Fiche de révisions – La poésie. La forme d’un poème CHANT POUR LA BELLE SAISON Aube J’ai embrassé l’aube d’été. Rien ne bougeait encore au front des palais. L’eau était morte. Les camps d’ombre ne quittaient pas la route du bois. J’ai marché, réveillant les haleines vives et tièdes, et les pierreries regardèrent, et les ailes se levèrent sans bruit. La première entreprise fut, dans le sentier déjà rempli de frais et blêmes éclats, une fleur qui me dit son nom. Je ris au Wasserfall blond qui s’échevela à travers les sapins : à la cime argentée je reconnus la déesse. Alors je levai un à un les voiles. Dans l’allée, en agitant les bras. Par la plaine, où je l’ai dénoncée au coq. A la grand’ville elle fuyait parmi les clochers et les dômes, et courant comme un mendiant sur les quais de marbre, je la chassais. En haut de la route, près d’un bois de lauriers, je l’ai entourée avec ses voiles amassés, et j’ai senti un peu son immense corps. L’aube et l’enfant tombèrent au bas du bois. Au réveil il était midi. Rien ne ressemble plus à l’inspiration Que l’ivresse d’une matinée de printemps, Que le désir d’une femme. Ne plus être soi, être chacun. Poser ses pieds sur terre avec agilité. Savourer l’air qu’on respire. Je chante ce soir non ce que nous devons combattre Mais ce que nous devons défendre. Les plaisirs de la vie. Le vin qu’on boit avec des camarades. L’amour. Le feu en hiver. La rivière fraîche en été. La viande et le pain de chaque repas. Le refrain que l’on chante en marchant sur la route. Le lit où l’on dort. Le sommeil, sans réveils en sursaut, sans angoisse du lendemain. Arthur Rimbaud, Illuminations, 1886 « Claudine, avec le temps tes grâces passeront » Claudine, avec le temps tes grâces passeront, Ton jeune teint perdra sa pourpre et son ivoire, Le ciel qui te fit blonde un jour te verra noire, Et, comme je languis, tes beaux yeux languiront. Le loisir. La liberté de changer le ciel. Le sentiment de la dignité et beaucoup d’autres choses Dont on ose refuser la possession aux hommes. Ceux que tu traites mal te persécuteront, Ils riront de l'orgueil qui t'en fait tant accroire, Ils n'auront plus d'amour, tu n'auras plus de gloire, Tu mourras, et mes vers jamais ne périront. J’aime et je chante le printemps fleuri. J’aime et je chante l’été avec ses fruits. J’aime et je chante la joie de vivre. J’aime et je chante le printemps. J’aime et je chante l’été, saison dans laquelle je suis né. Robert Desnos, Destinée arbitraire, in « Mines de rien ». O cruelle à mes vœux ou plutôt à toi-même, Veux-tu forcer des ans la puissance suprême, Et te survivre encore au-delà du tombeau ? Que ta douceur m'oblige à faire ton image Et les ans douteront qui parut le plus beau, ............Ou mon esprit ou ton visage. Guillaume Colletet (1598-1659) Amours de Claud 1 Fiche de révisions – La poésie. La forme d’un poème « Ma foi, c’est fait de moi… » Ma foi, c'est fait de moi, car Isabeau M'a commandé de lui faire un rondeau. Cela me met en une peine extrême. Quoi! treize vers, huit en eau, cinq en ême! Je lui ferais aussi tôt un bateau. En voilà cinq pourtant en un monceau. Formons-en huit en invoquant Brodeau; Et puis mettons, par quelque stratagème, Ma foi, c'est fait. Si je pouvais encor de mon cerveau Tirer cinq vers, l'ouvrage serait beau. Mais cependant me voilà dans l'onzième; Et si je crois que je fais le douzième; En voilà treize ajustés au niveau. Ma foi, c'est fait. Vincent Voiture (1594-1648) Guillaume Apollinaire Max Jacob 2 Fiche de révisions – La poésie. La forme d’un poème Consigne 1: A partir des définitions qui suivent, identifiez la forme de chacun de ces poèmes. Consigne 2 – revoyez chaque texte que nous avons vu, ainsi que ceux de votre