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L'architecture des systèmes de régulation
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Les différents systèmes de régulation
(…)
Certains pays ont choisi de maintenir, en leur sein, une structure
à deux piliers (twin peaks régulation). Cette architecture est
constituée :
- d'une part, d'une surveillance macroprudentielle, qui vise, par
des règles ou des décisions de portée générale, à réguler
l'ensemble du secteur afin de prévenir un risque systémique. Elle
s'applique aux intermédiaires financiers porteurs de risques dans
leur bilan ;
- d'autre part, en complément d'une surveillance
microprudentielle, qui s'intéresse à chacun des acteurs
(émetteurs, investisseurs, intermédiaires financiers) pris
individuellement.
D'autres nations ont, en revanche, préféré un système unitaire.
(…)
L'architecture du système français
Le système de régulation financière de la France repose donc sur
une structure à deux piliers. Il s'appuie d'un côté, sur des
autorités prudentielles (Commission bancaire, CECEI, CCLRF) et
de l'autre, sur un régulateur de marché (l'Autorité des marchés
financiers). Ces différentes autorités travaillent en étroite
concertation aussi bien pour élaborer la réglementation que pour
en assurer le suivi de l'exécution. L'existence de nombreux liens
« intuitu personae » entre elles concourt à faciliter l'homogénéité
des points de vue et la complémentarité des doctrines, via de
multiples instructions, recommandations, avis et règlements, et
permet de ce fait le développement d'une magistrature
économique. Ces autorités sont les suivantes :
- la Commission bancaire qui est chargée de contrôler le respect,
par les établissements de crédit, des dispositions législatives et
réglementaires qui leur sont applicables, et de sanctionner les
manquements constatés. Elle examine, en outre, les conditions
d'exploitation de ces établissements et veille à la qualité de leur
situation financière ainsi qu'au respect des règles de bonne
conduite de la profession. Elle assure, enfin, le contrôle des
changeurs manuels, des agents du marché interbancaire et des
prestataires de services d'investissement ;
- le Comité des établissements de crédit et des entreprises
d'investissement (CECEI) qui gère les agréments de ces deux
types d'institutions financières (12). Il est chargé de les distribuer
mais aussi de les retirer, soit à la demande des établissements,
soit d'office, en particuliers lorsque les conditions d'agrément ne
sont pas remplies.
- le Comité consultatif de la législation et de la réglementation
financières (13) (CCLRF) qui est chargé de donner un avis sur
tous les projets de textes normatifs à portée générale dans le
domaine bancaire, financier et des assurances (lois,
ordonnances, décrets, arrêtés ainsi que les règlements
européens et les directives européennes) sur saisine du ministre
de l'Économie, à l'exception des textes portant sur l'Autorité des
marchés financiers ou entrant dans les compétences de celle-ci ;
- l'autorité des marchés financiers (AMF) qui régule le ;
fonctionnement des marchés (voir l'encadré ci-contre).
Vers la création d'une autorité de surveillance
européenne plurisectorielle ?
La question d'une codification européenne ou d'un régulateur
européen ne se pose pas car la mise en œuvre de la
réglementation, au sein de chaque pays, est effectuée par les
régulateurs nationaux au nom du principe de subsidiarité.
Néanmoins, sept ans après la naissance de l'euro, l'Europe n'est
toujours pas en mesure de contester aux États-Unis ni leur
suprématie financière, ni leur capacité à attirer l'épargne
mondiale. Selon certains observateurs, l'existence, aux États-
Unis, d'un régulateur central, la Securities and Echange
Commission (SEC), faciliterait la lisibilité des marchés par les
investisseurs internationaux qui, a contrario, seraient désorientés
par la multitude de régulateurs et de réglementations nationales
applicables sur le Vieux continent.
Dans ces conditions, il est légitime de s'interroger sur
l'(in)existence d'une autorité de régulation au niveau européen.
