation basées sur la durabilité écologique et l'inclusion sociale. Initiative BioTrade de la CNUCED Depuis plusieurs années maintenant, la CNUCED travaille dans le but de favoriser le développement durable et le commerce. L'Initiative BioTrade en est une illustration. BioTrade consiste en la collecte, la production, la transformation et la commercialisation de biens et services dérivés de la biodiversité indigène (espèces et écosystèmes) conformément aux critères de durabilité environnementale, sociale et économique définis lors de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement de 1992. La CNUCED a lancé l'Initiative BioTrade en 1996; elle a reçu depuis le soutien des Gouvernements de la Suisse (à travers le Secrétariat d’État à l’économie), de l'Espagne, des Pays-Bas, de la Norvège, ainsi que de la Fondation pour les Nations Unies (FNU) à travers le Fonds des Nations Unies pour les partenariats internationaux (FNUPI). L'Initiative promeut l'usage commercial de la biodiversité selon des critères de durabilité, contribuant ainsi à la conservation des écosystèmes et à l'amélioration des moyens de subsistance, surtout dans les PED. Elle conjugue la conservation de la biodiversité indigène dans les pays riches en biodiversité, d'une part, et leur utilisation durable pour le commerce international, d'autre part, sur la base de principes et critères de BioTrade, établis conjointement par la CNUCED et les partenaires et praticiens à l'échelle nationale. Ces principes offrent un cadre intégré pour atteindre les objectifs de conservation, utilisation durable et partage juste et équitable des profits, tels que reflétés dans la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES), résultat de Rio+20 et dans d'autres conventions multilatérales en matière d'environnement relatives à la biodiversité. • Ingrédients et produits naturels pour produits pharmaceutiques – extraits et infusions de plantes médicinales, capsules de médicaments naturels; • Espèces sauvages pour le commerce – à titre d'exemple: espèces annexes II et III de la CITES, y compris les produits à base de crocodile et serpents, ainsi que les papillons; • Fleurs et feuillages – heliconias et autres fleurs tropicales; • Artisanat – meubles, objets de décoration, bijoux et vêtements; • Tourisme durable – écotourisme, tourisme axé sur la nature, observation d'oiseaux. Dix-huit pays d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine ont tiré profit des opportunités de commerce et d'investissement offertes par l'Initiative BioTrade de la CNUCED. Ces opportunités sont une source potentielle d'emplois et de revenus, de diversification des exportations et de développement rural pour la population, les PME et les organisations multinationales engagées dans ce secteur. En 2010, les activités de BioTrade ont bénéficié directement à 38 000 collectionneurs, éleveurs, chasseurs, agriculteurs et producteurs. Et plus de 20 millions d'hectares étaient gérés par des organisations bénéficiares travaillant dans BioTrade. Le montant des ventes effectuées par les organisations bénéficiaires de BioTrade s'élevait à $E.-U. 2,3 milliards en 2011, montrant un taux de croissance annuel de 14% par rapport à l'année précédente. L'Initiative a travaillé en Europe et aux États-Unis afin de faciliter l'importation de produits et services BioTrade des PED. Depuis près de 20 ans, l'Initiative BioTrade améliore les moyens de subsistance des communautés locales et rurales des PED en générant des bénéfices non seulement économiques, mais aussi environnementaux et sociaux. En tant que parties prenantes de cette initiative, la CNUCED et ses partenaires, présentent des études, préparent des lignes directrices et entreprennent des activités de renforcement des capacités dans les pays concernés. L'Initiative a élaboré des matériels de formation ainsi qu'un cours d'enseignement à distance sur BioTrade et la création de chaînes de valeur. Elle a également organisé les Congrès BioTrade International, plate-formes permettant aux parties prenantes de BioTrade de partager leurs expériences et établir une coopération dans la mise en œuvre de pratiques durables en vue du 'passage au vert' des secteurs de la biodiversité. La première a eu lieu dans le cadre de Rio+20. L'Initiative BioTrade a concentré ses efforts sur des biens et services spécifiques à la biodiversité, notamment: • Ingrédients et produits naturels pour cosmétiques – huiles essentielles, teintures naturelles, savons, crèmes et beurres, hydratants; • Ingrédients et produits naturels pour aliments – fruits, céréales, tubercules, noix, cacao, produits à base de poisson, confitures, sucreries et collations, gelées, pulpes et jus, épices et sauces, thés et infusions, compléments alimentaires; 05 FORUM Numéro 2 2013 11 CHRONIQUE favoriser le type approprié de commerce et d'investissement de développement, L'après-2015: Une action globale pour un avenir inclusif et durable, Assistant de recherche Assistant de recherche souligne deux des principales faiblesses du Institut de développement d'Outre-mer cadre actuel, les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD): (1) les instruments (OMD 8) pour obtenir les résultats clé (OMD 1 à 7) restent largement insatisfaisants – certains es expériences passées et présentes à la transformation structurelle de l'économie pourraient même être inappropriés – et, (2) en montrent que le commerce internatio- interne. Parmi ces dernières se trouvent des po- mettant en avant les secteurs sociaux, le cadre nal peut jouer un rôle clé dans l'accélé- litiques visant à augmenter le niveau de produc- néglige l'importance fondamentale d'améliorer ration du développement économique tivité des économies (tout en créant des emplois les capacités productives des sociétés – un et social. Le bilan des économies de l'Asie productifs), ce qui à son tour contribue à une impératif pour rehausser les niveaux de biende l'Est, en particulier, souligne l'importance augmentation durable du niveau de vie. L'im- être. Par conséquent, l'on peut contester la de sa contribution à l'accomplissement d'une portance de ce processus de transformation durabilité des accomplissements des OMD. croissance économique importante et durable. ne peut pas être surestimée, étant donné que Le dialogue mondial émergeant dans le cadre Plusieurs de ces pays, auparavant des pays les pays les plus pauvres se caractérisent sou- de l'après-2015 devrait donc tirer des leçons de pauvres en développement, sont devenus des vent par une dépendance à plusieurs niveaux: l'expérience des OMD tout en prenant en consipays à haut revenu en une seule génération. La matières premières, marchés d'exportation limi- dération le contexte économique et politique rapide croissance économique stimulée par tés, aide extérieure et technologies. Surmonter mondial en constante évolution. Le futur cadre le commerce dans les économies émergentes ces défis requiert d'importants changements devrait se fonder sur une vision transformatrice telles que la Chine, le Brésil et l'Inde, vient aussi structuraux. Le commerce et l'investissement du développement – caractérisée par la nécesen appui à l'argument selon lequel le com- augmentent les opportunités commerciales, site de transformer les structures économiques merce peut stimuler la croissance économique, poussent les processus de production à deve- et sociales – en vue d'assurer la voie du dévegénérer des emplois productifs et réduire les nir plus efficaces et fournissent des ressources loppement inclusif et durable. Que peut-on faire alors pour augmenter le niveaux de pauvreté. Même des PED plus financières et technologiques susceptibles pauvres comme le Bangladesh, l’Éthiopie, Le d'augmenter les capacités productives. Or, les potentiel du commerce international et de l'inGhana et le Viet Nam ont enregistré récemment politiques en matière de commerce et d'inves- vestissement étranger? de meilleurs résultats commerciaux. tissement seules n'encouragent pas forcément Ces expériences mettent également en évi- une transformation structurelle. Leur rôle doit Le rôle de l’État dence une autre leçon importante: les politiques s'inscrire dans le cadre d'une stratégie de déve- Les capacités productives des économies en matière de commerce (et d'investissement) loppement axée sur les transformations inter et pauvres restent faibles et sous-développées, ce les plus efficaces sont celles qui ont contribué intrastructurelles de l'économie. qui restreint leur capacité à bénéficier d'un marEn préparation du programme de déve- ché mondial en pleine expansion. La plupart loppement de l'après-2015, le Rapport européen des politiques récentes sont axées sur une plus Le futur cadre devrait se fonder sur sur le développement 2013 a mis l'accent sur grande capacitation de ces économies en maune vision transformatrice du trois moteurs internationaux du développement: tière d'offre, ce qui signifie en général produire développement – caractérisée par la le commerce et l'investissement, le financement les mêmes produits en plus grande quantité. nécessite de transformer les du développement et la migration. Le rapport L'on ne peut pas considérer cela comme étant structures économiques et sociales – de l'Institut de développement d'Outre-mer, du développement. Ce qu'il faudrait, c'est un en vue d'assurer la voie du du Centre européen de gestion des politiques changement dans le sens d'une augmentation développement inclusif et durable. de développement et de l'Institut allemand de la capacité de production, en particulier la Yurendra Basnett L 12 FORUM Numéro 2 2013 Pedro Martins productivité, de ces économies. Cela comprendrait une transformation dynamique des avantages comparables existants. L’État, avec ses nombreuses limites et ses nombreux échecs, doit faire partie de la solution. Des investissements publics stratégiques dans l'infrastructure économique et dans les capacités de développement sont fondamentaux pour nourrir un secteur privé en plein essor. De plus, la technologie est essentielle afin d'augmenter la productivité et d'assurer un environnement durable. L'accent mis sur l'augmentation des capacités de production, le rôle de l’État et de la technologie sont largement absents du programme mondial de développement. Gouvernance mondiale La gouvernance des échanges commerciaux mondiaux reste un monde hobbesien (anarchique), du moins vu depuis, disons, Kathmandu ou Maputo. Les Accords de l'OMC, nonobstant leurs limitations, commençaient à offrir une structure à ce chaos. Mais le processus est dans une impasse. Un monde sans un cadre pragmatique multilatéral est susceptible de nuire aux économies les plus pauvres et de les marginaliser davantage. Comparé à des approches bilatérales et régionales, un processus multilatéral peut être plus inclusif et diluer les hiérarchies de pouvoir, tandis que ses résultats présentent moins de risques de marginalisation des intérêts des économies petites et vulnérables. Mais la valeur du multilatéralisme réside davantage dans les problèmes qu'il résout que dans son discours. Ici, en raison de la croyance dogmatique dans la 'libéralisation' (qui peut être parfois instrumentale, mais pas toujours), le multilatéralisme a souvent été incapable de résoudre des problèmes et de provoquer un changement. Le monde dans lequel nous nous apprêtons à entrer sera défini par des changements permanents dans l'économie mondiale. Ce qui aura pour effet de réorienter le flux de biens et services, que ce soit vers la production ou vers la consommation. Au vu des constants changements, il serait futile de prédire à quoi il ressemblera. Ce qui est sûr, c'est que la plupart des économies, au lieu de produire et vendre les produits finaux comme par le passé, se trouveront impliquées dans une chaîne de production. C'est peut-être une progression naturelle de la division mondiale des processus de production, facilitée par la spécialisation et la technologie. Éléments clé de l'agenda de l'après-2015 Dans le Rapport européen sur le développement 2013, nous traitons de certains aspects pratiques qui pourraient être pris en compte dans le cadre de développement de l'après2015, dans le but de soutenir la diversification économique et la transformation structurelle dans les économies les plus pauvres. Parmi les mesures clé que la communauté internationale devrait envisager se trouvent: • la promotion de secteurs d'exportation modernes en rendant les préférences commerciales plus efficaces – p. ex. en reformant les règles d'origine, en s'attaquant aux obstacles non tarifaires, et en dopant l'APC; • la réduction de la vulnérabilité aux chocs externes en développant des mécanismes de réponse plus efficaces, par exemple en réduisant la volatilité des prix des matières premières et les facilités compensatoires afin de minimiser les chocs de revenu; • l'augmentation de l'impact de l'investissement étranger à travers des politiques encourageant l'investissement dans les secteurs à haut potentiel d'emplois et de croissance de la production. L'on ne peut pas attendre des successeurs des OMD qu'ils résolvent tous les problèmes de l'économie mondiale. Cependant, sans un progrès considérable dans les domaines clé de la coopération internationale – y compris le commerce et l'investissement – la vision inclusive et durable adoptée par la Déclaration du Millénaire resterait un rêve inatteignable. Ce qui peut être fait concrètement dans le cadre du débat sur l'après-2015, c'est stimuler un dialogue constructif en matière de politiques et favoriser l'accomplissement d'un accord sur les domaines essentiels. Entre le monde chaotique hobbesien des intérêts égocentriques et le puissant Léviathan, il y a suffisamment de place pour une action collective mondiale. FORUM Numéro 2 2013 13 CHRONIQUE nales devraient passer de $E.-U. 110 millions en 2009 à $E.-U. 2,7 milliards vers 2020. Cette augmentation annuelle pourrait créer plus de 250 000 nouveaux emplois au cours de la prochaine décennie, en particulier dans les régions les plus pauvres du pays. Tandis que les plateaux andins affichent les taux de pauvreté les plus élevés du pays, ils possèdent certaines des plus importantes ressources fondées sur la biodiversité. Huancavelica, la région ayant le taux de pauvreté le plus élevé du Pérou (77,9%), produit des ressources toujours plus demandées dans les marchés internationaux, telles que le kiwicha, le quinoa et le tara. Les communautés d'Ayacucho, Puno et Huánuco, possèdent des ressources fondées sur la biodiversité présentant un potentiel pour le développement du commerce biologique. Cependant, l'extension des chaînes de valeur mondiales à des zones rurales pauvres peut être un moteur pour l'amélioration des moyens de subsistance. Afin d'aider le Pérou à atteindre ces objectifs, le PNUE procédera à une étude de son secteur du commerce biologique en 2013-2014, à la promotion du commerce de ces produits, le axée sur des chaînes de valeur spécifiques Pérou a pu accéder à 2,3 milliards de consom- susceptibles d'être développées, la simplificamateurs dans plusieurs marchés importants tion réglementaire et la demande internationale inexploitée dans des marchés clé d'exportation; d'exportation. Selon notre étude, près de 90% des entre- elle visera à rationaliser et à aider à prioriser prises péruviennes orientées vers l'exportation l'intervention publique en soutien à ce secteur. L'exportation de biens et services commerdans le secteur du commerce biologique sont certifiées 'bio' ou 'commerce équitable', ou les ciaux a augmenté globalement en moyenne de deux. Cela illustre bien la contribution du com- 5% par année entre 2000 et 2010 (OMC, Rapport merce à l'économie verte. Dans un scénario sur le commerce mondial 2012). Dans les PED, modèle où la production biologique péruvienne la contribution des exportations au PIB a été orientée vers l'exportation augmenterait de 40% de plus en plus importante, alors que selon la par année jusqu'en 2020, les ventes internatio- Banque mondiale, le commerce Sud-Sud à lui UN COMMERCE DURABLE pour une économie verte Achim Steiner Secrétaire général adjoint des Nations Unies et Directeur exécutif Programme des Nations Unies pour l’environnement L ' initiative Pour une économie verte du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) a travaillé pendant plusieurs années avec plus de 30 PED et PMA en les aidant à formuler et mettre en œuvre des réformes en matière de politiques et d'investissements qui catalysent la transition vers une économie verte. Nous avons constaté que tous les pays, peu importe à quel niveau ils se trouvent sur l'échelle de développement, sont capables de revigorer des secteurs stratégiques de leurs économies en 'verdissant' leurs processus de production et en saisissant