et Andrzej Wajda.
Une histoire subjective de la Pologne.
Projection du film et rencontre des élèves du
Lycée Français de Varsovie avec le réalisateur.
Lundi 7 avril 2008.
Enseignants : A. LEONARD, F. MAGNONE, A. & B. SUBKO
Partenaires :
6 dates pour comprendre
On désigne sous le nom de « massacre de Katyń » l’exécution durant la Seconde guerre mondiale de
21857
Polonais. Si ce massacre s’est révélé être si atroce, ce n’est pas tant par le nombre lui-même de victimes
(faible comparé à d’autres crimes de la période), que par le statut des fusillés (des prisonniers de guerre à
majorité réservistes) et le fait qu’il ait fallu attendre 1992 pour connaître avec certitude les principaux
coupables.
17 septembre 1939 : l’URSS envahit à son tour la Pologne
Du côté allemand Du côté soviétique
Un pacte de non-agression est signé entre Hitler et Staline (et leurs ministres Ribbentrop et Molotov) le 23
août 1939 pour une durée de 10 ans, prévoyant le partage de l’Europe en deux sphères d’influence et la
division du territoire polonais en deux
Dès le 1
er
septembre, Hitler lance ses
troupes contre la Pologne, sans déclaration
de guerre. Cracovie est prise le 6, tandis
que le gouvernement s’enfuit vers l’est,
puis le sud-est.
Après avoir préparé la version officielle à dicter aux dirigeants
des partis communistes occidentaux, acquis jusque là au soutien
des pays agressés par les forces fascistes, les Soviétiques
lancent l’attaque sur la Pologne le 17 septembre, sans
déclaration de guerre, officiellement pour défendre les
territoires de l’est du pays face à l’avancée allemande. Pour les
Polonais, il s’agit d’un quatrième partage du pays. Le président
polonais Mościcki, le maréchal Rydz-Śmigły et tout le
gouvernement se réfugient en Roumanie et ordonnent par radio
aux troupes de passer en Roumanie ou en Hongrie pour gagner
la France, ce qui est perçu par nombre de Polonais comme une
trahison.
Le nord et l’ouest du pays sont annexés au
Reich, tandis que le reste de la Pologne,
incluant Varsovie et Cracovie, devient le
« Gouvernement Général ».
Entre la fin d’octobre et le début de
novembre 1939, les alliés allemands et
soviétiques échangent des prisonniers de
guerre polonais : 43 000 soldats (mais pas
les officiers et sous-officiers) qui résidaient
dans la partie allemande de la Pologne sont
livrés aux Allemands alors que ces derniers
livrent aux Soviétiques environ 14 000
militaires fait prisonniers dans les
territoires orientaux.
En se préparant à l’invasion de la Pologne, les 7 membres du
Politburo du Comité Central du Parti Communiste d’Union
Soviétique (Staline, Molotov, Beria, Kaganovitch, Kalinine,
Mikoyan et Vorochilov) avaient déjà envisagé le problème des
prisonniers de guerre. Deux jours après l’agression du pays, une
« Direction du NKVD pour les affaires des prisonniers de
guerre » fut créée. Elle était chargée de superviser directement
tant l'organisation des camps que le déplacement, la
surveillance, les interrogatoires et l'utilisation des prisonniers
pour le travail. Le commandant Piotr Soprounenko, employé au
secrétariat de Lavrenti Beria, fut nommé pour la diriger ; le
commissaire Semen Nekhorochev, un des chefs du système des
goulags, fut nommé chef du Département politique.
Moscou, qui n’a pas signé la convention de Genève qui accorde
des droits aux prisonniers, libère les soldats polonais de
Pologne orientale et relâche ceux que l’Allemagne lui livre.
Mais officiers et sous-officiers sont gardés en captivité.
Les sous-officiers, bien qu’assimilés aux officiers, étaient pour
la plupart des réservistes (avocats, journalistes, scientifiques,
médecins, pharmaciens, professeurs, artistes, ingénieurs…) qui
avaient été mobilisés en catastrophe à la suite des invasions non
déclarées. Il en va de même pour la plupart des agents de
police, gendarmes et gardien de prison, que l’on a assigné à ces
tâches au début de la guerre car ils étaient des ouvriers et des
paysans inaptes à servir dans l’armée.
novembre 1939 : occupation allemande à l’ouest et soviétique à l’est
Du côté allemand Du côté soviétique
L'Office central de sécurité du Reich, le RSHA,
décide le 17 octobre 1939 la « liquidation
physique de tous les éléments polonais a) qui par
le passé ont occupé une quelconque
responsabilité en Pologne, b) qui pourraient
prendre la tête d'une résistance polonaise ». Sont
en particulier visés les enseignants, les prêtres,
les médecins, les dentistes, les vétérinaires, les
officiers, les commerçants importants, les grands
propriétaires fonciers, les journalistes, les
écrivains et toutes les personnes ayant fait des
études. Les nazis ferment les établissements
d’enseignement supérieur et secondaire et, dans
les territoires incorporés au Reich, toutes les
écoles polonaises. Ainsi, le 6 novembre 1939,
lors de la « Sonderaktion Krakau », 183
professeurs, assistants et chargés de cours de
l'université de Cracovie, rassemblés pour écouter
une prétendue conférence du
Obersturmbannführer Doktor Bruno Müller, sont
arrêtés par les SS et déportés dans les camps de
concentration de Sachsenhausen et de Dachau
(où 15 périssent). L’Université Jagellonne et sa
bibliothèque sont fermées par la Gestapo. Dans
le Gouvernement Général, Gestapo et SS
opèrent en toute impunité, hors des lois du Reich
et de l’influence de la Wehrmacht.