Dans un espace économique et monétaire unifié, ne serait-il pas
souhaitable de créer une tutelle européenne I des marchés
financiers ?
Des experts estiment que la priorité pour l'Union européenne est,
dans un premier temps, de faire converger les organismes de
régulation nationaux c'est-à-dire que l'ensemble des
protagonistes avance sur le même chemin. Un tel avis ne fait pas
l'unanimité. Certains spécialistes recommandent la création d'une
autorité unique de régulation des marchés financiers de l'Union
européenne. Ce régulateur, s'il existe, devrait être
multifonctionnel, et non plus spécialiste en raison d'une part, du
développement des groupes financiers en conglomérats et
d'autre part, de la circulation rapide du risque, tant de crédit que
de marché, entre banques commerciales, assureurs et banques
de financement et d'investissement. Une même autorité de
régulation remplirait donc beaucoup plus efficacement à la fois le
rôle de prévention des risques, celui de superviseur et celui de
producteur de règlements.
ÏÏ n'en demeure pas moins, in fine, qu'il n'y a aucune
démonstration théorique, ni aucune preuve empirique de la
supériorité d'un modèle institutionnel de surveillance, représenté
soit par une autorité plurisectorielle (14) compétente pour le
système financier dans son intégralité, soit par une multiplicité
d'autorités sectorielles.
En définitive, si l'émergence d'autorités trans-sectorielles se
justifie par la multiplication des risques systémiques, qui peuvent
se propager des produits financiers vers les produits bancaires
et/ou les produits d'assurance, l'objet de la régulation ne devrait
alors plus être le secteur en tant que tel, mais la nature du risque
qui le parcourt.
Dans cette optique, ne conviendrait-il donc pas mieux de mettre
en place un régulateur pour chaque risque encouru, plutôt qu'un
superviseur pour chaque secteur couvert ? Par ailleurs, réduire
les asymétries d'information par une meilleure régulation
microprudentielle est insuffisant, il convient également de tenter
d'influer sur le déroulement des crises financières pour en réduire
les conséquences néfastes, et même sur la formation des
croyances collectives, ou du moins sur l'information qui contribue
à les forger.
notes
(12) À l'exception des sociétés de gestion de portefeuille qui relèvent
de l'Autorité des marchés financiers.
(13) La loi de Sécurité financière du 1er août 2003 a réorganisé le
pouvoir réglementaire en matière bancaire et financière. Auparavant
délégué au Comité de la réglementation bancaire et financière
(CRBF) dont les règlements étaient homologués par le ministre avant
leur entrée en vigueur, le pouvoir réglementaire est désormais
directement exercé par le ministre de l'Économie, assisté par le
CCLRF, qui remplace le CRBF et la Commission de la
réglementation du Conseil nationale des assurances (CNA).
(14) La création d'une autorité plurisectorielle n'est pas une condition
nécessaire pour une surveillance efficace, même pas en présence
d'un nombre croissant de conglomérats financiers : une alternative
est, par exemple, représentée par la définition d'une autorité « chef
de file », ce qui est en principe compatible avec les deux choix
institutionnels.
Pour en savoir plus
Bagehot W. (1803,1999), « Lombard Street. A Description of thé Money
Market », NewYork, John Willey.
Humphrey T.M. (1992), « Lender of Last Resort », in
Newman ef a///, The New Palgrave Dictionary of Money and Finance. *
Perrut D. (2000), « Le chantier de la régulation financière », Banque
Magazine, n° 620, décembre.
Stigler G. (1964), « Public Régulation of thé Securities Markets », Journal
of Business, avril.
Thornton H. (1803), An Inquiryinto thé Nature and Effects of thé Paper
Crédit of Gréât Britain.
Site internet de l'Autorité des marchés financiers : www.amf-france.org
Site internet de la Banque de France : www.banque-france.fr
Site internet de la Securities and Exchange Commission : www.sec.gov