Madame Déborah GERADON
Députée wallonne rue Grand-Vinâve, 42 FJ/MH/sr/274
4101 JEMEPPE-SUR-MEUSE
Namur, le 13 décembre 2016
Madame la Députée wallonne,
J'ai l'honneur de vous faire parvenir, en annexe, la réponse à votre question écrite n°274 du
25 novembre 2016 que nous adresse ce jour Monsieur Maxime PREVOT, Ministre des
Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine.
La question et la réponse seront publiées sur le site web du Parlement
(www.parlementwallonie.be).
Je vous prie de croire, Madame la Députée wallonne, à l'assurance de ma considération
distinguée.
Frédéric JANSSENS
Question n° 274 de GERADON Déborah
à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine
Imprimé le 13/12/2016 à 10:59:50 1
N° : Réception : 25 novembre 2016 Echéance : 16 décembre 2016
Matière :
Objet : la nécessité d'établir une politique plus cohérente en matière de consommation d'alcool
Question écrite
Douze associations wallonnes et bruxelloises, réunies sous le groupe « Jeunes, alcool et société » ont rédigé
une série de propositions et revendiqué la mise en place d’une politique cohérente en matière d’alcool.
Un nouveau plan d’action national alcool (PANA) doit apparemment être mis en place. La Wallonie, par
l’intermédiaire du ministère de Monsieur le Ministre, compétent en matière de santé, a-t-elle été ou sera-telle
associée à la rédaction de ce plan ?
Le groupe dénonce les pratiques de plus en plus agressives des marques en matière promotion des produits
alcoolisés.
De plus, les jeunes sont de plus en plus visés, notamment par l’apparition de sodas alcoolisés, alcopops, aux
couleurs acidulées et au marketing ciblé.
Comment sensibiliser la jeunesse face à ce phénomène ?
Des campagnes de prévention spécifiques sont-elles prévues ?
Est-il envisageable, comme pour le tabac, d’interdire la publicité des boissons alcoolisées vu les dommages
qu’une consommation abusive peut provoquer sur la santé ?
Réponse
En matière de prévention, je soutiens bien sûr différentes associations, notamment le travail de l'ASBL Univers
Santé qui déploie des activités spécifiques en lien avec la consommation d'alcool par les jeunes. Cette ASBL
réunit, au sein de ce réseau pilote appelé « Jeunes, Alcool et Société », 12 associations actives auprès des
jeunes, dont certaines sont subsidiées par la Région wallonne. Au sein de ce groupe se définissent des stratégies
et des actions (comme celles qui visent le binge drinking).
Sur le plan de la prévention, la Région subventionne également l'ASBL Modus Vivendi qui bénéficie du
soutien logistique de cette association, notamment dans le cadre du label Quality Nights. Ce label a pour
objectif d'améliorer le bien-être des personnes qui sortent dans les lieux de fête. Dans les lieux labellisés se
trouvent divers outils préventifs dont la distribution d'eau gratuite pour limiter les consommations de bière ou
d'alcool, des préservatifs et bouchons d'oreilles, des brochures d'informations sur la santé, des alertes rapides
en cas de circulation de drogues à haut risque ainsi qu'un personnel sensibilisé à la réduction des risques et
aux premiers secours.
Par ailleurs, plusieurs associations soutenues par la Wallonie dans le domaine de l'aide et des soins en matière
d'assuétudes (comme Infor-Drogues ou Citadelle) offrent aux institutions qui en ont besoin (écoles et maisons
de quartier par exemple) des formations, un accompagnement de projets et des outils pour travailler la question
des consommations avec les jeunes.
D'autres actions plus générales verront le jour dans le cadre du plan Prévention, comme la promotion de
l'accessibilité gratuite à l'eau, dans des manifestations diverses de jeunes, comme les festivals.
Imprimé le 13/12/2016 à 10:59:50 2
De manière plus structurelle, la Région wallonne a agréé 27 services d’aide et de soins spécialisés en
assuétudes qui offrent un accompagnement spécifique destiné aux personnes sujettes à des problèmes de
dépendance, en ce compris la dépendance à l’alcool. Ces services sont répartis sur l’ensemble du territoire
wallon.
Cependant, une approche multisectorielle est nécessaire pour diminuer la nocivité de la consommation de
boissons alcoolisées, d’où la nécessité d’établir des concertations entre les différentes autorités de la santé.
Selon l'OMS dans sa « Stratégie mondiale visant à réduire l'usage nocif de l'alcool », une action nationale doit
concerner 10 domaines d'actions :
1) leadership, prise de conscience et engagement ;
2) action des services de santé ;
3) action communautaire ;
4) politiques et mesures de lutte contre l’alcool au volant ;
5) offre d’alcool ;
6) marketing des boissons alcoolisées ;
7) politiques de prix ;
8) réduction des conséquences néfastes de la consommation d’alcool et de l’intoxication alcoolique ;9)
réduction de l’impact sur la santé publique de l’alcool illicite ou produit par le secteur informel ; 10) suivi et
surveillance.