Les prisonniers polonais sont rassemblés dans trois
monastères orthodoxes désaffectés transformés en camps.
Kozelsk se trouve dans la province de Smolensk ; c'est
qu'est emprisonné le capitaine Edward Herbert, grand-
oncle de Zbigniew Herbert, qui lui dédiera le poème
Guziki, auquel Wajda fait allusion dans son film.
Starobilsk est situé dans l'est de l'Ukraine, dans la
province de Vorochilovgrad ; c'est qu'est enfermé le
père de Andrzej Wajda. Le dernier camp est localidans
une île du lac Seliger, près d'Ostashkov (dans la province
de Kalinine). D’autres se trouvent dans les prisons
d'Ukraine et de Biélorussie occidentales.
Dans les zones occupées par l’Armée rouge, la
propagande soviétique tente de faire passer son invasion
pour une action de défense des territoires de l’est face à
l’avancée allemande. Les Polonais reçoivent
automatiquement la citoyenneté soviétique.
*
24 décembre 1939 : le premier Noël de la guerre
Du côté soviétique
Décemment traités - sauf ceux d'Ostashkov les prisonniers restent en « observation » (on cherche à repérer
les plus dangereux ennemis du régime soviétique mais aussi de potentiels collaborateurs) et sont même
soumis à une campagne de « rééducation » (projection de films de propagande…). Mais les autorités leur
laissent célébrer Noël. Ce qui rend un certain nombre d’entre eux optimistes, persuadés que la France et
l’Angleterre ne peuvent pas se priver de 20 000 officiers et feront donc tout pour les récupérer. D'autres
préfèrent tenir secrètement le journal des événements, au cas où il leur arriverait malheur ; on a ainsi retrouvé
le journal qu'Adam Solski gardait sur lui.
La décision d’éliminer ces officiers mûrit vers la fin de février 1940 au sein des dirigeants soviétiques.
L'URSS est en train d'envahir plus de la moitié de la Pologne et les dirigeants soviétiques sont déterminés à
éliminer ces membres de la nation qui, dans le futur, pourraient mener la lutte pour la résurrection de leur
patrie. Cette conviction est renforcée par le fait que la plupart des prisonniers ne sont pas des officiers de
carrière, mais des réservistes ; ils sont donc des représentants d'une intelligentsia polonaise, considérée
comme un vivier potentiel de chefs de la résistance. Le 2 mars, le Politburo approuve la proposition présentée
par Beria et par le premier secrétaire du Parti communiste ukrainien, Nikita Khrouchtchev, d'« effectuer la
déportation de toutes les familles de prisonniers de guerre ».
Les membres de ces familles (en priorité les épouses) ont été repérés par le courrier envoet sont déportés
au Kazakhstan pour une période de 10 ans (ce qui équivaut souvent à une condamnation à mort).
L'invraisemblable cruauté de la punition laisse présager ce que sera la nature de la sentence frappant les
officiers eux-mêmes.
Printemps 1940 : l’extermination concertée des élites polonaises
Du côté allemand Du côté soviétique
L'Allemagne nazie envahit la Norvège afin de
sécuriser le transport du fer suédois. Les 5 600
soldats allemands réfugiés dans les montagnes
enneigées qui bordent Narvik résistent aux 24 500
soldats alliés jusqu'au départ de ceux-ci,
réquisitionnés pour la bataille de France.
De janvier à mars 1940 ont lieu plusieurs
rencontres entre les représentants du NKVD et de
la Gestapo pour décider des mesures visant à
supprimer « la propagande polonaise ». Les
résultats des conférences communes qui se
tiennent en mars 1940 à Cracovie sont d'un intérêt
particulier. On a posé à cette occasion le
problème du traitement de l'élite politique et
culturelle sur les territoires polonais désormais
sous contrôle allemand ou soviétique. L'opération
AB vise à éliminer la classe dirigeante et
l'intelligentsia polonaise, parallèlement aux
opérations soviétiques : environ 15 000 prêtres,
enseignants et chefs politiques sont déportés à
Dachau ou fusillés dans la forêt de Palmiry. Les
nazis décident de construire à Auschwitz un camp
de concentration pour l'élite polonaise - qui sera
ensuite utilisé pour l'extermination des juifs.
Face aux ordres de «sengorger » les camps, Beria, le
chef du NKVD, propose à Staline le 5 mars 1940
l’extermination massive des prisonniers de guerre
polonais. Sur quatre feuillets dactylographiés, il énumère
les « ennemis jurés du pouvoir soviétique » polonais
détenus par le NKVD qui « méritent la peine capitale -
par fusillade ».