des opportunités commerciales avec des produits et services conçus, produits, livrés et consommés de manière durable. Cela est particulièrement important pour les PED, qui s'intègrent davantage dans le commerce international, en particulier à travers l'expansion des chaînes de valeur mondiales. Le biocommerce en est un exemple. Au Pérou, le PNUE a montré en 2012 que les politiques de libéralisation du commerce mises en œuvre dans un contexte plus élargi de stabilité macroéconomique peuvent être associées à l'élargissement de l'accès au marché pour les 228 entreprises exportatrices de produits issus de la biodiversité locale. Grâce à la facilitation et 01 14 FORUM Numéro 2 2013 02 03 01La récolte du thé au Népal. © Himadri Palikhe 02La pêche artisanale est plus durable que le chalutage. © Shutterstock 03Le secteur manufacturier peut aussi être vert. © Shutterstock 04L'infrastructure doit devenir plus durable. © Shutterstock 04 seul est responsable de 50% des exportations des PED en 2010. Or, la corrélation entre le développement commercial, économique et social et la protection de l'environnement est extrêmement complexe, en particulier dans les PED et les économies émergentes. Cette complexité résulte en partie du fait que ces pays exportent surtout des produits issus de ressources naturelles et des matières premières; il est donc urgent de diversifier leurs économies et adopter des pratiques commerciales plus durables. À cet effet, le PNUE a lancé le Projet sur l'économie verte et sur les opportunités commerciales (GE-TOP). Ce projet a un triple objectif: (1) identifier les opportunités de commerce associées à la transition vers une économie verte; (2) identifier les politiques et mesures pouvant servir de facilitateurs et permettre de surmonter les difficultés de saisir les opportunités de commerce offertes par la transition vers une économie verte; et (3) aider les gouvernements, le secteur privé et les autres parties prenantes à renforcer la capacité de saisir des opportunités de commerce durables au niveau national, régional et international. Le premier résultat clé du GE-TOP est le rapport Économie verte et commerce – tendances, défis et opportunités, qui analyse le rôle du commerce vis-à-vis de l'économie verte et du développement durable. Ce rapport analyse les opportunités de commerce dans six secteurs économiques – l’agriculture, la pêche et l'aquaculture, les forêts, le secteur manufacturier, celui des énergies renouvelables et le tourisme – où le commerce durable peut avoir un effet positif sur la compétitivité économique, l'efficacité des ressources et la durabilité dans les domaines social et environnemental. Le rapport souligne que l'intégration de produits et services verts dans les marchés internationaux peut fortement inciter les producteurs et fournisseurs de services à passer au vert, alors que des politiques et stratégies en faveur d'une économie verte peuvent générer de nouveaux marchés pour des biens et services durables. Il confirme en outre qu'en termes absolus, le commerce de produits certifiés en matière de durabilité tels que les biens et services environnementaux est en augmentation. Alors que ce commerce ne représente qu'une petite partie du commerce mondial, ces marchés évoluent plus rapidement que les marchés conventionnels. Grâce à une plus grande sensibilisation des consommateurs et à des modèles de production et de consommation respectueux de l'environnement, les pratiques commerciales durables ont le potentiel d'améliorer les problèmes environnementaux et sociaux les plus urgents et, dans certains cas, offrent aux PED un avantage compétitif en termes de gains économiques. Le rapport du PNUE montre que la création d'incitatifs économiques pour la mise en œuvre de normes en matière de durabilité et de traçabilité qui permettra le suivi des produits depuis la source jusqu'au consommateur favorise le commerce durable. Permettre un partenariat effectif entre les chaînes d'approvisionnement et les exportateurs internationaux peut bénéficier particulièrement aux petits producteurs et favoriser le développement d'une chaîne d'approvisionnement durable, comprenant le stockage, l'emballage et le transport. En outre, le renforcement des institutions nationales et des cadres réglementaires peut aider à soutenir ces activités de l'économie verte et stimuler d'autres initiatives. Au vu de l'intensification du commerce international au cours des 20 dernières années, le travail entrepris par le PNUE afin d'identifier les tendances, les défis et les opportunités associés au commerce durable est essentiel pour aider les pays à améliorer leur bien-être économique, social et environnemental et à les placer dans une position plus avantageuse en vue de la transition vers une économie verte. Pour plus d'informations sur GE-TOP ou pour télécharger le rapport, allez sur www.unep.org/french/greeneconomy/ FORUM Numéro 2 2013 15 CHRONIQUE LE COMMERCE ET LES DÉFIS du développement durable Ricardo Meléndez-Ortiz Directeur exécutif Centre international pour le commerce et le développement durable (CICDD) Toute discussion autour de cadres politiques en matière d'économie mondiale, que ce soit pour l'investissement ou le commerce, devrait avoir pour priorité la recherche d'une économie prospère et à faible émission de carbone. 16 FORUM Numéro 2 2013 L e monde se dirige vers un nouveau cadre global pour le développement durable: une nouvelle série d'objectifs en matière de développement durable ont été établis lors de la Conférence de l'ONU sur le développement durable (Rio+20) en juin 2012. La convention est basée sur la vision pour 'L'avenir que nous voulons'. Sa viabilité comporte la recherche d'un niveau plus élevé de bien-être à travers la réduction de la pauvreté tout en évitant de compromettre les systèmes de survie de la Terre. Dans ce but, elle doit être fondée sur les OMD de l'ONU, censés être atteints avant 2015. Cependant, le développement durable de l'après-2015 devrait également viser des domaines tels que le climat, la biodiversité terrestre et maritime, les cycles de nitrogène et de phosphore, la couche d'ozone stratosphérique, l'eau potable, les terres saines et productives et l'évitement de la pollution chimique, l'acidification des océans et la concentration excessive d'aérosols dans l'atmosphère. Afin de répondre de manière efficace à ce défi, un monde interdépendant nécessite une compréhension approfondie du rôle joué par le commerce en tant que connecteur et catalyseur de l'économie mondiale et du développement durable dans les différents pays. Nous savons que l'intégration dans les marchés mondiaux à travers les chaînes de valeur n'est pas suffisante pour susciter des opportunités de développement. Pour que le commerce mène à l'équité et à la durabilité, il est impératif que les politiques nationales et les cadres internationaux sensibles soit cojugués avec les dimensions inter liées de la croissance économique, du bien-être social et de la durabilité environnementale. Cela peut paraître inatteignable, mais en fait le monde a déjà commencé à construire les échafaudages réglementaires et la compréhension scientifique nécessaires à rendre cela possible. De nombreux efforts sont faits en vue de surmonter les obstacles environnementaux et de rendre les chaînes de valeur plus durables et respectueuses des ressources dans le domaine de l'agriculture, de la production de biens de consommation et de produits provenant de ressources naturelles. C'est une bonne nouvelle, mais encore largement insuffisante; les efforts fournis doivent être priorisés. Martin Wolf, commentateur économique en chef du Financial Times, écrivait le 14 mai 2013: 'Léguer une planète en plein chaos climatique est une inquiétude majeure. Il n'y a pas d'autres endroits où aller et il n'est pas possible de redémarrer le système climatique de la planète. Si nous devions examiner les finances publiques d'un point de vue prudentiel, il faudrait sûrement examiner d'un point de vue prudentiel quelque chose d'irréversible et nettement plus coûteux.' En fait, nous approchons l'irréversible. En mai 2013, pour la première fois en cinq millions d'années, la concentration de dioxyde de carbone (CO2) dans l'atmosphère a dépassé les 400 parts par million (ppm), niveau considéré par les scientifiques comme critique par rapport au maintien de la température globale à des niveaux nécessaires au maintien de la vie. Cela devrait servir de signal d'alarme pour nous tous. Toute discussion autour de cadres politiques en matière d'économie mondiale, que ce soit pour l'investissement ou le commerce, devrait avoir pour priorité la recherche d'une économie prospère et à faible émission de carbone. Pour ce faire, l'accent doit être mis pétition et la consolidation agressives typiques de toute nouvelle industrie, la surproduction, les tensions commerciales et les changements de politiques; tout cela en plein boom de l'extraction de gaz et de pétrole de sources non conventionnelles. Or, jusqu'à 70% du nouveau potentiel énergétique devrait provenir des énergies renouvelables d'ici à 2030. Afin de stabiliser l'augmentation des températures d'ici à 2020, les émissions doivent être limitées. Selon les dernières analyses figurant dans le rapport Combler l'écart en matière de réduction des émissions du PNUE, l'on estime qu'il y aurait un écart considérable de l'équivalent de 5 à 9 gigatonnes de CO2 (GtCO2e) entre les promesses les plus ambitieuses de réduction et les objectifs fixés par les scientifiques. Le tableau (ci-dessous) illustre le potentiel de réduction des émissions de gaz à travers des réductions dans plusieurs secteurs liées à l'activité économique et au commerce. L'importance de remplacer les sources d'énergie à haute teneur en carbone par des sources à faible consommation de carbone dans les secteurs de l'énergie, industrie, transports, gestion des déchets et construction est indéniable. Croissance et développement axés sur l'énergie Le défi en termes d'atténuation du changement climatique est de taille, vu le niveau de consommation d'énergie fossile par habitant dans les pays membres de l'OCDE. Ce défi devient d'autant plus intimidant lorsqu'il est doublé d'une augmentation rapide de la demande en énergie, résultat de l'augmentation des modèles de Potentiel de réduction des 'émissions' par secteur richesse et de consommation dans les économies en croissance rapide telles que la Chine et l'Inde. En même temps, le monde est confronté Total mondial des émissions de gaz à effet de serre (GtCO2/année) à un besoin impératif de fournir l'accès à l'énergie à des millions de personnes dans les zones pauvres, principalement en Afrique et en Asie Statu quo «business as usual» du Sud-Est, afin de combler les besoins essen56 GtCO2 (55 – 59) tiels à la survie tels que la cuisine et l'éclairage. 55 Combler ces besoins d'une manière qui ne porte pas atteinte au climat de la planète demande une réorientation des combustibles fossiles vers des sources d'énergie propres, tout en rendant plus efficace l'utilisation des combustibles fossiles. Actuellement, la combustion de combustibles fossiles représente 90% des émissions totales de CO2 (à l'exception des feux de forêt et de l'utilisation de bois de chauffe). Le Rapport 2012 sur les tendances des 50 émissions de CO2 à l'échelle mondiale de l'Agence nééerlandaise d'évaluation environnementale montre qu'en 2011 la demande en énergie au niveau mondial a augmenté de 2,5%, ce qui correspond à la croissance moyenne de la dernière décennie. La consommation de combustibles fossiles tels que le pétrole, le charbon et le gaz naturel a continué de croître, enregistrant une augmentation de 2,9% pour le pétrole, 5,4% pour le charbon et 2,2% pour le 45 gaz naturel en 2011. Seule la consommation de charbon a représenté 30,3% de la consommation mondiale d'énergie, le pourcentage le plus Estimation moyenne du niveau élevé depuis 1969. Alors que l'on enregistre une compatible avec 2°C: évolution rapide des investissements en éner44 GtCO2 (41 – 46) gies renouvelables, celles-ci ne représentent encore qu'une petite portion de l'ensemble des énergies. Selon Bloomberg New Energy Finance, qui surveille de près les investisse40 ments dans ce secteur, les énergies renouvelables ont rencontré récemment des difficultés 2010 2020 Temps (années) dues à un ensemble de facteurs dont la com- Barre des 2°C Secteur énergétique (2,2 – 3,9 GtCO2) Industrie (1,5 – 4,6 GtCO2) 17 GtCO2e (14-20) sur le besoin de s'attaquer à la plus importante source d'émission de gaz à effet de serre – l'approvisionnement énergétique – d'autant plus que l'énergie est le principal moteur de l'activité économique dans le monde. Transports terrestres (1,4 – 2,0 GtCO2) Transports aériens et maritimes (0,3 – 0,5 GtCO2) Construction (1,4 – 2,9 GtCO2) Traitement des déchets (environ 0,8 GtCO2) Industrie forestière (1,3 – 4,2 GtCO2) Agriculture (1,1 – 4,3 GtCO2) Source: Combler l'écart en matière de réduction des émissions. Programme des Nations Unies pour l’environnement (2011) FORUM Numéro 2 2013 17 Le commerce dans une économie à faible consommation de carbone La transition vers un avenir sobre en carbone ne se fera pas sans la construction d'un cadre solide et l'adoption de politiques réglementaires à l'échelle nationale et internationale. Cela influencera les prix, l'allocation des ressources dans les secteurs privé et public ainsi que les décisions en matière de consommation. L'innovation et le déploiement de technologies à haut rendement basées sur les énergies propres seraient donc encouragés, en lieu et place de l'utilisation de combustibles fossiles. Un cadre réglementaire idéal comprendrait la réforme des subsides pour les combustibles fossiles, qui représentent des dépenses considérables pour réduire artificiellement le prix du charbon, du kérosène et de l'essence fixant ainsi des règles de jeu non équitables pour les énergies de sources propres telles que l'énergie solaire et éolienne. Selon les chiffres de l'OCDE et de l'Initiative mondiale sur les subventions (GSI), le montant des subsides pour les combustibles fossiles, qui servent de mesure contraire à l'incitation aux réformes, demeurent autour de $E.-U. 600 milliards chaque année, trois fois le montant alloué aux solutions énergétiques propres. Les politiques et le cadre réglementaire en matière de commerce auront un rôle important à jouer dans toutes les politiques et cadres pour l'atténuation des changements climatiques. D'une part, l'énergie revêt une importance spéciale. Tout en étant un produit commercialisable comme d'autres produits et services, l'énergie est essentielle aux produits et services agricoles et industriels. Compte tenu du caractère transfrontalier des politiques commerciales, celles-ci agissent autant comme barrières que comme moteurs pour les produits, technologies et services à base d'énergies propres. Les biens destinés à l'énergie propre (par exemple les pièces et composants d'installations éoliennes ou solaires) sont produits de plus en plus fréquemment à travers des accords complexes régissant les tâches, les services, les produits intermédiaires, les investissements et la propriété intellectuelle conclus entre les entreprises situées dans différentes juridictions et organisées autour de chaînes de valeur régionales ou mondiales. S'attaquer aux barrières au commerce – des droits aux normes ou politiques au-délà des frontières (par exemple les subsides ou exigences de contenu local) – permettrait aux entreprises d'optimiser la rentabilité de leurs chaînes de valeur mondiales, contribuant ainsi de manière considérable à encourager le besoin d'augmenter l'utilisation d'énergies propres à l'échelle mondiale. Des règles bien charpentées et transparentes en matière de commerce, en particulier les règles multilatérales adoptées dans des 18 FORUM Numéro 2 2013 accords de l'OMC devraient aussi fournir une plus grande prévisibilité aux acteurs du secteur privé des énergies propres, encouragent des investissements plus importants. Cela est essentiel, vu qu'il est largement reconnu que la plupart des ressources et investissements nécessaires à faciliter la transition vers un avenir énergique propre devraient provenir des marchés. Des règles plus transparentes permettront également aux gouvernements de décider jusqu'où ils peuvent aller sur leurs fronts politiques pour favoriser l'utilisation des énergies propres. Ces politiques peuvent être introduites en vue de répondre au changement climatique, et d'atteindre d'autres objectifs internes, tels qu'assurer la croissance économique, augmenter la compétitivité, favoriser le développement industriel, créer des emplois et augmenter la sécurité énergétique. Ces objectifs sont parfois en concurrence avec le