LEÇON N˚ 14 :
Congruences dans Z. Anneau Z/nZ.
Pré-requis :
Relation d’équivalence;
Définitions d’un groupe, d’un anneau, d’un corps;
Division euclidienne dans Z, notation d’un cardinal (|·|);
Nombres premiers (et notation ), PGCD, théorème de Bézout.
14.1 Congruences dans Z(nN, n >2)
Définition 1 : Soit (x, y)Z2. On dit que xest congru à ymodulo nsi xynZ. On note alors
xy[n].
Proposition 1 : La relation de congruence est une relation d’équivalence.
démonstration :
Réfléxivité : xx= 0 ·nnZ, donc xx[n].
Symétrie : On suppose que xy[n], c’est-à-dire qu’il existe kZtel que xy=kn. Alors
yx=k·nnZ, donc yx[n].
Transitivité : On suppose cette fois que xy[n]et yz[n], c’est-à-dire qu’il existe k, kZtels
que xy=kn et yz=kn. Alors xz= (xy) + (yz) = kn +kn= (k+k)nnZ,
donc xz[n].
Les trois points de la définition d’une relation d’équivalence sont vérifiées, donc celle de congruence en
est une.
Proposition 2 : La relation de congruence est compatible avec l’addition et la multiplication de Z,
c’est-à-dire que xy[n]
xy[n]x+xy+y[n]
x·xy·y[n].
démonstration :On a les implications suivantes :
x=y+kn
x=y+knnx+x=y+y+
Z
z}| {
(k+k)n
x·x=y·y+ (ky+ky+nkk)
|{z }
Z
n.
x+xy+y[n]
x·xy·y[n],
2Congruences dans Z. Anneau Z/nZ.
ce qui démontre le résultat.
Exercice : Soit pN. Montrer que xy[n]implique à la fois px py [n]et xpyp[n].
Solution : En effet, il existe kZtel que xy=kn. D’une part, on a ainsi que p(xy) = p(kn)px py = (pk)npx
py [n]. Attention cependant à la réciproque, parce que la division par pne garantit que le multiplicateur de nsoit entier! Il faut
alors que pdivise npour satisfaire cette condition.
D’autre part, on procède par récurrence pour la seconde congruence. Pour p= 1, il n’y a aucun problème. Supposant le résultat
vrai au rang p1, on applique la proposition 2 pour montrer qu’il l’est toujours au rang p, et ainsi achever la récurrence.
14.2 L’anneau Z/nZ(nN)
Définition 2 : L’ensemble quotient de Zsur la relation de congruence est noté Z/nZ. On note xla
classe d’équivalence de xdans Z/nZ, c’est-à-dire x={yZ|yx[n]}.
Théorème 1 : Pour tout xZ, il existe un unique rxtel que 06r < n.
démonstration :On effectue la division euclidienne de xpar n: il existe un unique couple (q, r)
Z×Ntel que x=qn +ret 06r < n, donc rx[n]rxet 06r < n.
Exercice : Montrer qu’en partiulier, xy[n]si et seulement si xet yont même reste dans la division
euclidienne par n.
Solution : Notons x=qn +ret y=qn+r, avec 06r, r< n. On a alors les équivalences suivantes :
xy[n]xy=kn qn +rqnr=kn rr=n(kq+q)
rr[n]06r,r<n
r=r,
et le résultat est ainsi démontré.
Corollaire 1 : Z/nZ={0,1, . . . , n 1}, et |Z/nZ|=n.
démonstration :Par le théorème précédent, rxest unique. Donc, par transitivité, tous les éléments
congrus à rmodulo nle sont aussi à xmodulo n, ce qui nous amène à écrire que r=x. Mais r=
{0,1, . . . , n 1}, d’où le résultat.
Proposition 3 : On définit une addition +et une multiplication ·sur Z/nZde la manière suivante :
pour tous α, β Z/nZ, il existe a, b Ztels que a=αet b=β, et l’on pose ainsi
α+β=a+b=a+bet α·β=a·b=a·b.
Congruences dans Z. Anneau Z/nZ.3
démonstration :Il faut vérifier que +et ·sont bien définies sur Z/nZ:
α=a=a
β=b=baa[n]
bb[n]
prop 2
a+ba+b[n]
a·ba·b[n]a+b=a+b
a·b=a·b,
donc cette définition est indépendante du choix des représentants, ce qui la rend pertinente.
Théorème 2 : (Z/nZ,+,·)est un anneau commutatif.
démonstration :Découle directement du fait que Zsoit un anneau commutatif.
14.3 Eléments inversibles
Théorème 3 : xZ/nZest inversible si et seulement si xn= 1.
démonstration :On a les équivalences suivantes :
xinversible dans Z/nZ yZ/nZ|x·y= 1
x, y Z|x·y1 [n]
x, y, u Z|x·y+u·n= 1
Bézout
xn= 1.
Théorème 4 : Les propositions suivantes sont équivalentes :
(i) npremier;
(ii) Z/nZest intègre;
(iii) Z/nZest un corps.
démonstration :
(i) (iii) : npremier ⇒ ∀ a∈ {1,...,n 1}, a n= 1 thm 3
a(Z/nZ), a est inversible
Z/nZest un corps.
