Printemps 1940 : l’extermination concertée des élites polonaises
Du côté allemand Du côté soviétique
L'Allemagne nazie envahit la Norvège afin de
sécuriser le transport du fer suédois. Les 5 600
soldats allemands réfugiés dans les montagnes
enneigées qui bordent Narvik résistent aux 24 500
soldats alliés jusqu'au départ de ceux-ci,
réquisitionnés pour la bataille de France.
De janvier à mars 1940 ont lieu plusieurs
rencontres entre les représentants du NKVD et de
la Gestapo pour décider des mesures visant à
supprimer « la propagande polonaise ». Les
résultats des conférences communes qui se
tiennent en mars 1940 à Cracovie sont d'un intérêt
particulier. On a posé à cette occasion le
problème du traitement de l'élite politique et
culturelle sur les territoires polonais désormais
sous contrôle allemand ou soviétique. L'opération
AB vise à éliminer la classe dirigeante et
l'intelligentsia polonaise, parallèlement aux
opérations soviétiques : environ 15 000 prêtres,
enseignants et chefs politiques sont déportés à
Dachau ou fusillés dans la forêt de Palmiry. Les
nazis décident de construire à Auschwitz un camp
de concentration pour l'élite polonaise - qui sera
ensuite utilisé pour l'extermination des juifs.
Face aux ordres de « désengorger » les camps, Beria, le
chef du NKVD, propose à Staline le 5 mars 1940
l’extermination massive des prisonniers de guerre
polonais. Sur quatre feuillets dactylographiés, il énumère
les « ennemis jurés du pouvoir soviétique » polonais
détenus par le NKVD qui « méritent la peine capitale -
par fusillade ».
A la suite de ce rapport, le Politburo dicte le 5 mars 1940
l'ordre au NKVD d' « examiner » le cas des prisonniers de
guerre polonais « sans faire comparaître en jugement les
détenus et sans formuler d'accusation, sans étayer par
aucun document ni la conclusion de l'instruction ni l'acte
d'accusation », appliquant à leur égard « la plus haute
mesure punitive : l'exécution [par fusillade] ». L'ordre
donne aux officiers de rang moyen du NKVD une
certaine liberté de transférer certains prisonniers «
présentant un intérêt opérationnel », autrement dit qui
sont d'une certaine utilité pour les Soviétiques, dans les
autres camps. 448 prisonniers sont ainsi épargnés, c'est-à-
dire 3 % de la population entière des camps.
Les militaires polonais emprisonnés ont cessé depuis avril
1940 (le 23 au plus tard), d’échanger des lettres avec
leurs familles. Les lettres adressées à ces officiers sont
retournées aux expéditeurs avec un tampon marqué «
retour, destinataire parti ».
Les listes de membres des familles des officiers
polonais dans les camps soviétiques comprennent
également les familles qui habitent sur les
territoires sous occupation allemande et ne
peuvent être arrêtées par les Soviétiques. Les
deux régimes totalitaires travaillent donc avec une
égale rigueur à réduire les Polonais au rang de
nation sans chefs et sans amis.
C’est en mars-avril 1940 qu’une commission spéciale
examine le cas de tous les prisonniers. Des groupes de
100-150 prisonniers sont confiés aux commandants des
régions du NKVD de Smolensk, de Charkiv et de
Kalinin. Sans explication aucune, les prisonniers
commencent à être évacués vers une destination
inconnue. Chaque matin, la liste nominative des partants
est téléphonée de Moscou, après quoi une demi-heure est
laissée à chacun pour rassembler ses effets avant de
s'engouffrer dans des fourgons cellulaires.
Les militaires polonais du camp de Kozelsk sont
acheminés en gare de Gnezdovo puis emmenés en
fourgon au bois de Katyń, où ils sont abattus au bord et à
l’intérieur des fosses communes.
Les détenus du camp d'Ostashkov sont quant à eux
exécutés au siège du NKVD à Kalinine ; 250 prisonniers
sont abattus de nuit, un par un, d'une seule balle dans la
nuque par un trio de tueurs. On connaît le nom de tous les
exécuteurs du NKVD car le 26 octobre 1940 Beria leur a
remis une prime pour les récompenser.