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LIDC CONGRES D’AMSTERDAM
QUESTION B
Les règles relatives à la concurrence déloyale devraient-elles avoir pour objectif
de protéger les concurrents, les consommateurs, ou d’autres intérêts ?
Comment les conflits entre ces divers intérêts devraient-ils être résolus ?
1. Généralités
En vue d’avoir un aperçu global de la gislation belge en matière de pratiques
commerciales tenues pour déloyales, les éléments suivants sont indiqués ci-après :
a) jusqu’au 23 décembre 1934 :
Sauf certaines infractions en petit nombre visé par une loi pénale, la concurrence
déloyale est uniquement primée sur la base de l’article 1382 du Code Civil, qui
sanctionne les actes fautifs causant à autrui un dommage.
b) Inspiré par l’article 10 bis de la convention d’Union de Paris, l’arrêté royal 55
du 23 décembre 1934 énonçait ce qui suit :
Article 1 : Lorsque par un acte contraire aux usages honnêtes en matière
commerciale ou industrielle, un commerçant, un industriel ou un artisan enlève ou
tente d’enlever à ses concurrents ou à l’un d’eux une partie de leur clientèle ou
porte atteinte ou tente de porter atteinte à leur capacité de concurrence, le
président du Tribunal de Commerce, sur la poursuite soit des intéressés ou de l’un
d’eux, soit du groupement professionnel ayant la personnification civile, dont ils
sont membres, ordonne la cessation de cet acte.
L’article 2 qualifie de contraire aux usages honnêtes notamment :
- la création ou la tentative de création de confusion
- la diffusion d’imputations fausses sur un concurrent, sa personne, son
entreprise, ses marchandises ou son personnel
- la remise d’indications inexactes sur la personnalité commerciale, l’industrie,
les dessins, marques, brevets, références, destinations, sur la nature des
produits ou des marchandises, sur les conditions de leur fabrication, leur
origine, leur provenance ou leur quantité
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- apposer, faire apposer ou laisser apposer un nom, un signe ou une
indication quelconque de nature à faire croire que les produits ont une origine
ou une provenance autre que leur véritable origine ou provenance
- faire croire à une origine ou à une provenance inexacte desdits produits soit
par addition, retranchement ou altération quelconque d’une marque, d’une
dénomination ou d’une étiquette, soit par des annonces, brochures, circulaires,
prospectus ou affiches, soit par la production de factures ou de certificats
d’origine ou de provenance inexacts, soit par tout autre moyen
- faire usage non autorisé (ou y provoquer) de modèles, échantillons,
combinaisons techniques, formules d’un concurrent et en général de toutes
indications ou de tous documents confiés en vue d’un travail, d’une étude ou
d’un devis
- faire un emploi non autorisé du matériel d’un concurrent, de l’emballage, des
récipients de ses produits, même sans intention de s’en attribuer la propriété, ni
de créer une confusion entre les personnes, les établissements ou les produits.
Outre ce texte spécifique, certaines législations à caractère pénal répriment ou
réglementent la tromperie, les ventes avec prime, les atteintes a des appellations
d’origine, ventes publiques et d’autres domaines encore.
La situation ainsi créée permettait l’exercice des actions suivantes :
- concurrent lésé : action en cessation
- commerçant lésé : action en réparation
- consommateur lésé : action en réparation
c) Malgré cette situation, le besoin d’une amélioration se fit sentir. C’est ainsi qu’une
réforme de la gislation fut mise en chantier en 1960 et elle aboutit en vote de la
loi du 14 juillet 1971, modifiée et améliorée par la loi du 14 juillet 1991, qui elle-
même a subi depuis lors de nombreuses modifications mais étrangères au sujet qui
nous occupe.
Ce qui est essentiel dans la loi du 14 juillet 1971, c’est que la répression de l’acte
contraire aux usages honnêtes n’est plus seulement ouverte au concurrent lésé
mais à tout autre acteur économique aux intérêts duquel il est porté atteinte ou
risque d’être porté atteinte.