Une partie de ces actions dépassent les compétences de la Région, notamment les actions 5, 6 et 7 qui sont du
ressort du Gouvernement fédéral. L'emplacement idéal pour construire un plan Alcool se situe dès lors dans
la Cellule générale de Politique Drogues qui réunit les 17 cabinets des entités fédérées et fédérale ayant des
compétences en matière de substances psychoactives, licites ou illicites.
Cette Cellule générale tente toujours d'élaborer le plan Alcool sur base de la stratégie recommandée par l'OMS.
Mon Cabinet participe activement à cette construction pour s'assurer que des mesures concrètes de lutte contre
les conséquences négatives de la consommation d’alcool puissent être mises en place dans notre Région.
Cependant, de nombreuses mesures qui avaient pour objectif de réduire l'accessibilité des boissons alcoolisées
ont été rejetées par le Gouvernement fédéral alors qu'elles sont recommandées par l'OMS et qu'elles ont fait
la preuve de leur efficacité.
Dans ces conditions, il n’est pas possible d’avaliser le plan.
Lors de la dernière Conférence Interministérielle Santé publique du 24 octobre, avec mes collègues en charge
de la santé, les Ministres bruxellois et la Ministre de la Fédération Wallonie-Bruxelles, nous avions pourtant
duit nos attentes en matière de réduction de l'offre, dans l'intérêt d'un accord sur le plan Alcool et en vue
d'aboutir sur ce dossier important.
Nous ne demandions plus au Fédéral que trois mesures qui, selon moi, sont nécessaires pour protéger les
mineurs.
* Tout d'abord, la clarification de la loi sur l'interdiction de la vente de spiritueux aux moins de 18 ans.
La définition d'un spiritueux est en effet trop complexe pour être comprise par les vendeurs, les serveurs ou
les clients, ce qui rend cette partie de la loi inapplicable.
* Nous avions également demandé l'interdiction de la vente de boissons alcoolisées dans les distributeurs
automatiques parce que cette accessibilité de l'alcool sans contrôle est évidemment incohérente avec
l'interdiction de la vente d'alcool aux moins de 16 ans et de spiritueux aux moins de 18 ans. * La dernière
mesure demandée était l'interdiction du marketing.
Le secteur est en effet censé s'autoréguler dans ce domaine, mais les plaintes bien souvent n'ont aucune suite
: l'honorable membre le note d'ailleurs, les actions continuent à cibler les jeunes. Or, il est impossible de réagir
tant qu'il n'est pas prouvé que ces actions ne respectent pas l'interdiction de vente ou d'offre d'alcool aux moins
de 16 ans et de spiritueux aux moins de 18 ans.
Chacun se souviendra pourtant de la polémique à l'époque en marge des 24 heures de Louvain-La-Neuve, avec
une grande société internationale de brasserie qui incitait à la consommation. Pour prendre un autre exemple
Imprimé le 13/12/2016 à 10:59:50 3
plus récent, une application pour smartphone a été développée par des entreprises commerciales pour avertir
les jeunes des endroits où obtenir des boissons alcoolisées à tarif réduit. À certaines heures et certains endroits,
une bière est même offerte à chaque arrivant. À ce propos, j'ai d'ailleurs interpelé dernièrement ma collègue,
la Ministre Maggie De Block.
L'honorable membre l'a vu, le secteur du commerce de l'alcool exerce souvent un marketing actif auprès des
jeunes pour les pousser à consommer des boissons alcoolisées. Les alcooliers cherchent à recruter de nouveaux
consommateurs parmi les jeunes. Les intérêts financiers rendent certains secteurs volontairement aveugles aux
conséquences de la consommation de leur produit. L'autorégulation est un leurre, car il est un moment où les
intérêts commerciaux et ceux de la santé publique ne peuvent se rejoindre. Ce type de secteur doit
impérativement être strictement contrôlé.
Au niveau global, la politique actuelle en matière d'alcool pose donc problème : les actions de prévention de
la consommation d'alcool auprès d'élèves ou d'étudiants sont potentiellement enrayées par la publicité et le
marketing. En outre, l'existence de ce marketing ciblant les jeunes vient en contradiction avec la loi sur
l'interdiction de la vente d'alcool ou de spiritueux aux mineurs.
Le Gouvernement fédéral parle maintenant d'arriver à un compromis d'ici le mois de mars 2017. Je reste
dubitatif, pour des enjeux de cette nature, de devoir considérer qu'il faille faire des compromis.
Nous avons cependant décidé de continuer les discussions sur le plan Alcool pour essayer malgré tout d'aboutir
sur un plan, avec au moins les trois mesures que j'ai mentionnées plus haut. Ces trois mesures nous
apparaissaient déjà comme le résultat d'un compromis.
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