Qualité de vie et santé mentale : évaluation en alcoologie Quality of life and mental health: assessment in the field of alcohol treatments P. Martin * Mots-clés : Qualité de vie, Alcool. Key words: Quality of life, Alcohol. CH Paul-Guiraud, Villejuif 29 mars 2007 Coutume acceptée presque partout dans le monde, la consommation d’alcool est étroitement liée aux troubles mentaux et représente l’un des principaux facteurs de maladie, de traumatisme, d’invalidité et de décès prématuré. Certes, l’une des mesures consiste à réduire les risques de problèmes qui lui sont liés dans divers cadres : foyer, lieu de travail, quartier. Mais il est primordial que la qualité de vie et son évaluation soient un indicateur de santé publique important pour les acteurs de santé et le patient lui-même. Dans le contexte de la recherche en santé publique et de l’évaluation thérapeutique, l’utilisation de la qualité de vie comme critère de jugement apparaît de plus en plus nécessaire et se révèle le plus souvent pertinente. Les critères habituels sur lesquels repose l’évaluation d’une thérapeutique, c’est-à-dire l’ef* Centre de tabacologie, hôpital Albert-Chenevier, 94000 Créteil. ficacité clinique et la tolérance, ne sont plus suffisants aujourd’hui. Il est nécessaire de prendre en compte l’appréciation du patient sur son vécu, que ce soit au travers de sa vie quotidienne ou de l’influence de la prise en charge de sa pathologie lorsqu’il est souffrant. Il apparaît essentiel que l’individu soit pris en compte dans sa globalité, et pas uniquement dans son état somatique À l’heure actuelle, il est important de décrire les modalités qui confèrent à toute vie hu- maine sa “qualité”, ou du moins de définir ce qui pourrait être considéré pour tout individu comme un “idéal de vie”, à un moment de son existence. L’appréciation de ce qui est appelé la qualité de vie est donc un des éléments principaux qui doivent contribuer à la décision médicale. D’autant qu’à l’heure actuelle, il semble bien admis qu’il ne suffit plus de s’intéresser uniquement à la survie ou au prolongement de la vie d’un patient, mais également à la qualité de celle-ci. L’autre question d’importance est de savoir si les instruments qui existent à l’heure actuelle sont vraiment adaptés à cette évaluation, tant dans la conception que dans l’application. Enfin, il faut aussi faire la part de la spécificité du lien que l’individu a avec alcool, à un moment donné de sa vie et de sa pathologie, afin qu’il puisse s’auto-évaluer en fonction de son état de santé du moment, et en prendre conscience. L’un de nos objectifs est donc de créer et valider un autoquestionnaire. Cet outil devrait permettre la réalisation de ces deux démarches : obtenir des données s’inscrivant dans un cadre de santé publique, concernant les conditions d’existence et de perception de la qualité de vie de ces sujets ; faire prendre conscience aux patients de l’évolution de la qualité de vie en fonction de leur état de santé à différents moments de leur addiction et de leur prise en charge (effet biphasique). n La France, mauvaise élève des politiques anti-alcool Eau de cologne, teinture d’iode, agents de nettoyage en teinturerie et autres liquides alcoolisés non licites, tuent plus sûrement que la vodka en Russie. Six fois moins chers qu’elle mais aussi plus chargés encore en éthanol (de 60 à 97 % contre 43 %), ils aggravent encore une mortalité, imputable en grande partie à l’alcool et au tabac, déjà très lourde dans ce pays. En effet, en 2004, la longévité moyenne pour un homme était de 59 ans et pour une femme de 72 ans ! L’étude, menée par l’équipe de David Léon à Izhevsk, une ville industrielle de plus de 600 000 habitants à l’ouest de l’Oural, a porté sur 1 750 personnes et autant de témoins. Résultats : 751 hommes alcooliques ou consommateurs de boissons alcoolisées non potables, contre 192. L’odds-ratio pour la mortalité liée à la consommation de celles-ci était de 9,2 (après ajustement pour l’âge), contre 6 pour celle des boissons licites (après ajustement pour le tabagisme et le niveau d’éducation). Soit un odds-ratio de 8,3 lorsque l’on fait un ajustement avec la part d’éthanol bue dans les boissons alcoolisées autorisées chez les consommateurs d’alcools non alimentaires. Léon D et al. Lancet 16 juin 2007;369:2001-9 et 1975-6. Nous sommes au 26e rang sur 30 pour les politiques anti-alcool, juste avant l’Autriche, l’Allemagne, la Suisse et le Luxembourg (premier : la Norvège, suivie de la Pologne, puis l’Islande). Un mauvais classement obtenu dans “l’indice de la politique alcool” (Alcohol Policy Index), construit par des chercheurs du New York Medical College, qui étalonne cinq domaines réglementaires, et calculé pour chacun des trente pays de l’OCDE : l’accessibilité physique de l’alcool (âge minimum légal pour l’achat, restriction des horaires de vente…) ; le contexte d’alcoolisation (formation des personnes servant de l’alcool…) les prix ; la publicité en faveur des boissons alcoolisées ; la conduite automobile. Soit, 16 items, choisis et pondérés selon leur efficacité potentielle pour limiter les effets néfastes de l’alcool. Par ailleurs, la consommation annuelle par habitant est inversement proportionnelle à la valeur de l’indice. Ainsi, une augmentation du score de 10 points correspond à une diminution de la consommation d’un litre d’alcool pur par habitant et par an. Brand et al. Comparative analysis of alcohol control policies in 30 countries. Plos Medicine 2007; 4:752-9. www.plosmedicine.org. In: Actualités Alcool, n° 33, www.inpes.sante.fr Brèves L’alcool non alimentaire fait des ravages en Russie Le Courrier des addictions (9) ­– n° 3 – juillet-août-septembre 2007 94