Enfin, dans la majorité des cas, l’action en cessation pourra aussi être intentée à la
requête d’associations de consommateurs reconnues justifiant d’un intérêt. Cette
nouvelle catégorie de personnes pouvant se prévaloir de la loi est très importante à
notre point de vue.
Vingt ans plus tard, un nouveau pas est franchi lorsque l’article 94 de la loi du 14
juillet 1991 ouvre la répression de tout acte d’un acteur économique portant
atteinte ou pouvant porter atteinte aux intérêts d’un ou plusieurs consommateurs.
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Ainsi, il est mis fin une fois pour toutes à l’exigence d’un état de concurrence
entre acteurs économiques et ainsi à la dichotomie instaurant deux voies
judiciaires différentes, selon que l’acte se meut entre commerçants (concurrents ou
non) ou qu’il atteigne ou risque d’atteindre un consommateur.
On trouvera ci-après le texte des lois du 14 juillet 1971 et 14 juillet 1991.
Loi du 14 juillet 1971 (abrogée)
Article 54 Est interdit tout acte contraire aux usages honnêtes en matière
commerciale par lequel un commerçant ou artisan porte atteinte ou tente de porter
atteinte aux intérêts professionnels d’un ou de plusieurs autres commerçants ou
artisans.
L’article 54 bis cite de manière non limitative un certain nombre d’actes tenus en
plus comme contraires aux usages honnêtes.
Loi du 14 juillet 1991
Article 93 Est interdit tout acte contraire aux usages honnêtes en matière
commerciale par lequel un vendeur porte atteinte ou peut porter atteinte aux
intérêts professionnels d’un ou de plusieurs autres vendeurs.
Article 94 Est interdit tout acte contraire aux usages honnêtes en matière
commerciale par lequel un vendeur porte atteinte ou peut porter atteinte aux
intérêts d’un ou de plusieurs consommateurs.
Le terme « vendeur » peut surprendre et a été abondamment critiqué. Mais il a été
choisi pour disposer de la signification la plus large possible.
L’article 1°, 6° de la loi le définit comme suit :
a) Tout commerçant ou artisan ainsi que toute personne physique ou morale qui
offrent en vente ou vendent des produits ou des services, dans le cadre d’un
activité professionnelle ou en vue de la réalisation de leur objet statutaire ;
b) Les organismes publics ou les personnes morales dans lesquels les pouvoirs
publics détiennent un intérêt prépondérant qui exercent une activité à caractère
commercial, financier ou industriel et qui offrent en vente ou vendent des
produits ou des services ;
c) Les personnes qui exercent avec ou sans but de lucre une activité à caractère
commercial, financier ou industriel, soit en leur nom propre, soit au nom ou
pour le compte d’un tiers doté ou non de la personnalité juridique et qui offrent
en vente ou vendent des produits ou des services.
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Dans son état actuel, la législation permet la défense et la sauvegarde de l’intérêt
particulier, de l’intérêt professionnel et de l’intérêt général.
L’intérêt particulier : par l’action en cessation ouverte tant à l’acteur économique
qu’au consommateur ainsi que par l’action de droit commun en indemnisation
l’exception de la « class action »).
L’intérêt professionnel : l’action en cessation ouverte aux groupements
professionnels, qui faute d’intérêt propre sont exclus de l’action en indemnisation.
L’intérêt général : le ministre qui a les affaires économiques dans ses attributions
peut poursuivre la cessation de tout acte contraire aux usages honnêtes qu’il
s’agisse d’une infraction à l’article 93 ou à l’article 94. Certains actes particuliers
peuvent aussi être poursuivis par le ministre concerné par ce type d’acte. La liste
en est reprise ci-après.