besoin, et souvent l'exigence d'accords commerciaux garantissant l'accès non discriminatoire à l'importation de technologies énergétiques propres de partenaires commerciaux d'un pays donné. D'un autre côté, un manque de clarté dans les règles commerciales pourrait provoquer des tensions entre les politiques internes en matière d'énergies propres et les obligations découlant de la loi sur le commerce. Un tel manque de clarté peut provoquer des tensions commerciales entre pays, comme dans les cas soumis à l'Organe de règlement des différends de l'OMC, tels que l'affaire de l'Ontario sur le tarif de subventionnement (Canada contre le Japon et l'UE); la plainte de la Chine contre des incitatifs aux solaires photovoltaïques à contenu local et les mesures y relatives dans l'UE; et la plainte des États-Unis d'Amérique contre les mesures de contenu local prises par l'Inde dans le secteur solaire photovoltaïque. Des frictions commerciales ont également poussé certains pays à envisager de prendre des mesures antidumping et compensatoires, comme par exemple les États-Unis et l'UE contre les panneaux solaires chinois, et la Chine au sujet des importations de polysillicium par l'UE. Dans la perspective de l'OMC, le système commercial multilatéral pourrait jouer un rôle plus important en vue de faciliter une utilisation à plus grande échelle des technologies énergétiques propres: • Définir des mesures qui limitent le commerce des biens et services nécessaires à l’approvisionnement en énergies propres tout en gardant à l’esprit les problèmes de développement cruciaux. • Permettre une plus grande transparence autour des mesures et politiques visant à promouvoir les énergies propres mais pourraient en même temps restreindre le commerce. •A méliorer la clarté des règles commerciales existantes pouvant affecter le déploiement de technologies énergétiques propres et explorer le besoin de reformuler ces règles et les nouvelles dispositions à travers des nouvelles négociations – bilatérales, plurilatérales et avec l’OMC dans le but d’assurer une plus grande prévisibilité pour les décideurs politiques ainsi que pour le secteur privé, et de réduire la probabilité de futurs différends en matière de commerce. Les instruments et cadres politiques concernés devraient comprendre des révisions des droits, incitatifs et subsides aux énergies propres, exigences de contenu local, commerce des services, politiques gouvernementales en matière de passation des marchés, normes et certifications en matière de matériel lié à l’énergie propre. La transition vers une économie prospère à faible consommation en carbone s’inscrira dans un changement plus large vers une économie durable, à haut rendement en matière de ressources et plus verte. Une telle transformation requiert une adaptation active des politiques concernant l’ensemble de l’activité économique, de l’agriculture à la production et aux services. À cette fin, des efforts ont été déployés et des instruments politiques ont été conçus de manière créative et mis en place avec succès au cours des 20 dernières années; ces derniers comprennent frais, impôts, normes, certifications et incitatifs à un changement de comportement. Or, l’ampleur du changement obtenu est encore loin d’être optimal et des programmes méritants tels que ceux concernant le commerce équitable, pêcheries et scieries – certes très sophistiqués – continuent à toucher un segment modeste mais important des marchés mondiaux ou internes. À l’avenir, des politiques en matière de commerce durable devront atteindre un niveau susceptible de provoquer une véritable transformation des marchés. CHRONIQUE le véritable marché mondial des capitaux Peter Bakker Président Conseil mondial des entreprises pour le développement durable Q uel est le plus grand marché de capitaux sur Terre? Ce n’est pas la bourse de valeurs de New York, ni l’Euronext, ni même toutes les bourses de valeurs du monde réunies. Les marchés mondiaux des dettes sont certes beaucoup plus grands que tous les marchés de titres du monde, mais ce n’est pas encore cela. Non. Le plus grand marché de capitaux sur Terre, c'est la Terre elle-même. Nous commercialisions ses valeurs avant même d'avoir compris le concept de l’argent, mais nous n’avons toujours pas appris comment la valoriser. Cependant, nous reconnaissons qu’elle vaut plus que les $E.-U. 225 trillions en avoirs sur tous les marchés financiers du monde confondus. Nous gérons nos actifs financiers en vue d’une croissance, mais les actifs de capital naturel sont en diminution. Le taux d’extinction des espèces et de 100 à 1 000 fois plus grand que le taux normal habituel – un niveau jamais atteint depuis l’extinction majeure des espèces il y a 66 millions d’années. En 2050, plus de 40% de la population vivra dans des bassins hydrographiques dans une grave pénurie d’eau. L’on estime qu’il y ait environ 400 zones mortes dans nos océans, où nous avons épuisé l’oxygène nécessaire au soutien de la vie maritime, et nous surexploitons 80% des pêches maritimes. La dégradation d’écosystèmes critiques et la perte de la biodiversité terrestre qui en résulte compromettent ce marché naturel de capitaux. Plus qu’une simple écriture comptable, la nature fournit avantages et services essentiels – pas seulement les ressources que nous extrayons et consommons, comme les minéraux, l’eau et l’air. Les lits des rivières et les marais filtrent et nettoient l’eau; les bactéries transforment le nitrogène de l’air en nitrogène qui nourrit les plantes, et les abeilles fournissent les services de pollinisation afin que nous puissions cultiver nos aliments. Nous dégradons ces services à nos propres dépens – nous obligeant à nous tourner vers des substituts tels que les usines de traitement des eaux et les fertilisants. Lorsque la dégradation des écosystèmes atteint une échelle mondiale il n’y a plus de substitut possible. Le cadre Frontières planétaires a été publié en 2009 par un groupe de 28 scientifiques renommés avec le soutien de milliers de chercheurs; il définit neuf domaines clé (tels que la perte de la biodiversité, l’acidification des océans et le changement climatique) où les limites de sécurité sont proches ou ont déjà été dépassées. Franchir ces frontières pourrait provoquer des changements environnementaux abrupts voire irréversibles. Les frontières planétaires représentent également un obstacle au commerce. Les commerces peuvent-ils survivre sans le droit à de l’eau potable? Si les cycles de nitrogène et de phosphore cessent de déployer leurs activités gratuites, si les conflits autour de la disponibilité des terres cultivables, devenues rares en raison des changements climatiques liés à notre bouquet énergétique, étaient élevés au rang d’importantes stratégies géopolitiques? Plus la planète s’approche de ces frontières, moins il y aura de marge de manœuvre pour le commerce. La communauté internationale des affaires ne doit pas être paralysée par de telles questions; certes, les risques sont réels, mais les opportunités aussi. Quand les dirigeants commenceront à envisager la Terre en termes de capital naturel, ils commenceront à com- prendre sur quoi le secteur privé peut et doit agir. Les chefs d'entreprises peuvent: •M esurer l’impact. Même si la règle n'est pas encore le système métrique, nombreux sont les instruments disponibles pour mesurer, gérer et minimiser l’impact des affaires sur le capital naturel p. ex. dans les émissions, l’utilisation de l’eau, l’approvisionnement en produits forestiers et l’impact, la dépendance et l’évaluation des écosystèmes. •R evoir l'établissement des rapports. Les marchés de capitaux se basent sur les rapports. Le lancement du projet de Cadre international de reporting intégré est est un premier pas vers la transformation de la transparence dans les rapports d’entreprise. •T ravailler avec des investisseurs financiers. Les communautés financière et des affaires doivent travailler ensemble afin de comprendre comment mesurer, superviser, tenir compte et rapporter les impacts, les risques et les opportunités des capitaux naturel et social dans les affaires. •T ravailler avec les décideurs politiques. Des marchés de capitaux viables à long terme nécessitent un soutien politique à long terme. L’industrie doit avoir son mot à dire dans les domaines du choix des objectifs, l'allocation des ressources et mécanismes de financement afin d’encourager des politiques protectrices de la biodiversité et des écosystèmes. •C hercher des opportunités de développement auprès de ses pairs. La collaboration autour des leçons apprises peut créer de nouvelles opportunités. Nous luttons encore pour nous remettre de la crise des marchés financiers mondiaux de 2008 et de ses dommages collatéraux. Le marché des capitaux naturels et plus grand – et il est en crise aussi. Nous ne pouvons simplement pas nous permettre de le laisser s’écrouler. FORUM Numéro 2 2013 19 CHRONIQUE Le commerce peut-il changer les choses en Afrique? I Carlos Lopes Secrétaire exécutif Commission économique des Nations Unies pour l'Afrique Durant plusieurs années, l'Afrique n'a été qu'un simple preneur de prix dans les relations commerciales mondiales, n'ayant que peu ou pas d'influence sur les marchés. Elle a maintenant la possibilité de devenir un faiseur de prix. 20 FORUM Numéro 2 2013 l ne fait aucun doute que l'Afrique est sur une pente ascendante, tendance qui se vérifie dans toutes les économies émergentes du 'Sud'. Malgré le ralentissement de l'économie mondiale ces dernières années, ce continent présente une croissance sans précédent. Même s'il est parfois irrégulier, l'on vérifie un progrès dans la réduction de la pauvreté, et l'amélioration de la qualité de vie a offert des opportunités économiques à un grand nombre d'Africains. Le commerce représente un potentiel important d'aide au développement durable; il a joué un rôle de plus en plus un important dans la performance des économies africaines durant les 10 dernières années. En effet, la performance des échanges commerciaux a fait preuve d'une grande résilience face à la crise économique. Cependant, l'Afrique doit regarder sa croissance économique régulière à la lumière des trois piliers du développement durable – économique, environnemental et social – et déterminer si son 'développement répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs propres besoins’, comme défini par la Commission Brundtland dans son rapport Notre avenir à tous. L'année dernière, la Conférence des Nations Unies sur le Développement durable, Rio+20, a donné l'élan pour la facilitation d'une économie verte en Afrique, et il est essentiel que le continent dirige son programme de transformation vers la voie du développement durable. Comment augmenter la compétitivité de l'Afrique? Les échanges commerciaux intra-régionaux formels en Afrique ont atteint un niveau historique de 10% à 12%, même si ce taux aurait pu être beaucoup plus élevé. Ces chiffres ne tiennent pas compte des lacunes statistiques ni du commerce informel. Cependant, le commerce au sein des communautés économiques régionales croît plus rapidement que les exportations africaines vers le reste de l'Afrique et le reste du monde. Le Marché commun de l'Afrique orientale et australe seul a vu son commerce intra-africain augmenter de cinq fois depuis le lancement de la convention de libre-échange en 2000. Les échanges commerciaux de la Communauté de développement de l’Afrique australe ont plus que triplé et le commerce de la Communauté d'Afrique de l'Est a plus que doublé. Les chaînes de valeur régionales, correctement exploitées, pourraient aider l'Afrique à atteindre la capacité critique nécessaire pour devenir compétitive, tandis que le continent se tourne vers la chaîne de valeur mondiale, encourageant les opportunités transfrontalières qui permettent aux pays d'apporter leur contribution à la production de produits intermédiaires et finis. Ceci pourrait avoir une série d'effets positifs tels que la création d'emplois, les gains en productivité, la création de revenus et des liaisons en amont vers l'économie qui pourraient sortir des millions de personnes de la pauvreté. Le commerce doit encore accomplir un processus transformationnel en faveur du développement humain en Afrique comme il l'a fait dans d'autres économies en développement, et c'est à travers un lien positif avec le développement que le commerce peut jouer un rôle central. Le développement des capacités et l'amélioration de la qualité de ses ressources humaines pourraient également contribuer à rendre l'Afrique plus compétitive. Selon le Panel sur les progrès en Afrique, présidé par Kofi Annan, ex-Secrétaire général des Nations Unies, l'Afrique est au bord d'un dividende démographique en raison de la moyenne d'âge actuelle sur le continent, de 18 ans. Au cours des 10 dernières années, le nombre de jeunes âgés de 15 à 24 ans en Afrique est passé de 133 millions à 172 millions. En 2020 ce chiffre devrait atteindre 246 millions. Cette 'explosion démographique des jeunes' pourrait considérablement changer la dynamique sociale – positivement ou négativement – comme le montrent les récents soulèvements en Afrique du Nord. L'investissement dans le développement des compétences, dans la formation technique et vocationnelle, ainsi que dans une meilleure éducation universitaire est nécessaire pour que tout le continent puisse bénéficier de cette ressource naturelle. Nous ne devons pas perdre de vue les bénéfices de l'industrialisation basée sur les matières premières ni ceux de l'amélioration de la performance du secteur agricole, qui emploie une majorité d'Africains. Les gouvernements doivent jouer un meilleur rôle à travers une réglementation appropriée de la production et de la mise en place d'un mélange adéquat de politiques commerciales et industrielles nécessaires au soutien des industries manufacturières locales qui offrent des débouchés et créent des emplois. sources pour le développement et la transformation de l'Afrique est nécessaire. Conformément au Cadre institutionnel du développement durable établi à Rio, l'Afrique doit faire meilleur usage de ses ressources naturelles et s'assurer en même temps que les bénéfices soient transmis au générations futures. C'est exactement ce que cherche à faire la Vision pour l'industrie minière en Afrique adoptée par les Chefs d’État africains en 2009, à travers un cadre intégrant les trois objectifs de durabilité: économique, social et environnemental. La possibilité d'investir simultanément dans l'infrastructure et l'exploitation minière, par exemple en créant des corridors de développement axé sur les ressources naturelles, offre une approche pragmatique pour débloquer non seulement des projets en matière d'exploitation minière et d'infrastructure, mais aussi d'autres opportunités collatérales économiques et sociales, et ce au-delà des frontières nationales. Ce concept a fait ses preuves au Botswana, qui a créé une politique de valorisation, et en Afrique du Sud, qui a créé des politiques en matière d'exploitation minière pour établir de liaisons en amont vers son économie avec une dimension de développement durable et équitable. Il existe aussi de nombreuses opportunités de croissance pour une économie verte à travers diverses initiatives en cours à l'échelle régionale et nationale, axées sur l'atténuation des impacts négatifs du changement climatique. Par ailleurs, des efforts sont faits en vue de développer des stratégies sous-régionales pour la croissance d'une économie à faible consommation de carbone. Lorsque ces efforts auront abouti, ils pourraient aider le continent à faire des pas de géant vers des solutions pour des énergies durables. De meilleurs échanges commerciaux Durant plusieurs années, l'Afrique n'a été qu'un simple preneur de prix dans les relations commerciales mondiales, n'ayant que peu ou pas d'influence sur les marchés. Elle a maintenant la possibilité de devenir un faiseur de prix. L'élargissement des pistes de collaboration Sud-Sud, notamment le commerce intra-africain, à travers la proposition de la zone de libre-échange, rompent le monopole des pays développés en offrant un meilleur environnement pour les décideurs politiques et un meilleur choix en termes de partenariats commerciaux. Les facteurs fondamentaux en matière d'élaboration de politiques, d'infrastructures, de financement et de maintien des liens entre le commerce et les autres secteurs de l'économie doivent être travaillés afin de rendre cela possible. Contraintes sociales et environnementales Par ailleurs, les dirigeants Africains doivent mettre en place des politiques garantissant l'accès au capital, technologie et main-d’œuvre. Des mesures doivent être mises en place pour créer l'égalité dans les négociations commerciales