(ii) (i) : On procède par contraposée : nnon premier ⇒ ∃ n1, n2N|(n1n2=net 1< n1, n2<
n)n1·n2=n= 0. Mais n16= 0 et n26= 0, donc Z/nZn’est pas intègre.
Enfin, puisque tout corps est intègre, le théorème est démontré.
4Congruences dans Z. Anneau Z/nZ.
14.4 Applications
14.4.1 Théorème des restes chinois
Théorème 5 (des restes chinois) : Soient p, q N. Alors
pq= 1 Z/pZ×Z/qZ
=Z/pqZ.
démonstration :
"=" : Soit fl’application définie par
f:ZZ/pZ×Z/qZ
x7−(x, ex).
On vérifie aisément grâce à la proposition 3 que fest un morphisme d’anneaux.
Déterminons alors son noyau. Soit xZtel que f(x) = (0,e
0). Alors on a simultanément x= 0
et ex=e
0, c’est-à-dire pet qdivisent x. Or pq= 1 par hypothèse, donc la produit pq divise aussi
x, de sorte que xpqZ, et le noyau recherché n’est autre que pqZ.
L’application quotient f:Z/pqZZ/pZ×Z/qZest donc injective, et les deux ensembles ont
même cardinal, donc fest bijective, d’où Z/pqZ
=Z/pZ×Z/qZ.
"=" : Soit gl’isomorphisme (d’après le sens direct) d’anneau défini par
g:Z/pqZZ/pZ×Z/qZ
bx7−(x, ex).
Supposons pq=d6= 1. Alors il existe p, qtels que p=pdet q=qd. Puisque g(b
1) = (1,e
1)
et b
1est d’ordre pq pour l’addition, il doit en être de même pour (1,e
1).
Or dpq(1,e
1) = q(p1), p(qe
1= (0,e
0), donc (1,e
1) est d’ordre inférieur ou égal à dpq< pq.
On aboutit à une contradiction qui prouve bien que pq= 1.
14.4.2 Petit théorème de Fermat
Théorème 6 (de Fermat) : Si pest premier, alors pour tout aZ,apa[p].
démonstration :Puisque pest premier, alors pour tout k∈ {1,...,p1},pdivise p
k. En effet,
p
k=p(p1) ···(pk+ 1)/k!k!p
k=p(p1) ···(pk+ 1). Comme pest premier, il est
premier avec tout entier le précédent, donc pk= 1, et il vient que pne divise pas k!. Par le théorème
de Gauss, il s’ensuit que pdivise p
k.
Procédons ensuite par récurrence sur l’entier aN.
Initialisation : Si a= 0, le résultat est évident.
Hérédité : Supposons que (a1)pa1 [p].
ap= (a1 + 1)p=
p
X
k=0 p
k(a1)k(a1)p+ 1 [p]H.R.
a1 + 1 [p]a[p].
Congruences dans Z. Anneau Z/nZ.5
Si a(N), alors aN(a)p≡ −a[p]. Supposons alors un instant p6= 2 de sorte que
la condition ppremier soit équivalente à dire que pest impair. La relation de congruence précédente
devient alors ap≡ −a[p]apa[p]. Enfin, si p= 2, alors quelque soit a, l’entier apaest pair,
et donc divisible par p.
14.4.3 Théorème de Wilson
Théorème 7 (de Wilson) : Soit p>2un entier naturel. Alors pest premier si et seulement si (p
1)! ≡ −1 [p].
démonstration :
"=" : Supposons pnon premier, de sorte qu’il existe d, ptel que p=dp.dest strictement compris
entre 1 et p, et puisque pdivise (p1)! + 1 par hypothèse, dle divise aussi. Or dest l’un des
facteurs de (p1)! donc ddivise (p1)!, et on arrive ainsi à la contradiction que ddivise 1.
Finalement, pest premier.
"=" : Puisque pest premier, ane le divise par. D’après le petit théorème de Fermat, apa[p]
a(ap11) 0 [p]ap11 [p]ap1= 1. Par suite, le polynôme Xp11admet pour
racines tous les éléments de (Z/pZ)et, le produit des racines valant 1, il vient que (p1)! +
1 = 0, c’est-à-dire (p1)! ≡ −1 [p].
14.4.4 Critères de divisibilité
En base 10, tout entier naturel Ns’écrit sous la forme N=a0+ 10a1+···+ 10nan.
Puisque 10 1 [3/9],10n1 [3/9] pour tout n, donc Na0+a1+···+an[3/9]. On en tire le critère
suivant : « Un nombre est divisible par 3 (ou 9) si la somme de ses chiffres l’est ».
De même, 10 ≡ −1 [11] ⇒ ∀ nN,10n(1)n[11] Na0a1+a2+···+ (1)nan[11]. D’où
le critère suivant : « Un nombre est divisible par 11 si la différence de la somme de ses chiffres de rang
pairs par celle de ses chiffres de rang impairs l’est ».
Exercice : Dire si les nombres suivants sont multiples de 3, 9 et/ou 11 :
324,1948617,18690045,2310905821257,1073741824.
Solution : On récapitule ceci selon le tableau suivant (Σpdésigne la somme des chiffres de rang pairs et Σicelle des chiffres de
rangs impairs) :
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