Article 97 Le président du tribunal de commerce constate également l’existence
et ordonne également la cessation des infractions visées ci-dessous :
1. l’exercice d’une activité commerciale par l’exploitation, soit d’un
établissement principal, soit d’une succursale ou d’une agence, sans être
immatriculé préalablement au registre du commerce conformément aux
dispositions des lois relatives au registre du commerce coordonnées par
l’arrêté royal du 20 juillet 1964 ;
2. l’exercice d’une activité commerciale autrement que par l’exploitation, soit
d’un établissement principal, soit d’une succursale ou d’une agence sans en
avoir informé au préalable le registre du commerce conformément aux
dispositions des lois relatives au registre du commerce coordonnées par
l’arrêté royal du 20 juillet 1964 ;
3. l’exercice d’une activité commerciale autre que celle pour laquelle on est
immatriculé au registre du commerce ;
4. l’exercice d’une activité commerciale autre que celle qui a fait l’objet d’une
information au registre du commerce ;
5. l’exercice d’une activité artisanale sans être immatriculé préalablement au
registre de l’artisanat conformément aux dispositions de la loi du 18 mars 1965
sur le registre de l’artisanat ;
6. l’exercice d’une activité artisanale autre que celle pour laquelle on est
immatriculé au registre de l’artisanat ;
7. le non-respect des dispositions légales et réglementaires relatives à la tenue des
documents sociaux et à l’application de la taxe sur la valeur ajoutée ;
8. l’occupation de travailleurs sans être inscrit à l’Office national de sécurité
sociale, sans avoir introduit les déclarations requises ou sans payer les
cotisations, les augmentations de cotisations ou intérêts moratoires ;
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9. l’occupation de travailleurs et l’utilisation de travailleurs en infraction à la
réglementation du travail temporaire, du travail intérimaire et de la mise de
travailleurs à la disposition d’utilisateurs ;
10. le non-respect des conventions collectives du travail rendues obligatoires ;
11. l’obstacle à la surveillance exercée en vertu des lois relatives au registre du
commerce, au registre de l’artisanat, et à la tenue des documents sociaux ;
12. (L. 25 mai 1999) le non-respect des dispositions légales, décrétales et
réglementaires en matière de publicité, autres que celles qui sont prévues dans
la présente loi ou prises en exécution de celle-ci ;
13. (L. 1er juin 1993) l’occupation d’une personne par un employeur qui a commis
une infraction visée à l’article 27, 1°, a, de l’arrêté royal 34 du 20 juillet
1967 relatif à l’occupation de travailleurs de nationalité étrangère.
14. (L. 14 juillet 1994) le non-respect des dispositions légales et réglementaires en
matière de label écologique.
15. (L. 29 janvier 1999) le non-respect des dispositions de la loi du 24 juillet 1973
instaurant la fermeture obligatoire du soir dans le commerce, l’artisanat et les
services.
16. (L. 24 mars 2003) (L. 25 mai 1999) l’exercice d’une activité professionnelle
sans disposer de l’attestation requise en application de la loi-programme du 10
février 1998 pour la promotion de l’entreprise indépendante.
17. (L. 24 mars 2003) l’exercice de la profession de transporteur de choses ou de
personnes par route sans être titulaire des licences et autorisations de transport
requises.
18. le non-respect des prescriptions relatives aux temps de conduite et de repos des
conducteurs de véhicules.
Le président du tribunal de commerce peut accorder au contrevenant un délai pour
mettre fin à l’infraction ou ordonner la cessation de l’activité. Il peut accorder la
levée de la cessation dès qu’il est prouvé qu’il a été mis fin aux infractions.
A l’époque actuelle, la jurisprudence et la doctrine permettent de déterminer les
actes tenus pour contraires aux usages honnêtes suivant liste jointe en annexe,
étant la table des matières d’un ouvrage consacré à la matière.
Il importe aussi de retenir que l’action en cessation étant dorénavant ouverte,
même à l’encontre d’un acte pénalement réprimé, se retrouve dans la
jurisprudence la répression des actes qui suivent :
- fraude fiscale
- rédaction et publicité illicite en matière pharmaceutique
- publicité en matière de soins dentaires ou médicaux
- activité illicite en matière de :
transport
taxi
agences de voyage
activité commerciale réglementée
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