à l'échelle internationale, garantissant ainsi au secteur industriel grandissant du continent des échanges commerciaux et des régimes tarifaires en matière d'exportation équitables. Jusqu'à 90% du revenu total de l'Afrique provenant du café, calculé comme le prix moyen au détail d'une livre de café torréfié et moulu, va vers des pays consommateurs. Cela souligne clairement les bénéfices qui pourraient être réalisés par les pays africains et profiter à ces derniers s'ils devaient augmenter les processus de création de valeur ajoutée. L'approvisionnement régulier, accessible et fiable des industries en énergie doit aussi être assuré. Les normes minimales de durabilité doivent également être adoptées dans l'exploration des minéraux et des ressources naturelles. Quels sont les options durables disponibles? Le secteur des minéraux en Afrique a connu un essor des matières premières ces dernières années, mais hélas cela ne s'est pas traduit en retours sur investissements plus importants. dans les pays africains. Une vision claire de l'utilisation inclusive et de la gestion des resFORUM Numéro 2 2013 21 CHRONIQUE promouvoir l'esprit d'entreprise auprès des petits exploitants ougandais Au moyen d'une application sur leur smartphone, ils fournissent des informations essentielles sur l’agriculture à leurs communautés, contribuant à une augmentation des revenus des agriculteurs et à l’amélioration de leurs moyens de subsistance. Les principales Sean Paavo Krepp informations sont celles contribuant à augmenDirecteur pour l'Ouganda ter la productivité (meilleures pratiques agriAppLab de la Fondation Grameen coles, méthodes de traitement des maladies et parasites, et prévisions météorologiques, ne chaîne d’informations en temps etc.) et celles permettant aux agriculteurs de réel accessible sur un smartphone, se connecter aux marchés et de s’engager de une plate-forme technologique sur manière effective dans les chaînes de valeur internet (cloud) et un réseau d’intermé- agricoles (y compris la mise à jour des prix diaires désignés par les pairs: voilà comment la du marché et les répertoires des fournisseurs Fondation Grameen cherche à changer les vies et acheteurs). Cette double approche permet des petits exploitants en Ouganda. Avec plus aux petits exploitants d’augmenter leur producde 1 100 travailleurs du savoir communautaire tion et de maximiser les retours sur des ventes (CKW) déployés dans tout le pays, l’entreprise supplémentaires. Cela permet aux agriculteurs sociale connue comme l’Initiative CKW n’est d’augmenter leurs revenus de manière expopas prête de ralentir le rythme. En effet, la Fon- nentielle et leur apporte le soutien entrepreneudation Grameen envisage de doubler ta taille de rial nécessaire pour passer d’une agriculture son réseau CKW en Ouganda cette année; elle a de subsistance (culture de consommation) à déjà dirigé une opération similaire en Amérique une agriculture commerciale (lucrative). latine et envisage de reproduire ce modèle dans D'autres moyens de communication tels d’autres marchés dans un proche avenir. que les SMS et le Farmer Call Center, assuré par une équipe de spécialistes en agriculture parlant neuf des langues locales, viennent compléComment cela fonctionne Les CKW sont désignés par leurs communau- ter la palette d’activités des CKW et améliorent tés sur la base de critères tels que des expé- l’accès aux connaissances offertes par la base riences précédentes de leadership et le souhait de données agricole de la Fondation Grameen. de rendre service à la communauté. Les CKW reçoivent en prêt un 'kit entreprise', qui com- Flux d’informations bilatéral et en temps réel prend un smartphone, une station de recharge La force des technologies modernes réside en à énergie solaire, une balance et du matériel leur nature interactive, exploitée par la Fondation publicitaire. Grameen de différentes façons. L’information est divulguée aux communautés rurales à travers les Information en temps réel sur la culture et la cueillette. CKW, mais aussi collectée et renvoyée à la base © Grameen Foundation de données de la Fondation Grameen, rendant l’opération hautement réactive. La Fondation Grameen utilise ces informations afin de superviser et évaluer les activités des CKW, perfectionnant en permanence tous les aspects du programme, y compris la divulgation de son contenu, le fonctionnement de sa technologie et la manière dont les CKW reçoivent les incitations. La Fondation Grameen n’est pas la seule organisation à bénéficier de cette capacité de collecte d’informations du dernier kilomètre pour les sociétés rurales. CKW conduit égale- U 22 FORUM Numéro 2 2013 ment des enquêtes sur les téléphones mobiles auprès de leurs communautés au nom des partenaires de la Fondation Grameen, dont des organisations non gouvernementales, agences de développement, organisations gouvernementales et entreprises du secteur privé. Impact Depuis sa conception en 2010, l’Initiative CKW a déployé plus de 1 100 CKW à travers 18 320 villages dans 36 districts de l’Ouganda. Elle a fourni à plus de 176 000 petits exploitants les informations essentielles contenues dans la base de données agricole de la Fondation Grameen, et l’on estime à 880 000 le nombre de ses bénéficiaires. 1,2 million d’interactions directes avec les agriculteurs ont déjà eu lieu, et ce chiffre ne cesse d’augmenter. Une évaluation indépendante sur l’Initiative CKW, conduite par l'Institut international de recherche sur les politiques alimentaires, qui a comparé un groupe de petits exploitants ayant accès aux services d’information des CKW à un groupe de contrôle qui n’avait pas encore accès à ces services. Elle a montré que les agriculteurs ayant accès aux services d’information des CKW ont augmenté de 34% l’accès aux services de promotion agricole, et de 17% leurs connaissances en matière d'agriculture; de plus, leurs connaissances sur les prix de marché ont augmenté de 45%; 92% d'entre eux ont déclaré agir sur la base des informations reçues. L'avenir Compte tenu de l’impact positif de l’Initiative CKW sur la recherche ainsi qu’à travers un nombre grandissant d’investissements par les partenaires de la Fondation Grameen, l’Initiative CKW continuera de grandir. Le monde est de plus en plus connecté à la technologie, et le secteur du développement peut sans doute en bénéficier. L’Initiative Grameen autonomise en créant le contact: elle permet à des organisations de mieux servir les communautés rurales en les mettant en relation avec ceux qu’ils cherchent à servir, et aux petits exploitants agricoles d’améliorer leurs moyens de subsistance en les mettant en relation avec des connaissances vitales et avec un nombre illimité d’opportunités entrepreneuriales. CHRONIQUE Préserver l'Afrique à travers le développement du leadership Niddi Nwuneli Fondatrice LEAP Afrique L a durabilité: une question de préservation et de perpétuité. Elle inspire un engagement envers l'intendance: la responsabilité de la gestion d'une ressource confiée à la garde de quelqu'un pour la prochaine génération. C'est aussi ce qui se passe chez LEAP Africa, et la ressource clé qu'elle essaie de préserver, c'est le continent africain. Créée en 2002, sur la base de la prémisse que le manque de leadership est un facteur déterminant qui limite le développement dans le continent, LEAP Africa correspond à Leadership, Efficacité, Responsabilité (Accountability) et Professionnalisme. Organisation à but non lucratif ayant son siège au Nigéria, LEAP cherche à permettre aux jeunes, chefs d'entreprise, entrepreneurs sociaux et titulaires d'emplois dans les secteurs privé et public de se développer à travers une formation en leadership. L'organisation leur permet d'acquérir des capacités en vue de leur développement personnel et au sein des organisations et de leur communauté. Grâce au Programme Leadership, Éthique et Civilité, intégré dans les écoles publiques du Nigéria, les adolescents développent des aptitudes à la vie et sont appelés à répondre aux besoins pour le bien commun de leurs communautés locales. 'Retrouver mon environnement' est l'un des 500 projets communautaires mis en place par les adolescents dans le cadre du programme. Dans le cadre de ce projet, un groupe d'élèves de l'École secondaire communautaire Umuokpu ont identifié un problème d'érosion du sol dans leur communauté, Anambra, située à l'est du Nigéria. Avec le soutien de la communauté locale et du Département d'État pour l'environnement, les élèves ont planté une série d'arbres, dont des palmiers et des arbres à pain. Ces arbres devraient non seulement résoudre le problème de l'érosion, mais aussi fournir des fruits comestibles et des abris à la communauté. Plus significatif peut-être, ces jeunes, en prenant l'initiative et en dirigeant les efforts coopératifs, ont développé leur confiance en leur capacité créatrice et en l'impact positif qu'ils peuvent avoir sur leurs communautés. Segun Shetan, bénéficiaire du Programme sur le Leadership des Jeunes piloté par LEAP, a débuté son incursion dans les entreprises sociales en 2004. Touché par la pauvreté, la violence, la prostitution et d'autres crimes qui caractérisent Ajegunle, bidonville de Lagos, Segun a créé la Bright Youth Organization, initiative qui encourage les élèves des écoles secondaires et les soutient dans l'accomplissement de leur potentiel. Il a organisé des ateliers de deux jours présentant des modèles de comportement populaires pour motiver ces jeunes. Afin d'assurer la continuité de la Bright Youth Organization, il a créé une blanchisserie qui emploie les jeunes et dont les bénéfices sont utilisés pour financer les programmes de l'organisation. Il a également organisé une troupe de danse composée de jeunes intéressés au monde artistique, créant ainsi un catalyseur positif de leur énergie. En 2010, Segun a créé Bravehearts Entertainment Kulture, qui œuvre à la promotion des talents créatifs des jeunes défavorisés. Création d'entreprises durables LEAP a lancé le Programme de leadership en entreprise en 2003 pour soutenir les chefs d'entreprise dans la création d'entreprises durables. À travers ce programme, LEAP fournit les connaissances, les compétences et les instruments nécessaires pour diriger et repositionner une entreprise pour une période de 20 ans ou plus. Tara Fela-Durotoye, propriétaire d'un institut de beauté, élue cette année Jeune leader mondiale par le Forum économique mondial, est une élève de ce programme. Elle parle de son expérience: 'Ce programme m’a rendue consciente de l’importance des valeurs fondamentales et m’a appris comment rendre mon affaire plus durable. Plus important encore, j’ai appris que la structure organisationnelle est un outil pour la réussite de la création d’une entreprise. Maintenant, je gère mon entreprise sur la base de ces principes et gardant à l’esprit ceux qui vont me succéder.' Outre les programmes de formation, LEAP investit en permanence dans la recherche pour soutenir les chefs d’entreprise à affronter des défis toujours plus importants. LEAP a aussi publié huit livres traitant de sujets liés à l’éthique, à la gouvernance, à la planification de la succession, à la gestion des talents et de l’organisation, sur la base des meilleures pratiques internationales appliquées dans un contexte local. LEAP a déjà touché 250 000 personnes à travers ses programmes et ses activités. Parmi ces personnes se trouvent 20 000 jeunes qui ont créé plus de 500 projets de changement dans leurs communautés locales. Que ce soit en permettant à des jeunes et à des entrepreneurs de se développer ou en conduisant et en publiant des recherches pour soutenir la longévité des entreprises, LEAD Africa est déterminée à contribuer à la construction d’un avenir durable pour tous les Africains. 01Discussions autour de l'avenir de l'entrepreneuriat en Afrique. © LEAP Africa 02Élèves du programme de leadership en entreprises de LEAP. © LEAP Africa 01 02 FORUM Numéro 2 2013 23 CHRONIQUE AGRICULTURE: SEMER LES GRAINES d'un avenir durable vaises herbes. Les premiers essais montrent que les agriculteurs peuvent baisser de jusqu’à Directeur général 30% leurs besoins en eau et de jusqu’à 60% les coûts énergétiques de production. Cependant, Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture ces économies ne seront atteintes que s’ils reçoivent un soutien solide et consistant en vue d’améliorer le bien-être social et économique des agriculteurs et des autres petits exploitants agriculture est une source directe d’em' plois et de revenus pour des millions de qui constituent plus de 70% des personnes personnes – et une source d’aliments touchées par l’insécurité alimentaire dans le pour nous tous. Avec une population monde vivant dans les zones rurales des PED. La clé, c’est l’investissement. Les agriculmondiale devant atteindre 9 milliards d’ici à 2050, nous n’avons pas d’autre choix que de teurs à revenu faible et intermédiaire invesmettre l’agriculture au centre des efforts en vue du développement durable. L’agriculture utilise déjà 11% de la surface de la terre pour les cultures et elle est responsable de 70% de la consommation d’eau et de 14% des émissions de gaz à effet de serre. Maintenir la même utilisation intensive des ressources naturelles et de produits chimiques pour augmenter la production constituerait un lourd tribut à être payé par l’environnement. Nous devons trouver d’autres manières de produire ce dont nous avons besoin. En 2011, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a publié le guide Produire plus avec moins afin d’aider la plupart des producteurs pauvres dans le monde à utiliser des moyens plus durables pour augmenter la production d’aliments et la productivité agricole. Cette approche a permis à des agriculteurs dans les PED de s’adapter au changement climatique et de minimiser ses effets, de conserver et de restaurer des nutriments dans le sol et d’utiliser davantage de méthodes naturelles ou à faible utilisation de produits chimiques pour des procédés tels que la lutte contre les parasites et les mauJosé Graziano da Silva L tissent déjà plus de $E.-U. 170 milliards chaque année dans leurs fermes, ce qui correspond à environ $E.-U. 150 par agriculteur. Cela représente trois fois le montant de toutes les autres sources d’investissement réunies, quatre fois plus que les contributions par le secteur public et plus de 50 fois plus que l’assistance officielle au développement accordée à ces pays. Mais le niveau d’investissement actuel n’est pas suffisant. En effet, des familles pauvres qui dépendent directement de l’agriculture, de la pêche ou des forêts pour leur subsistance et leur revenu sont souvent les plus vulnérables. 