anthologie si je vous en ai fait faire une) et identifiez-en la forme. Ballade des Dames du temps jadis Dites-moi où, n'en quel pays, Est Flora la belle Romaine, Archipiades, ne Thaïs, Qui fut sa cousine germaine, Echo, parlant quant bruit on mène Dessus rivière ou sur étang, Qui beauté eut trop plus qu'humaine ? Mais où sont les neiges d'antan ? Différentes formes poétiques : Le sonnet (forme fixe) La forme du sonnet est d'origine italienne. Cette forme s'impose en France au XVIème siècle, notamment grâce aux écrivains de Pléiade. Il est obligatoirement composé de deux quatrains (strophe de 4 vers) et de deux tercets (strophe de 3 vers), soit 14 vers en tout. A l'origine, les rimes dans les quatrains devaient être embrassées (ABBA ABBA). Où est la très sage Héloïs, Pour qui fut châtré et puis moine Pierre Esbaillart à Saint-Denis ? Pour son amour eut cette essoine. Semblablement, où est la roine Qui commanda que Buridan Fût jeté en un sac en Seine ? Mais où sont les neiges d'antan ? Le rondeau (forme fixe) Le rondeau était très utilisé au Moyen Âge. La Pléiade le rejettera pour lui préférer le sonnet. Le rondeau impose la reprise du premier vers en refrain au long du poème. Il contient seulement deux rimes. La roine Blanche comme un lis Qui chantait à voix de sirène, Berthe au grand pied, Bietrix, Aliz, Haramburgis qui tint le Maine, Et Jeanne, la bonne Lorraine Qu'Anglais brûlèrent à Rouen ; Où sont-ils, où, Vierge souvraine ? Mais où sont les neiges d'antan ? La ballade (forme fixe) Elle apparaît au XIIème siècle, mais n'acquière sa forme définitive qu'au XIVème siècle. La ballade est composée de trois strophes carrées (le nombre de vers de la strophe est égal au nomcre de syllabes par vers, par exemple une strophe de 10 vers sera composé de décasyllabes). Chaque strophe est terminée par un refrain et un envoi au destinataire de la dédicace. Les poètes prenaient parfois quelques libertés par rapport à la forme de la ballade. Prince, n'enquerrez de semaine Où elles sont, ni de cet an, Que ce refrain ne vous remaine : Mais où sont les neiges d'antan ? François Villon, (1431- ?) Le poème en vers libres Dans ce type de poème, on ne retrouve plus une forme particulière ou un nombre de syllabes par vers défini. Le vers est défini par le retour à la ligne. Cependant, les jeux de sonorités et de rythme sont essentiels. 3 Fiche de révisions – La poésie. La forme d’un poème L’acrostiche Un acrostiche (substantif masculin), du grec akrostikhos ("haut, élevé" et stichos, le vers), est un poème fondé sur une figure de style consistant en ce que les initiales de chaque vers, lues verticalement de haut en bas, composent un mot ou une expression se rapportant au sujet du poème. Il existe trois sortes d'acrostiches en réalité. Si l'acrostiche est un type de poème, il repose avant tout sur une opération de transformation graphique donc sur une figure de style. Le calligramme Un calligramme est un poème dont la disposition graphique sur la page forme un dessin, généralement en rapport avec le sujet du texte, mais il arrive que la forme apporte un sens qui s'oppose au texte. Le poème en prose Le poème en prose apparaît au XIXème siècle, notamment grâce à Aloysius Bertrand, auteur méconnu qui n'a pu publier de son vivant, qui écrit le premier poème en prose. Mais Rimbaud, plus connu, renouvelle le genre. Le poème en prose ne présente pas de retour à la ligne permettant d'identifier des vers. Il ne présente donc pas de rimes. Il se distingue d'un texte normal par sa dimension poétique : rythme des mots, sonorités, utilisation de figures de style... La disposition des rimes : Rimes plates ou suivies : AA-BB Rimes croisées : ABAB Rimes embrassées : ABBA 4