A la suite de ce rapport, le Politburo dicte le 5 mars 1940
l'ordre au NKVD d' « examiner » le cas des prisonniers de
guerre polonais « sans faire comparaître en jugement les
détenus et sans formuler d'accusation, sans étayer par
aucun document ni la conclusion de l'instruction ni l'acte
d'accusation », appliquant à leur égard « la plus haute
mesure punitive : l'exécution [par fusillade] ». L'ordre
donne aux officiers de rang moyen du NKVD une
certaine liberté de transférer certains prisonniers «
présentant un intérêt opérationnel », autrement dit qui
sont d'une certaine utilité pour les Soviétiques, dans les
autres camps. 448 prisonniers sont ainsi épargnés, c'est-à-
dire 3 % de la population entière des camps.
Les militaires polonais emprisonnés ont cessé depuis avril
1940 (le 23 au plus tard), d’échanger des lettres avec
leurs familles. Les lettres adressées à ces officiers sont
retournées aux expéditeurs avec un tampon marqué «
retour, destinataire parti ».
Les listes de membres des familles des officiers
polonais dans les camps soviétiques comprennent
également les familles qui habitent sur les
territoires sous occupation allemande et ne
peuvent être arrêtées par les Soviétiques. Les
deux régimes totalitaires travaillent donc avec une
égale rigueur à réduire les Polonais au rang de
nation sans chefs et sans amis.
C’est en mars-avril 1940 qu’une commission spéciale
examine le cas de tous les prisonniers. Des groupes de
100-150 prisonniers sont confiés aux commandants des
régions du NKVD de Smolensk, de Charkiv et de
Kalinin. Sans explication aucune, les prisonniers
commencent à être évacués vers une destination
inconnue. Chaque matin, la liste nominative des partants
est téléphonée de Moscou, après quoi une demi-heure est
laissée à chacun pour rassembler ses effets avant de
s'engouffrer dans des fourgons cellulaires.
Les militaires polonais du camp de Kozelsk sont
acheminés en gare de Gnezdovo puis emmenés en
fourgon au bois de Katyń, ils sont abattus au bord et à
l’intérieur des fosses communes.
Les détenus du camp d'Ostashkov sont quant à eux
exécutés au siège du NKVD à Kalinine ; 250 prisonniers
sont abattus de nuit, un par un, d'une seule balle dans la
nuque par un trio de tueurs. On connaît le nom de tous les
exécuteurs du NKVD car le 26 octobre 1940 Beria leur a
remis une prime pour les récompenser.
CAMP DE
DETENTION
LIEU
D’EXECUTION
LIEU
D’INHUMATION
NOMBRE DE
VICTIMES STATUT DES VICTIMES***
Kozelsk Katyn
Smolensk ? Katyn 4 421
Starobilsk Charkiv Piatykhatky* 3 820
Ostashkov Tver (Kalinin) Mednoye* 6 311
Généraux, colonels et lieutenants-colonels : 2 %
Commandants et capitaines : 14 %
Lieutenants, sous-lieutenants et aspirants : 41 %
Officiers et sous-officiers de la police, des gardes
frontières et de la gendarmerie : 7 %
Agents de police, gendarmes, gardiens de prison et
agents de renseignement : 35 %
Fonctionnaires, propriétaires terriens, prêtres et colons
des régions frontalières : 1 %
PRISON LIEU
D’EXECUTION
LIEU
D’INHUMATION
NOMBRE DE
VICTIMES STATUT DES VICTIMES***
Prisons de
Biélorussie Minsk ? Kurapaty ?
Prisons
d’Ukraine
Kiev ?
Cherson ? Bykivnia*
7 305**
Anciens officiers : 6 %
Anciens agents de renseignement, de la police et de
la gendarmerie : 28 %
Espions et saboteurs : 2 %
Anciens propriétaires terriens, propriétaires d’usine et
fonctionnaires : 2 %
Membres d’organisations contre-révolutionnaires de
résistance et éléments divers : 29 %
Transfuges : 33 %
* Ces lieux n’ont été découverts qu’à partir de 1990
** Parmi les documents transmis par les autorités russes à la Pologne figure un document daté du 3 mars 1959 dans lequel Khrouchtchev
accepte la proposition du chef du KGB, Chelepine, de détruire les fiches individuelles des 21 857 prisonniers polonais exécutés en 1940.
Ce chiffre, croisé avec ceux de 1940, permet de connaître le nombre d’exécutions dans les prisons.
*** D’après les documents secrets établis par les Soviétiques en 1940
Tylko guziki nieugięte przeleciał ptak przepływa obłok
przetrwały śmierć świadkowie zbrodni upada liść kiełkuje ślaz
z głębin wychodzą na powierzchnię i cisza jest na wysokościach
jedyny pomnik na ich grobie i dymi mgłą katyński las
są aby świadczyć Bóg policzy tylko guziki nieugięte
i ulituje się nad nimi potężny głos zamilkłych chórów
lecz jak zmartwychstać mają ciałem tylko guziki nieugięte
kiedy są lepką cząstką ziemi guziki z płaszczy i mundurów
Zbigniew Herbert, Guziki
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