01 24 FORUM Numéro 2 2013 02 03 04 Ils manquent d’accès approprié aux marchés, aux infrastructures, aux services financiers, aux ressources telles que la terre et l’eau et aux politiques d’éducation et de soutien. Un développement véritablement durable doit s’attaquer à toutes ces questions, y compris au besoin d’opportunités d’échanges commerciaux inclusifs et de soutien aux petits exploitants désirant explorer ces opportunités. À titre d’exemple, la FAO a récemment publié une série de guides de marketing pour l’exportation en partenariat avec Pacific Island Trade and Invest, agence régionale active dans la promotion du tourisme. Ces guides accompagnent les petits exploitants à travers des questions telles que la conformité aux réglementations gouvernementales en matière de marchés cible, la conformité aux normes industrielles et l’évaluation de la demande et la compétitivité de produits tels que la noix de coco, le café et les piments. La FAO coopère également avec les gouvernements des pays émergents afin d’aider leurs producteurs à obtenir de meilleures informations sur le commerce des produits forestiers et sur les questions de marketing. Dans le secteur de la pêche, nous aidons les pays à 01Une agricultrice consulte un instructeur à Rumonge, au Burundi. © FAO/Giulio Napolitano 02Des pêcheurs vendent le poisson pêché sur les rives du Lac Victoria, au Kenya. © FAO/Ami Vitale 03Un facilitateur commente les résultats des améliorations d'une culture de cacahuètes avec des agriculteurs locaux à Dangala, en République Centrafricaine. © FAO/Riccardo Gangale 04Un spécialiste de la FAO apprend aux agriculteurs locaux à JalalAbad Oblast, au Kirghizistan, de nouvelles méthodes. © FAO/Sergey Kozmin freiner les pratiques économiquement injustes et irrespectueuses de l’environnement. Nous nous réjouissons que les gouvernements s’attaquent de plus en plus à ces questions dans leurs programmes nationaux et utilisent des mécanismes et organisations régionales et internationales qui soutiennent ces processus. En Afrique, la FAO offre soutient et conseil dans le cadre des efforts déployés dans le sens de favoriser le commerce intra-régional de matières premières stratégiques telles que céréales, huiles et graisses, produits laitiers, viande et produits à base de viande, sucre et boissons. Aujourd’hui, le commerce intraafricain rencontre une série d'obstacles; les importations d’origine non-africaine comblent les lacunes entre la production interne et la demande, alors que ces lacunes pourraient être comblées par des surplus commercialisables existant dans le continent. À l’échelle régionale et internationale, une plus grande attention devrait être portée à assurer l’inclusion des pays dans les processus touchant les échanges commerciaux mondiaux et la reconnaissance des intérêts des petits producteurs dans ces processus. Les PED ont également besoin d’espace pour articuler des politiques commerciales compatibles avec le développement rural national et les objectifs en matière de sécurité alimentaire. Sans un soutien adéquat pour l’accès aux marchés internes, régionaux ou internationaux, les familles pauvres risquent de demeurer dans l’insécurité alimentaire. La dernière Conférence sur le développement durable, Rio+20, a envoyé un message très clair concernant le lien entre sécurité alimentaire et durabilité: nous n’atteindrons pas l’avenir que nous voulons si des millions de personnes sont laissées pour compte, souffrant de la faim et vivant dans une pauvreté extrême. Cette idée a aussi été soulignée par Défi Faim Zéro, initiative lancée par le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, lors de Rio+20. Les graines pour un avenir durable sont semées non seulement sur le terrain, mais aussi à travers l’information, les politiques, les conventions commerciales et l’action à l’échelle locale, régionale et internationale. Les fruits de ces efforts permettront d’améliorer les vies des plus vulnérables, puisqu’ils seraient bénéfiques à nous tous. FORUM Numéro 2 2013 25 CHRONIQUE Sensibilisation durable à travers les arts créatifs des jeunes et l’expertise de Nokia dans les nés – qui ont participé activement à plusieurs technologies durables, les bourses visent des initiatives et ont déjà laissé leurs marques dans jeunes artistes dans les domaines suivants: arti- leurs communautés. Ce programme met l'accent sur la création sanat, musique, danse, cinéma, photographie, design, technologie et médias sociaux pour le d'une conscience et de connaissances, et endéveloppement de projets mettant leurs talents gage les jeunes dans des discussions avec les créatifs au profit de la gestion de l’eau, de l'éner- experts sur la consommation durable. Divers Nisha Agrawal gie, du transport et des déchets électriques programmes de formation sont en cours avec Directrice générale et électroniques. Ces projets ont pour but de la collaboration d'organisations et institutions provoquer des discussions afin de redéfinir la réputées telles que WWF India, Energy and Oxfam Inde vision des villes sur la consommation durable et Resource Institute et Development Alternative. la manière dont la population peut adopter des Ils offrent aux candidats l'opportunité d'acquérir et de développer une meilleur compréhension es jeunes sont les véritables agents du styles de vie durables. Après un processus de sélection rigou- des modèles de consommation et des défis auxchangement de demain, et leur participation active est nécessaire pour abou- reux, 200 candidats ayant une expérience dans quels leur environnement local est confronté. tir à un changement social radical dans les arts créatifs ont été choisis dans les deux Dans les ateliers ludiques, par exemple, ils se nos sociétés. Dans le cadre de son programme villes. Outre leurs portfolios, ils ont dû démon- focalisent sur des éléments et stratégies pour de citoyenneté active, Oxfam India œuvre trer leur motivation et leurs connaissances sur favoriser l'engagement du public et la sensien vue de la protection, de la promotion et de la consommation et le développement durables. bilisation à un produit, et sur la promotion des Les candidats choisis ont ensuite été ad- changements de comportement dans leurs l’avancement des droits humains des jeunes afin de construire un monde durable pour eux mis, informés de leur mission, partagés en 27 communautés locales. Lors de l'événement de clôture du proéquipes, encadrés par des experts en induset pour leurs sociétés. gramme, chaque équipe présente ses produits Dans un effort innovateur pour créer un tries créatives, environnement et durabilité. Le processus d'encadrement constitue créatifs portant un message en faveur de la réseau mondial de jeunes informés et remarquables en Inde, qui comprennent l’urgence la particularité de ce programme de bourses. durabilité. Ils s'adresseront ensuite au public des 'droits des consommateurs' et sont désireux Les participants reçoivent une formation dans en général, à travers le contact avec des écoles, de sensibiliser aux questions de consommation leur domaine d'intérêt et sont encadrés par des universités, associations pour le bien être des durable, Oxfam India s’est associée à Nokia mentors dans leurs domaines de création. Ces résidents et institutions culturelles, les arts afin de développer un programme de bourses mentors sont non seulement des professionnels créatifs pour montrer le potentiel de la redéfiniappelé Créer pour inspirer. Il s’agit d’un défi de la photographie, de la musique, du cinéma tion de la consommation de ressources rares. créatif appelant les jeunes à sensibiliser la et des arts, entre autres, mais aussi des entrepopulation à la nécessité d’une consommation preneurs innovateurs et des jeunes acteurs du Pour en savoir plus, veuillez visiter: effective et judicieuse et d'une gestion de l’eau, changement social – et des individus passion- www.nokia.com/in-en/createtoinspire/ de l’énergie, du transport et des déchets à travers des moyens créatifs. Vers une plus grande sensibilisation à la durabilité à travers la danse. © Oxfam India Lancée le 12 août 2012 pour coïncider avec la Journée internationale de la jeunesse, le projet Créer pour inspirer a réuni des jeunes de 18 à 23 ans venant de Dheli et d’Hyderabad pour se pencher sur des questions relatives à la consommation durable dans leurs villes respectives. Le programme offre aux jeunes une plate-forme dans laquelle ils peuvent utiliser les arts créatifs pour créer des projets d’action social innovateurs qui provoquent des discussions drôles et surprenantes sur la consommation durable. En ligne avec le mandat d’Oxfam India en vue de la création de capacités et compétences L 26 FORUM Numéro 2 2013 CHRONIQUE CRÉER UN TOURISME DURABLE à partir de la beauté naturelle infinie du tourisme et soutient maintenant son développement – même s'il n'est pas leur activité principale; il a également reconnu l'impact de l'industrie sur l'économie nationale. En effet, selon le Conseil mondial du voyage et du tourisme, le tourisme aurait été responsable de 5% du PIB Sandra Elena Abreu Ortiz de la Colombie et créé plus de 400 000 emplois. Administratrice Même si ces chiffres sont modestes comparés Avia Export à ceux d'autres pays, l'industrie du tourisme de la Colombie connaît une croissance annuelle de près de 5%. Et il y a des raisons de croire qu'elle n'a pas a Colombie compte actuellement parmi les économies qui connaissent le plus fini de se développer. C'est un pays magnifique fort taux de croissance d'Amérique du avec un grand nombre de destinations offertes Sud. Malgré les turbulences dans l'éco- aux visiteurs: au nord, la mer des Caraïbes et à nomie mondiale, elle a atteint en 2012 un taux de l'ouest, l'Océan pacifique. Il possède une forêt croissance de 5,3%, et a été placée par l'Econo- tropicale au sud, et à l'est le fleuve Orénoque mist Intelligence Unit sur la liste des marchés et aussi l'impressionnante cordillère des Andes. émergents les plus attractifs, connus comme Grâce à son abondant environnement tropical, les CIVETS (Colombie, Indonésie, Viet Nam, la Colombie est classée au deuxième rang des Égypte, Turquie, Afrique du Sud). La réputa- pays ayant la plus grande diversité en termes de tion de la Colombie comme étant un pays dan- flore et faune. Les villes colombiennes attirent gereux disparaît rapidement à mesure que les également les touristes: la vibrante capitale, conditions de sécurité s'améliorent. Son écono- Bogota, Medellín, considérée comme la ville la mie est considérée comme stable, propice aux affaires. C'est également une destination qui figure de plus en plus sur la liste d'incontour© istock nables des touristes étrangers. L'industrie du tourisme en Colombie fleurit en partie grâce à l'engagement du gouvernement, qui a reconnu l'importance de ce secteur pour le développement de l'économie. Les communautés locales ont été impliquées dans le processus de développement de l'industrie du tourisme du pays, et les entrepreneurs ont été encouragés à améliorer leurs normes de qualité, le niveau des services offerts et des infrastructures pour faire du patrimoine naturel et culturel de la Colombie une expérience inoubliable pour ses visiteurs. L'expansion de l'industrie du tourisme a également été possible grâce à une série de facteurs, parmi lesquels les programmes éducatifs visant à renforcer le rôle des communautés locales. Pour les visiteurs, l'accès au pays a été facilité avec près de 900 vols internationaux par semaine. Partout dans le pays, le secteur privé a saisi le potentiel de l'industrie L plus innovatrice du monde, Cali, la capital du monde de la salsa et Barranquilla, le berceau du fameux carnaval colombien. Sans oublier le produit d'exportation le plus connu du pays: les visiteurs ont aussi la possibilité d'apprendre tout ce qu'il y a à savoir sur le café colombien, considéré comme l'un des meilleurs cafés du monde. Cependant, pour attirer les touristes en Colombie, les secteurs privé et public doivent réunir leurs efforts. C'est pourquoi depuis plusieurs années déjà, Avia Export travaille en partenariat avec le Ministère du commerce, de l’industrie et du tourisme afin de fournir un cadre pour le secteur du tourisme. Dans un effort conjoint public-privé, Avia Export organise et promeut un pays qui, malgré sa beauté et ses infinies ressources naturelles et culturelles, a encore un long chemin à parcourir avant d'exploiter son potentiel et se positionner comme une destination de première classe et assurer ainsi une durabilité économique, environnementale et sociale. Mais la Colombie y arrive – lentement mais sûrement. © David Otalora © David Otalora FORUM Numéro 2 2013 27 PLEINS FEUX SUR LES ENTREPRISES Autonomisation biologique dans une communauté zambienne techniques pour demander une certification entreprise de transformation d'aliments de cette ou pour exploiter une usine de transformation manière. 'Depuis le départ, mon mari et moi Susanna Pak d'aliments. avons compris que nous devions faire quelque Rédactrice junior 'En Zambie, nous partons du principe que chose pour la communauté,' dit Eriksson. Centre du commerce international nos cultures sont biologiques car les mangues poussent sans aucune aide,' dit Eriksson. 'Nous Des champs aux usines orothy Eriksson et son époux Rolf sont avons compris que pour être bio, il faut être cer- Redonner à la communauté signifiait offrir co-propriétaires de la ferme Chan- tifié. Il faut une traçabilité.' Les Eriksson ont tout aux agriculteurs locaux des emplois durables. kwakwa à Kabwe, en Zambie, depuis appris sur la certification à travers la formation Chankwakwa a organisé les familles d'agri40 ans. Au cours des années, ils ont et le soutien de diverses organisations, dont le culteurs en coopératives et les a formées pour atteint plusieurs objectifs, mais un évènement Centre du commerce international (ITC). Outre la culture de mangues, goyaves, bananes et en particulier reste gravé dans leur mémoire: le la certification HACCP, Chankwakwa a aussi tomates. Ce faisant, Chankwakwa a exploité ce jour où leur entreprise de transformation de pro- été certifiée par la Fondation Fairtrade, qui s'as- qu'Eriksson décrit comme un nouveau marché duits naturels a reçu son certificat analyse des sure que les agriculteurs reçoivent au moins le dans le pays. risques − points critiques pour leur maîtrise prix du marché pour leurs produits, et Ecocert, 'Les manguiers étaient plantés pour qu'on (HACCP), atteignant les normes internationales norme internationale pour produits biologiques. puisse s'asseoir dessous et recevoir nos invités. Les Eriksson avaient une raison pour créer leur On n'avait jamais regardé la mangue comme un de sécurité alimentaire. 'Je me souviens des cris des filles quand je leur ai dit: 'on l'a eu!'. Nous étions en délire car 01Mangue mûre pour les exportations biologiques. © Chankwakwa nous savions qu'une porte avait été ouverte', a dit Dorothy Eriksson. Le certificat HACCP a ouvert la voie pour que Chankwakwa tente ses chances s'ouvrant à l'étranger. L'entreprise a commencé à envoyer de mangues séchées à Hansen’s Ice Cream au Danemark au printemps 2011 et elle exporte maintenant 300 kg de mangues à Hansen's chaque année. Chankwakwa est bien établie au niveau local, avec des produits tels que confitures, fruits secs et sauces tomate vendus dans les plus grandes chaînes de supermarchés: Pick n Pay, SPAR et le groupe Shoprite. Selon Eriksson, Chankwakwa est en train de devenir une marque connue en Zambie. Depuis qu'elle est passé en 2000 d'une exploitation uniquement agricole à une société de transformation d'aliments, ses recettes ont augmenté d'environ 200%. Mais cela n'a pas été sans difficultés. D La certification Les affaires ont été 'très stagnantes' durant les cinq premières années, se souvient Eriksson. En tant qu'agriculteurs commerciaux, les Eriksson ne possédaient pas les connaissances 28 FORUM Numéro 2 2013 05 03 02 fruit qui pouvait rapporter de l'argent', dit Eriksson. 'C'est incroyable, nos agriculteurs sont si enthousiastes maintenant qu'ils commencent à récupérer leur graines et faire d'autres semis.' Des gens qui jetaient des fruits frais parce qu'ils n'arrivaient pas à les vendre avaient alors la possibilité de les vendre à un prix équitable. Chankwakwa emploie aujourd'hui 232 agriculteurs pour cueillir des fruits et légumes, avec un groupe travaillant vers l'usine de transformation à Kabwe et un autre dans la province de Luapula, a environ 700 km de distance. Eriksson dit que les agriculteurs bénéficiaires de l'ITC à Luapula reçoivent une formation sur la certification biologique et sur la gestion des manguiers, ce qui a permis une plus grande récolte de fruits et la prolongation de la saison de transformation de la mangue. En conformité avec son but de fonctionner comme une entreprise durable et respectueuse de l'environnement, Chankwakwa utilise six séchoirs à énergie solaire et un séchoir électrique pour traiter les fruits et les légumes. Une fois transformés, ils sont utilisés pour des confitures ou sauces, ou emballés comme fruits secs pour être vendus dans les marchés à travers le pays. 04 Trouver des nouveaux partenaires à l'étranger pourrait permettre une croissance considérable de l'entreprise, car les produits seraient envoyés par dizaines de kilos, plutôt que par 10 ou 20 kg à la fois, comme c'est le cas pour les envois aux supermarchés locaux. Plus que de trouver de nouveaux acheteurs, le coût de la livraison des produits demeure le plus grand défi. Selon Eriksson, l'envoi d'un kilo de mangues séchées au Danemark coûte environ $E.-U. 5. 'La Zambie n'a pas de litoral, et pour envoyer les produits en Europe, les frais de port sont si élevés que le prix de nos mangues n'est pas si compétitif', dit Eriksson. Malgré le 'fantastique' retour sur le goût et la qualité des mangues, à la fin, c'est toujours une question de prix. Afin de rendre leurs produits attractifs pour les acheteurs à l'échelle mondiale, Eriksson est d'avis que Chankwakwa devra envoyer des plus grandes quantités à plus d'acheteurs à la fois. 02Plus de 230 agriculteurs employés pour la récolte de fruits et légumes. © Chankwakwa 04Mangue séchée prête à être utilisée pour de la confiture ou des sauces. © Chankwakwa 03Les manguiers protègent aussi du soleil. © Chankwakwa 05Famillles et communautés bénéficient des nouvelles opportunités d'exportation. © Chankwakwa menter le nombre d'agriculteurs qu'elle emploie de 200 à 500 pour répondre à une demande grandissante. Chankwakwa est en pourparlers avec de nouveaux clients intéressés par la livraison de mangues, ce qui pourrait augmenter les exportations à trois ou quatre tonnes de mangues par année, au lieu des 300 ou 400 kg actuels. L'expansion de l'entreprise pourrait aussi comprendre le travail avec les agriculteurs de la province occidentale de la Zambie, puisque selon Eriksson 'il n'y a pas assez de mangues' dans la province centrale. Bien qu'axé actuellement sur les mangues, à mesure que l'entreprise grandit, son attention sera aussi portée 'Grands espoir' en l'avenir Les fondateurs de Chankwakwa dirigent leur vers d'autres fruits et légumes. Chankwakwa a fait beaucoup de chemin entreprise avec quatre objectifs en tête: fabriquer des produits de haute qualité, autonomiser depuis ses débuts en 1973, quand les Eriksson la population des zones rurales, devenir le plus se sont donné pour mission de redonner à leurs Le défi d'explorer les marchés mondiaux Même si le marché local pour ses produits grand producteur de fruits séchés au soleil du voisins. 