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Le film « Katyn » de Wajda distribué en France
dimanche 29 mars 2009, par Alexandra VIATTEAU
Cinéma et géopolitique de l’Europe. Le film "Katyn" de Wajda est un apport considérable de
connaissances, notamment par l’image. Sortie en salle le 1er avril 2009. Découvrez une
présentation du film, une mise en perspective de Katyn, les salles où le film sera présenté et sa
bande-annonce.
L’OEUVRE MAJEURE du cinéaste polonais Andrzej Wajda, son dernier film "Katyn", porte sur l’histoire
interdite pendant 70 ans des massacres de dizaines de milliers de prisonniers de guerre polonais durant la
Seconde Guerre mondiale. Ces premiers Alliés ont été pris à revers lors de la campagne germano-
soviétique en septembre 1939 et massacrés par la police politique soviétique, le NKVD, au printemps 1940
sur ordre écrit de Staline et de la haute hiérarchie du parti communiste au pouvoir à Moscou.
Le film "Katyn" raconte l’histoire du mensonge et de la désinformation
communistes tels que A. Wajda - dont le père était une des victimes - les a lui-même connus et l’histoire
des massacres tels que les archives les ont décrits et que les bourreaux retrouvés les ont racontés en
détail. Ces aveux et témoignages ont été recueillis par les magistratures militaires polonaise et russe
entre 1990 et 1995. En effet, ces cinq années ont marqué une bonne volonté du Kremlin dans la révélation
des crimes de Katyn et la recherche des immenses charniers non encore dévoilés jusque là.
Un crime de guerre et contre l’humanité
L’URSS n’avait pas signé la Convention de Genève sur les prisonniers de guerre en 1929, mais la Russie
avait signé la Convention de la Haye en 1907, et le Kremlin a bien confirmé en 1941 que "l’URSS
considérait comme obligatoires pour soi les règles de la guerre exposées dans la quatrième Convention de
la Haye du 18 octobre 1907 concernant les lois et coutumes de la guerre...". L’URSS a donc commis sans
le moindre doute "un crime de guerre et contre l’humanité" contre les Alliés polonais. D’autre part, la
continuité légale que le Kremlin établit entre la Russie tsariste et l’Union soviétique vaut également pour
la continuité sur le plan de la responsabilité légale entre l’URSS et la République de Russie actuelle.
Mise en perspective historique
En 1959, vingt ans après l’agression germano-soviétique de la Pologne en septembre 1939, N.
Khrouchtchev envisageait éventuellement de charger le seul J. Staline des crimes soviétiques commis en
collusion avec A. Hitler de 1939 à 1941. Ceci afin de décharger sa propre position de "déstalinisation" et
celle du communisme soviétique de ce très compromettant passé au moment de la "détente" avec
l’Occident et d’un nouveau tournant de la propagande soviétique.
Aussitôt, le 3 mars 1959, le chef du KGB, A. Chelepine, lui adressa un rapport opposé à toute révélation et
vérité sur le crime de guerre commis à Katyn, Kharkov, Kalinine (Tver) et dans les caves des prisons, où
sur ordre de J. Staline et de tout le Politburo du PCUS avaient été assassinés 25 700 officiers et résistants
polonais aux envahisseurs nazis. S’il fallait toujours nier et mentir, c’est parce qu’il s’agissait, en effet, de
massacres d’officiers et combattants, non seulement polonais, mais alliés, au moment où l’URSS était
complice active de l’Allemagne nazie.
Une scène du film de Wajda : "Katyn"
Photographie extraite du film de A. Wajda, "Katyn"
Le massacre au nom générique de Katyn, commis par les Soviétiques, était donc obstinément nié par
Moscou depuis que les charniers avaient été découverts par les Allemands en 1943, alors que J. Staline,
contraint et forcé par l’attaque d’Hitler en 1941, avait rejoint les Alliés occidentaux.
A la fin de la guerre, au Procès de Nuremberg, les Soviétiques avaient vainement tenté de charger les
Allemands de ce "crime de guerre, contre l’humanité et génocide" en procédant à une fabrication et à un
montage de "preuves" si inconsistantes qu’elles ne réussirent pas à convaincre les juges : les Allemands
furent innocentés de ce crime là. Il ne restait donc qu’un seul coupable : l’URSS - qui ne fut toutefois pas
désignée, ni jugée.
Moscou (et donc le communisme international) opta alors pour la négation, le mensonge, l’occultation, le
secret et la répression de la recherche et de la proclamation de la vérité.
Secret d’Etat
Encore aujourd’hui, alors que M. Gorbatchev a fait en 1990 le difficile aveu de la culpabilité de
Moscou, et que B. Eltsine en a remis officiellement les preuves à Varsovie en 1992, des historiens russes
déplorent avec inquiétude et amertume, sous V. Poutine et D. Medvedev, le retour du "syndrome de
l’interdiction" de la pleine vérité sur ces crimes.
En effet, 116 volumes de documents et d’archives concernant Katyn sont désormais classés "secret d’Etat"
et sont rendus inaccessibles. Le Kremlin veut "classer sans suite l’affaire Katyn". Alors que des historiens
russes ont déjà admis après étude très approfondie que :
. "Katyn est un crime contre l’humanité et une destruction planifiée de la substance de l’Etat polonais"
(Natalia Lebedeva) ;
. Victor Zaslavsky, qui vit et enseigne en Italie, a conclu pour sa part que "l’intelligentsia polonaise
[notamment les officiers de réserve en grand nombre – A.V.], détestée comme un vivier de chefs de la
résistance aux régimes nazi et stalinien, a inspiré une haine profonde à Staline et Hitler, qui menèrent une
politique identique d’extermination [des élites et des combattants polonais – A.V.]".
On revient en quelque sorte en 2009 à la décision de 1959 de l’ancien chef du KGB, A. Chelepine, qui
recommandait à N. Khrouchtchev de toujours dissimuler la vérité : "Pour les organes soviétiques toutes
ces affaires ne présentent ni intérêt opérationnel, ni valeur historique..." Au contraire, un retour sur "cette
affaire" [de Katyn – A.V.] "peut amener à déconspirer l’opération menée [il avoue donc que l’opération de
liquidation physique a bien été menée - A.V.] avec toutes les conséquences pour notre gouvernement.
D’autant plus que, dans le cas des fusillés dans le bois de Katyn, il existe une version officielle [la négation
du crime – A.V.] confirmée, sur l’initiative des organes du gouvernement soviétique, par notre commission
spéciale de 1944 concernant le crime des fascistes allemands contre les officiers polonais prisonniers de
guerre... Les conclusions de notre commission sont fermement implantées dans l’opinion publique
mondiale".
C’était, en effet, le cas à l’époque et pendant longtemps encore, tellement était puissante la propagande
communiste soviétique, notamment en France jusque dans les années 1980.
Mais, la volonté irréductible des Polonais et de chercheurs et politiques
internationaux sérieux et de bonne volonté, y compris russes, de découvrir jusqu’au bout, de dévoiler et de
juger les faits survenus, et de raconter, expliquer l’histoire interdite de Katyn s’est imposée.
Le film "Katyn" de Wajda est un apport considérable de connaissances, notamment par l’image.
C’est une œuvre magistrale. Il est donc important de donner à ce film toute la place et toute l’attention
qu’il mérite.
Copyright mars 2009-Viatteau/diploweb.com
La bande annonce du film Voir
P.-S.
Ecrivain
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