'Nous ne voyions pas cela comme une continue de s'agrandir et si les agriculteurs pays et exporter vers les marchés régionaux et entreprise, nous n'avions même pas envisagé trouvent plus d'opportunités d'emploi, Chan- étrangers. Eriksson dit avoir de 'très grands espoirs' qu'elle serait exportable un jour', dit elle. 'Nous kwakwa manque d'acheteurs dans le marché mondial. Hansen’s Ice Cream, au Danemark, d'atteindre le quatrième but. Durant les deux nous sommes d'abord identifiés à la commuprochaines années, l'entreprise envisage d'aug- nauté.' est encore le seul acheteur étranger. FORUM Numéro 2 2013 29 L’ITC EN ACTION TROUVER DES SOLUTIONS POUR LE CLIMAT dans les usines à thé au Kenya plus vulnérables au changement climatique. Les températures plus élevées, les variations dans les schémas des précipitations et d'autres événements plus fréquents menacent leurs moyens de subsistance. Les producteurs de thé au Kenya se trouvent donc dans une course pour s'adapter au changement climatique. Mais Aaban Ali Butt Consultante malgré leurs efforts, selon les experts les températures de plus en plus hautes rendront pluCentre du commerce international sieurs zones de culture de thé traditionnelles impropres à la production. Ces mêmes agriculteurs subissent aussi argret Ochieng est une petite exploitante agricole à Chinga, ville pitto- une pression de la part des acheteurs qui doivent resque des hauts plateaux centraux prouver aux intermédiaires que le produit est du Kenya. Pendant qu'elle remplit 'respectueux du climat'. Cela signifie adapter son panier avec des feuilles de thé, debout dans leur processus de production afin de se conforsa modeste plantation, elle peut voir l'impact du mer à certaines normes telles que la mesure de changement climatique dans sa vie. Beaucoup l'empreinte carbone. Même si ces exigences de feuilles ont les bords bruns et flétris et doivent peuvent offrir une occasion de réduire les coûts donc être jetées. D'autres présentent des signes en énergie de la chaîne d'approvisionnement, évidents d'infection par des parasites. La cha- elles peuvent en même temps représenter un leur étouffante et la sécheresse persistante se fardeau malvenu pour les producteurs de thé font remarquer autant dans la qualité que dans comme Margret, car la mise en conformité est souvent coûteuse et techniquement complexe. la quantité de la récolte de cette année. Afin de s'attaquer à ces défis, l'ITC a créé Soixante pour cent des 900 millions de personnes qui vivent en Afrique subsaharienne un partenariat public-privé avec le Partenariat dépendent de l'agriculture pour leur subsis- éthique pour le thé (ETP) et deux organismes tance, comme Margret. Au Kenya, le secteur du de normalisation, Rainforest Alliance et FLOthé emploie plus de 3 millions de personnes, et CERT. Le project offrira aux agriculteurs et les petits exploitants sont responsables de 62% au personnel d'encadrement des usines à thé une formation sur la conformité aux normes en de la production du thé dans le pays. Bien qu'ils aient le taux d'émission de gaz carbone et l'adaptation au changement climaà effet de serre par personne le plus bas du tique. L'Agence kényane de développement du monde, les agriculteurs africains sont parmi les thé (KTDA), qui supervise la production de thé M 01 30 FORUM Numéro 2 2013 02 par plus de 560 000 petits exploitants agricoles au Kenya, en est le partenaire national. Cette approche collaborative devrait aider à assurer l'adhésion totale du gouvernement et du secteur privé ainsi que la durabilité de l'impact du projet une fois qu'il sera fini. Une usine KTDA à Chinga, où vit Margret, est la première à piloter le programme de formation. Sur place, l'ITC et ses partenaires travaillent avec le personnel encadrant de l'usine afin de préparer des stratégies pour diminuer les émissions et accroître leur efficacité énergétique. Le projet finance également la mise en œuvre de ces stratégies d'atténuation. Dans des écoles sur le terrain, les producteurs de thé reçoivent une formation sur l'adaptation des techniques telles que la gestion de l'eau et du sol, le choix des variétés de plantes et l'utilisation efficace d'énergie. Et à travers un programme 'Former des formateurs', plusieurs participants sont également préparés à transmettre leurs compétences à d'autres. À travers cette approche diversifiée, le projet est à même d'atteindre Margret ainsi que d'autres 10 000 petits exploitants agricoles pour approvisionner l'usine Chinga – les préparant et leur donnant l'opportunité de surmonter les obstacles causés par le changement climatique. 01Les températures élevées menacent les zones de production de thé au Kenya. © ITC 02Se préparer à affronter les défis du changement climatique. © ITC L’ITC EN ACTION La couture comme billet de sortie de la pauvreté pour les femmes L Nicki Chadwick Consultante Centre du commerce international 01 es textiles tissés à la main et les colorants naturels du Ghana, du Mali et du Burkina Faso, trois des pays les plus pauvres du monde, commencent à être introduits dans l’industrie mondiale de la mode grâce à l’Initiative Mode éthique (EFI) du Centre international du commerce (ITC). L’Initiative vient juste de s’étendre à l’Afrique Occidentale, reliant les micros producteurs et les acheteurs du secteur de la mode en Europe. L’EFI œuvre dans le but d’améliorer les moyens de subsistance des micro entrepreneurs et des groupes de communautés marginalisés en Afrique Orientale, en Afrique Occidentale et en Haïti en les mettant en relation avec des grandes maisons de la mode et en offrant son assistance pour la création de trésors d’artisanat dont les consommateurs sont très friands. Certains des plus importants créateurs de mode du monde comme Stella McCartney, Vivienne Westwood, Ilaria Venturini Fendi et Sass & Bide soutiennent l’initiative, qui à son apogée a réuni plus de 7 000 artisans, dont la plupart étaient des femmes. L’EFI a débuté comme projet pilote en 2007 au Kenya et en Ouganda. Alors que le Kenya est un pays industriellement avancé, plus de la moitié de sa population vit en dessous du seuil de pauvreté. L’on estime que le 'secteur informel' – qui comprend les personnes exclues de l'économie principale et qui n'on pas accès à des services bancaires ou d'épargne – est responsable de plus d’un tiers du produit intérieur brut du Kenya. Depuis ses débuts, l'EFI aide les artisans à assurer un revenu et à avoir accès aux services bancaires, permettant ainsi à ceux dont les ressources sont limitées de planifier mais aussi d’économiser. Le noyau africain de l’Initiative se trouve à Nairobi, ville de plus de 3 millions d’habitants, où le contraste entre riches et pauvres est saisissant. Le noyau de Nairobi, et un site à Gilgil, dans la Vallée du Rift, offrent des lieux de travail sûrs où des femmes de divers horizons sont encouragées à collaborer. Au Kenya, les femmes impliquées dans l’EFI produisent des accessoires, en général des sacs, ainsi que des bijoux et des chaussures. La fabrication d’un simple sac peut comprendre une dizaine de techniques artisanales différentes à travers l’utilisation des compétences du plus grand nombre de groupes communautaires possible. Au Burkina Faso, où la plupart de la population pratique une agriculture de subsistance, ou peu s'en faut, l’initiative a créé un noyau régional à Ouagadougou, la capital du pays, qui sert aussi aux bénéficiaires de l’EFI au Mali. Les deux pays sont connus pour leurs techniques 01/02 T issage du tissu qui donnera la touche finale à une robe. © Chloe Mukai/ITC 03À la planche à dessin, lors d’un atelier EFI au Ghana. © Chloe Mukai/ITC 02 03 FORUM Numéro 2 2013 31 et leur expertise dans le traitement, la teinture et le tissage du coton pour la fabrication de beaux tissus qui atteignent des prix élevés sur les marchés internationaux et constituent la plus grande fierté de ceux qui les fabriquent. Stylistes et autres acteurs de l’industrie de la mode obtiennent ces tissus à travers l'EFI en Afrique Occidentale. Le projet a déjà laissé une trace sur le monde international de la mode. En effet, un sac de week-end – fabriqué avec du textile tissé au Burkina Faso – a été présenté à Londres lors du défilé de mode de Vivienne Westwood en février 2013. Au Ghana, où près de 30% de la population survit avec moins de $E.-U. 1,25 par jour, il y a un grand respect pour l’artisanat traditionnel, ainsi qu’un goût prononcé pour la mode et un savoirfaire croissant en matière de fabrication. L’EFI travaille avec des talents en herbe de la création de mode et les aide à créer leurs marques et leurs entreprises, offrant des places de travail à plusieurs personnes, des couturières aux comptables. L’EFI, financé par le Secrétariat d’État à l’économie de la Suisse (SECO) ainsi que par l’Allemagne, la Norvège et le Japon, utilise la mode comme porte de sortie de la pauvreté, mettant en relation les communautés marginalisées, organisées en sociétés coopératives, et les chaînes de valeur internationales de l’industrie de la mode. Elle répond également au désir grandissant de plusieurs acteurs de l’industrie de la mode de travailler avec des artisans qui reçoivent un salaire décent, ont des conditions de travail équitables et utilisent des matériaux produits de manière éthique. L’Initiative autonomise les femmes, leur permettant d’assurer un revenu régulier et d’améliorer les conditions de vie de leurs familles et de leurs communautés, et de gagner confiance et respect. par AltaRomAltaModa et réunit des stylistes du monde entier. La collection de mode africaine est co-pilotée par l'EFI et comprend des collections créées par l’étoile montante italienne, la styliste Stella Jean, et le duo de stylistes suisses PortenierRoth, avec des textiles tissés à la main au Burkina Faso et au Mali. Elle présentera également des créations de marques ghanéennes Kiki et Christie Brown. Stella Jean Stella Jean est une jeune créatrice de mode née à Rome avec des origines caribéennes. Elle a présenté sa première collection en juillet 2011 et a gagné le concours 'Who is on Next', sponsorisé par Vogue Italia et AltaRoma. Stella Jean, ancienne mannequin, conjugue motifs africains et éléments modernes pour refléter ses origines italiennes et haïtiennes. Ses collections sont des 'reflets de la vie inspirés d’expériences multidimensionnelles'. Stella Jean soutient l’Initiative Fashion-Able Haïti, qui œuvre pour la création d’emplois durables en Haïti à travers des sites de production manufacturière pour le marché américain. PortenierRoth Sabine Portenier et Evelyne Roth sont deux créatrices suisses qui ont lancé leur marque en 2007. Leur concept est unique: elles n’ont pas de collections saisonnières, mais elles créent une collection par an avec un accent différent sur chaque saison. Ces deux stylistes sont passionnées par le mélange entre mode et art 05La créatrice ghanéenne Aisha Obuobi, Fondatrice de Christie Brown. © Chloe Mukai/ITC contemporain dans leurs présentations, pour lesquelles elles ont reçu de nombreux prix. Kiki Clothing Kiki Clothing est une marque ghanéenne de vêtements et chaussures pour femmes et enfants créée par Titi Ademola, créatrice de mode ghanéenne-nigériane. Les collections Kiki Clothing arborent des couleurs vives et des motifs africains, le tout dans un style décontracté. Pour ses collections, Titi Ademola s’inspire tout d’abord de ses origines ghanéennes et nigériane et de la vie de tous les jours, en plus d’autres cultures. Tous les produits sont fabriqués au Ghana avec des tissus du Mali et du Ghana afin de permettre aux pays africains de bénéficier du monde de la mode. Christie Brown Christie Brown est une marque de vêtements féminins de luxe basée au Ghana. Elle a été créée en 2008 par Aisha Obuobi, qui l'a appelée comme sa grand-mère, source d’inspiration initiale de sa carrière dans la mode. En 2009, Aisha Obuobi a gagné le prix 'Emerging Designer of the Year' lors de la Semaine de la mode à Arise, en Afrique du Sud, et elle a été la seule styliste ghanéenne à présenter sa collection lors de la Semaine de la mode à Paris. En utilisant des styles modernes et des motifs africains dans ses collections, Aisha Obuobi espère offrir un véritable goût pour l'Afrique aux femmes élégantes et modernes. 07Sabine Portenier et Evelyne Roth parlent de leur nouvelle collection avec une collaboratrice au Burkina Faso. © Chloe Mukai/ITC La mode africaine sur les podiums à Rome Des stylistes en herbe présenteront en juillet 2013 une collection africaine produite dans le cadre de l’Initiative Mode éthique de l’ITC lors de la Semaine de la mode à Rome. L’événement, qui a lieu tous les deux ans, est organisé 04/06 L es méthodes traditionnelles sont associées à la création moderne au Burkina Faso. © Chloe Mukai/ITC 04 32 FORUM Numéro 2 2013 05 05 07 L’ITC EN ACTION Normes de durabilité dans le commerce et le développement Oliver von Hagen Analyste de marché Centre du commerce international L ' évolution rapide des normes volontaires de durabilité a eu un impact considérable sur les PED ces dernières années. Cela est dû en partie au nouveau rôle joué par les normes dans la gestion de la chaîne d'approvisionnement, mais aussi à l’impact potentiel qu’elles pourraient avoir sur l’élaboration de politiques. L'augmentation actuelle de la demande en matière de normes de durabilité a eu une influence directe sur des questions telles que les coûts environnementaux et sociaux et la promotion de la durabilité de la production et des modes de consommation, mais aussi sur la compétitivité sur les marchés en croissance. Cependant, les exigences souvent strictes rattachées à ces normes inquiètent les producteurs et exportateurs des PED. Le plus souvent, le respect de ces exigences demande connaissances et compétences, équipements et investissements, créant ainsi des barrières à la mise des produits sur les marchés. De plus, en raison du manque d'harmonisation entre les normes volontaires de durabilité un seul produit doit souvent respecter de multiples normes au lieu d'une seule. Historiquement, les normes volontaires de durabilité étaient mises en place pour mettre en relation les activités agricoles durables et les consommateurs demandeurs de produits durables dans les pays développés. Cependant, ces normes ont récemment gagné de l'importance dans les marchés internes des PED. Cela est dû en partie au fait que les supermarchés des PED ont commencé à établir leurs propres normes de durabilité ou demandent que leurs fournisseurs respectent les normes internationales. Les consommateurs des pays développés aussi sont devenus plus attentifs à la manière dont les produits qu'ils achètent sont cultivés, transformés et transportés. Dans le domaine agricole, par exemple, les normes visaient au départ des aspects tech- Guide pratique pour l'approvisionnement durable en matières premières agricoles En mars, l'ITC a publié un Guide pratique pour l’approvisionnement durable en matières premières agricoles en partenariat avec sept organisations mondiales. Parmi ses principaux partenaires se trouvent la plateforme de l'Initiative pour le développement durable dans l'agriculture (SAI), la plateforme d'apprentissage CSL du Centre mondial pour le leadership en matière de durabilité de l'IMD et l'Initiative pour le Commerce durable. Approvisionnement durable en matières premières agricoles – un guide pratique est un outil-libre innovateur qui réunit les meilleures pratiques et l'expérience d'entreprises mondiales dans un cadre stratégique axé sur une logique commerciale. Il permet une plus grande autonomie du personnel d'encadrement en leur fournissant une feuille de route détaillée et conviviale pour la construction et la mise en place de stratégies durables d'approvisionnement agricole de manière efficace. Le guide peut être téléchargé sur: www.intracen.org/Sustainable-Sourcing-Guide niques tels que la réduction des coûts de transaction et la rationalisation de la coordination et de la communication entre les divers acteurs de la chaîne d'approvisionnement. De nos jours, l'utilisation des normes dans la plupart de secteurs comprend également la différenciation des produits, la pénétration de marché et le partenariat entre la norme de durabilité et la marque. Cependant, d'autres éléments moins tangibles tels que l'autonomisation progressive entre producteurs et l'amélioration des capacités organisationnelles sont de plus en plus associés aux normes volontaires de durablité. Des normes pour bénéficier aux grands et puissants? Les normes mettent-elles la barre trop haut pour les petits exploitants et les empêchent-elles d'entrer dans le marché? Ou les relient-elles vraiment aux chaînes de valeur mondiales? Selon un rapport de l'Institut de développement d'Outre-mer de mai 2013 Leaping and Learning: Linking smallholders to markets in Africa confirme les conclusions antérieures selon lesquelles des exigences strictes sur la qualité et la sécurité des produits limitent la participation des petits exploitants dans les chaînes de valeur mondiales. Pour les multinationales, s'approvisionner auprès de plusieurs petits exploitants est aussi plus compliqué que compter sur quelques fournisseurs avec une plus grande capacité. Or, selon d'autres études, les normes volontaires de durabilité pourraient bénéficier aux petits producteurs en augmentant leurs revenus, leur productivité et la qualité de leurs produits et en leur offrant une garantie des prix et des ventes. Ils pourraient également gagner l'accès au capital. Des programmes d'assistance, par exemple, peuvent offrir aux agriculteurs les capacités nécessaires à la réduction des coûts de transaction lorsqu'ils appliquent FORUM Numéro 2 2013 33 les normes de durabilité. En effet, une production à forte intensité de main-d’œuvre avec des faibles économies d'échelle pourrait faire gagner aux petits exploitants un avantage en terme de coûts. Même si les normes de durabilité visent à améliorer la situation des producteurs défavorisés, plusieurs chercheurs avancent que le résultat serait l'opposé, et que ces normes favorisent ceux qui sont les mieux lotis plutôt que ceux qui ont le plus besoin d'aide. À titre d'exemple: une étude documentaire menée par la FAO a démontré la corrélation positive entre les avoirs de départ, la taille de la ferme et le statut de certification. Cela suggère un biais de sélection dans la participation dans les systèmes de normes. Cette étude souligne en outre les conditions inégales rencontrées par les producteurs lorsqu'ils doivent décider de leur participation à un Partenariat BSR et Walmart Chine Le projet The Green Farmer training mis en place par Business for Social Responsibility (BSR) en partenariat avec Walmart Chine vise à contribuer à atteindre l'objectif de Walmart de former un million d'agriculteurs de sa chaîne d'approvisionnement à l'échelle mondiale sur la sécurité alimentaire et le développement durable. Afin de concevoir un projet de formation efficace, BSR et Walmart Chine sont partis du terrain, se rendant sur place, des fermes productrices de pomelo à Fujian aux maraîchers de la province de Guangdong. Lors de chaque visite, les groupes ont eu des conversations approfondies avec le personnel d'encadrement, les techniciens et les agriculteurs sur ce qu'ils voulaient apprendre et comment ils voulaient apprendre. Même si chaque agriculteur a ses propres difficultés liées à la culture, au type de sol, au système de production et au niveau de connaissances techniques exigées, la plupart des agriculteurs se sont montrés relativement sophistiqués et modernes. Pour plus d'informations, allez sur: http://goo.gl/mN25B 34 FORUM Numéro 2 2013 système, ce qui dépend de leur niveau de préparation à affronter les conditions imposées par les normes volontaires de durabilité. Mieux lotis dans un système de normes Les effets du respect des normes volontaires de durabilité sur la rentabilité d'une ferme sont difficiles à attribuer à l'adoption des normes, étant donné que la rentabilité dépend d'une série de facteurs tels que le rendement, la qualité, le volume et l'efficacité. Selon Vers un développement durable: les rôles et les limites de la certification, une étude menée en 2012 par le Comité de pilotage de l’État de connaissances de l'évaluation des normes et de la certification, la participation dans des systèmes de normes peut faire augmenter les prix et doper les bénéfices des producteurs. Mais tout impact positif reste modeste lorsque l'augmentation des revenus compense à peine les coûts supplémentaires et le surplus de travail requis pour le respect des dispositions relatives aux normes. Or, les autres avantages économiques – tels que de meilleures relations commerciales ou la garantie de vente des produits certifiés – pouvant être considérablement augmentés par le respect des normes volontaires de durabilité, peuvent être plus importants que les avantages financiers immédiats. Normes et règlements Tandis que le cadre réglementaire des systèmes de normes est établi par les organes gouvernementaux ou inter-gouvernementaux, les relations dynamiques entre les normes volontaires de durabilité et les réglementations sont en augmentation. Le renforcement des règlements comprend des principes et dispositions établis par les normes de durabilité, lesquelles à leur tour requièrent une conformité aux lois et réglementations locales, nationales ou internationales, par exemple les lois sur le travail et sur l'environnement. Le développement d'un système commun et efficace de règlements et normes est plus avancé en matière de qualité et sécurité alimentaire, alors qu'il y a peu de progrès concrets en matière de normes sociales et environnementales. Des organisations du secteur privé, pour leur part, ont développé des normes collectives pour répondre aux coûts de transaction élevés occasionnés si elles avaient leurs propres normes en matière de chaînes d'approvisionnement. Des organisations nationales et internationales ont été créées par les entreprises pour traiter des questions relatives aux normes touchant leur industrie, notamment l'Initiative mondiale de la sécurité alimentaire (GFSI), Nouveau Forum des Nations Unies sur les normes volontaires de durabilité Le Forum des Nations Unies sur les normes volontaires de durabilité a été créé pour répondre à l'évolution rapide des marchés et des tendances. Il vise à faciliter et à renforcer la participation des PED dans le dialogue international sur les normes volontaires de durabilité. Ce dialogue informera les principaux décideurs au sein des gouvernements, du secteur privé et de la société civile dans les PED sur les enjeux stratégiques et les exigences politiques des principales normes. Pour plus d'informations, allez sur: http://unfss.org/ et les mécanismes de chaque ensemble de normes ou de chaque système. Il ne fait aucun doute que l'adoption de normes est souvent favorisée dans les contextes suivants: produits avec des exigences de traçabilité; secteur de l'extraction; produits finaux avec des matières premières identifiables; chaînes d'approvisionnement plus courtes avec un nombre réduit d'acteurs. L'ITC a constaté que les systèmes de normes tendent à être plus viables dans des Global GAP et le Consortium britannique de la Quand est-ce que les systèmes de normes contextes où les producteurs et les institutions fonctionnent? vente au détail. Les gouvernements restent des parties Il est important de comprendre les circons- sont mieux préparés. L'état de préparation des prenantes importantes qui ont une influence sur tances dans lesquelles les normes volontaires institutions est souvent lié au soutien du secteur la légitimité des normes volontaires de durabi- de durabilité peuvent être un instrument effi- public ou des donateurs aux services et aux lité. Cependant, la légitimité peut être accordée cace pour promouvoir le développement du- systèmes de contrôle alimentaire. à différents degrés en fonction des rôles des rable. À titre d'exemple: comment le respect Les normes volontaires de durabilité doivent autorités publiques. d'une ou plusieurs normes peut bénéficier à aussi être reconnues et légitimées par leurs parCette multitude de normes entraîne tou- tous les acteurs de la chaîne d'approvision- ties prenantes, surtout en ce qui concerne l'intefois des inefficacités dans le système com- nement? Et si ces groupes ne bénéficient pas clusivité et la transparence des processus d'étamercial. Les normes nombreuses et souvent de la mise en œuvre d'une norme, quels sont blissement des normes. Par ailleurs, les parties strictes en matière de durabilité, de sécurité et les facteurs pouvant produire des effets posi- prenantes doivent se mettre d'accord sur l'efficade qualité peuvent décourager les producteurs tifs? Comment apporter un soutien pour faire cité de l'initiative d'établissement des normes et de se lancer dans l'exportation. Les inefficaci- en sorte que les systèmes de normes œuvrent de ses mécanismes de mise en œuvre. tés surviennent lorsque les acteurs du marché dans le sens d'une production et d'un dévelopAlors que la réussite de la mise en œuvre doivent se conformer à plusieurs normes, ce qui pement durables? de systèmes de normes demande un équilibre entraîne des redondances et des frais adminisEn réponse à ces questions, les recherches entre leur portée globale et leur adaptation aux tratifs. Par conséquent, il est indispensable de menées par l'ITC indiquent que les effets des conditions locales, leur mise en œuvre est amétravailler à une harmonisation entre les règle- normes volontaires de durabilité doivent être liorée lorsqu'il y a des incitatifs clairs et visibles ments et les normes ainsi qu'entre les différents analysés dans un système plus large prenant pour que les acteurs des chaînes d'approvisionsystèmes de normes. en considération le contexte, les instruments nement les adoptent. Cependant, le succès des systèmes de normes repose sur l'acheteur final, qui crée un partenariat avec les fournisseurs, offre la possiLe Fonds Knorr pour un partenariat durable bilité de préfinancement et soutient les fournisseurs dans le respect des exigences en matière de qualité. Unilever Knorr a mis en place le Fonds Knorr pour un partenariat durable afin d'aider les producteurs et fournisseurs impliqués dans des projets agricoles durables complexes qu'ils ne parviendraient pas à gérer seuls. Knorr investit 50% du budget établi pour un projet donné assorti d'un investissement équivalent de la part du fournisseur ou du producteur. Cela permet au fournisseur d'expérimenter de nouvelles idées et d'accélérer la mise en œuvre de pratiques agricoles durables. Knorr s'est engagé à co-investir 1 million d'euros avec ses fournisseurs et agriculteurs en connaissances et équipement pour accélérer la mise en œuvre de pratiques agricoles durables. Les fournisseurs directs d'Unilever remplissent des demandes, mais ils peuvent le faire au nom d'un producteur ou d'un groupe de producteurs travaillant pour le fournisseur. Pour plus d'informations, allez sur: www.unilever.com/aboutus/supplier/sustainablesourcing/ Cet article est basé sur une série d'études documentaires en quatre parties menées par l'ITC. • • • • I mpact des normes privées sur les chaînes de valeur mondiales. es impacts des normes privées sur L les producteurs dans les pays en développement. 'intéraction entre les normes publiques et L privées. uand et comment les normes privées Q fonctionnent-elles? (en anglais) Ces publications sont disponibles sur: http://www.standardsmap.org/publications-list-en/ FORUM Numéro 2 2013 35 L’ITC EN ACTION STIMULER LES COMMUNAUTÉS à travers les opportunités d'exportations Lilia Naas Martin Labbe Mehdi Chaker OlivIer Naray Centre du commerce international ITC ITC ITC Responsable du programme NTF II Conseiller, Marketing électronique Gestionnaire du projet NTF II et réseaux numériques L es producteurs de mangue du Sénégal, les producteurs de café de l'Ouganda et les sociétés de technologie de l'information (TI) du Bangladesh bénéficient d'un projet mené par le Centre du commerce international (ITC) et le Centre néerlandais pour la promotion des importations en provenance des pays en développement (CBI) créé pour améliorer la compétitivité des exportateurs des PED. La deuxième phase du Fonds d’affectation spéciale des Pays-Bas (NTF II) a été lancée en avril 2009 dans des industries sélectionnées au Bangladesh, Kenya, Sénégal, Afrique du Sud et Ouganda. NTF II était la continuation d'une collaboration entre l'ITC et le CBI qui remonte à 2005 et qui cherchait à stimuler la croissance axée sur le commerce et à promouvoir la participation des PED dans les chaînes de valeur mondiales. Développer les exportations Au Sénégal et en Ouganda, NTF II et ses partenaires ont étendu la formation et l'assistance technique à 1 000 producteurs de mangue et à 5 000 producteurs de café qui ont pu assurer un À titre d'exemple: la main-d'œuvre d'une société bangladaise a passé de sept à plus de 100 personnes en 2012. Ce chiffre peut paraître insignifiant, mais pour les personnes qui bénéficient de ces opportunités d'emploi – ainsi que pour leurs familles et leurs communautés – c'est un pas de plus vers l'accomplissement de leur potentiel dans les chaînes de valeur mondiales. 36 FORUM Numéro 2 2013 travail régulier grâce à l'amélioration des procédés. Le lancement de plans d'action pour des entreprises de matières premières au Kenya devrait bénéficier à des milliers de producteurs en les mettant en relation avec des chaînes d'approvisionnement axées sur l'exportation. Dans le secteur automobile de l'Afrique du Sud, le projet a aidé à augmenter les profits des entreprises, ce qui à son tour a permis une plus grande stabilité dans le secteur et, dans certains cas, la création d'emplois. Au Bangladesh, avec l'augmentation de la demande, les TI et les services informatiques ont réussi à se placer dans une meilleure position leur permettant de créer des emplois. Les femmes ont également participé activement aux projets NTF II au Bangladesh, au Sénégal et en Ouganda et ont acquis une meilleure compréhension de la gestion de la qualité et des exigences des marchés d'exportations. En mettant l'accent sur les secteurs les plus susceptibles de créer des emplois et en facilitant ainsi la réduction de la pauvreté, NTF II a été un véritable succès. À titre d'exemple: la main-d’œuvre d'une société bangladaise a passé de sept à plus de 100 personnes en 2012. Responsable de projet NTF II Ce chiffre peut paraître insignifiant, mais pour les personnes qui bénéficient de ces opportunités d'emploi – ainsi que pour leurs familles et leurs communautés – c'est un pas de plus vers l'accomplissement de leur potentiel dans les chaînes de valeur mondiales. Le programme NTF II, créé par le Gouvernement néerlandais, était conçu pour augmenter le revenu de la population et réduire la pauvreté en améliorant la compétitivité en matière d'exportations à court terme et en créant l'infrastructure nécessaire à la promotion durable de la compétitivité à moyen terme. Dans ce contexte, NTF II visait à combler les lacunes dans les chaînes de valeur sélectionnées où la perte de valeur était plus importante. Ces pertes étaient en grande partie dues aux contraintes posées par les ruptures dans la chaîne de valeur, depuis la production jusqu'à la livraison au consommateur. Résultat: la production ne répondait pas à la demande, les coûts étaient excessifs, la qualité ne correspondait pas vraiment aux normes internationales, et les services clé tels que la logistique et le marketing étaient inadéquats. NTF II visait également à combler les lacunes dans les institutions d'appui au com- Pays et secteurs du NTF II Bangladesh Technologie de l’information et services informatiques Kenya Fruits du verger, y compris avocat, manque et fruit de la passion Sénégal Afrique du Sud Mangue Thé Rooibos et pièces automobilies Ouganda Café merce. Très souvent, les services d'aide au commerce dans les PED n'offrent pas aux exportateurs l'avantage nécessaire pour atteindre les marchés internationaux. Pour compenser cela, NTF II a cherché à augmenter les capacités des organisations sélectionnées fournissant ainsi des services plus efficaces et à mettre en œuvre des mécanismes de suivi rigoureux pour les aider à mesurer l'impact de leur travail. des exportations des PME. Le programme a renforcé les services existants ou a développé de nouveaux services pour les exportateurs, a amélioré les processus de suivi et d'évaluation et a dopé la compétitivité des entreprises. Un goût de succès en Ouganda les femmes et leur a permis d'améliorer leur niveau de vie tout en s'assurant que leurs enfants aillent à l'école plutôt que dans les champs. Le programme a encouragé les associations d'agriculteurs à s'enregistrer, créer des structures organisationnelles et augmenter leurs ventes de grains de café traités et classés. Renforcer la compétitivité NTF II a aidé à offrir une meilleure compréhension de la performance des chaînes de valeur et de la manière d'augmenter la compétitivité IDENTIFIER LES OBSTACLES, TROUVER DES SOLUTIONS OlivIer Naray Responsable de projet NTF II Centre du commerce international •A u Bangladesh, l'Association bangladaise des services de logiciels et l'information (BASIS) et la Chambre du commerce et de l'industrie de Dhaka (DCCI) ont reconnu que le secteur de la technologie de l’information (TI) et des services informatiques avait des liens faibles avec les entreprises de sous-traitance et manquait d'une image de marque solide à l'étranger. Ils ont remédié à ces lacunes en augmentant leur soutien pour la création d'une image de marque et pour établir la confiance en cette marque auprès des marchés-cible, et en modifiant leurs services. BASIS et DCCI ont aussi développé un service de jumelage afin de mettre en relation des entreprises bangladaises avec des partenaires européens, ce qui a déjà généré 147 contacts et a abouti à de nouveaux contrats de sous-traitance. •A u Sénégal et en Ouganda, les secteurs de la mangue et du café se heurtaient à des liens faibles ou brisés le long de la chaîne de valeur, en particulier entre producteurs, exportateurs et importateurs. Les associations de secteur ont été encouragées à travailler main dans la main avec des organisations de promotion du commerce pour fournir des services de soutien aux acteurs du secteur, en aidant à améliorer la gestion des procédés de récolte et post-récolte, assurant une meilleure qualité des produits et le respect de exigences en matière d'emballage, et en mettant en place des initiatives de marketing et promotion pour bénéficier à l'ensemble du secteur. L'amélioration des procédés qualitatifs, la gestion post-récolte, l'emballage pour l'exportation et le marketing au Sénégal ont suscité l'intérêt des importateurs européens, qui ont créé des liens commerciaux avec les exportateurs de mangue et les coopératives. •A u Kenya et en Afrique du Sud, des institutions partenaires ont adopté une approche globale de l'industrie pour promouvoir les exportations de produits à valeur ajoutée dans les marchés existants et dans les nouveaux marchés. L’Association kényane des exportateurs de produits frais, forte de l'expérience réussie des ventes de légumes et fleurs à l'étranger, a mis en place une équipe chargée de promouvoir les exportations de fruits de verger et d'augmenter la part des marchés internationaux du pays. Ces efforts combinés ont eu pour résultat une meilleure production, qualité et marketing des produits d'exportation ainsi que de meilleures relations avec les acheteurs et les signataires de nouveaux contrats. En Ouganda, la deuxième phase du projet du Fonds d’affectation spéciale des Pays-Bas (NTF II) a aidé les producteurs de café du pays à mieux comprendre leur produit et leurs marchés. Il leur a également permis d'assurer qu'ils soient mieux payés pour leurs récoltes. Le projet du NTF II en Ouganda visait à rendre l'industrie caféière du pays plus compétitive et durable pour l'environnement ainsi que pour les communautés locales. Pour y parvenir, NTF II a cherché à renforcer les capacités institutionnelles d’organisations faitières telles que l'Union nationale des agroentreprises et entreprises caféicoles (NUCAFE), et à promouvoir un modèle de propriété foncière parmi les petits producteurs. Le projet a contribué aux objectifs du Millénaire pour le développement des Nations Unies en s'appuyant sur le potentiel du secteur du café pour améliorer les moyens de subsistance en augmentant la production et en renforçant l'efficacité des chaînes de valeur. En créant des liens commerciaux, en améliorant leurs connaissances en agriculture et leurs compétences en marketing pour l'exportation et le code de conduite 4C (norme de référence pour la durabilité dans le secteur caféier), davantage de producteurs de café en Ouganda ont décidé de participer à des hauts niveaux de la chaîne de valeur des exportations, attirant une moyenne de $E.-U. 2,30 par kilo. Durant le projet, les producteurs de café ont expédié plus de 14 000 sacs de café d'une valeur de plus de $E.-U. 2,5 millions en Europe à travers les associations d'agriculteurs. Le soutien apporté par NTF II a aussi renforcé les relations commerciales lors des nombreuses foires commerciales internationales et visites d'acheteurs dans le pays. Des liens commerciaux ont été établis en Italie, Chine, Japon, Canada, Belgique et ÉtatsUnis, et la base de marché a été élargie pour inclure les marchés intérieurs et internationaux, avec plus de 15 acheteurs dans le secteur marché spécialisé. 'Le projet nous a aidés avec des connaissances sur le café', a dit Charles Lubumbira, producteur de café dans le district de Mukono. 'Aujourd'hui nous pouvons produire un meilleur café et obtenir de meilleurs prix.' L'un des aspects les plus innovateurs du projet était la participation de partenaires publics et privés dans la gestion et le suivi. Deux agences gouvernementales – le Conseil ougandais de promotion des exportations et l'Autorité pour le développement du café – ainsi que NUCAFE, pilotée par le secteur privé, qui représente 155 associations d'agriculteurs dans tout le pays, y ont participé activement. 'Pour la première fois, nous avons vu un changement d'approche en relation avec la mise en œuvre de projets de caféiculture en Ouganda', a déclaré le Directeur exécutif de NUCAFE, Joseph Nkandu. 'Cette fois, le projet NTF II a été beaucoup plus loin en impliquant une organisation comme NUCAFE qui entretien des liens solides avec les agriculteurs sur le terrain et en ofrant directement la création de capacités à l'échelle de la ferme.’ En complément à d'autres programmes d'assistance technique gérés par NUCAFE, en particulier les efforts pour la parité homme-femme, NTF II a contribué à soutenir la capacité de membres de la famille à participer à la prise de décision au sein de leurs fermes et à utiliser les ressources générées de manière équitable. Cela a aidé à autonomiser FORUM Numéro 2 2013 37 OUTILS DE L'ITC OPPORTUNITÉS D'EXPORTATION dans le commerce durable tifications. Ces outils fournissent également les coordonnées des sociétés actives dans l'importation, l'exportation, la production et la distribution. Prenons par exemple une productrice argentine de miel organique à la recherche de marchés pour l'exportation. En cherchant les Helen Lassen tendances en matière de commerce de miel sur Analyste principale de marché Trade Map, elle voit que les États-Unis d'Amérique (EUA) importent 25% du miel naturel du Centre du commerce international monde, un marché évalué à plus de $E.-U. 400 millions. Trade Map lui montre aussi que la de' accès aux informations concernant les mande annuelle de miel aux EUA a augmenté opportunités sur le marché internatio- de 20% ces cinq dernières années, bien au-desnal et les importateurs et exportateurs sus de la moyenne mondiale de 9%. Ensuite, de miel produit de manière durable est elle voit que les EUA ont inclut le commerce de essentiel pour augmenter les échanges com- miel bio dans leur classification de produits en merciaux et permettre la réussite des produc- 2012. teurs de miel. Il s'agit du premier pays dans le monde à Les outils gratuits d'analyse de marchés l'avoir fait, ce qui pourrait présager des changede l'ITC permettent aux exportateurs des PED ments à venir dans d'autres marchés. En 2012, (pas seulement de miel) de trouver ces oppor- leurs importations de miel bio ont représenté tunités en fournissant des informations sur les 3% des importations de miel dans le monde, un dernières tendances en matière de dimension créneau évalué à $E.-U. 11,4 millions par année. et dynamique de marchés, de performance des En cherchant des informations plus réconcurrents, de tendances sur les prix, de régle- centes, cette productrice voit que la demande mentations des marchés, de normes et de cer- pour du miel bio aux EUA a même augmenté L Liste des importateurs du produit sélectionné en 2012 Produit: 040900 Miel, naturel États-Unis d’Amérique Valeur des importations: $E.-U. 429 millions 2 000 25 20 15 États-Unis d’Amérique Taux de croissance annuel de la valeur: 20% 1 000 10 500 0 5 MONDE ÉTATS-UNIS D’AMERIQUE ALLEMAGNE VALEUR DES IMPORTATIONS: $E.-U. MILLIONS 38 FORUM Numéro 2 2013 ROYAUME-UNI JAPON FRANCE 0 TAUX DE CROISSANCE ANNUEL DE LA VALEUR, % Pourcentage $E.-U. millions 1 500 plus rapidement que la demande pour du miel naturel et qu'en janvier 2013, ce pays a importé du miel bio de l'Argentine; elle a donc ses chances en abordant ce marché. Les données montrent que les EUA importent du miel bio argentin au prix de $E.-U. 6,67 par kilo, bien audessus du prix moyen d'importation sur le marché américain de $E.-U. 3,68 par kg, qui a son tour est plus élevé que le prix d'importation du kg de miel normal, de $E.-U. 3,36. Sur Market Access Map, elle voit que l'Argentine paie 1% de droits de douane aux EUA et que même si certains pays fournisseurs bénéficient d'une exemption tarifaire, leurs avantages sont réduits; elle est rassurée de voir que d'autres pays tels que le Brésil, exportent aussi avec succès vers les EUA. Ensuite, elle fait une recherche sur la législation en matière de santé et de sécurité des produits aux EUA, ainsi que sur d'autres exigences réglementaires auxquelles elle devra se conformer. Sur Market Access Map, elle trouve des liens vers des sites web des autorités américaines contenant les informations sur la réglementation du marché. La productrice trouve sur Trade Map les coordonnées de sociétés importatrices de miel bio dans le marché américain. Avant de les contacter, elle cherche sur Standards Map les normes les plus pertinentes pour les acheteurs aux EUA et elle compare ses certifications aux exigences normatives en vigueur aux EUA. Sa recherche ne fait que commencer, mais grâce aux outils de l'ITC, elle est plus proche de réussir ses objectifs en matière d'exportation. Outils de l'ITC Pour s'inscrire et utiliser les outils de l'ITC, allez sur: www.intracen.org/marketanalysis Pour en savoir plus sur comment l'ITC renforce les capacités des producteurs de produits bios, allez sur: www.intracen.org/projects/tccep/sustainableagriculture-biodiversity/projects Pour comprendre comment l'ITC met en relation les acheteurs et les exportateurs de produits bio, allez sur: www.intracen.org/exportateurs/produits-organiques/ RÉPERTOIRE Publications de l'ITC Ressources relatives au développement du commerce et des exportations destinées aux exportateurs, aux institutions d'appui au commerce et aux décideurs politiques POUR COMMANDER les publications de l’ITC Pour commander les publications en ligne La liste des publications et leurs prix sont disponibles en ligne et elles peuvent être commandées à l'adresse www.intracen.org/a-propos/e-boutique et via le National Book Network (NBN) à https://unp.un.org/Browse.aspx?publisher=9 Pour acheter les publications par courriel United Nations Publications Customer Service c/o National Book Network PO Box 190 Blue Ridge Summit, PA 17214 États-Unis courriel: [email protected] Nouveaux documents techniques Commonwealth Trade: Prospects for Stronger Cooperation Pour les télécharger gratuitement, consulter le site www.intracen.org/publications 01 Sustainable Sourcing of Agricultural Raw MATERIALS: A Practitioner’s Guide Ce guide aborde les questions devant être prises en compte par les entreprises à l'heure d'élaborer et de mettre en œuvre une stratégie d'approvisionnement durable, en insistant plus particulièrement sur l'établissement d'une chaîne d'approvisionnement durable. Illustrant les principales difficultés inhérentes à l'établissement de chaînes d'approvisionnement durables, il propose un ensemble de mesures et de réponses stratégiques pour aider les entreprises à traiter les questions de durabilité tout au long de la chaîne d'approvisionnement. Ont collaboré à l'élaboration de cette publication conjointe: le Centre du commerce international, la Plateforme Initiative pour une agriculture durable (SAI), la CSL Learning Platform de la IMD Global Center for Sustainability Leadership (CSL), et l'Initiative pour le commerce durable. Business for Social Responsibility, le système d'échange d'informations Sedex et le Laboratoire pour une alimentation durable ont aussi contribué à l'élaboration de ce guide et en appuient la diffusion. www.intracen.org/Sustainable-Sourcing-Guide/ Les publications sont disponibles gratuitement en nombre limité pour les institutions à vocation commerciale officielles. Pour recevoir des exemplaires papier, contacter les publications de l’ITC, courriel: [email protected] 02 Cette étude de l'ITC des exportateurs et des importateurs du Malawi traite des préoccupations des entreprises liées aux mesures non tarifaires. Elle constate que de nombreux obstacles au commerce peuvent être surmontés au plan national. Elle révèle que les principales difficultés pour accéder aux marchés étrangers et liées aux mesures non tarifaires se divisent en deux catégories. Premièrement, la certification des produits est problématique: les entreprises ont du mal à respecter les normes internationales et le Malawi ne dispose pas de laboratoires accrédités à l'échelle internationale pour certifier les produits. Deuxièmement, les licences à l'exportation sont un réel problème du fait des nombreuses institutions impliquées, ce qui complique la délivrance des licences. Ce document présente et analyse les résultats de l'étude, y compris les incidences au plan de la politique commerciale du Malawi. Elle présente aussi les recommandations élaborées dans le cadre d'un dialogue public-privé sur les résultats de l'étude. www.intracen.org/Malawi-Entreprise-perspectives---An-ITCseries-on-non-tariff-measures/ 01 02 03 04 Le renforcement de la coopération économique entre les États du Commonwealth pourrait doper l'intégration commerciale en dépit des différences géographiques et de développement économique. Ce document analyse la performance à l'exportation des États membres du Commonwealth, reconnaissant leurs différences en termes de niveau de développement et de climat d'affaires. Sur la base d'une évaluation des conditions actuelles d'accès au marché, il recense les différentes possibilités de renforcer au plan politique la coopération économique au sein du Commonwealth. www.intracen.org/Commonwealth-Trade-Prospects-forStronger-Cooperation/ The Trade in South-East Asian 04 Python Skins Étude des flux commerciaux, de la chaîne de valeur, de la durabilité, du commerce illicite et du bien-être animal dans le commerce des peaux de python en Asie de l'Est. Le document analyse les échanges déclarés de peaux de python, la valeur ajoutée à chaque étape, depuis la capture jusqu'à la vente de détail, ainsi que les pratiques illicites (contrebande, fausses déclarations de permis CITES). Il contient des informations sur la réglementation CITES, passe en revue les menaces qui pèsent sur la durabilité de l'approvisionnement et aborde les pratiques liées au bien-être animal. Le document contient des recommandations à l'intention des décideurs politiques et de l'industrie du cuir/de la mode. www.intracen.org/The-Trade-in-South-East-Asian-Python-Skin/ Malawi: Company perspectives An ITC series on non-tariff measures En Europe, en Afrique, et au Moyen-Orient: Turpin Distribution Pegasus Drive Stratton Business Park Biggleswade SG18 8TQ Royaume Uni courriel: [email protected] 03 Nouvelles publications Pour commander en ligne: www.intracen.org/a-propos/e-boutique/ Lutter contre les pratiques anticoncurrentielles - Guide à l'intention des exportateurs des économies en développement 05 Les pratiques anticoncurrentielles peuvent nuire aux entreprises des PED. Cette publication se concentre sur les monopoles d'État et les abus de position dominante sur les marchés d'infrastructures, sur les pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la distribution internationale et de la vente de détail, ainsi que sur les cartels internationaux. Le rôle et l'action du secteur privé sont abordés, ainsi que les possibilités d'améliorer la coopération internationale pour faire face à ce problème. En s'attaquant aux pratiques anticoncurrentielles et aux structures de marché, les entreprises des PED verront leur potentiel à l'exportation augmenter. www.intracen.org/a-propos/e-boutique/ 05 FORUM Numéro 2 2013 39 dans notre prochain numéro: AIDE POUR LE COMMERCE UNE PERSPECTIVE RÉGIONALE Abonnements: [email protected] ABONNEMENTS PAPIER: $E.-U. 60/an (gratuit pour les institutions d'appui au commerce et les entreprises de pays en développement) Centre du commerce 40 FORUMinternational Numéro 2 2013